Pour évoquer « la cathédrale de l’histoire de
France », le conférencier devant les amis du musée de Grenoble rappelle la
phrase de Violet le Duc :
« Si les piliers
de Notre-Dame avaient une voix, ils raconteraient l’histoire nationale. »
Une illustration de Jean Fouquet datant de 1450 environ figurait
dans le catalogue annonçant cette soirée.Le « vaisseau de pierre »,
insulaire, en position centrale à Paris entre la rive droite de la Seine industrieuse et la gauche intellectuelle
n’était pas située au dessus d’un temple dédié à Jupiter, même si « Le
pilier des Nautes » (des mariniers) datant du 1° siècle, trouvé
lors de fouilles au XVIII° siècle, mentionne le Dieu romain.Au Moyen Âge, côté sud, « Le palais de l'évêché »
faisait écran. Au nord, la rue des Chanoinesses garde quelques souvenirs des 51
chanoines qui se succédèrent dans le quartier. Raguenet, le Canaletto Français,
a peint « Le Cloître Notre-Dame » au XVIII°, vu de l'île
Saint Louis.A l’est, l’arrière plan du « Fils prodigue au milieu
des courtisanes » du Musée Carnavalet laisse voir un lieu non bâti destiné à des
plaisirs estivaux interdits bientôt par l’archevêque.Les maîtres d’œuvres sont restés inconnus, le maître
d’ouvrage, l’évêque Maurice de Sully, au « Frontispice de l'église
Saint-Ythier à Sully-sur-Loire », débute le chantier en 1163.
Il fait percer la rue Neuve, libérant un
enchevêtrement de rues débouchant sur le parvis prévu à l'emplacement de
l'édifice du IV ° siècle. Comme à Genève
ou Grenoble un groupe épiscopal regroupait le baptistère « Saint-Jean-le-Rond »
et la basilique Saint Etienne. Le calcaire lutétien nécessaire à la construction était
acheminé par la Bièvre voisine et le bois de charpente par la Seine depuis les
forêts du diocèse. Le maître-autel sera consacré en 1182.« Le portail Sainte-Anne », le plus ancien, réemploie
vers 1200 des pièces sculptées antérieurement.Sur le tympan, le roi Childebert ou Louis VII
s’agenouille devant la vierge à l’enfant. Notre-Dame témoigne de l’évolution de l’art gothique avec
les premiers arcs-boutants et une course à la hauteur (33 m) permise par l’évidement
des parois.L’horizontalité s’impose avec « La galerie des Rois »
qui équilibre les lignes de force verticales de la majestueuse façade.Rois de Judée ou de France, ils ont été mis à bas en 1793,
pour certains retrouvés après des fouilles sous l'hôtel de Jean-Baptiste
Lakanal, frère royaliste d'un député de la Convention, « Rois de Juda » à voir au Musée de Cluny. Eugène Viollet-le-Duc recrée la
galerie des Rois en 1845 où il figure parmi 28 statues comme il est représenté
en Saint Thomas au pied de la flèche.Il a laissé un témoignage des quatre étages premiers :
grandes arcades, tribune, roses aveugles, fenêtres hautes, tout en fusionnant
ailleurs les deux derniers niveaux.« La rosace du midi » divisée en 24 parties symbolise ce
gothique rayonnant. Les chapelles financées par des privés ou des corporations
comblaient les espaces.Les palais de la monarchie de droit divin étaient proches et
si les enterrements royaux avaient lieu à Saint Denis et les sacres à Reims,
les baptêmes se déroulaient à proximité du parvis où figure « Le
point zéro des routes de France ». Saint Louis dépose dans la
cathédrale la couronne du Christ en 1239 avant que soit construite la Sainte
Chapelle destinée à recevoir les reliques de la Passion. « Philippe le Bel réunit les
états généraux » dans la plus grande des salles de Paris en 1302.
« Le roi très chrétien » s’était opposé au pape et avait vaincu les
Flamands à Mons-en-Pévèle. Sa « Statue équestre » se trouvait
près du chœur.Henri IV célèbre son entrée dans Paris en assistant à un « Te
Deum ». Les drapeaux pris à l’ennemi pendant les batailles ornaient
la nef, « Le maréchal de Luxembourg » y
gagna le surnom de « tapissier de Notre-Dame ».Des archéologues viennent de mettre à jour des « Fragments du jubé »
médiéval daté du XIIIe siècle, démoli lors de travaux sous Louis XIV et devant un nouveau maître-autel figure sa statue par Coysevox et celle de Louis XIII
déposant sa couronne.Le seul sacre de roi fut celui d’ « Henri VI d'Angleterre » en
pleine guerre de 100 ans. Ce lieu a été rendu au culte catholique depuis le
concordat de 1795, après avoir été voué à l’Être suprême en quelque « Fête
de la raison ». Napoléon se couronne empereur en 1802. Son fils le
roi de Rome est baptisé en 1811. Le serment civique du clergé « d'être
fidèle à la Nation, à la Loi, au Roi » datait de 1790. « La
bénédiction des drapeaux de la garde nationale » s’est déroulée
en 1789 sous les « Mays » grands
tableaux commandés par la corporation des orfèvres, pour être offerts chaque
1er mai.
En 1944, un Magnificat est chanté sans le cardinal Suhard
compromis avec le régime de Vichy, en présence du général de Gaulle. Pour ses
funérailles, devant les chefs d’état du monde entier, une « Messe solennelle »
en l’honneur du père de la V° République est célébrée en même temps que son
enterrement le 12 novembre 1970, à Colombey-les-Deux-Eglises.Victor Hugo a entrainé la réfection d’une
cathédrale qui se défaisait, lui dont Michelet disait : «… quelqu'un a marqué ce monument d'une telle
griffe de lion, que personne désormais ne se hasardera d'y toucher. C'est sa
chose désormais, c'est son fief, c'est le majorat de Quasimodo. Il a bâti, à
côté de la vieille cathédrale, une cathédrale de poésie, aussi ferme que les
fondements de l'autre, aussi haute que ses tours »« Projets « Au secours de Notre-Dame »Le
général Georgelin président de l'établissement public chargé de la
conservation et de la restauration (à l’identique) de la cathédrale a évoqué
une célébration le 16 avril 2024, cinq ans
après l’incendie du 15 avril 2019.