jeudi 29 juin 2017

Anselm Kiefer. C. Loubet.

L’artiste allemand vivant en France présenté par le conférencier devant les amis du musée de Grenoble, met plomb, pierre, paille et peinture en jeu pour traiter de l’Apocalypse (la révélation).
Trois de ses oeuvres viennent d’être achetées par Le Louvre. Il fallait bien le Grand Palais en 2007 pour accueillir ses constructions gigantesques et Beaubourg pour l’honorer en 2015.
Il est né sous les bombardements de 1945 entre le  lac de Constance et la forêt noire.
Beuys sera son professeur à Düsseldorf, les happenings tournaient alors à la provocation.
En se photographiant faisant le salut nazi, « Occupation » dans un cadrage évoquant Friedrich, il a l’intention d’assumer la tragique histoire germanique avec « emphase et gravité ».
Dans un « Paysage d’hiver » la civilisation saigne.
Le serpent survit dans un paysage calciné, l’artiste brûle le territoire pour le reconstruire : « Resurrexit »
« Vol de Hanneton » illustre la berceuse :
«Le hanneton vole,
Papa est à la guerre,
Maman en Poméranie,
La Poméranie est brûlée. »
La baignoire de sa grand-mère est dérisoire pour rappeler l’« Opération lion de mer », nom de code désignant le projet d’invasion de l’Angleterre par les nazis.
Il évoque les figures mythiques : « Brunehilde endormie » (Catherine Deneuve) oubliée par Siegfried, les évènements fondateurs, Hermann le Vercingétorix Teuton, les grands auteurs : Goethe, Nietzsche et compagnie…
Puis entre Icare et l’alchimie, il va citer souvent Paul Celan, poète rescapé des camps, pour exprimer sa « fascination horrifiée » pour la shoah. « Ligne de chemin de fer ».
« L’Athanor », le four alchimique de l’oeuvre au noir, de la recherche de la pierre philosophale, de la régénération, et de l’étincelle de vie, a atteint des records à la vente à New York.
Fasciné par la Kabbale de Louria où Dieu a créé le monde par son retrait, il produira de nombreuses toiles jusqu’à  « Alkahest », le dissolvant auquel aucun métal ne résiste y compris l’or.
Installé un moment à Barjac sur 35 ha, il accumule des matériaux dans « Les maisons » de la Ribaute.
Il synthétise ses visions d’autres cosmogonies où l’homme est pris entre microcosme et macrocosme. Dans « Le camp des étoiles » chaque élément céleste est numéroté ainsi que le furent les déportés.
Si le renouveau peut être issu du chaos, « La tombe dans les airs » de notre culture prométhéenne est bien bancale.
« Danaé »: depuis des livres calcinés fleurit un tournesol. Le retour du chaos et de la renaissance est cyclique.
Et avec «Le dormeur du val » rimbaldien les fleurs poussent sur une terre fécondée.
«  Je suis dans la matière, dans la couleur, dans le sable, dans l’argile, dans l’aveuglement de l’instant »
Me reviennent à la fin de l’exposé dont je n’ai retenu que quelques images d’une production très abondante, ces vers d’Eluard, quand tant de matériaux divers furent rassemblés pour accomplir un travail de mémoire endeuillée et s’élargir à une quête spirituelle embrassant mystique et occultisme : plomb, ongles, paille, photos, suie, sable, salive, tessons de verre et de porcelaine, laque,résines… 
« Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J’écris ton nom
Liberté. »

1 commentaire:

  1. Bon, là je suis obligée de reconnaître que c'est un artiste (et non pas un saltimbanque...), même si je n'adore pas son art.
    Si seulement l'assimilation de tant d'héritage juif nous avait rendu plus heureux, Guy, mais force est de constater que non.
    Même si je critique l'utopie (des Lumières) d'un bonheur cotonneux, le poids de tant de conscience de soi (self consciousness et non pas égoïsme, ce n'est pas la même chose) est si lourd.
    On peut comprendre combien cela écrase les pauvres fleurs mortelles que nous sommes. Le.. Divin en l'Homme aura Raison de lui ?
    C'est à craindre...

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