samedi 4 mai 2013

Liturgie. Marie Hélène Lafon.



Quelques grands lecteurs que j’écoute volontiers n’hésitent pas à dévorer tout ce que publient leurs auteurs favoris; trop soumis aux plaisirs des nouveautés, je me gardais de tomber dans la passion exclusive jusqu’à la rencontre avec cette auteure qui me touche au plus profond.
Et il a fallu de la persévérance : le livre découvert chez Finkielkrault n’était pas disponible à la FNAC, ils me l’ont commandé et à l’issue de procédures automatiques, remboursé quelques jours après sans que je l’obtienne ; la librairie du Square m’a sauvé et l’a déniché.
 Pour se régaler de mots aussi évidents que l’été:
« C’était le mois de juin, capiteux, riche, fourré d’herbes longues. L’ombre et la lumière crépitaient dans la cour. »
Mais ce sont surtout des fleurs de Novembre qui sont présentes dans cette série de portraits, de destins, de maisons dont tant de pièces sont vides.
Roland, le grand menuisier s’est pendu, la vie des habitants de ces pays « au plus serré des hivers » est tellement rude.
Le lien intime du lecteur et de l’auteur avec ceux qui comme moi ont commencé à lire surtout « Vaillant » au bord d’un champ tout en gardant les vaches, se tricote avec le portrait cette fois de l’institutrice partie en ville :
« Elle n'était plus de ceux qui gagnent leur vie avec les bêtes, leur viande, leur lait, avec la terre ouverte, charruée, ensemencée, avec ce que la terre donne et ce qu'elle refuse, avec les saisons, leurs attentes longues, leurs coups de colère et leurs soudaines embellies »
 Pourtant : « Quelque chose de la pâleur des livres, peut-être, avait coulé dans la chair de Jeanne, qui parlait d'ailleurs et d'autrement. »
130 pages pudiques et  charnelles, violentes, telluriques et d’une minutie qui rejoint mon goût maniaque des gros plans en photographie.
Tellement fort, que même un parisien peut découvrir et comprendre ces « territoires » d’outre temps, avant que les technocrates n’aient vidé ce mot de toute sa densité, à force de le répéter.

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