vendredi 19 décembre 2014

Nota bene.

Sur un air aux notes nostalgiques, quelques mots sur le débat au long-court concernant les notes à l’école, en cours d’être soldé.
Dans cette affaire comme dans celle des rythmes, quand les syndicats sont absents du débat, les médias mènent la danse.
Lorsque le Dauphiné Libéré donne la parole à des passants sur un coin de trottoir, aucun enseignant n’a dû se trouver à proximité de micro du paresseux rédacteur.
Par ailleurs, le mérite des séquences des journaux télévisés de France 2 est leur côté sommaire qui ne demande aucun talent pour en déceler les grosses ficelles.
Ainsi il convient de comprendre : La notation de 0 à 20 c’est du passé : filmé en noir et blanc, un enfant en culotte courtes à la voix encore plus nasillarde qu’Elise Lucet voudrait complaire à ses parents, le pauvre ! L’avenir est à la couleur : vert, orange, rouge.
Le code binaire de la route devient le code de nos civilités simplifiées.
Comme si une note pouvait  être traumatisante si le climat de la classe est à la confiance.
Cette société rétive à la solidarité, où l’impôt est désormais si mal vu, aime se bercer parfois de compassion. Elle se voudrait du côté des découragés par l’école, des dégradés du savoir,  alors qu'elle les méprise.
Après un Téléthon qui a côtoyé un concours de miss évaluées en cm (centimètres), des potaches fatigués par leur week-end, mais très peu par les devoirs que des professeurs sadiques voudraient encore leur imposer, vont affronter quelques adultes attachés à les humilier : les profs !
C’est ainsi qu’est présenté l’enseignement qui fatigue et déprécie ses enfants.
Le temps consacré aux études diminue, l’école ne donne plus le tempo, elle  court, le souffle court derrière la dernière mode, n’ose plus rien dire. Les agences de notation notent, PISA classe, les films s’étoilent, les sondages mesurent, Zlatan avec 9,5/10 humilie se camarades, Jean Eude  lui est « en cours d’acquisition » dans bien des « domaines de compétences », heureusement en LEP  il peut grappiller deux points en français, s’il a bien rangé sa chaise  (authentique)…
Des élèves sont en souffrance, pas forcément à cause de l’éducation nationale, mais faute parfois d’éducation par des parents qui n’ont jamais envisagé de devenir adultes. L’institution  a multiplié les dispositifs aidants, de classes-passerelles en notations lissées, et bien que les valeurs attachées au travail soient discréditées, tout le monde n’accèdera pas  forcément à un poste de « Commercial » horizon de notre société, surtout pas prof!
Quand on sait toutes les potentialités d’un bébé, l’appétit des petits à apprendre et qu’on parcourt à nouveau tant de vaines querelles, vous saisit la tentation du silence, contrarié!
Et dire que c’est encore l’école privée qui va bénéficier de tous ces remèdes fallacieux !
…………
Pour dire mon décalage : il y a eu parait-il une circulaire envoyée aux écoles  l’an dernier pour déconseiller les décorations de Noël. Non pas la crèche, évidemment, mais le sapin et le bonhomme au bonnet rouge… même pas un petit poème. Le bonhomme de neige aurait-il besoin d’une certification ? Et on ne nous a rien dit !
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Le dessin du haut est  pris dans « Le Canard » de la semaine , celui ci bas dans « Courrier International » qui révise l’année écoulée.

jeudi 18 décembre 2014

Vermeer. S. Legat.

Après Hals et Rembrandt, Serge Legat clôturait le cycle des conférences concernant « l’âge d’or » Hollandais par Jan (Johannes) Vermeer avec en introduction, le tableau de la « Jeune femme jouant de la guitare ».
Le regard de la musicienne ne rencontre pas celui du spectateur, elle se retourne et laisse la place à toutes les interprétations. Souvent on retrouvera caraco jaune et fausse fourrure sur les épaules d’autres jeunes femmes, sujets de la plupart des portraits du maître de Delft. Le tableau échappe à la moralisation comme dans la plupart de ses toiles souvent reprises où il a usé de repentirs et fait disparaitre bien des détails significatifs qui pourraient expliciter les sujets.
L’émotion de ceux qui ont croisé son œuvre n’est pas proportionnelle au nombre de ses tableaux, seulement une trentaine.  En 1675, il meurt à 43 ans, laissant 12 enfants à sa femme Catherina, au bout d’une vie dont on sait peu de choses.
Ainsi retrouver ses maîtres, les archives ayant été dispersées au moment de l’invasion des français, relève de l’interprétation. Fabritius, celui du  trompe l’œil « le  chardonneret », l’aurait influencé et réciproquement, ainsi que Pieter de Hooch et ses perspectives lumineuses. Il aurait eu connaissance de l’école d’Utrecht aux connotations caravagesques par sa belle mère  par ailleurs déterminante dans sa conversion au catholicisme.
Le tableau religieux Marthe s’active et Marie écoute la bonne parole « Le christ chez Marthe et Marie » est monumental, comme la scène mythologique « Diane et ses nymphes » est puissante, dans la manière de ses débuts qui gagnera plus tard en finesse et en légèreté.
Puis viennent les scènes de genre : «L’entremetteuse » est explicite, si le musicien fait le lien avec le spectateur un magnifique tapis oriental occupant une grande partie de l’espace rend les personnages inaccessibles.
Est ce « La leçon de musique » ou un duo qui s’apprête ? Le dallage sombre et veiné donne une perspective forte. Un petit trou dans la manche gauche de la jeune femme se situe à l’emplacement des lignes de fuites où des fils se rejoignaient. Le décor domestique se retrouve dans d’autres tableaux dans lesquels la musique signifie l’harmonie amoureuse. Il est plus convenable de jouer du virginal, que de se pencher sur un luth, sans même oser une quelconque figure québéquoise qui rimerait en « lute ». Dans le miroir se devine un piétement de chevalet. Le peintre s’avance mais ne se montre pas, il n’a pas réalisé semble-t-il d’autoportrait.
 Dans « La lettre d’amour »,  la servante goguenarde, ne s’occupe guère de son ouvrage, elle apporte sans doute de bonnes nouvelles : la mer est calme sur le tableau en arrière plan. Par contre aucun indice pour « La liseuse à la fenêtre », Cupidon a disparu derrière un rideau alors qu’il brandissait une carte portant le 1 de l’amour unique pour une « Jeune femme debout au virginal ».
 " La liseuse en bleu " sans doute enceinte, tient la lettre de ses deux mains, elle est solide devant la carte de La Frise d’un hollandais fier de l’être ; la sobriété ajoutant à la sérénité, à la force de la scène. Si le thème de la lettre apportée devant la fenêtre pour être lue ou écrite a souvent été traité, quelques femmes ont un verre à la main, une est poussée à boire dans « Le soldat et la jeune femme souriante ». «La jeune fille endormie » attend-elle un amant,  ou a-t-elle trop bu ?
Elles peuvent se laisser séduire par des valeurs terrestres, quand l’une pèse des pierres précieuses à « La balance »  devant la représentation du jugement dernier, ou lorsqu’une autre admire un « Collier de perles ».

« L’astronome » et « Le géographe », sont les rares hommes représentés, chacun avec son globe, alors qu’un autre globe de verre suspendu à un cordon bleu reflète la pièce magnifiquement dans une « Allégorie de la foi »  déjà surchargée. L’esprit humain est bien petit pour comprendre la grandeur de Dieu.
Je ne suis pas d’accord avec le conférencier lorsqu’il se plaint de l’utilisation de « La laitière » par la publicité, car la culture pour moi c’est justement reconnaître. Un enfant qui croise la lumière de cette icône mise à sa disposition, en dehors des lieux réservés, peut être amené plus tard à aller plus loin sur les chemins de la sensibilité artistique. La servante a un rôle central parmi une ponctuation de points lumineux où s’allient une fois de plus le bleu et le jaune. Une caméra obscura a été utilisée à plusieurs reprises.
« La dentelière »  au carreau appuyé sur la bible exerce une activité digne ainsi que la pratiquait Marie, Renoir y voyait le plus beau tableau du monde.
« La jeune femme à la perle » était « la Joconde du Nord » pour Malraux et Paul Valéry aimait tant la « substance tendre et précieuse » de son visage.

En extérieur «  La ruelle » intime et sereine et « La vue de Delft » jouent un peu avec la vérité.
Proust dans la recherche du temps perdu  fait mourir Bergotte  devant  le fameux « petit pan de mur jaune » :
« Enfin il fut devant le Ver Meer, qu’il se rappelait plus éclatant, plus différent de tout ce qu’il connaissait, mais où, grâce à l’article du critique, il remarqua pour la première fois des petits personnages en bleu, que le sable était rose, et enfin la précieuse matière du tout petit pan de mur jaune. Ses étourdissements augmentaient; il attachait son regard, comme un enfant à un papillon jaune qu’il veut saisir, au précieux petit pan de mur. « C’est ainsi que j’aurais dû écrire, disait-il. Mes derniers livres sont trop secs, il aurait fallu passer plusieurs couches de couleur, rendre ma phrase en elle-même précieuse, comme ce petit pan de mur jaune. » Cependant la gravité de ses étourdissements ne lui échappait pas. Dans une céleste balance lui apparaissait, chargeant l’un des plateaux, sa propre vie, tandis que l’autre contenait le petit pan de mur si bien peint en jaune. Il sentait qu’il avait imprudemment donné la première pour le second. »
Le peintre du silence qui s’est approché si bien de ses personnages, a nourri ses suivants comme Van Gogh, et il est classé par Dali comme le premier d’entre eux, se réservant lui la septième place juste devant Picasso. Des livres et des films se multiplient encore aujourd’hui  à partir de ses mystères féconds où le charnel ne supplante pas le spirituel, et le réel n’étouffe pas l’illusion.

mercredi 17 décembre 2014

Iran 2014 # J 10. Ispahan. Kashan.

En descendant pour le petit déjeuner nous avons la surprise de découvrir la rue et l’immense place de l’Imam envahie par des fidèles en prière. Il n’y a plus une place de disponible pour un tapis de plus.
Un haut parleur diffuse le prêche, puis c’est la reprise chantée par toute une foule fervente et concentrée, qui se prosterne en même temps : c’est impressionnant, la foule donne la chair de poule. Sur les toits se distinguent les silhouettes de militaires en arme.
Nous avions bien entendu les hauts parleurs dès 5h du matin mais nous étions loin d’imaginer que la fin du ramadan déplacerait autant de monde. Les gens se dispersent en ordre et dans le silence, tandis que nous allons prendre notre petit déjeuner.
Nous quittons Ispahan vers 9h en direction de Kashan. Nous bifurquons vers Abyaneh classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, situé à plus de 2200 m d’altitude. Nous apprécions le petit air frais dès que nous sortons et sommes surpris par le costume local des femmes très coloré et découvrant les jambes juste en dessous du genou sous de vastes jupes plissées. 
Les hommes portent des pantalons noirs très larges qui donnent presque l’impression de jupes longues. Le village en torchis ocre s'accroche sur une colline cernée par trois forteresses. Nous nous promenons, discutons, avec un  franco iranien qui ressemble à Enrico Macias, posons avec d’autres sur des photos à « ne pas mettre sur Facebook ». Nous allons vers un moulin où l’eau tombe en cascade dans un petit canal, puis nous revenons au village qui compte 140 résidents  permanents et pénétrons dans le mausolée des descendants de l’Imam. A la différence d’une mosquée, cet édifice ne comporte pas de minaret et le dôme est remplacé par un petit toit pointu. Nous demandons la permission à une dame  de la prendre en photo dans son costume chatoyant mais la volubile personne qui nous gratifie d’un « je vous aime », vient de Turquie.
Le village est envahi de touristes locaux venus pique-niquer sur les espaces ombragés de l’entrée du village, fêter l’aïd ou en visite dans les familles.
Dans un hôtel un peu excentré, le seul établissement ouvert en ce jour de fête, on nous sert l’abgoosht, un plat typique à base de mouton, servi dans une cassolette métallique. Il faut isoler la sauce dans une assiette dans laquelle nous émiettons du pain. Dans une seconde écuelle, pois chiches,  pommes de terre et viande sont broyés à l’aide d’un  petit pilon.  Puis nous partons en compagnie de quatre jeunes ados qui nous guident vers la citadelle face au village et à deux autres en ruine qui le surplombent. La promenade passe par le bas du village sur un chemin parmi les arbres puis une montée sur la colline parsemée de ruines et d’étables troglodytes dans lesquelles nous évitons de pénétrer  à cause des serpents. L’un des jeunes au demeurant forts sages, bien élevés et vêtus comme les nôtres de marques occidentales se montre fort timide et mal à l’aise quand Haleh, notre guide, nous traduit en riant que la citadelle sert de lieu de rendez-vous amoureux à ce garçon qui a beaucoup de petites amies. Les jeunes nous raccompagnent au centre du village où nous avons fait quelques emplettes (poupées, pantalons larges, pâte aux abricots), fait causette avec une femme de Téhéran de retour au pays pour les congés et des transactions pour des petits porte-bonheur en graines achetés à une dame au dos cassé.
Nous abandonnons le village montagnard vers les 18h et prenons la route de Kashan qui se situe un peu plus bas à environ 1000 m d’altitude. M. Ali doit renoncer à poursuivre jusqu’au Noghli historical à cause de l’étroitesse des ruelles de la vieille ville. 
Pas d’enseigne lumineuse voyante pour repérer l’hôtel, il faut sonner comme dans une habitation de particulier pour entrer dans cette ancienne demeure au patio en contrebas meublé de divans autour d’un bassin. Nous disposons nos bagages et nous nous rafraichissons d’une bonne douche puis sortons prendre un premier contact avec la ville.
Toutes les boutiques du petit bazar sont fermées, sauf une, où deux commerçants nous proposent de monter sur les toits. Depuis l’arrière boutique, nous nous glissons par une fenêtre au moyen d’une échelle branlante qui ajoute du pittoresque à l’excursion.
Nous découvrons une architecture à la « Barbapapa » avec des coupoles  offrant une vue magnifique sur la ville éclairée, l’intérieur d’un entrepôt aussi grandiose qu’une mosquée et sur les climatiseurs des boutiques. Nous terminons la soirée dans un restaurant traditionnel encore situé dans un cadre superbe où l’on nous sert de la viande de chameau. 
D'après les notes de voyage de Michèle Chassigneux

mardi 16 décembre 2014

Le Dahlia noir. BD.

Ils s’y sont mis à trois pour adapter en BD le roman culte de James Ellroy : Matz au scénario aidé du réalisateur David Fincher (Seven), avec aux crayons l’excellent Miles Hyman créant une atmosphère particulière qui aide à digérer une affaire violente et compliquée.
Betty Short, une starlette qui se prostitue, surnommée «le Dahlia noir», dont le corps affreusement mutilé a été retrouvé dans un terrain vague, va fasciner quelques enquêteurs et révéler bien des noirceurs
« Je savais que ce sourire-là allait me hanter jusqu'à ma mort. Je ne pouvais pas la quitter des yeux, mais je ne pouvais pas non plus vraiment la regarder. »
Dans des cases souvent allongées aux teintes brunes et noires, les femmes sont belles et mystérieuses, les hommes des boxeurs bien taillés, la ville de Los Angeles des années 40 évoquée efficacement : cinéma, business, politique, police : tous corrompus.
Tout semble sous contrôle : les amours, l’avancée  implacable de l’enquête et pourtant les trahisons, les coups de théâtre surgissent tout au long des 170 pages où les protagonistes semblent statufiés alors que les scènes chaudes se multiplient.

lundi 15 décembre 2014

Retour à Ithaque. Laurent Cantet.

Pas besoin de se référer à l’antique Ulysse pour souligner l’universalité du propos qui va bien au-delà de rêves perdus du côté du Malecón à La Havane. Il est d’ailleurs davantage question d’une époque plutôt que d’un lieu.
Oui, film de génération, où s’écluse du whisky entre amis qui ressassent leurs illusions perdues.
Qui n’a pas refait le monde jusqu’à point d’heure ? Ici comme à Cuba, mais nous, nous n'avions pas la peur.
Désormais, la question du départ du pays s’avance, même pour quelques uns de nos enfants, comme elle se pose dans les Caraïbes et dans tellement de pays, à quelques barcasses près.
Dans le cadre très circonscrit d’une terrasse, donnant certes sur la mer, se formule entre autres le problème des difficultés de la création hors de son sol, mais dans un contexte moins léger et mélancolique que « Nous nous sommes tant aimés » (1974) de Scola souvent cité.
Ecrivain, peintre, médecin, ingénieur qui cherchaient la vérité, qui croyaient à un monde meilleur, qui croyaient en eux, ont menti, se sont tus. Ils mettent du temps à accoucher de quelques vérités amères constituant la trame de ce film, proche du théâtre. On peut penser à Tchekhov, qui n’était pas un membre du politburo. Les comédiens sont excellents et si la conclusion peut paraître artificielle, cette révision  lors d’une chaude nuit d’été peut réchauffer nos petits cœurs meurtris qui se font mal aux froideurs présentes.
Que sommes nous devenus?

dimanche 14 décembre 2014

Daho Etienne

" Be bop, pieds nus sous la lune, sans foi ni toit ni fortune
Je passe mon temps à faire n'importe quoi
Sur les pistes noires de préférence, quand le démon de la danse
Me prend le corps, je fais n'importe quoi, tout va bien"
« Le roi de la pop », comme il est qualifié dans tous les articles, était à la MC2, aux airs de boite de nuit, avec un public beaucoup plus chaleureux, plus impliqué que pour les spectacles habituels.
Dans les premiers rangs je ne me sentais pas trop à ma place, bien secoué sur mon siège trop bien placé par ses admiratrices qui connaissaient par coeur les paroles que j’avais du mal à saisir. En appréciant la musique où quelques battements suffisent parfois comme  dans « Weekend à Rome » chanté par la foule en conclusion d’une soirée forte aux deux sens du terme.
« Une escapade à deux, la pluie m´assomme
L´gris m´empoisonne, week-end à Rome
Pour la douceur de vivre, et pour le fun
Puisqu´on est jeunes, week-end rital
Retrouver le sourire, j´préfère te dire
J´ai failli perdre mon sang froid
Humm, j´ai failli perdre mon sang froid
Oh j´voudrais, j´voudrais
J´voudrais coincer la bulle dans ta bulle
Poser mon cœur bancal dans ton bocal, ton aquarium »
Léger, bien troussé et même si ce n’est pas toujours aussi dingue qu’avec la chanteuse Dany, la formule « comme un boomerang » pour parler de l’amour, est tout à fait juste.
Elégant, séduisant, cambré, un pro.
J’aime ses tournures et ses hésitations attrapées de ci de là, quand « le baiser du destin » ne se trouve pas loin  d’ « il n’y a pas besoin de se baisser pour tout amasser »,
« Et de la vie faire ripaille
Avant que j'm'en aille »
ses images :
« Des photos d'un ado sombre,
Accrochées au mur, devant lui,
Est-ce moi? Est-ce lui? »
de subtiles expressions
« Parvenir de l’autre côté,
et vivre vaille que vive »
 Pas si superficiel, en somme :
« Que de temps passé en surface,
Que de temps à ne pas succomber
Au spleen et aux étoiles plombées. »
La fête pour s’étourdir face aux projecteurs,
« Night club, Tequila, je m'enivre, je parle trop, bien trop
A quoi servent les mots, m'embarrassent plutôt »
mais les mots ne renoncent pas
« Volontiers j'accepte le meilleur traitement
Que l'on réserve tout exclusivement
Aux invités le festin nu, qui fait les langues au soir se délier, se délier yeah
yeah yeah yeah... »

samedi 13 décembre 2014

Caprice de la reine. Jean Echenoz.

Sept brefs récits, depuis le plus lointain dans le temps et l’espace à l’infiniment petit.
De Babylone par Hérodote jusqu’à la main de l’auteur, lui-même parmi la campagne alentour,
de l’histoire des ponts à une colonne de fourmis,
du jardin du Luxembourg au Bourget face à un sandwich au saucisson sec (catégorie qui a tendance à se perdre),
avec  Nelson l’amiral dont l’apparition  dans les premières pages ouvre magnifiquement sur les 120 suivantes. « Manchot, borgne et fiévreux » il  laisse les convives d’un grand repas pour aller planter des glands qui feront les bateaux à venir et le tonneau plein d’eau de vie qui ramènera son cadavre.
« La terrasse domine une vaste pelouse triangulaire en pente douce, se poursuivant à partir de son côté inférieur par une déclivité plus abrupte presqu’un à-pic borné par un bosquet de chênes verts en contrebas duquel, par vent favorable, un torrent invisible donne des nouvelles assourdies de son cours. »
Le style de cet écrivain http://blog-de-guy.blogspot.fr/2013/01/14-jean-echenoz.html  ne prend jamais la pose, il joue de l’ironie avec la mort, prend des détours agréables et aussi augmente la précision de nos perceptions, ouvre sur des réflexions sur l’écriture en nous surprenant souvent, en variant les approches légères et profondes.