mardi 13 novembre 2012

Qui a mangé Zidane ? Sylvain Ricard. Didier Maheva.



Quelle idée d’appeler son lapin Zidane, du nom d'un publiciste, en 2012 ? Zlatan alors?
Je croyais revisiter la fin des années 90 avec une BD sociale, eh non ! 
Ce numéro 1 d’une trilogie de l’éditeur « 6 pieds sous terre » est sorti récemment, mais pour moi cet opuscule alignant les clichés sonne faux.
Le manager  du fast food où travaille Vincent s’appelle Jean Eude et  comme il ne veut pas se rappeler du prénom de celui qui s’occupe des poubelles, il le nomme Mouloud.
Le père est gras et  picole devant la télé, il ne veut pas de « pédé » à la maison,
la mère qui pourrait être belle, distribue des torgnoles à ses enfants.
Le lapin consolateur finira mal fatalement, tout était si mal parti.
Je n’apprécie guère l’eau de rose, mais on ne peut croire à tant de noir complaisamment répandu. 
Mince album inactuel où ne perce aucun enjeu qui taraude nos grands ensembles où l’on se retrouve d'ailleurs si peu ensemble.

lundi 12 novembre 2012

Amour. Haneke.



Comme j’ai écrit concernant le dernier James Bond, « ça, c’est du cinéma ! »
pour ce film, je vais éviter  de paraphraser les commentaires déjà fournis,
ou tartiner sur ce qui est soulevé fatalement dans nos destins perso :
« ça, c’est la vie ! » violente.
Le film est  juste, pudique et obscène.
L’amour en tant que soin palliatif est étouffant.

dimanche 11 novembre 2012

Camille à la MC 2. Ilo Veyou.



J’avais apprécié « Prendre ta douleur »
« Je vais prendre ta douleur
Mais c'est qui cette incrustée,
cet orage avant l'été,
sale chipie de petite sœur ?
Je vais tout lui confisquer:
Ses fléchettes et son sifflet,
je vais lui donner la fessée,
(prendre ta douleur,
je vais prendre ta douleur)
la virer de la récré.»
Mais je craignais de l’artificialité dans les échos d’une voix trop travaillée, trop sophistiquée.
Et en spectacle, avec l’humour, la variété, le tempérament de l’artiste, son univers original, j’ai été convaincu que son succès était mérité.
En entrée des accents d’Anne Sylvestre pour son enfant qui vient de naître, mais avant tout de l’inventivité qui  surprend à chaque séquence le spectateur, même celui qui aurait tendance à devenir blasé.
Une reprise du « Que je t’aime » de Johnny au rappel avec des arrangements subtils valait le détour, ainsi qu’un « Grre !...noble » dans une sarabande terminale pleine de légèreté qui clôturait une  excellente soirée.
Des chansons dynamiques,
« allez allez allons
à chaque coup de crosse
prends l'écorce du colosse
et du canasson »
des balades,
« Sale décembre
comme il est lourd le ciel
sais-tu que les statues de sel
ont cessé de t'attendre ? »
Bien sûr des inventions avec la voix : du murmure au cri, à cappella souvent
« J'ai tout dit
J'ai rompu le charme
J'ai tout dit
Maintenant je vous regarde »
et des pizzicati.

samedi 10 novembre 2012

Les lisières. Olivier Adam.



La quatrième de couverture « Roman qui embrasse dans un même souffle le destin d’un homme et le portrait d’une certaine France, à la périphérie d’elle-même ». J’achète.
Le « roman de la rentrée » a proclamé la critique. Je vais nager dans le « main stream ».
Et ses oiseaux « qui gueulaient comme s’ils craignaient que la nuit les emporte » m’avaient attrapé au début, mais arrivé au bout des 450 pages, je suis ressorti déçu.
L’écrivain de gauche au dessus de ses contemporains n’est qu’un fantôme. 
Ne suis-je pas sorti  encore des épreuves de la fracture sociale, culturelle ? 
Je l’ai trouvé surplombant, sans estime pour ses personnages. La divulgation d’un secret de famille fait flop.
Personne n’est sympathique dans ce pavé sans surprise, surtout pas le narrateur qui dresse un portrait  conventionnel de la banlieue et de ses habitants. Il ne trouve pas sa place à Paris non plus, ni en Finistère où le seul remède à son spleen est de se plonger dans l’eau froide.
Ses parents froids  et taiseux sont responsables de sa maladie, mais lui qui vient de se faire jeter par sa femme est bien insuffisant avec ses propres enfants qu’il étouffe d’étreintes et oublie évidemment de leur faire faire leurs devoirs.
Il ne cesse de geindre et de le regretter et de se vautrer dans l’échec.
« … petits fonctionnaires de l'écriture comme j’en étais un moi-même n'est-ce pas, me levant le matin pour me mettre sagement à mon bureau, vivant la même vie que les autres avec la maison le garage, les courses, des enfants, les factures, tous ces petits fonctionnaires le cul sur leur chaise dans leurs maisons, leurs appartements qui se prenaient pour Hemingway ou London mais ne sortaient jamais de chez eux que pour boire des cocktails entre gens de la même espèce. . .
Je l'ai laissé dérouler son fil. Je n'avais rien à lui opposer.
Il martelait que mes livres lui avaient fait du mal, beaucoup de mal. Non pas parce que j'en étais l'auteur mais du fait de leur contenu. Mes livres et ceux de mes confrères n’aidaient nullement les gens, au contraire, ils enfonçaient les plus fragiles, les plus inaptes, ils les confortaient dans leurs humeurs les plus noires, leur maintenaient la tête sous l'eau, dans l'étang poisseux de la dépression, la vase verdâtre de la mélancolie. lls glorifiaient la tristesse et les éclopés, la défaite la désillusion, la fuite et la désertion, comme s'il était plus noble d'être de ce côté-là que de celui de la vie et de la lumière. »
C’est cela, oui.
Et dire que pendant ce temps je ne suis  toujours pas venu à  bout de « L’homme sans qualité » de Musil.

vendredi 9 novembre 2012

Jours tranquilles à Gaza. Karim Lebhour.



J’ai connu l’auteur tout petit et c’est pour cela que son livre m’est parvenu. 
Karim a gardé ses grands yeux d’enfant, ouverts aujourd’hui sur la situation que l’on sait dramatique à Gaza.
Il met en lumière une absurdité ébouriffante quand le blocus interdit l’importation de ballons de football, un sens pathétique et magnifique de la survie des habitants quand au zoo en guise de zèbre on peint des rayures à un âne.
Le titre est excellent et la chronique palpitante sur un sujet dont on a pourtant entendu parler.
Est-ce parce que je me trouvais au bord de la Méditerranée, au moment de la lecture que j’ai ressenti encore plus vivement le scandale de ces souffrances et l’indécence de la politique de l’état hébreu ?
J’avais toujours gardé une admiration pour ceux qui firent fleurir le désert mais la spirale diabolique qu’ils persistent à tracer est désespérante. Ils vident la mer.
Le correspondant de La Croix  et de RFI montre la montée du Hamas favorisée par les politiques israéliennes et la chape de plomb qui s’est installée dans cette bande de huit kilomètres de large sur quarante kilomètres de long, peuplée d’un million et demi d’habitants.
De 2007 à 2010, il s’en est creusé de tunnels à la frontière égyptienne, de la haine s’est encore vivifiée après les morts de l’opération «  plomb fondu » de 2008, du désespoir s’est amplifié.
Si le sanglant aveuglement israélien est présent à chaque page, l’incurie des pouvoirs palestiniens est patente quand les querelles de clans reflètent des pratiques politiques insensées.
Dans ce contexte désespérant le reporter préfacé - s’il vous plait - par Stéphane Hessel nous livre une série de récits  vifs où il se met en scène sans ostentation, précisant utilement les conditions de fabrication de l’information avec le rôle des « fixeurs », une correspondante qui met son foulard au moment de passer à l’antenne, ses propres excès d’optimisme.
Une telle description du quotidien quand les angles se multiplient donne de l’épaisseur à l’information trop souvent obscurcie dans les médias par des mots dévalués, des  postures péremptoires.
Les pêcheurs  gazaouis ont vu leur zone de pêche se réduire sans cesse, alors un restaurateur importe du poisson par les  tunnels creusés dans le sable.
Nous sommes au bord de la Méditerranée.
................  

jeudi 8 novembre 2012

L’art et le sacré en France au XVII° siècle dans les collections du musée de Grenoble.



Les saisies révolutionnaires vont alimenter les cimaises du musée de Grenoble et son premier conservateur Louis-Joseph Jay va se montrer particulièrement avisé en choisissant nombre de toiles remarquables.
Valérie Lagier lui a rendu hommage lors de sa deuxième conférence aux amis du musée consacrée aux œuvres françaises du XVII°.
Oui, il est question de peinture française, même si la notion de nationalité est incertaine avec des frontières mouvantes.
Le Lorrain est né en Lorraine qui n’avait alors point Paris pour capitale, Philippe de Champaigne est né à Bruxelles, Poussin passa sa vie en Italie, école de tous ceux qui font profession de peindre. Quand il n’y a plus d’ateliers en France, c’est Rubens, le flamand, qui vient pour la déco.
Ce XVII°  siècle connaît trois rois : Henri IV, Louis XIII, Louis XIV et deux régences de Marie de Médicis et Anne d’Autriche.  La période est troublée avec huit guerres de religion, alors les commandes des églises sont plus rares. Les cardinaux Richelieu et Mazarin mécènes et grands conservateurs ont le pouvoir : la noblesse et les protestants se soumettent.
La contre réforme est plus lente à se mettre en place chez nous qu’en Italie.
Les formes picturales seront moins exaltées, plus cérébrales, plus mesurées, les martyrs moins sanglants.
Un petit livret  intitulé joliment «  les couleurs du ciel », disponible au Musée, situe quelques tableaux de la collection grenobloise dans leur établissement  religieux d’origine en complément d’une exposition qui aura lieu au musée Carnavalet jusqu’au 23 février.  
Plus amateur des impressionnistes que de ces impressionnants, je regarderai  désormais avec plus d’attention ces tableaux
Claude Vignon et son Jésus parmi les docteurs a le réalisme du Caravage, avec une touche vénitienne dans les étoffes.
Jacques Blanchard, Le Titien français, a peint un Saint Jérôme émouvant.
Provenant de l'abbaye de Saint-Antoine, l’anachorète, patron des traducteurs est également remarquable avec ses jambes démesurées, peint par Georges De La Tour.
Le maître du clair obscur, réputé à son époque puis oublié, fut réhabilité grâce à un historien de l’art allemand en 1915.
Devant un majestueux paysage, un personnage se bouche le nez parmi la foule compacte lors de la résurrection de Lazare par Philippe de Champaigne dont l’Assomption de la vierge est plus retenue que celle de Rubens.
Son christ  cloué par quatre clous, et non pas trois, venant du monastère de la Grande Chartreuse témoigne de l’influence des jansénistes de Port Royal et de ses scrupules à respecter les écritures à la lettre. Saint Jean Baptiste désignant le christ « l’agneau de dieu qui ôte les péchés du monde » accompagne le courant qui prône un retour à des règles monastiques plus strictes.
Simon Vouet est le chef de la colonie française de Rome, il introduit une dimension flamboyante dans ses peintures. Les belles couleurs  du repos de la Sainte Famille se retrouvent avec Le christ apparaissant à Saint Antoine abbé tout en arrondis et drapés gracieux.
Eustache Le Sueur met en scène Marie Madeleine, souvent choisie par les peintres d’alors, au moment où elle reconnaît le christ qui lui demande de ne pas la toucher : Noli me tangere.
C’est sa reproduction qui figure en tête de compte-rendu.
Laurent de la Hyre  est fidèle au texte  lui aussi avec Les pèlerins d’Emmaüs
"... Or une fois à table avec eux, il prit le pain, dit la bénédiction, puis le rompit et Ie leur donna. Leurs yeux s'ouvrirent et ils le reconnurent... mais il avait disparu de devant eux. Et ils se dirent l'un à l'autre: « Notre cœur n’était-il pas brûlant au-dedans de nous, quand il nous parlait en chemin et qu’ 'il nous expliquait les Écritures ? »
Il est considéré comme un représentant éminent de l’atticisme (venant de l’Attique en Grèce), tout en élégance et simplicité.
Charles Le Brun,  anobli par Louis XIV, fut l’œil du roi soleil, sa Marie Madeleine à la grotte de la Sainte Baume est installée dans un magnifique paysage et les chardons ne sont pas là par hasard, ils sont le symbole de l’immortalité.
Louis Testelin est protestant, il répond aux commandes des catholiques ainsi Saint Louis soignant les malades de la peste.
 Jean Baptiste Jouvenet met en lumière, d’une façon quelque peu grandiloquente, Saint Ovide dont les reliques vont connaître un certain succès avant que des doutes soient émis quant à leur authenticité.  

mercredi 7 novembre 2012

Les pommes brayaudes.



Une recette de cuisine c’est bien plus que des patates et des tranches d’agneau, c’est de la culture et du soin pour ses invités.  
Nous sommes entre amis et la moindre bouchée n'est pas considérée comme un danger, dans un pays où manger ce n'est pas que se nourrir.
Michel a voulu honorer son auvergnate amie et lui  a mijoté depuis sa maison dans la pente un plat venu du Livradois entre Ambert et Marsac appelé « pommes brayaudes ».
La dénomination « pomme »  débarrassée de sa glèbe convenait mieux à cette attention que le vulgaire « patate » accommodé à toutes les sauces rapides.
A regarder sur internet pour cette recette, d’agneau il n’est question que  de gigot, alors que notre hôte avait disposé  dans le plat au four des tranches qui peuvent être des barons débarrassés de toute graisse, voire des côtes, au dessus de ses pommes de terre qui étaient déjà  avancées dans leur cuisson depuis vingt minutes dans un peu d’eau au dessus d’un lit d’oignons et  de subtiles échalotes. Il a retourné la viande au bout d’un quart d’heure et elle était parfaite sans apprêt, sans graisse. Il est des versions avec des lardons, du beurre du thym et  du laurier. Ne pas oublier sel et poivre et auparavant frotter le plat avec de l’ail.
Le site « Escout moi voir » précise « les brayauds sont les habitants de Riom. Leur nom provient de la "braye" ou culotte du 18° siècle que portent encore les hommes qui transportent la chasse de Saint-Amable, le 11 juin ou le Dimanche qui suit, pour la procession »