mercredi 25 septembre 2024

Vulcania.

Notre halte à Saint Bonnet se justifie par la volonté  de nous rendre à Vulcania.
Le GPS nous y conduit à travers de beaux paysages, 
avec un itinéraire qui passe par Châtel-Guyon.
La ville comporte de beaux hôtels début XX° construits pour répondre à la demande du thermalisme fort prisé à cette époque.
La route sillonne ensuite  la forêt ou des terrains plus vallonnés et les panneaux annonçant  Volvic apparaissent à plusieurs reprises.
L’arrivée à Vulcania nous impressionne par son ampleur et son organisation. Une série inimaginable de parkings se côtoient, s’intégrant discrètement sous les arbres.
Dirigés efficacement par du personnel dédié à orienter les voitures, nous stationnons dans le P10, alors que les véhicules continuent de débouler et remplir les espaces disponibles. Nous sommes à 1000 mètres d’altitude, le soleil présent compense la fraicheur de l’air. Malgré l’affluence de voitures, l’entrée sur le site de 57 hectares en pleine nature s’avère fluide, d’autant plus que nous disposons déjà des billets achetés sur Internet.
L’employée au guichet nous fournit un dépliant  qui résume toutes les attractions et possibilités classées en cinq groupes : attractions dynamiques, films sur grand écran, petits explorateurs (orienté enfants), spectacles. Elles se répartissent dans plusieurs bâtiments.
Le principal d’entre eux comporte deux étages ; il se prolonge en forme de cône recouvert de pierres sombres doublées  de plaques dorées.
Cette évocation d’un volcan s’enfonce dans la roche entourée par 2 niveaux inférieurs où se trouvent une serre et des salles de cinémas ou d’expositions. Vu d’en bas, le cône qui s’élance vers le ciel parait immense et se rétrécit vers une ouverture sur le ciel. L’autre bâtiment important se situe sur la droite : c’est le planétarium.
Le " Namazu" complète l’ensemble, c'est une montagne russe portant le nom japonais d’un poisson-chat géant  dont les soubresauts provoquent des séismes. Dans l’immense étendue du parc prennent place des aires de jeux pour les enfants, des aires de pique-nique, un circuit pour draisiennes et un circuit pour BMX : tout concorde à satisfaire les familles.
Nous établissons notre programme : nous commençons  par « la chaîne des Puys racontée » à l’abri de parasols. Un animateur excellent nous explique la différence entre volcans monogéniques (issus d’une seule éruption) et volcans polygéniques.
Ici, les quatre-vingt qui composent la chaîne des Puys sont monogéniques.
Il fait la distinction entre éruptions effusives (lave fluide qui s’écoule le long des pentes et petites projections) et éruption explosive (propulsions plus dangereuses, bombes, cendres, poussières, blocs, nuée ardente allant jusqu’à 300km/h).
Il nous décrit les différentes formes adoptées par les volcans: le cône, le dôme, la forme de maar (avec cratère pouvant contenir un lac), de fer à cheval, égueulée.
Il s’appuie pour son exposé sur un écran vidéo ou carrément sur l’exemple des montagnes face à nous et s’exprime dans une langue fluide compréhensible avec un niveau sonore appréciable.
Nous nous accordons une pause au restaurant « Panorama », logé au 2ème étage supérieur du bâtiment principal et nous laissons facilement tenter par une assiette mixte remplie de spécialités régionales en charcuterie et fromages. Nous ne sommes pas les seuls amateurs…
Repus, nous descendons de plusieurs niveaux à côté de la serre pour assister à la séance « Machine terre racontée » par deux animateurs. Ils nous parlent à 2 voix des planètes et de leurs caractéristiques (gazeuse, couleur,  taille).
Ils nous détaillent la constitution de la terre en partant de l’écorce, puis le manteau en 2 parties, et le noyau contenant sans doute une amande de fer et nickel. C’est l’étude de météorites parvenues jusqu’à nous qui a permis aux savants d’avancer ces théories, car évidemment, personne n’est encore parvenu au centre de la terre pour vérification.
Nous nous installons ensuite dans une salle de ciné  devant un écran gigantesque pour voir « Regards sur les volcans » en activité dans le monde.
En sortant de là, pourquoi ne pas tester à côté  une attraction dynamique ? Avec  « Premier vol » le public s’engouffre dans cinq nacelles individuelles et mobiles. Elles s’inclinent,  s’agitent en fonction des vues prises au-dessus des volcans et nous partageons le vol d’une mère aiglonne dans l’initiation aérienne de sa progéniture. Nous vivons de belles images sur les lacs, participons à des plongées vertigineuses ou des remontées à la verticale le long de montagnes comme si nous étions des volatiles.
Dans le bâtiment du planétarium, ne proposant aucune attraction à cette heure, nous nous laissons convaincre par des animateurs pour assister à une sorte de TP intitulé « Sous le soleil ».
Un présentateur scientifique nous installe à des paillasses et teste nos connaissances pour les élargir : à quoi sert le soleil, sa couleur,  sa taille par rapport à la terre, que savons-nous de l’arc en ciel, des aurores boréales, des saisons, des autres astres? Il propose de petites expériences utilisant des lampes, des prismes en verre et un bocal d’eau.
Nous ressortons profiter de l’extérieur tout en poursuivant  l’exploration du site.
« La forêt  des dragons » repose sur les légendes du monde autour des phénomènes autrefois inexpliqués tels les tsunamis, les orages, les séismes. Représentés sous forme de dragons articulés et sonorisés, ils apparaissent ici et là au détour d’un parcours boisé et surprennent les enfants. Nous n’attendrons pas 18h pour pénétrer dans le planétarium pourtant recommandé, accessible grâce à une animation, nous déclarons forfait pour les
activités restantes. 
Le chemin du retour nous ramène à Châtel-Guyon où nous nous arrêtons dans le centre coquet avec ses hôtels et ses établissements de cure pimpants. La rue principale devenue piétonne s’apprête à un marché nocturne, les étals se dressent lentement et calmement dans la douceur de fin d’après-midi.  Pour  ce soir nous effectuons quelques courses au Vival à consommer dans la cuisine d’été.  Il fait bon.
Après le repas, nous allumons la TV pour suivre les J.O. La France a gagné 9 médailles dont 3 en or : natation ( invincible Léon Marchand), judo ( imbattable Teddy Riner) et BMX (or argent et bronze , tout pour les Français !)

mardi 24 septembre 2024

Palais Bourbon. Kokopello.

 
Le fonctionnement de l’assemblée nationale est pédagogiquement présenté dans cet album de 135 pages : commissions, questions d’actualité au gouvernement, permanences en circonscription et manœuvres habiles pour faire intervenir par exemple Greta Thunberg devant les députés…
Le dessinateur passe pour un collaborateur du « Courrier Picard lorsqu’il suit François Ruffin ou du « Télégramme de Brest »  quand il accompagne la mission d’information sur la pêche au Guilvinec. 
Quant à un berger, lors de la fête de la transhumance où est attendu Jean Lassalle, il lui demande si c’est pour « La République des Pyrénées » qu’il est venu dans la vallée d’Aspe.
C’était au temps de François De Rugy alors que le homard qui va l’évincer de son poste de président de l’assemblée se retrouve au détour de quelques pages comme marque de défiance envers l’institution républicaine. 
Le travail des parlementaires est valorisé, dépassant les invectives qui ont nuit à leur image, nous instruisant sur la complexité de l’élaboration de la loi et sur les conditions favorables offertes pour que fonctionne au mieux la démocratie. 
« Faute d'aéroport, dans les territoires les plus reculés, comme certaines îles de Polynésie, les bulletins de vote sont largués par avion. »

lundi 23 septembre 2024

Ma vie, ma gueule. Sophie Fillière.

Agnès Jaoui au sommet de son art en quinquagénaire excentrique rencontre brièvement Philippe Katherine parfait dans ce film fantaisiste, original, doux-amer.
La comédie enjouée aux dialogues bien troussés évolue vers plus de gravité  au moment où les thèmes du vieillissement, de la folie, de la relation avec les enfants sont évoqués. 
Quand les rires ne sont pas des ricanements et que les destins ne tournent pas à l’apocalypse, scènes cocasses et  atmosphère poétique permettent d’illustrer parfaitement la catégorie «  comédie dramatique », drôle et sérieux, cocasse et émouvant, morose et rose.  

 

samedi 21 septembre 2024

Continuez sans moi. Jean Michel Mestre.

Dans son deuxième roman, l’auteur revient sur la vie de sa sœur qui s’est suicidée il y a quarante ans. Ce livre essaye de réparer l’absence de toute plaque sur la tombe où elle est enterrée. 
« À défaut de souvenirs, je m'en suis sorti en pensant : ce n'est pas moi qui l'ai oubliée, c'est elle qui est partie en claquant la porte, elle qui a tiré le rideau en lâchant : Ça suffit, basta, j'en ai assez, continuez sans moi. Elle ne l'a pas dit comme ça. A-t-elle seulement eu le temps de penser à ceux qui continueraient sans elle ? Et si ce que je prends pour de l'oubli relevait de la gêne. Il suffirait de la surmonter, d'ouvrir une vanne, puis deux ou trois, pour que d'autres bulles remontent à la surface. La trappe est lourde. » 
Dans toutes les appréciations de lecteurs à propos de ces 200 pages, figure l’expression « sans pathos » pour mieux souligner l’originalité du narrateur dans un exercice périlleux. J’ajouterai son honnêteté.
« Quand la maladie ou un accident emporte un proche, l'art de converser avec lui, de le garder vivant, d'entretenir un lien avec lui est casse-gueule mais un chemin reste possible. Chacun emprunte comme il peut, avec ses mots, ses silences, ses doutes, ses failles. Mais quand la violence du suicide éradique la possibilité d'un chagrin, qu'est-ce qui peut lui succéder ? J'ai cru remplacer la peine par l'effacement, la culpabilité par l'indifférence et le remords par le silence. Foutaises, bien sûr. » 
Le cheminement à l’intérieur de sa mémoire lacunaire est plus émouvant que le rappel des années post-68 communes à la génération boomeuse et au delà. Ses recherches tardives de souvenirs fantomatiques, bien sûr plus personnelles, font tout l’attrait, la force de ce retour vers ses faiblesses, ses fuites, son incompréhension.
Le cinéma, la musique, sont les instruments de cette archéologie avec Beaucarne, IBanez(Palabras para Julia de Juan Goytisolo). 
«  Mais souviens-toi toujours
De ce qu’un jour j’ai écrit
En pensant à toi, en pensant à toi
Comme j’y pense à présent. » 
Ses prospections minutieuses, fines, sont permises par un style limpide en accord avec l’intégrité de l’écrivain.  

vendredi 20 septembre 2024

Penser contre soi-même. Nathan Devers.

Tellement assailli par les dogmatiques, j’ai été attiré par ce titre alors qu’il est déjà si difficile de penser par soi même.
J’ai apprécié le récit d’un parcours intense depuis l’envie de devenir rabbin sous sa kippa, « dôme d’humilité », jusqu’à l’abandon de cette vocation exigeante intellectuellement. 
« Oui, il fallait se frotter aux questions difficiles. Aux religions différentes. Aux idées qui dérangent. Aux sciences. Aux arts. Aux livres. Aux révolutions intellectuelles, aux fluctuations de l’histoire. Ce n’est qu’à ce prix qu’on déployait sa singularité. Qu’on explorait sa propre altérité. » 
Avec ces 326 pages, le jeune philosophe met en pratique ses réflexions ancrées dans le quotidien: 
«  Réconcilier la littérature et la philosophie, moi qui étais amoureux de l’une et religieux de l’autre : n’était-elle pas là la clef ? Ne plus voir de différence entre ces deux continents. Abolir tout schisme séparant théorie et pratique ; conformer ses actions et ses idées, mais ne pas réduire celles-ci à la conceptualité. » 
Loin des manuels de savoir penser, vivre, cuisiner, les fatigués peuvent se requinquer avec ce livre accessible, agréable à lire: 
« Un scepticisme qui n’a plus rien à voir avec les sables mouvants de l’hésitation mais qui constitue un principe actif de la philosophie. Le moteur d’une négation qui travaille secrètement la pensée. Un doute souterrain, destructeur autant que créateur, qui, souvent invisible, traverse toute la philosophie et l’aide à s’accomplir. »

jeudi 19 septembre 2024

Les rencontres de la photographie. Arles 2024.

D’habitude, quand nous retournons en septembre vers notre ville de cœur,
bien des chapelles et autres entrepôts qui accueillent des expositions sont fermés, 
mais cette année pas trop, et nous avons presque pu tout voir en deux jours.
Le temps passant, ce sont toujours les anciens qui nous accrochent le plus. 
Leur travail parle pour eux sans que les cartels aient besoin d’expliquer l’intensité de leur humanisme.
Ainsi à tout seigneur, tout honneur : Lucien Clergue au musée Réattu où fut créé le premier département de photographie dans un musée des beaux-arts en1965,
comme le rappelle dans une vidéo l’historien-photographe Jean Claude Gautrand. 
Alfred Latour par ailleurs graphiste est là bas en bonne compagnie.

Parmi les noms que j'aimerais retenir:  
Marie Hellen Mark qui aime les personnes dont elle offre les portraits
ou Lee Friedlander aux cadrages forts. 
Hans Sylvester magnifie les boulistes
alors que « Citoyens modèles » autour de militaires en apprentissage aux Etats-Unis et leurs uniformes «  Fashion Army » sont quelque peu redondants quand la déconstruction des images de guerre de Dock m’a semblé bien théorique.
Les problèmes du Liban apparaissent à travers un regard décalé, et les migrations perpétuelles des habitants du Bengale assaillis par la mer sont exposées mais dans le flot d’images et de thèmes regroupés en vain sous le titre de l'année: « Sous la surface »,
 « L’engagement » semble bien vaste à propos de la mondialisation, des déplacements de population, des déchets, des crises identitaires...
 Les sculptures baroques sur les toits au Pendjab sont une expression sympathique

mais les graffitis même emballés dans des discours complaisants - au mieux - m’indiffèrent.
L’évocation du fleuve Mississipi a besoin d’un nuancier de très grand format pour marquer l’originalité de la démarche semblable aux froides images abstraites de
Mustapha Azeroual
Par contre la sobriété d’un reportage de trente ans avec des japonaises pêchant les ormeaux en apnée éclate de beauté.
Au cours de nos pérégrinations, dans un jardin public, des images de la flore du Lautaret alternent avec le portrait de jardiniers un peu tristous,
 et une espèce de cabinet de curiosité a pris place dans la chapelle de la Charité.
« Transcendance »
, « Répliques » ou «  Quelle joie de vous voir » regroupent plusieurs artistes japonaises dont quelques unes retiennent l’attention. Le « Passé composé » à Saint Trophime pour la seule Vasantha Yogananthan ne laisse pas plus de trace que Ischuichi Miyako dont l’intention pourtant était de "révéler le pouvoir des lieux, des objets et des corps".  
Je ne suis pas monté dans «  Le manège fantôme » du chinois Mo Yi .
Et n’ai pas été « contaminé » par « les narrations simultanées invitant à un vertige poétique en perpétuel mouvement : qu’il soit à l’extérieur ou à l’intérieur de soi » de Nhu Xuan Hua et Vimala Pons.
Le titre « Les images apprennent à parler » m’a paru plutôt présomptueux
alors qu’ «  Une petite histoire du repas ferroviaire » revenant au temps où la modernité était désirable n’est pas seulement charmante.
« Le sport à l’épreuve »
s’avère photogénique, comme on disait jadis.
L’intelligence artificielle mise à contribution pour « Le fermier du futur » n’entame pas la nôtre. 

J’ai préféré les recherches des élèves de l’École Nationale Supérieure de la Photographie à propos de la ville d’Arles aux lauréats de la fondation Dior ou Roderer.

Sophie Calle, parfaitement  à sa place dans une crypte sous l’hôtel de ville, a déposé des œuvres qui avaient souffert de l’humidité et du temps, elle les achève.