samedi 10 janvier 2009

Modernes et silencieux.


L’école a été un formidable outil de modernisation.
Aujourd’hui la modernité nous déstabilise et l’affubler du seul masque du libéralisme, commode le temps d’une manif, ne rend pas compte de la complexité des mutations.
Nous restons perplexes quant aux réactions assez faiblardes vis-à-vis des mesures graves prises contre l’école. C’est qu’il n’y a plus unanimité et ce n’est pas en méprisant les thermomètres que ça ira mieux.
L’école, attaquée de toutes parts, nous voilà contraints de la défendre en bloc, oubliant parfois ses carences, percevant mais confusément que le monde a changé et la mentalité des personnels aussi.
Je cultive avec délices la posture de l’instit’ à l’ancienne, mais je sais bien en 2009, qu’il est d’avantage question de professionnalisme que de foi, de vocation. Nous sommes pressés par l’instantané : un clic, le speedant de la république est dans le mouv’. L’éducation nécessite un autre chronomètre : grandir prend du temps. Les parents attendent des services, et n’adhèrent plus d’emblée aux valeurs de l’école qui ne sont plus celles de la société.
En bénéficiant d’acteurs de l’éducation, critiques, écoutant distraitement nos incantations, remettant notre légitimité en question ; notre pédagogie aurait-elle porté ses fruits ?
Le corps des enseignants s’est atomisé : on n’a jamais tant parlé d’équipe alors que l’individualisme est entré dans le sanctuaire ; la multiplication des statuts l’aggrave.
Plus encore au collège, où l’éparpillement des taches éducatives dilue les responsabilités.
Le ver était dans le fruit. Les super- directeurs vont s’installer sur le désinvestissement des adjoints.
L’instituteur instituant a disparu sans une fleur. Nous avions tant crié contre les institutions.
En gagnant le rang de professeur après avoir revendiqué une dignité indexée sur grille de salaire, nous sommes entrés dans les valeurs CAC 40.
Face à l’attaque contre l’école publique qui vient du fond des âges réactionnaires, le P.S. sort son Bruno Julliard, mais qui nous entend ? Jack Lang bavarde sur l’école, cela revient au même qu’un silence gêné.
Une pétition contre Darcos a vu s’effacer récemment 15 000 signatures sur le web, faudrait pas virer paranos ! Au détour d’un article de Patrick Pellous dans Charlie Hebdo, remarquant qu’il a fallu du courage à ses collègues de l’Essonne pour révéler la mort d’un homme, que pendant six heures ils ont tenté en vain de faire admettre dans un hôpital, parce qu’ils se sont fait gronder par leur hiérarchie, montre que le silence réservé jadis à l’ hôpital, s’étendrait à toute une société.
Une affichette de 68 disait : «la police vous parle à 20h » : plus besoin, le policier est dans les têtes.
Le climat qui s’installe fait froid dans le dos : un Sarko XXI, en duplex avec Chabot, pourrait rendre la justice tous les soirs à 20h sous son chaîne, ça ferait de l’audience et économiserait des juges.
En période de vœux, nos mots sonnent cette année encore un peu plus dans le vide.
Solde sur les dictionnaires.
La crise nous tétanise ; des enfants portent à Gaza d’autres enfants morts dans leurs bras.
Les bras nous en tombent.

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