Pas de prédicateur bruyant cette nuit, seulement un âne qui s’exprime sur le matin.
Des sortes de colibris vifs et colorés font trembler les grandes
fleurs rouges de l’ibiscus voisin. Nous prenons un copieux petit déjeuner avec
omelette sous la véranda car la pluie commence à tomber.
Nous changeons deux billets de 100 birrs en petites coupures
de 1 birr, et achetons 3 couvertures en prévision du camping à venir (200 birrs
= 8 € pièce)
Jamais nous n’avons vu autant de troupeaux de zébus sur la
route qu’ils occupent placidement. Des bergers jeunes portent différents outils
dont des sagaies et souvent un appuie-tête qui leur sert parfois de tabouret. Des ruches de forme
allongée en bois tressé sont suspendues aux arbres.
En direction de Konso, la route cède la place souvent à la
piste et nous pouvons voir des ponts emportés par des crues imposant des
contournements.
Ici on cultive le sorgho rouge ou blanc. Pour protéger les
cultures des oiseaux, des enfants sont postés sur des plateformes en branches
et font claquer leur fronde d’un mouvement gracieux, tandis que d’autres y vont
de leur sifflet.
Certains arbres nous intriguent, les moringas dont il ne
reste que des gousses car leur feuillage est ramassé comme légume ou tisane
pour soigner l’hypertension et le diabète. Il parait qu’un homme doit en avoir
planté quatre pour prétendre à une épouse.
Nous traversons Konso
qu’on visitera plus tard mais nous pouvons déjà apprécier les toits de chaume à
deux étages semblables aux jupes des femmes avec leur petit volant à la taille
au dessus d’une jupe ample.
La pluie se met à tomber dans la montagne et nous cache le paysage. Crevaison.
Nous faisons une halte à Key Afer où nous nous régalons de légumes et de viande de chèvre.
Nous en profitons pour négocier de bracelets de cuivre. Après la cérémonie du
café, le temps s’éclaircit.
Nous prenons une piste très praticable et nous croisons
quelques Bannas et Hamars surprenants. Le marché de Dimeka qui s’est prolongé à cause du temps, est extraordinaire non
pas pour ses étalages achalandés d’un peu de café, et de quelques oignons, mais
pour les costumes et l’apparence des clients et des marchands.
Les hommes portent un pagne plus court qu’une mini jupe, des
bijoux de perles et de cuivre, voire une clef de verrou en boucle d’oreille ou un
bracelet de montre en métal transformé en pendentif. Leur front est dégarni à l’arrière et ils portent une plume parfois
ou une calotte d’argile. Tous exposent des jambes magnifiques parfois peintes.
Les femmes portent des jupes en peau de vache rehaussée de
perles et coiffent leurs cheveux en tresses enduites d’une boue rouge composée
de beurre et d’argile. Les femmes mariées se distinguent par un collier inamovible
ressemblant à un collier d’esclave.
Bannas et Hamars sont « cousins » et les tribus
s’inter marient.
Chaque photo se négocie de 2 à 5 birrs. Nous sommes dans une
Afrique mythique, loin de notre civilisation et en même temps confrontés à des rapports où
l’argent est important.
Les chauffeurs s’esclaffent au récit d’une histoire
vécue par un de leur collègue.
« Celui-ci a eu
un accrochage avec un troupeau et téléphone à son patron:
- Paye la vache
et continue, lui dit-il.
- Mais ce n’est
pas une vache, mais 4 que j’ai tuées !
- Ma parole, tu
as conduit dans l’enclos ! »
Ce soir nous campons sous les manguiers. Nous prenons notre
repas aux bougies : pâtes à la sauce tomate et thon en boite, fruits…
l’une d’entre nous confond une lampe de poche avec la poivrière, mais grâce au
groupe électrogène nous avons le plaisir de boire une bière fraîche et de
recharger nos batteries d’appareil photos. La soirée est magnifique.
Nous ne sommes pas sûr de pouvoir visiter les Mursis qui se
sont révoltés car un camion a renversé une femme enceinte et l’a tuée. Son mari
réclamait qu’on lui livre le chauffeur pour se venger et la femme de celui-ci pour qu’elle
lui donne quatre enfants afin d'arriver aux sept qu’il souhaitait. La situation
se résoudra sans doute par de l’argent et le passage sur la route sera rétabli.