mercredi 18 juin 2025

Orléans # 1

Notre voyage nous mène aujourd’hui  à ORLEANS, où nous commençons par un passage incontournable  à l’Office du tourisme installé place du Martroi, jolie et centrale.
Nous y trouvons un plan de la ville ; à proximité, dans une librairie nous acquerrons un « Guide du routard », et avant de nous lancer dans notre exploration, nous filons déplacer la voiture car le prix du parcmètre trop peu cher pour un centre-ville (1.70€ pour 3h incluant la gratuité entre midi et 14h) me parait suspect et m’angoisse.
Nous préférons le parking souterrain du Martroi après avoir vérifié les tarifs, bien sûr. 
L’esprit léger, nous démarrons nos déambulations pédestres.
Tout d’abord nous nous rendons au restau « Les fils à maman », choisi parmi d’autres dans le routard. Noté par le fameux guide comme se voulant régressif, il affiche au menu des cordons bleus du père Dodu, des coquillettes jambon (à la truffe) et tous ces plats servis dans notre enfance tandis que des jeux imprimés sur les napperons papier nous occupent le temps que le cuistot nous satisfasse.
Le secteur de la rue de Bourgogne, où il se situe, est investi par beaucoup de bars et restaurants, dédié au plaisir de la table comme l’affirme la  « Rue des assoiffés et des affamés ».

Puis une fois rassasiés, nous  portons nos pas jusqu’à  l’hôtel Groslot.

Cet hôtel particulier  construit  au XVIème présente une façade en briquettes rouges et noires.
A l’entrée, une statue en bronze de Jeanne d’Arc rappelle  logiquement  son lien fort à Orléans. Mais autre  témoignage historique ; elle montre des perforations ; ces  stigmates proviennent d’une explosion d’un dépôt de munitions  proche de l’endroit où elle fut enfouie durant la seconde guerre mondiale.

Dans cet hôtel particulier  devenu par la suite mairie, subsiste la salle des mariages toujours en activité et que le passant peut parcourir gratuitement.

C’est ici que mourut François II à l’âge de 17ans d’une otite avec complication après que sa mère Catherine de Médicis se fut opposée  à une trépanation préconisée par Ambroise Paré.

Nous accédons aussi au salon d’honneur, à la salle du conseil municipal et l’ancien bureau du maire meublés dans un style lourd, en bois foncé, de tentures d’Aubusson et dotés de belles cheminées Renaissance.

Le Musée des beaux-arts s’appuie contre L’hôtel de ville actuel face à l’hôtel Groslot de l’autre côté de la rue.

Il récolte 3 routards dans le guide du même nom, label qui retient donc notre attention. Nous recevons bon accueil, bénéficions du tarif des vieux, et arpentons les salles de ce musée rénové quasiment seuls.

Il conserve une muséographie à l’ancienne avec  superposition de tableaux et occupation optimale des espaces comme le pratiquaient les marchands du XVIIIème siècle. 
Le fait de disposer les cartels au sol devait en rendre la lecture plus aisée,  parait-il…

Peu de peintres nous sont connus, exceptés Vélasquez ou Georges de La Tour dont il me semble avoir vu la même toile au musée de Rouen.
Par contre le musée possède beaucoup d’œuvres de Léon Cogniet  lauréat du prix de Rome et garde des œuvres spoliées par les nazis, récupérées par l’état qui les a disséminées dans ses musées en attendant d’en identifier les propriétaires.
Le musée  expose aussi des sculptures ou des objets rares, des ivoires, des cafetières, de la vaisselle de Sèvres.
Il couvre une période du XVème au XVIIème au 2ème étage, du XVIIème au  XVIIIème au 1er  avec salle 10, des toiles de grands formats accrochées du sol au plafond, du XIXème à l’entresol et encore plus bas, du  XXème représenté entre autre par Mathieu, Hantaï Monory, Cueco, Lavier, Fromager.
Il est temps de se préoccuper de notre Airbnb,  nous interrompons nos visites pour aujourd’hui et récupérons la voiture direction OLIVET.
Mais les GPS du téléphone ou de l’automobile ignorent l’adresse donnée.
Grâce à l’itinéraire du site Airbnb nous parvenons à nos fins. Nous découvrons un studio avec mezzanine assez vaste, neuf, propre, bien équipé, jouxtant la maison des proprios. Après avoir déchargés nos affaires quelques emplettes s’imposent au centre-ville pour une soirée tranquille à la maison dans un quartier calme. 
Notre logeur J. nous aide par téléphone à régler un petit problème d’eau chaude.

mardi 17 juin 2025

Surface. Olivier Norek, Matz & Luc Brahy.

Le métier de policier est dangereux. La parisienne touchée lors d’un assaut  à Saint Denis 93 est mutée à Decazeville dans l’Aveyron et loge au bord d’un lac artificiel où un village a été englouti et donc propice à l’émergence de quelque cold case. 
« C’est pas un village. Ici, c’est un trou avec un code postal. » 
Les dessins de paysages sont plaisants, l’intrigue bien tarabiscotée comme les aiment les amateurs de polars, les personnages identifiables au premier coup d’œil comme la BD sait les mettre en place. 
« Vous savez, ici, il faut savoir rétrograder les vitesses.
C'est marrant comme les Parisiens ont du mal à ralentir. » 
Au-delà des ingrédients habituels : autopsies et cimetière, finesse de l’enquêtrice, distanciation par écran interposé lors d’entretien avec un psychologue, petite romance, faux morts et familles toxiques, quelques caractères bien stéréotypés de la «  province » mis en évidence ajoutent un mol intérêt à ces 136 pages. 

lundi 16 juin 2025

Indomptables. Thomas Ngijol.

Si ce film policier ne se déroulait pas au Cameroun si rarement filmé, l’intérêt serait maigre.
Un commissaire, père autoritaire et pontifiant, pathétique, en arrive enfin à se faire clouer le bec face à sa femme et à ses enfants qui ne cessent de lui échapper, comme lui s’en détache.
La recherche des coupables d’un assassinat d’un collègue n’est qu’un prétexte à une débauche de coups de pieds dans les portes, suivis de tortures, que le critique du « Monde » se permet de qualifier d’ « humanisme de combat » quand le moindre croche-pied par ici fait scandale !
A la misère indomptable des hôpitaux, de la police, au bout de rues défoncées, s’ajoute la corruption qui ruine les rapports humains. Les relations sociales, familiales sont tellement catastrophiques, que les discours moralisateurs n’en paraissent que plus obscènes.

dimanche 15 juin 2025

Rambouillet # 2

Nous gagnons à pied la laiterie de la Reine.
Ce cadeau  que fit Louis XVI à sa femme ne séduisit pas Marie Antoinette malgré son goût pour une vie champêtre rêvée qu’elle aima cultiver à Versailles dans son  hameau.
Elle n’apprécie guère le château de Rambouillet qu’elle surnomme  « la crapaudière ».
La laiterie ressemble à un petit temple antique destiné à la dégustation des produits laitiers.
L’intérieur se divise en 2 espaces : dans  le premier en forme de rotonde, une coupole à caissons proche de celle du panthéon de Rome laisse filtrer la lumière  par un oculus.
Des médaillons sculptés apposés sur les murs  idéalisent des sujets liés aux travaux de la ferme comme la traite, le barattage… 
Le 2ème espace sert d’écrin à un amas de rochers monumentaux  en forme de grotte qui englobe une statue féminine représentant Amalthée et la chèvre de Jupiter.
Dans une dépendance sur la gauche de la laiterie,
une petite exposition fournit quelques explications et montre des exemplaires de vaisselle de Sèvres conçue spécialement pour ce bâtiment. Le raffinement  et l’art de vivre se nichent  partout.
Le gardien nous enjoint à ne pas trop tarder pour aller à la chaumière aux coquillages, et d’arriver avant que son collègue ne prenne sa pause méridienne impliquant la fermeture de la petite maison.
Nous la trouvons un peu plus loin dans le parc. Elle adopte un style rustique avec un toit de chaume et semble sortir tout droit du passé. 
Son appellation provient de sa décoration intérieure incroyable, inédite, époustouflante !
Des coquilles d’une grande diversité, moules, praires, huitres, de tailles et de couleurs différentes  franches ou délicates, recouvrent tous les murs.
Elles dessinent des décors avec symétrie, des colonnes, des médaillons, comblent les fonds, tracent des motifs de broderies, épousent les surfaces même en arrondi de la pièce.
Des vasques utilisant des coquillages plus importants s’insèrent dans des niches prévues à cet effet.
Des canapés et des chaises placés le long des murs s’adaptent à la forme circulaire de la pièce.

Comment ne pas penser à la chambre d’ambre de Tsarkoïe Selo, 
version française, avec des  moyens beaucoup plus modestes mais valorisés avec beaucoup d’art et de savoir- faire ? Unique et réussi! 
Pour rentrer, nous suivons le canal. La grandeur du parc et ses aménagements nous impressionnent. Il possède un canal, des plans d’eau, des ilots abordés autrefois en barque.
De l’allée de Diane, marquée par la présence de sa statue, s’offre une longue  perspective dégagée vers l’arrière du château. Ici, dans cette partie, plus reculée, circulent des  promeneurs mais aussi des vélos, des joggers et des voitures électriques. Les jardins soignés à la française ou à l’anglaise, cèdent la place à une végétation organisée de façon  plus naturelle, voire plus sauvage. Nous ne nous enfonçons pas suffisamment pour rencontrer la forêt riche en gibier donc  propice à la chasse, faisant la réputation de Rambouillet et son château.
Maintenant, il est temps de nous poser et de nous restaurer. Nous  trouvons tout près « La maison blanche » qui nous sert un poke bowl au bœuf ou un tartare de thon et avocat suivis d’un café gourmand. 
 
Nous disposons de toute l’après-midi pour nous promener dans le parc forestier et animalier
dit Espace Rambouillet
Nous devons pour cela reprendre la voiture.
Bien qu’aidés par le GPS nous galérons un peu au milieu des bois dépendants de la commune de Sonchamp embarqués sur des routes étroites qui les traversent mais nous finissons par déboucher sur le parking anarchique placé sous les arbres.
L’espace Rambouillet (entrée payante)  propose des animations pour les enfants près de l’entrée, et plusieurs circuits repérables à leur couleur pour les familles ou les adultes : 
Le plus court parcourt la forêt des cerfs et la forêt du monde invisible dans un cadre en semi-liberté, les bêtes étant gardées derrière des enclos. 
Le 2ème passe par la forêt des aigles qui se produisent à des heures fixes de la journée. 
Nous choisissons le 3ème, et nous poussons le portillon vers la forêt sauvage.

Elle mérite sa réputation, beaucoup de chênes et de bouleaux la composent, avec à leur pied, un sol sans broussaille inextricable au profit d’une terre humide recouverte de feuilles mortes.
Dans les trouées de lumières ou les clairières les fougères se plaisent et s’épanouissent éclatantes de santé. Le chemin nous conduit à la mare saint Rémy. C’est un superbe endroit plein de magie due essentiellement à une île où prospèrent des cyprès chauves originaires d’Amérique dont les résurgences racinaires en surface créent des picots et des broderies, là où l’eau se recouvre d’une pellicule verte mouvante.
Durant la promenade de plus de 2 h, nous distinguerons de loin des cerfs en hordes ou isolés et couchés à l’ombre sous les fougères. Mais il fait encore  trop chaud pour espérer croiser les autres habitants de la forêt.
Cependant, la promenade balisée sur des chemins d’où il ne faut pas s’écarter ne manque pas de charme, les groupes se diluent dans l’espace sans ressentir les désagréments engendrés par trop de monde, ils se parlent cordialement et s’échangent les bons plans pour débusquer les cerfs. Quant au petit train forestier, il circule en harmonie et discrètement sans déranger la quiétude du lieu.
Nous avons fait notre plein de nature aujourd’hui.

De retour à Sermaise, avant de passer une soirée tranquille dans notre colombier, nous partons à pied regarder à quoi ressemble le centre du village à deux pas du manoir : très petit, il concentre un stade, des maisons, dont la mairie, en pierres blanches liées entre elles par un enduit clair et une église équipée de porches en bois protégeant  les portes d’entrée sur deux de ses façades.

samedi 14 juin 2025

Dernières nouvelles de Rome et de l’existence. Jean Le Gall.

L’éditeur écrivain a accordé la forme de son roman désabusé à son propos :
« A vouloir démontrer l’inexistence de Dieu, l’homme n’a pas vu la sienne. » 
Un ami pense lancer la carrière du narrateur à partir d’un livre qu’il n’a pas écrit.
Dans les années 70, le dénommé Palumbo démissionne le jour où il est élu à la tête d’un parti politique sensé renouveler le paysage intellectuel transalpin. 
« Ce communisme new age avait vécu. Deux heures et quart pour être précis. » 
Il s’établit comme vendeur de canapé pour mieux observer « l’homme moyen ».
Cette démarche déjà testée en Chine où les intellectuels étaient invités aux champs pouvait renouveler la réflexion sur la fracture sociale de par chez nous.
Mais rien de probant n’apparaît dans ce récit de 187 pages avec quelques formules désabusées :  
« Souvent, il usait de son charme comme d’une allumette humide qui, frottée dix fois, ne prend toujours pas. »
Il  a perdu ses illusions, il s’écrit à lui-même: 
« La moitié de l’humanité est prête à remplacer l’amour par des parcs d’attractions, la beauté par la chirurgie, les pâtes par les nouilles, les écrivains par les journalistes. » 
La littérature pourrait être un recours : 
« Stendhal, c’est inégal en fait de style, de caractères et d’intérêt, mais c’est un observateur à l’œil millimétrique, c’est un désenchanteur de première bourre, un railleur exceptionnel, un maître du scepticisme. » 
Mais même Rome, issue de tous les chemins, se voit maltraitée : 
« Rome n’est pas seulement ignoble et excrémentielle, elle est aussi inauthentique.
Sa « décadence » et sa « chute » sont des crâneries d’historiens, des tics d’écriture, des vanités d’éditorialistes impatients de placer leurs conclusions sur l’Occident. » 
Cette errance désincarnée, dépressive, ne nous donne aucune nouvelle de la ville éternelle, mais réussit son pari d’une approche de l’inexistence. 
« Se trouvent dans les romans non advenus, l’éloquence et l’émotion qui manquent si sadiquement à la littérature une fois qu’elle est imprimée. Le roman, en tant que roman se dérobe toujours. Et l’on devine quel avantage il y aurait dans le privilège d’être un romancier qui n’a rien écrit ! »  
A lire de nuit, dans une salle vide, peinte en blanc d’une FRAC, qu’il ne sera pas utile d’éclairer pour exciter malgré tout notre pensée.

vendredi 13 juin 2025

Futu&r. N°46.

Usbek & Rica a pris le nom de Futu&r avec le même objectif depuis 2010 : tourner  vers l’avenir un regard persan comme les personnages de Montesquieu auteur de lettres « naïves et sans préjugés ».
Orphelin de Jean François Khan et de Jacques Julliard, je m’applique à chercher des voix nouvelles et le titre de ce trimestriel ne pouvait que m’accrocher.
« L’écriture va disparaître, et alors ? »
« Et si, après cinq siècles de domination de l’écrit, notre civilisation redevenait orale ? »
Plus guère de courrier dans les boites à lettres, 
le livre audio est plébiscité par 62% des enfants de 7-9 ans, 
7 milliards de notes vocales par jour circulent sur les réseaux permettant aux langues sans clavier de s’exprimer, à ceux qui ont des difficultés de lecture de communiquer.
L’oral devient un atout dans les entreprises.
Le traitement du sujet est alerte avec un journaliste qui a passé une semaine sans écrire, approfondi sous le regard d’une philologue italienne, 
décapant avec un essayiste américain qui reconnaît :  
«  On sous estime à quel point les gens détestent écrire »
Une librairie au Japon propose un seul livre (en plusieurs exemplaires) par semaine. 
Bien sûr il est question de ChatGPT dont on se demande s’il ne va pas tuer l’alphabet …et les alphabètes. 
Il est intéressant d’envisager une école sans écrit, 
de nouveaux métiers à l’âge de l’oralité,
et les glissements dans les pratiques des entreprises, en politique. 
Les historiens emprunteront-ils aux techniques des griots ?
Cinq œuvres de sciences fiction qui ont prévu la disparition des livres ont toute leur place parmi ces 150 pages denses qui offrent en outre une uchronie originale :  
«  Et si Louis XVI n’avait pas été guillotiné ? » 
Le dialogue entre un expert du Giec et une activiste intersectionnelle autour de la question  
«  Faut-il arrêter de militer pour le climat ? » est tout à fait pertinent…
Tout cela suffit à me nourrir même si je laissé au bord de l’assiette  
« La ville cybernétique de SimCity » 
ou « J’ai discuté avec mon futur moi » avec un jeu de l’oie autour de la planète Mars... Dépassé par les enjeux exposés par un expert du stockage sur ADN,  
difficile de suivre « l’anti nataliste qui nous veut du bien »
Plus familier des personnalités de « Vieux » ou « Schnock », je n’ai pas été attentif aux propositions de Simona Levi, 
ni à celles de Mélody Mourey d'illustres inconnues pour moi, 
par contre la découverte de la face cachée de Brian May, rock star et astrophysicien a piqué ma curiosité.

jeudi 12 juin 2025

Malaterre. Pierre Henry Gomont.

Les dessins nerveux, le récit dynamique rendent palpitant le destin d’un homme insupportable.
Des conflits familiaux destructeurs sont exportés au cœur de la forêt tropicale où les charmes de l’Afrique, la liberté adolescente née de la dérobade adulte vont construire des vies romanesques. 
« Ils avaient vécu dans la cage dorée des jeunes expatriés, 
avaient goûté le mirage d'une liberté totale. » 
L’histoire de ce père menteur, manipulateur, fumeur, buveur, coureur, irresponsable, malhonnête, égoïste, irascible … est bien plus passionnante que celle des gentils.
En 200 pages, cette bande dessinée évoque avec force des ambiances exotiques et familières, des caractères affirmés et complexes.   
« J’ai prié pour que tu dérapes, pour que tu heurtes un de tes précieux arbres, lancé à pleine vitesse et les yeux pleins d’alcool. Mais ne te trompe pas, mon petit Papa. Nous ne sommes pas soulagés. Je ne savais pas à l’époque que j’avais beau te haïr, je t’aimais quand même. »