dimanche 16 septembre 2012

Albin de la Simone.



 J’ai suivi un de ses concerts à la MC2 où il avait carte blanche ; par ailleurs il devait jouer un autre soir avec des amis, proposer des films à inventer ou une sieste musicale. Cette série de chansons venait après une vingtaine d’autres de son cru qu’il avait présentées la veille au moment du débat pour les présidentielles qualifié par le jeune homme, injustement, « de concours de pets ».
Le public du petit théâtre complice de cette soirée sympathique était conquis.
Le doux chanteur  chanson française à la voix cajoleuse réserve des surprises.
Son charme ouvre parfois sur de noires visions, un pommier porte un pendu, au cœur d’un moment de solitude romantique il tombe sur « un film de boules » et   il se retrouve sur le palier quand sa porte vient de claquer. Situation ridicule qui peut virer à la catastrophe, mais reste jouable sous les sautillantes musiques synthétiques.
 « Il est vingt heures j'ai froid aux pieds
En pyjama sur le palier
Un courant d'air et tout bascule
Claquer sans clé je suis bien nul
Grosjean debout devant la porte
De mon appartement fermé
Alors qu'au feu brûle le fond
De mon dîner dans un poêlon
Aïe Aïe Aïe
Catastrophe »
Les poètes chanteurs d’à présent font preuve de plus d’humour que leurs plombants prédécesseurs, pourtant quand il rend hommage à Pierre Vassiliu, c’est dans un répertoire loin d'être frivole qu'il nous ramène :
« Mais elle a eu un seul amant
Et ne se souvient plus du tout
Du goût du baiser dans le cou
Elle me demande de l’embrasser
Je n’sais plus si c’est déplacé
Et je suis bien embarrassé
Même juste comme ça un baiser
Amour amitié
Je ne sais pas si par dépit ou par pitié
Je franchirai cet océan
Qui va de l’ami à l’amant »
Pour conclure : « etc… » conviendrait car souvent il laisse en suspend une histoire amorcée, nous laisse libre de compléter le tableau.
Suave et déséquilibrant, sucré et piquant, talentueux.

samedi 15 septembre 2012

Mammifères. Pierre Mérot.



Les titres des trois chapitres donnent le ton des 250 pages:
Gastrite érosive,
Dépôt de bilan,
Linge sale.
Tout un programme où s’illustre le lieu commun :
« on ne fait pas de  bonne littérature avec de bons sentiments ».
C’est vache à souhait : le premier  des mammifères est la mère du narrateur, celui-ci recherche dans une consommation excessive d’alcool, le liquide amniotique.
C’est imbibé de la poésie de nuits désespérées.
Les expériences amoureuses sont sans amour.
 « Vous vous mariâtes en septembre. La fête eut lieu chez vos parents naïfs comme l’art du même nom. Elle ressembla à un goûter d’enfants amélioré. Votre épouse désenchantée se tint un peu à l’écart. »
Les métiers qu’il exerce, en dilettante, dans l’édition ou l’éducation nationale, sont seulement des occasions pour des portraits sévères et drôles de nos contemporains.
Comme beaucoup d’écrivains sans illusions ( Muray, Cioran, Houellebeck…) il manie la formule définitive, à profusion :
« Une famille sans raté n’est pas vraiment une famille, car il lui manque un principe qui la conteste et lui donne sa légitimité. » 
« Le travail est l’une des causes essentielles du malheur de l’humanité, l’autre étant l’amour. »
« L’ennui est l’une des libertés majeures que Dieu a concédé aux hommes »
L’écriture tonique rend agréable la lecture de ce roman dépressif.
Ecrit en 2003, il nous venge des sirops New Age, des diapos de toutous enrubannés ou des sourires crispés des marchands de bons sentiments. Jubilatoire et expéditif.

vendredi 14 septembre 2012

«Ça mange le Bon Dieu et ça chie le diable.»



Jean Marie Rouart remet au goût du jour une expression gasconne citée par Mauriac à propos du MRP et qu’il applique, lui, au journal Marianne dont il n’a pas apprécié les copinages en littérature. Toujours la distance des paroles et des actes
La formule m’a bien plu  pour sa vigueur et je la mets en titre des mes indignations à propos des raffinés qui viennent au secours de Bernard Arnault en se pinçant le nez à la vue de la une de Libé : 
« Casse toi, riche con ! »
Quand il était pauvre, le con, ces culs serrés n’y voyaient pas de mal.
Hollande attend 30 milliards ; la fortune d’Arnault est de 32 milliards.
Où est l’indécence ?
Le sujet  est central : s’y rencontrent, la morale  qui ne s’enseigne pas qu’à l’école, la liberté de la presse, la solidarité.
Dans cette péripétie de la lutte des classes, je suis content d’être dans le camp opposé à celui choisi une fois de plus par « Le Monde » et ses dessinateurs.
Le mérite de Libération, passant outre les pressions des annonceurs est de faire revenir dans le débat national les problèmes posés par l’évasion fiscale, et de révéler tous les hypocrites qui aimaient tant se draper dans les postures patriotes et se retrouvent à barboter en fâcheuse compagnie sur les plages bondées des Caïmans.
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Dans le Canard de cette semaine:

jeudi 13 septembre 2012

Camille Claudel.



Emoustillés par le film qui fit  apparaître la  réprouvée  sous les traits d’Adjani, au delà de son maître Rodin, nous sommes partis à la recherche de Camille Claudel, mais le château de frère Paul à  Brangues était fermé aux visiteurs et  cette année le village du Nord Isère réservait son espace d’exposition à Antoine Berthet,  enfant de là bas qui inspira  Stendhal pour le personnage de Julien Sorel.
A Morestel, ville voisine, la maison Ravier était fermée le matin, nous ne pourrons vérifier la complicité du poète et de la sculptrice.
La guide du château de Longpra mentionnera la rareté des visites du diplomate à l’internée  de Montfavet.
A Saint Geoires en Valdaine au bout d’une belle allée cavalière, la  maison forte accueille des œuvres de Camille Claudel et de Rodin. Sur la petite île au milieu des champs chartrousins parmi les meubles signés Hache, la confrontation des artistes passionnés est intéressante car il s’agit plus que d’un échantillon avec 22 œuvres, sans arriver à être exhaustive.
« La petite châtelaine » est plus émouvante que bien des postures contorsionnées  mais  c’est « La valse » dans son déséquilibre qui m’a emporté. 
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Je suis allé chercher une image sur la toile, les photos n'étaient pas autorisées.

mercredi 12 septembre 2012

La part des anges. Ken Loach.



Des whiskies rares peuvent atteindre des prix astronomiques ; les films du bon Ken, eux, valent tout l’or du monde car il sait extirper parmi les engrenages les plus inéluctables, des raisons de croire en la générosité des hommes.
Je pensais assister à une rigolade et ne savais si le maître du cinéma social saurait faire.
Ce n’est pas qu’une comédie et des scènes sont particulièrement réussies sans simplisme : par exemple la confrontation avec une victime. Le personnage de l’éducateur est beau parce qu’il n’est pas  un bellâtre. Et comme une copine qui est propulsée hors de son siège dès qu’un chien se fait écraser une patte à l’écran, j’ai bondi quand une bouteille  de whisky a éclaté. De bonnes idées de scénario, des acteurs crédibles. Quand un récit hautement politique est habile c’est remarquable. Le talent  œnologique découvert pour le personnage principal n’est pas une révélation miraculeuse, il entre dans un processus  optimiste de remise à flot où le murissement ne vaut pas seulement pour le malt. Un enfant peut faire sortir de l’enfance et l’amour lorsqu’il  n’est pas aveugle peut donner un coup de fouet  décisif sans qu’il y ait tourbe à rajouter.
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La  scottish photo est de Margaux
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mardi 11 septembre 2012

Le défilé ouvre la biennale de la danse. Lyon 2012.



Je vais éviter de me répéter puisque figurent sur ce blog des articles et des photos sur les défilés 2008 et 2010.
Quand la culture populaire rencontre les créateurs, l’enrichissement mutuel allume bien des regards : l’investissement des 4000 personnes de tous âges, de toutes conditions, de tous les tours de taille, qui avancent rue de La « Ré » est toujours aussi tangible et réconfortant.
Parmi les milliers de spectateurs, beaucoup se sont retrouvés pour la Tarentelle qui clôturait la journée et ouvrait une biennale où 15 créations mondiales seront accueillies.
Cette année, c’était la neuvième édition sur le thème « Entre ciel et terre ».
Dominique Hervieux est directrice artistique pour la première fois avec Mourad Merzouki qui ouvrait et fermait la marche, un ton au dessus des autres groupes.
Il a présenté aussi, place Bellecour,  un extrait de « Récital », son spectacle fondateur.
Des lapins, des coccinelles, des flamants roses en ballons brillaient au dessus des groupes de ceux qui assuraient la ponctuation entre les ensembles de danseurs et musiciens de Rillieux, Saint Priest, Chambéry, Villefontaine, Villeurbanne…
Tellement étourdi par le kaléidoscope des images, c’est au hasard d’une photographie que j’ai découvert Keith Harring sur des tambours: ainsi bien des allusions sont passées très vite, mais pas le plaisir d’une ivresse quand les batucadas accélèrent les « pace maker ».
Avions et hôtesses de l’air, acrobates, rêveurs, nous ont fait décoller.
Un postier avait accroché des chevaux légers sur son porte-bagages, un potier derrière des plastiques nous rappelait que la glaise pouvait être créative, un baobab en  bois de cagette se promenait et les brouettes dansaient. Un beau dimanche en ville.
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Si la photographie des reflets vous plait vous pouvez voter sur le site de la biennale. http://www.biennaledeladanse.com/fr/participez/concours-defile/votez.html?page=3
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lundi 10 septembre 2012

Monsieur Lazhar. Philippe Falardeau.



Fellag qu’on retrouve avec plaisir dans ce film canadien joue le rôle d’un instituteur venant remplacer une enseignante qui s’est suicidée dans sa classe.
Il a lui-même vécu un drame et peut aider les élèves traumatisés à chasser leur culpabilité.
Il se permet de parler plus librement que les collègues qui ont connu la désespérée.
Des questions pédagogiques sont posées avec justesse : la place de l’éducatif et des apprentissages, l’exotisme, la langue française,
« les enfants sont-ils devenus des produits radio actifs qu’on ne peut plus toucher ? »
C’est réjouissant de voir le natif  de Tizi Ouzou défendant une  belle langue classique dans la belle province.
Réfugié politique au Canada, le pseudo instituteur  va lui aussi guérir un peu de ses blessures.
Les acteurs sont authentiques et l’expérience caricaturale de la série « l’Instit » rappelle que ce n’est pas évident de filmer la vie d’une école, là c’est réussi.