vendredi 6 octobre 2017

Avec Edmond Maire.

En réaction – décidément - à des avis sommaires parus sur Facebook après la mort d’Edmond Maire, je reviens sur quelques années de militantisme,  pour aller au-delà des R.I.P. convenus, et m’insurger contre les habituels trolls, desquels il ne faut pas attendre un quelconque délai de décence.
Histoire aussi de marcher contre l’air du temps : Hervé Hamon, l’écrivain, non le fugace ministre, relevait que Libé  avait consacré 6 lignes à l’ancien secrétaire de la CFDT alors que Pierre Bergé avait bénéficié de 6 pages ; j’avais eu le même choc pour le laconisme du journal, qui fut emblématique, à la mort de Léo Ferré.
Dans les années 70, depuis les Terres Froides du Dauphiné, aux collines s’inventant du soleil (« Summerhill »), mon enfance venait de changer de camp : le potache se trouvait en face d’élèves.  
L’école m’avait fait monter sur une estrade que nous nous sommes empressés de démonter. Il en était de même de tant d’institutions remises en cause : ainsi  le tutélaire Syndicat des instituteurs avait excité d’emblée nos fibres contestataires.
La CFDT dont le Syndicat Général de l’Education Nationale jouxtait les communaux, la chimie, les métaux… était hospitalière. Quand Lip donnait alors du corps aux rêves d’autogestion, la forge de la « deuxième gauche » tenait le haut de l’affiche.
Le corporatisme nous semblait le péché majeur, attentatoire à la fraternité, même si nous avions appris que quelques cotisations exploitant des motivations singulières ne signifiait pas forcément adhésion aux valeurs d’une gauche prophétique.
Dans les salles enfumées des Bourses du Travail, nous étions fervents, cathos ou gauchos, qui s’essayaient à faire vivre une démocratie ne devant surtout pas reproduire les mœurs rigides et magouillardes de nos compères stals ou trotsks.
« On a beau fouiller les quatre horizons
 Rien n'est plus poétique que l'autogestion » Font&Val
 Des suites de la déconfessionnalisation à l’autogestion, des comités de soldats aux cabinets ministériels, la négociation était désormais la pierre angulaire du progrès social : ces années furent passionnantes. Solidarnosc.
En privilégiant le contrat sur la loi, les protestataires auraient suivi une filiation protestante d’une « gauche américaine ». En tous cas dans la diversité syndicale, l’apport de la CFDT a été fondamental : en «  donnant plus à ceux qui ont moins », c’est sur notre partition que ce sont installées les ZEP.
La recherche de nouvelles pratiques où se rejoignaient pédagogie et politique, syndicalisme, était affaire de praticiens. Mais les perroquets ministériels et la perruche ont eu raison de ma foi. A être mis à toutes les sauces, tant de mots ont perdu toute leur sève : « projets » et « citoyens » sont épuisés. Parce que nous ne supportions plus la remise en cause de l’indépendance syndicale par le PS, j’accompagnais une poignée de dissidents, mais quand la FEN eut éclatée, elle aussi, chacun revint dans sa chapelle ou plutôt dans un placard de la sacristie : le PAS (Pour une alternative Syndicale) fut une impasse. Je quittais l’active.
Les élèves d’autrefois n’avaient pas la parole, ils eurent bien besoin de textes libres et de « Bibliothèque du Travail » ; devenus « enfants roi », ils n’ont pas trouvé grand monde en face.
Dans les monuments républicains, où portes et Windows ont été ouverts en même temps, les courants d’air ont vidé les greniers de toute mémoire : le présent épisode en est l’illustration.
Je me suis « recentré » en suivant ma centrale, derrière les sinuosités d’un Rocard enseveli il y a peu sous les hommages. Pour les obsèques de son compagnon en intelligence et en courage, Edmond Maire a prononcé son dernier discours.
Son fils Jacques vient d’être élu député de la République En Marche.

1 commentaire:

  1. Merci, Guy, même si je ne comprends pas tout...
    Je relève que Pierre Bergé a eu droit à six pages dans Libé, et Léo Ferré, et Edmond Maire, quelques lignes...
    C'est sûr, c'est en comparant qu'on apprend à penser...

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