A 8h, la Toyota retenue par Phoenix Agency s’arrête devant l’hôtel à l’heure précise, conduite par un costaud rigolard, parlant parfaitement l’anglais. Tout au long du trajet ce n’est pas ma virtuosité en anglais qui va permettre la conversation, mais le football langue universelle. "Excuse me boss, vous avez un texto " inattendu, sorti de son téléphone s’invite dans le dialogue. La plaine diffère des paysages vietnamiens. Les rizières sont parsemées de palmiers très hauts dont les fruits sont utilisés pour leur eau et leur sucre afin de fabriquer du vin de palme. Les maisons bleues ou grises, hautes sur pattes avec leurs pilotis sont construites en bois, souvent, accessibles par des escaliers raides. Elles ne possèdent ni eau courante, ni l’électricité. Les champs n’en peuvent plus d’absorber toute cette pluie qui s’abat avec violence par intermittence. La route ressemble parfois à un bourbier. Nous doublons des charrettes tirées par deux bœufs ou par des petits chevaux notamment pour le transport du bois et des meubles.
Nous faisons une pause à mi-chemin dans la ville de Kompong Thom. Le chauffeur gare sa voiture pratiquement dans l’entrée d’un restaurant tandis que des employés se précipitent pour nous ouvrir les portières, et soulever le capot afin que le moteur refroidisse et protéger le pare-brises à l’aide d’un carton. Il semble que l’endroit soit incontournable pour les voyageurs comme un relais de diligences, car plusieurs cars et voitures stationnent devant l’établissement bien rempli.
Lorsque nous repartons, le chauffeur indique une route non goudronnée qui mène vers un temple et la frontière thaïlandaise. Il nous informe d’incidents militaires entre les deux pays qui interdisent la visite aux touristes.Nous arrivons à Siem Reap vers 13h sous la pluie. Nous nous engageons dans une ruelle qui coupe en plein milieu la concession d’un temple bordé d’un cimetière, la caisse de la voiture racle sur un « gendarme couché ». Peu après nous retrouvons la route et nous nous arrêtons sans vraiment apercevoir l’hôtel. C’est un lodge noyé dans la verdure avec des passerelles en caillebotis et c’est encore l’enchantement. Nous sommes accueillis par notre guide francophone qui en signe de bienvenue m’offre un petit tableau et un bouquet blanc ravissant à base de lotus à mes deux femmes. Nous prenons rendez-vous pour 8h demain et nous découvrons nos chambres de bon goût dans des petites maisons cachées par l’abondante végétation tropicale où nous profitons de la piscine. Lit à moustiquaire, carrelage rouge brique séparé par des lattes de bois, murs blancs et volets en bois sombre à claire voie assortis aux meubles ; salle de bain originale avec un pot en terre vernissé en guise de lavabo, une petite terrasse avec deux chaises longues en bois et ventilateur.
Nous nous arrachons à ce petit paradis et longeons la rivière sur l’autre rive à la recherche d’une officine Internet. Celle que nous trouvons sert aussi de bar et semble t-il peut être aussi de coiffeur. Nous sommes à l’abri d’une averse violente qui ricoche sur le bitume. Nous pouvons remettre le nez dehors assez rapidement et gagnons le marché couvert à quelques pas de là. Il ne nous faut pas longtemps pour dépenser des sous en écharpes, mobile, et bronzes dans les échoppes de souvenirs. Les bijoutiers éclairent leurs lampes à notre passage et les éteignent dans notre dos. Sous le même toit, les fruits et légumes, les viandes et les poissons, les insectes grillés et les restaurants s’étalent sur les tables autour des marchands assis en tailleur à la même hauteur. Il règne une impression de fraîcheur et de propreté dans ce marché ;
Nous trainons un moment avant de prendre le chemin du retour en stoppant devant une partie de badminton au pied et les marchandes d’orchidées au bord de la rivière. Près de la bifurcation, des joueurs de billes poursuivent leur partie malgré la nuit tombante. Nous traversons le territoire du temple à la lampe de poche.
Nous ressortons pour dîner dans un restau au bord de la rivière, grand hangar fréquenté par des cambodgiens et à moitié prix de ceux pratiqués au centre. Les plats ont le mérite de l’originalité. 8h 30 : vite, allons profiter de nos chambres !
mercredi 31 mars 2010
mardi 30 mars 2010
De Spar en Spar
A cette terrasse du bistrot près du Spar, je ne m’y suis jamais assise.
Une femme de la cité, attablée seule dans l’unique troquet à des kilomètres à la ronde, c’est suspect. Vous imaginez les regards hostiles des ménagères de cinquante ans plus ou moins, les ragots de porte en porte dans les coursives à courants d’air, les yeux vicelards des mecs. Une femme seule à une terrasse de l’unique rade à des kilomètres à la ronde, c’est louche, ça fait désordre, c’est de la provocation, surtout si la dame est rousse, qu’elle fume et qu’elle croise les jambes, haut. C’est pas mon portrait, je m’habille en sac pour m’épargner le viol. Y a des pervers qui aiment se faire des mamies : remarquez l’inverse est juste aussi.
Alors chaque mardi, mon jour de ménagèr, je ralentis la marche devant la terrasse minuscule pour vérifier s’il est là, devant son café, toujours sur la même chaise, les yeux dans le vague. Il a les mains fines, une barbiche à la Ho Chi Minh, une calvitie bien avancée. S’il pleut, il s’abrite sous un parapluie, ce qui doit énerver la tenancière, j’imagine, vu qu’elle ne déploie pas le store quand il pleut. Se mouiller pour deux euros !
Le chien de la patronne, un caniche grisonnant mal peigné ou pas peigné du tout, un clébard inoffensif, s’installe aux pieds de l’inconnu. Il sommeille, le museau sur les vieilles baskets de ce régulier en poussant des soupirs émouvants. Lonely dog for a lonely man !
Il y a ce va-et-vient des clients, leurs sacs Carrefour ou Picard, gonflés de bonnes intentions écologiques et équitables. J’entre au Spar. J’aime les Spar qui offrent moins de tentations que les hypermarchés, sont moins fatigants pour les quilles. De surcroît les proprios connaissent mes habitudes, mes préférences : ils me sourient.
Une de mes copines, un peu foldingue, ce qui fait en grande partie le plaisir de la fréquenter - elle s’appelle Andrée - adore se balader de Spar en Spar quand elle est en congés.
Elle n’achète rien, sort la tête haute, sourire énigmatique, je dirais plutôt sardonique, moi ! Elle préfère, dit-elle, trouver sa pitance aux marchés quotidiens de notre bonne commune : ce qui marche bien chez nous ce sont les marchés ! Quant au reste, c’est à chacun d’en décider !
Pourquoi, tu n’achètes rien ? C’est mon luxe, me répond-elle, ma séance de résistance à la tentation, l’exercice de ma liberté de non consommatrice de mal bouffe. Tu n’imagines pas combien je me sens libre, forte, glorieuse quand je sors d’une supérette, ou d’un hyper, les mains vides ! La caissière m’interroge du regard, (quitte à faire la queue, je ne passe jamais par la sortie « sans achats ») donc, je lui présente les paumes de mes mains, et je ris le plus bêtement possible. Ma caissière préférée, celle que je harcèle chaque semaine chez Merlin le pas enchanteur, me sourit maintenant en vissant son index sur la tempe. Elle a de jolies fossettes qui me mettent la pèche !
Andrée fait sa tournée à bicyclette. S’exercer dans les trois Spar et les dizaines de grandes surfaces de la zone, ça lui prend la journée.
Il n’y a aucune relation entre l’homme seul et Andrée, du moins à ma connaissance. Ce qui fait de cette histoire un rébus !
Vous pourriez imaginer une idylle intéressante entre ces deux-là, bien faits pour s’entendre, à première vue. Il n’entre jamais dans le Spar ; elle en sort sans avoir consommé. Comme je ne fréquente le commercial que le mardi et Andrée ses jours de congés très aléatoires, mon enquête va prendre beaucoup de temps. J’ai bien autre chose à faire ! Pour être honnête, je n’ai rien à faire.
Désormais, je me poste entre 10 et 11 heures derrière la camionnette du Spar pour les surveiller, ces potentiels tourtereaux. Epier les gens, c’est plus instructif que de faire des confitures ou du tricot : la journée prend du sens, les rêves se nourrissent.
Vous objecterez que je ne suis pas logique, que je patauge dans la contradiction et que c’est énervant pour les personnes armées de références classiques. C’est ainsi.
En général je m’autorise ce que je m’interdis, jamais l’inverse. « Je » étant un autre, cela ne pose aucune difficulté.
D’abord il faut résoudre ce rébus d’une manière ou d’une autre, ensuite la logique est ennemie du vivant ! J’ai même envie de dire qu’elle est son pire ennemi !
Je suis en vigilance, imper gris, un tic à l’oeil gauche pour me fondre dans le béton. De ma place je vois le Spar et la terrasse du bistrot. Lundi, rien. Mardi, rien : Je fais mes courses. Mercredi, rien. Normal Andrée fait son marché.
Vendredi, c’est veine et déveine ! Andrée sort du Spar, les mains vides, la tête haute, sourire sardonique. Prévu.
Il y a un attroupement à la terrasse du bistrot. Andrée enfourche son vélo et file en sifflant, indifférente. Les obsessionnels n’ont pas de cœur… Je m’approche. La patronne, assise à sa terrasse, pleure toutes les larmes de son corps. Expression un peu osée, non ? Des soubresauts agitent son gravissime décolleté. Elle a les pieds dans le caniveau, une chaussure en errance, les chevilles gonflées des fortes femmes de bar toujours debout.
- Je l’ai vu. C’est lui qui m’a enlevé mon Titi. Il a profité des cinq minutes que j’ai passées au Spar pour me l’enlever, mon Titi chéri. Ah ! L’hypocrite ! Le salaud ! Et ce chien ! Pourquoi il s’est laissé kidnapper, hein ? L’ingrat !
Ainsi la vie… Enigmes insolubles, même dans le café.
Marie Treize
-------------------------------------------------------------------------------------
Remplir les sacs… mais aussi les vider.
Marie Treize, alias Philomène, alias Marie-Thérèse Jacquet
a épuisé sa réserve de nouvelles courtes. Bien désolée de ne plus vous faire
le petit coucou du mardi sur le blog de Guy, un lieu bien famé (ou femmé ?)
Si vous souhaitez lire mes nouvelles longues et quelques autres non éditées sur ce blog vous pouvez acquérir « Allumez le four et autres récits… » aux Editions Alzieu
1 rue du Moulin au Fontanil.
Ci dessous un bon de souscription pour ce livre vendu 13 euros jusqu’au 15 avril.
Merci à vous.
.....................................................................................
Bon de souscription
Nom :
Prénom
Adresse :
Désire recevoir… exemplaire(s) du livre :
« Allumez le four et autres récits… »
de Marie-Thérèse Jacquet
(120 pages environ : 24 nouvelles )
Prix de souscription : 13 euros l’un valable jusqu’au 15 avril 2010
Parution dans un délai maximum de deux mois après la fin de la souscription
Prix public 15 euros
Ci-joint un chèque de …………….. correspondant au règlement de ….. exemplaires
Lettres et Règlement
Editions Alzieu La Maison du Livre : 1 bis rue du Moulin Le Fontanil Cornillon Tel : 04 76 75 33 76
e.mail : admin@editions-alzieu.com
« Si elle sait peindre dans les couleurs subtiles de l’aquarelle, son écriture emprunte à toutes les ressources des palettes de la mémoire. Du fantastique vient enchanter une réalité âpre qui recèle aussi bien des tendresses. Sous le sourire et les mots choisis qui pétillent, elle exprime la fidélité à ses origines, quand le four s’ouvrait pour offrir le pain essentiel, chaud et parfumé. Elle nous fait voyager du Marais Poitevin à l’île de Batz en passant par la Mauritanie…
Une documentation précise permet de tracer des univers variés avec une nature très présente où les herbes révèlent leurs mystères et les oiseaux leurs rêves. Humour, sensualité, plaisir de l’écriture. Et quand elle reçoit un certain monsieur Dieu, elle hésite à lui faire écouter la Symphonie Liturgique d’Arthur Honegger qui serait trop marquée. Aucune faute de goût. »
Une femme de la cité, attablée seule dans l’unique troquet à des kilomètres à la ronde, c’est suspect. Vous imaginez les regards hostiles des ménagères de cinquante ans plus ou moins, les ragots de porte en porte dans les coursives à courants d’air, les yeux vicelards des mecs. Une femme seule à une terrasse de l’unique rade à des kilomètres à la ronde, c’est louche, ça fait désordre, c’est de la provocation, surtout si la dame est rousse, qu’elle fume et qu’elle croise les jambes, haut. C’est pas mon portrait, je m’habille en sac pour m’épargner le viol. Y a des pervers qui aiment se faire des mamies : remarquez l’inverse est juste aussi.
Alors chaque mardi, mon jour de ménagèr, je ralentis la marche devant la terrasse minuscule pour vérifier s’il est là, devant son café, toujours sur la même chaise, les yeux dans le vague. Il a les mains fines, une barbiche à la Ho Chi Minh, une calvitie bien avancée. S’il pleut, il s’abrite sous un parapluie, ce qui doit énerver la tenancière, j’imagine, vu qu’elle ne déploie pas le store quand il pleut. Se mouiller pour deux euros !
Le chien de la patronne, un caniche grisonnant mal peigné ou pas peigné du tout, un clébard inoffensif, s’installe aux pieds de l’inconnu. Il sommeille, le museau sur les vieilles baskets de ce régulier en poussant des soupirs émouvants. Lonely dog for a lonely man !
Il y a ce va-et-vient des clients, leurs sacs Carrefour ou Picard, gonflés de bonnes intentions écologiques et équitables. J’entre au Spar. J’aime les Spar qui offrent moins de tentations que les hypermarchés, sont moins fatigants pour les quilles. De surcroît les proprios connaissent mes habitudes, mes préférences : ils me sourient.
Une de mes copines, un peu foldingue, ce qui fait en grande partie le plaisir de la fréquenter - elle s’appelle Andrée - adore se balader de Spar en Spar quand elle est en congés.
Elle n’achète rien, sort la tête haute, sourire énigmatique, je dirais plutôt sardonique, moi ! Elle préfère, dit-elle, trouver sa pitance aux marchés quotidiens de notre bonne commune : ce qui marche bien chez nous ce sont les marchés ! Quant au reste, c’est à chacun d’en décider !
Pourquoi, tu n’achètes rien ? C’est mon luxe, me répond-elle, ma séance de résistance à la tentation, l’exercice de ma liberté de non consommatrice de mal bouffe. Tu n’imagines pas combien je me sens libre, forte, glorieuse quand je sors d’une supérette, ou d’un hyper, les mains vides ! La caissière m’interroge du regard, (quitte à faire la queue, je ne passe jamais par la sortie « sans achats ») donc, je lui présente les paumes de mes mains, et je ris le plus bêtement possible. Ma caissière préférée, celle que je harcèle chaque semaine chez Merlin le pas enchanteur, me sourit maintenant en vissant son index sur la tempe. Elle a de jolies fossettes qui me mettent la pèche !
Andrée fait sa tournée à bicyclette. S’exercer dans les trois Spar et les dizaines de grandes surfaces de la zone, ça lui prend la journée.
Il n’y a aucune relation entre l’homme seul et Andrée, du moins à ma connaissance. Ce qui fait de cette histoire un rébus !
Vous pourriez imaginer une idylle intéressante entre ces deux-là, bien faits pour s’entendre, à première vue. Il n’entre jamais dans le Spar ; elle en sort sans avoir consommé. Comme je ne fréquente le commercial que le mardi et Andrée ses jours de congés très aléatoires, mon enquête va prendre beaucoup de temps. J’ai bien autre chose à faire ! Pour être honnête, je n’ai rien à faire.
Désormais, je me poste entre 10 et 11 heures derrière la camionnette du Spar pour les surveiller, ces potentiels tourtereaux. Epier les gens, c’est plus instructif que de faire des confitures ou du tricot : la journée prend du sens, les rêves se nourrissent.
Vous objecterez que je ne suis pas logique, que je patauge dans la contradiction et que c’est énervant pour les personnes armées de références classiques. C’est ainsi.
En général je m’autorise ce que je m’interdis, jamais l’inverse. « Je » étant un autre, cela ne pose aucune difficulté.
D’abord il faut résoudre ce rébus d’une manière ou d’une autre, ensuite la logique est ennemie du vivant ! J’ai même envie de dire qu’elle est son pire ennemi !
Je suis en vigilance, imper gris, un tic à l’oeil gauche pour me fondre dans le béton. De ma place je vois le Spar et la terrasse du bistrot. Lundi, rien. Mardi, rien : Je fais mes courses. Mercredi, rien. Normal Andrée fait son marché.
Vendredi, c’est veine et déveine ! Andrée sort du Spar, les mains vides, la tête haute, sourire sardonique. Prévu.
Il y a un attroupement à la terrasse du bistrot. Andrée enfourche son vélo et file en sifflant, indifférente. Les obsessionnels n’ont pas de cœur… Je m’approche. La patronne, assise à sa terrasse, pleure toutes les larmes de son corps. Expression un peu osée, non ? Des soubresauts agitent son gravissime décolleté. Elle a les pieds dans le caniveau, une chaussure en errance, les chevilles gonflées des fortes femmes de bar toujours debout.
- Je l’ai vu. C’est lui qui m’a enlevé mon Titi. Il a profité des cinq minutes que j’ai passées au Spar pour me l’enlever, mon Titi chéri. Ah ! L’hypocrite ! Le salaud ! Et ce chien ! Pourquoi il s’est laissé kidnapper, hein ? L’ingrat !
Ainsi la vie… Enigmes insolubles, même dans le café.
Marie Treize
-------------------------------------------------------------------------------------
Remplir les sacs… mais aussi les vider.
Marie Treize, alias Philomène, alias Marie-Thérèse Jacquet
a épuisé sa réserve de nouvelles courtes. Bien désolée de ne plus vous faire
le petit coucou du mardi sur le blog de Guy, un lieu bien famé (ou femmé ?)
Si vous souhaitez lire mes nouvelles longues et quelques autres non éditées sur ce blog vous pouvez acquérir « Allumez le four et autres récits… » aux Editions Alzieu
1 rue du Moulin au Fontanil.
Ci dessous un bon de souscription pour ce livre vendu 13 euros jusqu’au 15 avril.
Merci à vous.
.....................................................................................
Bon de souscription
Nom :
Prénom
Adresse :
Désire recevoir… exemplaire(s) du livre :
« Allumez le four et autres récits… »
de Marie-Thérèse Jacquet
(120 pages environ : 24 nouvelles )
Prix de souscription : 13 euros l’un valable jusqu’au 15 avril 2010
Parution dans un délai maximum de deux mois après la fin de la souscription
Prix public 15 euros
Ci-joint un chèque de …………….. correspondant au règlement de ….. exemplaires
Lettres et Règlement
Editions Alzieu La Maison du Livre : 1 bis rue du Moulin Le Fontanil Cornillon Tel : 04 76 75 33 76
e.mail : admin@editions-alzieu.com
« Si elle sait peindre dans les couleurs subtiles de l’aquarelle, son écriture emprunte à toutes les ressources des palettes de la mémoire. Du fantastique vient enchanter une réalité âpre qui recèle aussi bien des tendresses. Sous le sourire et les mots choisis qui pétillent, elle exprime la fidélité à ses origines, quand le four s’ouvrait pour offrir le pain essentiel, chaud et parfumé. Elle nous fait voyager du Marais Poitevin à l’île de Batz en passant par la Mauritanie…
Une documentation précise permet de tracer des univers variés avec une nature très présente où les herbes révèlent leurs mystères et les oiseaux leurs rêves. Humour, sensualité, plaisir de l’écriture. Et quand elle reçoit un certain monsieur Dieu, elle hésite à lui faire écouter la Symphonie Liturgique d’Arthur Honegger qui serait trop marquée. Aucune faute de goût. »
lundi 29 mars 2010
A serious man
Les frères Coen savent raconter des histoires, mais je me suis dit que je n’avais pas toutes les clefs des allusions à la culture juive pour expliquer leur pessimisme insistant sur l’absurdité de la vie. Tout se détraque autour du professeur qui essaie de faire de son mieux. Les rabbins insuffisants ne vont pas lui être d’un grand secours, rien décidément ne peut aller contre des évènements toujours défavorables. La tartine tombe inexorablement du côté du beurre. Alors sourire face à la fatalité.
dimanche 28 mars 2010
Boubacar Traoré
En allant au concert de Boubacar Traoré, je retournais vers une contrée éloignée dans ma mémoire où les terres sont rouges et les musiques noires. A la MC2, mon voisin remontait le Niger où nous avions coulé des heures fortes avec ce blues malien qui nous a embarqués. La mélancolie accrochée à des rythmes dansants, accompagne nos voyages, notre vie.
Le guitariste pourrait nous jouer sa chanson toute la nuit, accompagné par des claquettes des mains sur une calebasse et un harmonica qui pulse bien dans ce trio. La foule de l’auditorium était debout. Il manquait un papier avec la traduction des paroles des chansons surtout que celui qui accompagnait les réveils radiophonique de Bamako, « Kar Kar » (casser casser), est passé de la notoriété à l’oubli à cause de son engagement pour l’indépendance du Mali. Cette musique, pourtant, qui mélange douceur et douleur, nous a enivrés.
Le guitariste pourrait nous jouer sa chanson toute la nuit, accompagné par des claquettes des mains sur une calebasse et un harmonica qui pulse bien dans ce trio. La foule de l’auditorium était debout. Il manquait un papier avec la traduction des paroles des chansons surtout que celui qui accompagnait les réveils radiophonique de Bamako, « Kar Kar » (casser casser), est passé de la notoriété à l’oubli à cause de son engagement pour l’indépendance du Mali. Cette musique, pourtant, qui mélange douceur et douleur, nous a enivrés.
samedi 27 mars 2010
Gauche à Saint Egrève : la gestation.
« Coopérative » : revenu du fond des âges politique et pédagogique, le mot redevient tendance :
version ordinateurs au PS (la « coopol » réseau social)
et avec Cohn Bendit dans son appel du 22 mars 2010 qui n’a pas suscité beaucoup d’échos.
Dans notre commune où la gauche rassemble 64 % de suffrages aux régionales, nous sommes minoritaires au niveau municipal depuis belle lurette. Nous essayons, à plusieurs, de résoudre cette énigme.
Nous avons cherché sur le plan associatif à fédérer localement les énergies
mais « Réussir Ensemble » n’a pas réussi.
Nous cherchons de nouveaux dispositifs car « la politique ne prend sens que depuis une certaine configuration de la vie sociale » ( Bruno Karsenti),
Un travail a été possible "tous ensemble" à la région.
Que ferons-nous ?
Une plate-forme pour confronter des projets ?
Une estrade pour faire entendre nos voix ?
Une scène où Cassandre donnerait la réplique à Narcisse ?
Un lieu commun pour les perroquets d’espèce papamadi ?
Un cercle pour tous ceux qui ont perdu leurs cartes ?
Un terrain d’entraînement à la démocratie ?
Un club de réflexion ?
Un pont entre associations ?
Un jardin, pour le temps nécessaire aux éclosions, et les forêts de métaphores, même si « l’heure de la fermeture a sonné dans les jardins de l’occident » Cyrill Connolly ?
Un forum pour se donner de l’aire ?
Une allée vers la Métro ?
Une île en Utopie?
Un « machin » en trop ?
Une rocade qui contourne les conformismes ?
Un bûcher des vanités où d’impénitents grognons grognent ?
Un sas de décontamination pour des personnalités partantes pour de nouvelles aventures, un trampoline ?
Un champ d’échange, d’expériences, d’idées ?
Un mouvement modeste ?
Une association ?
Des citoyens ?
Un interface que les partis chercheraient à débrancher car ils seraient, eux, les seuls lieux légitimes de négociation et de validation pour une lutte des places ?
Un espace d’expression, de propositions, où la politique reviendrait à sa définition originelle quand il est question des affaires de la cité ?
J’ai mêlé des intentions nobles et des risques déjà éprouvés. J’aurai aimé encore livrer quelques belles citations mais je reviens abasourdi de ma rencontre avec un converti de fraîche date aux plaisirs du cumul des mandats qui me reproche de trop prendre les mots au pied de la lettre ; alors j’éviterai de me draper dans des phrases trop jolies. Mais je continue à croire aux mots et à la noblesse de l’action politique qui est de faire - d’essayer- de faire coller les actes aux mots.
Dans cette énumération pourtant contrastée qui se hasarde à échapper à la naïveté, je n’ai à aucun moment mentionné lieu de conformisme, d’obéissance, de flagornerie, de trahison, de manque de respect.
« Coopérative » me semble aller pas mal, qui verrait un rouge trinquer d’un verre de rosé, un lecteur du Monde Diplo causer avec un abonné du Dauphiné Libéré, un de Rochepleine avec une de La Monta.
....................................................................................
Petit supplément made in ATTAC : « On veut persuader l’opinion que le coût du travail est un frein à l’emploi, alors que le principal obstacle est le coût du capital, c'est-à-dire le coût que le capital impose à la société en terme de rémunération des actionnaires et l’accroissement des inégalités. »J.M. Arribey.
version ordinateurs au PS (la « coopol » réseau social)
et avec Cohn Bendit dans son appel du 22 mars 2010 qui n’a pas suscité beaucoup d’échos.
Dans notre commune où la gauche rassemble 64 % de suffrages aux régionales, nous sommes minoritaires au niveau municipal depuis belle lurette. Nous essayons, à plusieurs, de résoudre cette énigme.
Nous avons cherché sur le plan associatif à fédérer localement les énergies
mais « Réussir Ensemble » n’a pas réussi.
Nous cherchons de nouveaux dispositifs car « la politique ne prend sens que depuis une certaine configuration de la vie sociale » ( Bruno Karsenti),
Un travail a été possible "tous ensemble" à la région.
Que ferons-nous ?
Une plate-forme pour confronter des projets ?
Une estrade pour faire entendre nos voix ?
Une scène où Cassandre donnerait la réplique à Narcisse ?
Un lieu commun pour les perroquets d’espèce papamadi ?
Un cercle pour tous ceux qui ont perdu leurs cartes ?
Un terrain d’entraînement à la démocratie ?
Un club de réflexion ?
Un pont entre associations ?
Un jardin, pour le temps nécessaire aux éclosions, et les forêts de métaphores, même si « l’heure de la fermeture a sonné dans les jardins de l’occident » Cyrill Connolly ?
Un forum pour se donner de l’aire ?
Une allée vers la Métro ?
Une île en Utopie?
Un « machin » en trop ?
Une rocade qui contourne les conformismes ?
Un bûcher des vanités où d’impénitents grognons grognent ?
Un sas de décontamination pour des personnalités partantes pour de nouvelles aventures, un trampoline ?
Un champ d’échange, d’expériences, d’idées ?
Un mouvement modeste ?
Une association ?
Des citoyens ?
Un interface que les partis chercheraient à débrancher car ils seraient, eux, les seuls lieux légitimes de négociation et de validation pour une lutte des places ?
Un espace d’expression, de propositions, où la politique reviendrait à sa définition originelle quand il est question des affaires de la cité ?
J’ai mêlé des intentions nobles et des risques déjà éprouvés. J’aurai aimé encore livrer quelques belles citations mais je reviens abasourdi de ma rencontre avec un converti de fraîche date aux plaisirs du cumul des mandats qui me reproche de trop prendre les mots au pied de la lettre ; alors j’éviterai de me draper dans des phrases trop jolies. Mais je continue à croire aux mots et à la noblesse de l’action politique qui est de faire - d’essayer- de faire coller les actes aux mots.
Dans cette énumération pourtant contrastée qui se hasarde à échapper à la naïveté, je n’ai à aucun moment mentionné lieu de conformisme, d’obéissance, de flagornerie, de trahison, de manque de respect.
« Coopérative » me semble aller pas mal, qui verrait un rouge trinquer d’un verre de rosé, un lecteur du Monde Diplo causer avec un abonné du Dauphiné Libéré, un de Rochepleine avec une de La Monta.
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Petit supplément made in ATTAC : « On veut persuader l’opinion que le coût du travail est un frein à l’emploi, alors que le principal obstacle est le coût du capital, c'est-à-dire le coût que le capital impose à la société en terme de rémunération des actionnaires et l’accroissement des inégalités. »J.M. Arribey.
vendredi 26 mars 2010
Reportages
A la librairie du square, j’ai ramassé machinalement sur le comptoir une brochure éditée par leur soin. Malheur à moi ! Ce recueil d’une centaine de pages distribué gratuitement va élever gravement la montagne des livres que je souhaiterais lire. En effet c’est une cohorte d’écrivains qui parlent d’autres écrivains et donnent souvent envie de lire leurs productions conjointes. Ce panorama de la littérature de reportage convie bien sûr des noms tellement connus que leur notoriété m’avait masqué leurs livres : Londres, Mac Orlan ; d’autres que j’ai tant aimé dont il me reste à découvrir tant de pages évoquées avec talent par Tangui Viel pour Jean Rollin ou Briatte avec Bowles. Saviano l’auteur solitaire de Gomorra ou Anna Politkovskaia assassinée le jour de l’anniversaire de Poutine, ont payé de leur liberté et de leur vie pour illustrer cette phrase d’Orwell : « c’est toujours là où je n’avais pas de visée politique que j’ai écrit des livres sans vie ». Et pourtant brûle toujours l’espoir que les mots écrits rendront ce monde moins brutal. Même si comme l’écrit Jean Paul Mari à propos de Bao Ninh : « Un gamin est parti se battre autrefois, le but semblait clair, la mort héroïque et bienvenue. Il est revenu et la paix ne ressemble à rien. Ceux à qui il a offert un futur le regardent comme un objet inutile, désuet, un jouet cassé. » Ou cette citation de Sainte Thérèse D’Avila au détour de l’article consacré à Truman Capote « il y a plus de larmes versées sur les prières exaucées que sur celles qui ne le sont pas ». London Jack, Kessel, Leroux Gaston, Simenon, Cendrars et ce Werth à qui fut dédié « Le petit prince » et Colette et John Berger si vigoureux, à revoir, et Anne Marie Schwazenbach si mystérieuse et Kapuscinski qui « s’attache à des destinées singulières pour dire l’universel »… Et une interview évidemment des fondateurs de « XXI » le livre des beaux reportages, que j’attends impatiemment à chaque saison.
jeudi 25 mars 2010
Le Caravage
Le conférencier des amis du musée n’a pas insisté sur les anecdotes les plus spectaculaires de la biographie de Michelangelo Merisi qui vécut à Caravaggio où sa famille n’était pas si pauvre ; il entretint aussi toute sa vie une culture religieuse certaine. Il eut à subir l’acharnement du clan favorable aux espagnols après avoir tué l’un deux au cours d’un duel. Tout de même plus qu’un coquin ! Mais l’historien d’art a emballé son public par sa passion pour celui qui tient une place centrale dans l’histoire de la peinture. Héritier des sculpteurs antiques avec ses corps magnifiques, des flamands aux fortes natures mortes, il annonce le baroque. Faisant honneur sur ses toiles aux peaux exposées au soleil des gens les plus humbles pour figurer la spiritualité la plus élevée. Le sacré et le profane, la terre et le ciel, l’ombre et la lumière. Les corps magnifiques aux pieds poussiéreux, tellement humains, à l’heure de la contre réforme et de la peste. Cette mort qui rend si précieuse la vie et ses ivresses. A tomber par terre comme Saint Paul saisi par la révélation divine, ou bénéficier comme Matthieu de la présence chaleureuse d’un ange pour guider ses écritures, mettre le doigt dans la plaie comme Thomas. Il peignit la mort de la vierge et non sa dormition, tragique dans sa robe rouge la main sur le ventre des commencements. Ce fut un scandale, magnifique !
mercredi 24 mars 2010
J 27. Phnom Penh
Dany se lève assez tôt, va faire un tour, elle revient ébranlée par la misère entrevue des enfants abandonnés.
Nous allons au « marché russe » en tuk-tuk pour 2$(8000Riels). Nous ne tournons pas longtemps autour du bâtiment et passé un magasin extérieur d’antiquités intéressantes nous pénétrons dans le marché couvert, en cambodgien Psaar Tuol Tom Pong. Nous sommes loin de l’activité des marchés vietnamiens. Les marchands attendent sans nous haranguer, certains ont même carrément abandonné leur échoppe. Nous ne tardons pas à nous lancer dans des négociations pour des éléphants et oiseaux sous forme de boîtes en cuivre, une serpe pour couper le riz utilisant de la corne animale, boites à bétel et écharpes multicolores pour ramener des souvenirs aux familles. Nous reprenons le tuk-tuk pour l’hôtel assez tôt pour ne pas manquer notre rendez-vous.
Amreth nous attend, en jean, tongs et polo qui ont remplacé la chemise blanche du service. Pour 15$ le tuk tuk à 4 places s’ébranle et attaque ses quinze kilomètres sous une pluie timide. Il se passe un certain temps avant que nous entrevoyions des champs et la campagne. Tout à coup un bruit inquiétant suivi d’un cahotement anormal : crevaison. Nous sommes à l’embranchement qui conduit à Choeung Ek, le mémorial du génocide que nous gagnons à pied. Un immense stupa khmer contient une vitrine comprenant de nombreuses étagères où sont déposés 8000 crânes. Le bas est réservé aux misérables habits retrouvés sur les corps. Autour quelques stèles émergent encore de cet ancien cimetière chinois où ont été creusés des charniers découverts en 1980. Il y a le charnier des hommes frappés à la tête par un bâton ou un fléau qu’on laissait agoniser et souffrir jusqu’à la mort, le charnier réservé aux femmes et aux enfants découverts entièrement nus, le charnier des corps sans tête, l’arbre où l’on frappait les bébés quand ils n’étaient pas jetés en l’air puis mitraillés comme au tir aux pigeons et qui chutaient sur des haches et des lames. Choeung Ek ne servait pas de prison, mais de lieu d’exécution, l’espérance de vie n’excédait pas 24h. Dans un petit musée nous pouvons voir des informations sur « la clique » à Pol Pot, quelques photos et crânes et les vêtements noirs d’un couple de khmers rouges avec leur écharpe à carreaux rouges. Sous ce régime les enfants de quinze ans étaient éduqués pour tuer : « un enfant, c’est une feuille blanche ».
Amreth s’applique, avec tact et justesse, à nous raconter cet épisode douloureux de son pays « mon grand papa est là, il était policier ». Nous retrouvons notre tuk tuk pour aller jusqu’à la prison S 21.
Dans un ancien lycée, les khmers rouges ont transformé les salles de classe en salles de torture. Des photos individuelles des nombreux prisonniers provenant des dossiers des bourreaux sont exposées, restent aussi des fers collectifs pour immobiliser les jambes avec des anneaux fixés au sol, quelques lits métalliques. Dans un bâtiment enveloppé de barbelés pour empêcher les suicides, l’intérieur a été cloisonné en de nombreuses et minuscules cellules aux cloisons de briques. On peut voir aussi des instruments pour faire souffrir, des photos de morts après leur calvaire et des témoignages d’anciens khmers rouges. A l’extérieur les installations sportives de l’ancien lycée ont été recyclées en instrument de torture, notamment le portique destiné au grimper de corde : les mains attachées dans le dos, le prisonnier était hissé et quand il s’évanouissait, on lui plongeait la tête dans un jarre nauséabonde. Dans la cour les 14 tombes des dernières victimes de Pol Pot. Sur les 20 000 prisonniers, sept personnes ont échappé à la mort. A l’entrée de chaque bâtiment un panneau demande au public de ne pas rire à gorge déployée. Nous sommes dans l’hébétude devant tant de sadisme systématique qui s’est déchaîné pendant trois années entre 1975 et 1978.
Nous discutons encore un peu avec notre gentil étudiant. Nous le quittons à 17h pour assister à la projection du film « histoire d’un génocide » en français, monté et commenté par le patron d’un bar qui recadre les évènements, leurs causes et leurs conséquences, très utile. Ces années noires cambodgiennes ne sont pas si lointaines, nous les avons vécues en paix, social traitre pour les derniers marxistes léninistes les plus acharnés, alors que nous savions. La nuit tombe sur la ville annonçant l’heure du repas vers 18h30. Nous dinons à l’Edelweiss restaurant qui affiche des influences bavaroises. Je teste l’Amok (poisson au curry légumes riz) spécialité cambodgienne.
Nous allons au « marché russe » en tuk-tuk pour 2$(8000Riels). Nous ne tournons pas longtemps autour du bâtiment et passé un magasin extérieur d’antiquités intéressantes nous pénétrons dans le marché couvert, en cambodgien Psaar Tuol Tom Pong. Nous sommes loin de l’activité des marchés vietnamiens. Les marchands attendent sans nous haranguer, certains ont même carrément abandonné leur échoppe. Nous ne tardons pas à nous lancer dans des négociations pour des éléphants et oiseaux sous forme de boîtes en cuivre, une serpe pour couper le riz utilisant de la corne animale, boites à bétel et écharpes multicolores pour ramener des souvenirs aux familles. Nous reprenons le tuk-tuk pour l’hôtel assez tôt pour ne pas manquer notre rendez-vous.
Amreth nous attend, en jean, tongs et polo qui ont remplacé la chemise blanche du service. Pour 15$ le tuk tuk à 4 places s’ébranle et attaque ses quinze kilomètres sous une pluie timide. Il se passe un certain temps avant que nous entrevoyions des champs et la campagne. Tout à coup un bruit inquiétant suivi d’un cahotement anormal : crevaison. Nous sommes à l’embranchement qui conduit à Choeung Ek, le mémorial du génocide que nous gagnons à pied. Un immense stupa khmer contient une vitrine comprenant de nombreuses étagères où sont déposés 8000 crânes. Le bas est réservé aux misérables habits retrouvés sur les corps. Autour quelques stèles émergent encore de cet ancien cimetière chinois où ont été creusés des charniers découverts en 1980. Il y a le charnier des hommes frappés à la tête par un bâton ou un fléau qu’on laissait agoniser et souffrir jusqu’à la mort, le charnier réservé aux femmes et aux enfants découverts entièrement nus, le charnier des corps sans tête, l’arbre où l’on frappait les bébés quand ils n’étaient pas jetés en l’air puis mitraillés comme au tir aux pigeons et qui chutaient sur des haches et des lames. Choeung Ek ne servait pas de prison, mais de lieu d’exécution, l’espérance de vie n’excédait pas 24h. Dans un petit musée nous pouvons voir des informations sur « la clique » à Pol Pot, quelques photos et crânes et les vêtements noirs d’un couple de khmers rouges avec leur écharpe à carreaux rouges. Sous ce régime les enfants de quinze ans étaient éduqués pour tuer : « un enfant, c’est une feuille blanche ».
Amreth s’applique, avec tact et justesse, à nous raconter cet épisode douloureux de son pays « mon grand papa est là, il était policier ». Nous retrouvons notre tuk tuk pour aller jusqu’à la prison S 21.
Dans un ancien lycée, les khmers rouges ont transformé les salles de classe en salles de torture. Des photos individuelles des nombreux prisonniers provenant des dossiers des bourreaux sont exposées, restent aussi des fers collectifs pour immobiliser les jambes avec des anneaux fixés au sol, quelques lits métalliques. Dans un bâtiment enveloppé de barbelés pour empêcher les suicides, l’intérieur a été cloisonné en de nombreuses et minuscules cellules aux cloisons de briques. On peut voir aussi des instruments pour faire souffrir, des photos de morts après leur calvaire et des témoignages d’anciens khmers rouges. A l’extérieur les installations sportives de l’ancien lycée ont été recyclées en instrument de torture, notamment le portique destiné au grimper de corde : les mains attachées dans le dos, le prisonnier était hissé et quand il s’évanouissait, on lui plongeait la tête dans un jarre nauséabonde. Dans la cour les 14 tombes des dernières victimes de Pol Pot. Sur les 20 000 prisonniers, sept personnes ont échappé à la mort. A l’entrée de chaque bâtiment un panneau demande au public de ne pas rire à gorge déployée. Nous sommes dans l’hébétude devant tant de sadisme systématique qui s’est déchaîné pendant trois années entre 1975 et 1978.
Nous discutons encore un peu avec notre gentil étudiant. Nous le quittons à 17h pour assister à la projection du film « histoire d’un génocide » en français, monté et commenté par le patron d’un bar qui recadre les évènements, leurs causes et leurs conséquences, très utile. Ces années noires cambodgiennes ne sont pas si lointaines, nous les avons vécues en paix, social traitre pour les derniers marxistes léninistes les plus acharnés, alors que nous savions. La nuit tombe sur la ville annonçant l’heure du repas vers 18h30. Nous dinons à l’Edelweiss restaurant qui affiche des influences bavaroises. Je teste l’Amok (poisson au curry légumes riz) spécialité cambodgienne.
mardi 23 mars 2010
« Le pays d’où je viens… »
Au pays d’où je viens, le Plat Pays, ses maigres chevaux, les rivières ne coulent pas : elles sont canaux paisibles, porteurs de péniches ou se baladent sous terre, se font marécages et les égouts puent.
Au pays d’où je viens les murs sont de briques usées, rouges et noires parfois blanchies de peinture grasse vite ternie.
Ce pays d’où je viens dressait autrefois de hautes cheminées dominant les crassiers. Aujourd’hui les terrils ont verdi, devenus collines en hiver, modestes pentes pour timides skieurs.
Au pays de mes grands parents, dans les cités processionnaires, au pays de mes grands parents, Pas-de-Calais, il y a encore des corons. Leur maison toujours debout, deux pièces en bas, deux pièces en haut, si exiguës. Les temps nouveaux ont ajouté des vérandas. L’aluminium tient les fenêtres.
Ma mère y a grandi, si vite passant de l’enfance à l’âge adulte. Ma mère, ses onze frères et sœurs. Les filles promises aux « wassingues », les garçons « au fond », aux lampes à éthylène, aux boyaux, à une mort pas facile.
Au pays de mes ancêtres les hommes mouraient jeunes. Les veuves se mettaient en ménage avec un mineur moribond. On ne se mariait pas : ça faisait deux pensions.
Il y a une vingtaine d’années je suis retournée à Auchel (Pas de Calais) dans une de ces petites maisons de briques restaurées. Il y avait sur une couche mauve à volants l’avant-dernier de mes oncles, à son côté des bouteilles d’oxygène, sa future veuve aussi. Le mineur en tenue de momie, visage d’Indien.
Au pays d’où je viens les survivants ont le souffle court. Ils jouent aux boules et à la belote en toussant. Le foot c’était il y a si longtemps.Ils jouent dans les vestiaires de la vie en buvant leur bistouille (du Genièvre dans un fond de café).
Au pays d’où je viens, la pluie est mère fidèle, lavant et délavant, jamais découragée, son enfant meurtri.
En Novembre, il y a la Grande Braderie ; on y mange des tonnes de moules et de frites. La bière autrefois, en un temps moins écologique, coulait des braguettes aux caniveaux. Les femmes se retenaient.
Le soir on brûle toujours des géants de tissu, de papier et de bois sur la grande place de la Bourse, autrefois celle du Général de Gaulle.
Les Lillois font la ronde en chantant sous un ciel blanc et gris.
Misérabilisme ? Passéisme ? Nostalgie ? Que dalle !
Ecoutez ma mère :
« On a eu une enfance si joyeuse, on se faisait des farces, je lavais les longs cheveux de ma mère. Mes parents s’adoraient. On craignait la ceinture du père mais on courait plus vite qu’un mineur essoufflé.
On voisinait, on s’entraidait, on se mettait des branlées ; on était communistes et on baptisait les nouveaux-nés. »
Marie Treize
Au pays d’où je viens les murs sont de briques usées, rouges et noires parfois blanchies de peinture grasse vite ternie.
Ce pays d’où je viens dressait autrefois de hautes cheminées dominant les crassiers. Aujourd’hui les terrils ont verdi, devenus collines en hiver, modestes pentes pour timides skieurs.
Au pays de mes grands parents, dans les cités processionnaires, au pays de mes grands parents, Pas-de-Calais, il y a encore des corons. Leur maison toujours debout, deux pièces en bas, deux pièces en haut, si exiguës. Les temps nouveaux ont ajouté des vérandas. L’aluminium tient les fenêtres.
Ma mère y a grandi, si vite passant de l’enfance à l’âge adulte. Ma mère, ses onze frères et sœurs. Les filles promises aux « wassingues », les garçons « au fond », aux lampes à éthylène, aux boyaux, à une mort pas facile.
Au pays de mes ancêtres les hommes mouraient jeunes. Les veuves se mettaient en ménage avec un mineur moribond. On ne se mariait pas : ça faisait deux pensions.
Il y a une vingtaine d’années je suis retournée à Auchel (Pas de Calais) dans une de ces petites maisons de briques restaurées. Il y avait sur une couche mauve à volants l’avant-dernier de mes oncles, à son côté des bouteilles d’oxygène, sa future veuve aussi. Le mineur en tenue de momie, visage d’Indien.
Au pays d’où je viens les survivants ont le souffle court. Ils jouent aux boules et à la belote en toussant. Le foot c’était il y a si longtemps.Ils jouent dans les vestiaires de la vie en buvant leur bistouille (du Genièvre dans un fond de café).
Au pays d’où je viens, la pluie est mère fidèle, lavant et délavant, jamais découragée, son enfant meurtri.
En Novembre, il y a la Grande Braderie ; on y mange des tonnes de moules et de frites. La bière autrefois, en un temps moins écologique, coulait des braguettes aux caniveaux. Les femmes se retenaient.
Le soir on brûle toujours des géants de tissu, de papier et de bois sur la grande place de la Bourse, autrefois celle du Général de Gaulle.
Les Lillois font la ronde en chantant sous un ciel blanc et gris.
Misérabilisme ? Passéisme ? Nostalgie ? Que dalle !
Ecoutez ma mère :
« On a eu une enfance si joyeuse, on se faisait des farces, je lavais les longs cheveux de ma mère. Mes parents s’adoraient. On craignait la ceinture du père mais on courait plus vite qu’un mineur essoufflé.
On voisinait, on s’entraidait, on se mettait des branlées ; on était communistes et on baptisait les nouveaux-nés. »
Marie Treize
lundi 22 mars 2010
Ghost writer
Décidément, après le « nègre » de Dumas, voilà l’histoire d’un autre écrivain qui va être un révélateur de vérité très efficace dans un milieu des plus inhumains. Le dernier film de Polanski baigné de couleurs océanes, décrit avec de brillants dialogues, et des acteurs excellents, une mécanique du pouvoir terrible. Le marchand de livres, commanditaire de la biographie demande une écriture « qui parle au cœur » mais uniquement pour des raisons marketing, il est un maillon de cet univers impitoyable comme le métal et les vitres teintées. Le film est élégant et bien ficelé.
dimanche 21 mars 2010
Cannibales
J’ai apprécié les derniers spectacles de la MC2 qui réveillent notre regard sur l’époque. Cette pièce de théâtre de David Bobée sur un texte de Ronan Chéneau est attrayant avec une esthétique art contemporain, mêlant le cirque, à la vidéo, avec des déclamations en slam brillantes, de la musique, de la danse, des chants. Mais les interventions d’une comédienne surlignant les intentions de l’auteur semblent faire croire que celui-ci ne croit pas à son dispositif. Pourtant les acteurs sont convaincants, le décor clean, en accord avec le propos.
Le lit est un élément central où les convictions s’exercent à sauter sur le matelas, et la tendresse à se cacher sous la couette. Ces trentenaires cherchent une vie qui ait un sens, échappant à l’ensevelissement sous le confort.
Ils se mettent le feu au moment où ils sont heureux.
Le bidon d’essence restera sur la scène tout au long de la pièce.
Ma part adolescente se retrouve dans cette complaisance dans la noirceur, le bi trentenaire à bouffées moralisantes ne peut accepter que la jeunesse s’immole ainsi paresseusement. L’abus d’un jeu mortel avec le mot « flamboyant » n’est qu’une défaite face au monde des faux semblants, le résultat d’un avachissement de gavés, de revenus de tout sans être allés nulle part.
Le lit est un élément central où les convictions s’exercent à sauter sur le matelas, et la tendresse à se cacher sous la couette. Ces trentenaires cherchent une vie qui ait un sens, échappant à l’ensevelissement sous le confort.
Ils se mettent le feu au moment où ils sont heureux.
Le bidon d’essence restera sur la scène tout au long de la pièce.
Ma part adolescente se retrouve dans cette complaisance dans la noirceur, le bi trentenaire à bouffées moralisantes ne peut accepter que la jeunesse s’immole ainsi paresseusement. L’abus d’un jeu mortel avec le mot « flamboyant » n’est qu’une défaite face au monde des faux semblants, le résultat d’un avachissement de gavés, de revenus de tout sans être allés nulle part.
samedi 20 mars 2010
Dénis
« Que la mandale est belle »( Le Canard Enchaîné)
Je les aime, la droite, quand ils sont pathétiques comme ça avec leurs « éléments de langage » à ressasser sur les plateaux télé, au soir des élections régionales. Nous pourrions leur donner des tuyaux, nous à gauche, qui sommes rodés aux défaites. C’est d’ailleurs assez énigmatique la rapidité de cette chute du système Sarko vue par le filtre des médias qui ne sont pas loin de lâcher celui qui les fascinait, il y a encore peu. Ils n’ont rien vu venir, les sondeurs, concernant aussi la persistance du FN, et il ne voit toujours pas où est le problème, Fillon, et l’à peine président entouré de courtisans qui zigzague après s'être préservé de toute contestation lors des voyages en province. Il avait disait-il le culte de l'évaluation, eh bien voilà un sondage gratuit et il dit qu'il n'y a pas de problème. Continuez comme ça!
L’autruche à langue de bois n’est pas une espèce en voie de disparition, elle se multiplie sous tous les cieux.
Nous au village aussi l’on a des voitures qui crament jusque dans les sous sols de l’hôtel de ville. Eh bien la majorité municipale et la gendarmerie minimisent. Et ce sont les élus de gauche, les yeux ouverts,sur ce coup, qui s’indignent de ces attaques au bien commun et proposent un juste équilibre entre sanction et prévention, en reconnaissant la difficulté des affaires concernant la sécurité.
Les vents favorables des élections ont tendance à griser un peu mes camarades sevrés depuis longtemps de bonnes nouvelles. Sur notre canton en 2004, J.J. Queyranne faisait 40% maintenant il est à 30% avec le front de gauche à 8%, les verts eux sont passés de 13 à 23%. Et il y a eu quelques abstentions.
Et voilà que Dany le vert parle de déni de démocratie… ça va énerver, mais les accords électoraux ne se résolvent pas en une nuit, bien sûr. Souvent, il y avait eu du travail en commun auparavant. D’où la nécessité localement…
Pour aller au-delà des petites phrases, Ronsanvallon :
« Résister. Résister à l’insécurité sociale galopante, au naufrage de l’éthos public, au court-termisme, à l’ivresse marchande, à la société du mépris, à la corruption des institutions. Résister à « la droitisation » du monde. »
« Pour aimer la démocratie, il faut la compliquer, et s’attacher à lui donner consistance contre tout ce qui prétend la réduire à la légitimation électorale »
Je les aime, la droite, quand ils sont pathétiques comme ça avec leurs « éléments de langage » à ressasser sur les plateaux télé, au soir des élections régionales. Nous pourrions leur donner des tuyaux, nous à gauche, qui sommes rodés aux défaites. C’est d’ailleurs assez énigmatique la rapidité de cette chute du système Sarko vue par le filtre des médias qui ne sont pas loin de lâcher celui qui les fascinait, il y a encore peu. Ils n’ont rien vu venir, les sondeurs, concernant aussi la persistance du FN, et il ne voit toujours pas où est le problème, Fillon, et l’à peine président entouré de courtisans qui zigzague après s'être préservé de toute contestation lors des voyages en province. Il avait disait-il le culte de l'évaluation, eh bien voilà un sondage gratuit et il dit qu'il n'y a pas de problème. Continuez comme ça!
L’autruche à langue de bois n’est pas une espèce en voie de disparition, elle se multiplie sous tous les cieux.
Nous au village aussi l’on a des voitures qui crament jusque dans les sous sols de l’hôtel de ville. Eh bien la majorité municipale et la gendarmerie minimisent. Et ce sont les élus de gauche, les yeux ouverts,sur ce coup, qui s’indignent de ces attaques au bien commun et proposent un juste équilibre entre sanction et prévention, en reconnaissant la difficulté des affaires concernant la sécurité.
Les vents favorables des élections ont tendance à griser un peu mes camarades sevrés depuis longtemps de bonnes nouvelles. Sur notre canton en 2004, J.J. Queyranne faisait 40% maintenant il est à 30% avec le front de gauche à 8%, les verts eux sont passés de 13 à 23%. Et il y a eu quelques abstentions.
Et voilà que Dany le vert parle de déni de démocratie… ça va énerver, mais les accords électoraux ne se résolvent pas en une nuit, bien sûr. Souvent, il y avait eu du travail en commun auparavant. D’où la nécessité localement…
Pour aller au-delà des petites phrases, Ronsanvallon :
« Résister. Résister à l’insécurité sociale galopante, au naufrage de l’éthos public, au court-termisme, à l’ivresse marchande, à la société du mépris, à la corruption des institutions. Résister à « la droitisation » du monde. »
« Pour aimer la démocratie, il faut la compliquer, et s’attacher à lui donner consistance contre tout ce qui prétend la réduire à la légitimation électorale »
vendredi 19 mars 2010
Le quai de Ouistreham
Florence Aubenas, de la télé, a écrit sur son livre dédicacé rien que pour moi : « une vie devant le tableau noir, chapeau », alors que j’ai tant aimé ce travail, mais dans la chaîne des signatures à la librairie du Square, comment dire autrement ?
Elle vient de vivre, elle, le métier de femme de ménage, et témoigne de toute la difficulté à l’exercer. Dans l’entretien, suivi par de nombreux lecteurs qui ont apprécié ce témoignage fort, elle s’est montrée comme son livre, drôle et sincère, en empathie avec ses compagnons de galère. C’est une autre époque que celle décrite par Orwell, « Le quai de Wigan », avec ses prophéties politiques ou d’un Linhart « Etabli » dans les années 70.
Elle en savait pourtant des statistiques, la journaliste. Et puis c’est elle qui va apprendre, elle qui voulait décrire la vie des « précaires », ceux ci se sont défendus de l’expression, en disant qu’ils étaient « des français normaux ». Et c’est eux qui ont raison ! Pôle emploi n’est pas un service social, il a des clients et doit faire du chiffre, ses agents dépriment. A Caen où les emplois industriels ont fondu, la reporter du Nouvel Obs n’est pas partie à l’autre bout du monde, mais elle a du être dépaysée à se distraire le dimanche à la jardinerie du centre commercial entrainée par un Philippe émouvant. Au bout de son aspirateur, elle disparaît aux yeux des autres, debout à des heures impossibles, vivant par ses courbatures, où le fonctionnement d’une voiture est essentiel. Le livre est d’ailleurs adressé « Au tracteur ». Un monde où chaque piécette compte, où celle qui revendique le paiement des heures sup se retrouve seule à la réunion, où l’entraide côtoie la méchanceté.
« Blandine s’apprête à enchainer sur les aventures tragiques de la vésicule de sa sœur, dont nous connaissons toutes déjà les multiples versions, mais Fabienne la coupe :
« ça t’intéresse, la chirurgie esthétique, ma chérie ? »
Elle tend la main vers Blandine pour lui palper le décolleté, l’autre rit à pleine gorge, en lui balançant des jets de détergent WC au visage. […]
Là-dessus, un chef arrive. Fabienne fait : « On parlait politique ».
ça assomme le chef.
« Vous êtes malades ou quoi les filles ? »
J’avais mis d’autres citations de ce livre, le mois dernier sous le titre
« Parachutes dorés »
Elle vient de vivre, elle, le métier de femme de ménage, et témoigne de toute la difficulté à l’exercer. Dans l’entretien, suivi par de nombreux lecteurs qui ont apprécié ce témoignage fort, elle s’est montrée comme son livre, drôle et sincère, en empathie avec ses compagnons de galère. C’est une autre époque que celle décrite par Orwell, « Le quai de Wigan », avec ses prophéties politiques ou d’un Linhart « Etabli » dans les années 70.
Elle en savait pourtant des statistiques, la journaliste. Et puis c’est elle qui va apprendre, elle qui voulait décrire la vie des « précaires », ceux ci se sont défendus de l’expression, en disant qu’ils étaient « des français normaux ». Et c’est eux qui ont raison ! Pôle emploi n’est pas un service social, il a des clients et doit faire du chiffre, ses agents dépriment. A Caen où les emplois industriels ont fondu, la reporter du Nouvel Obs n’est pas partie à l’autre bout du monde, mais elle a du être dépaysée à se distraire le dimanche à la jardinerie du centre commercial entrainée par un Philippe émouvant. Au bout de son aspirateur, elle disparaît aux yeux des autres, debout à des heures impossibles, vivant par ses courbatures, où le fonctionnement d’une voiture est essentiel. Le livre est d’ailleurs adressé « Au tracteur ». Un monde où chaque piécette compte, où celle qui revendique le paiement des heures sup se retrouve seule à la réunion, où l’entraide côtoie la méchanceté.
« Blandine s’apprête à enchainer sur les aventures tragiques de la vésicule de sa sœur, dont nous connaissons toutes déjà les multiples versions, mais Fabienne la coupe :
« ça t’intéresse, la chirurgie esthétique, ma chérie ? »
Elle tend la main vers Blandine pour lui palper le décolleté, l’autre rit à pleine gorge, en lui balançant des jets de détergent WC au visage. […]
Là-dessus, un chef arrive. Fabienne fait : « On parlait politique ».
ça assomme le chef.
« Vous êtes malades ou quoi les filles ? »
J’avais mis d’autres citations de ce livre, le mois dernier sous le titre
« Parachutes dorés »
jeudi 18 mars 2010
Les modernes s’exposent.
Le très classique musée des beaux arts de Lyon avait organisé une exposition consacrée aux modernes en réorganisant ses ressources et en présentant quelques prêts. La foule se pressait devant les toiles de Matisse, Dubuffet, Dufy, Debré, Vuillard, Monory… Plaisir de retrouver des familiers : cette scène de cirque de Fernand léger maintenant que j’ai appris à l’apprécier en l’ayant mieux connu à Biot dans un musée qui lui est entièrement consacré, cette lumière au Grand Lemps de Bonnard qui nous éclaire sur des lieux familiers que nous n’avons jamais vus si beaux. Découvrir Gleizes et Maria Helena Vieira da Silva, un Picasso tout en rondeur. Constater que l’abstraction n’est pas arrivée après l’extinction de la figuration, mais ces périodes ont alterné. Une exposition aux commentaires utiles, pour se conforter. Mes amis auraient emporté la cathédrale de De Staël ou un Foujita, je me serais contenté d’un Bacon ou de Rebeyrolle.
mercredi 17 mars 2010
J 26. Phnom Penh
Le réveil sonne tôt, à 5h 25, car nous prenons le bateau à 7h.
Le chauffeur et Thien accomplissent la fin de leur mission, nous guident une dernière fois jusqu’à un embarcadère que nous aurions bien été en peine de trouver. Deux employés du bateau se chargent de nos bagages et nous sommes les premiers clients à embarquer. Se joignent à nous une famille française d’origine asiatique, le grand père et la grand-mère, deux couples dont un mixte et quatre enfants. « Vous êtes français vous aussi » prononcé par le grand père nous réjouit. Nous sommes treize passagers en tout, plus le pilote et deux stewards dans le bateau effilé. Le grand père nous sert gentiment d’interprète, quelle peut être son histoire ?.
Les formalités de douane nous sont grandement facilitées par le steward : il a récupéré tous les passeports, rempli à l’avance tous les papiers, préparé les formulaires de visas pour le Cambodge et récupéré les dollars des visas.
Le poste frontière sur l’eau se situe à environ 1h 30 de Chau Doc. Nous attendons sur un ponton couvert avec bar et toilettes pendant que notre steward se dépatouille avec la douane vietnamienne. Suivant l’exemple du grand père, nous changeons 20€ (1€ = 5000 Riels). A peu de distance de bateau nous devons nous arrêter au poste frontière cambodgien installé dans un joli jardin, avec beaucoup de douaniers dont certains jouent aux cartes. Les autels ont changé d’allure respectant l’architecture khmère avec des toits terminés comme de faux ongles des danseuses d’ici. Le bateau repart sur le Bassac à vive allure pendant plus de deux heures et nous n’apercevons pas grand-chose sur les rives, sinon quelques îlots inondables de septembre à décembre. Peu à peu nous distinguons nos premières pagodes khmères, des cultivateurs et leur buffle. Comme dans les avions, on nous sert un petit déjeuner sur un plateau repas. Nous arrivons avec de l’avance, personne ne nos attend sur le ponton mais guides rabatteurs et chauffeurs de taxi, s’accrochent déjà à nous. Notre contact, chauffeur de Phoenix voyage ne tarde pas à apparaître avec son panneau « Bienvenue » avec nos noms. Il parle bien l’anglais et s’occupe déjà de l’horaire de départ pour Siem Reap après demain, avec un autre chauffeur. Il nous installe à l’hôtel FCC (Foreign Correspondants Club of Cambodgia), décharge nos bagages avec l’aide d’un policier en rangers. Notre chambre n’est pas encore prête, il nous faudra patienter jusqu’à 14h. Nous partons à la découverte de la capitale de un million d’habitants. Nous sommes surpris par la largeur de routes pratiquement désertes, peut être parce qu’aujourd’hui c’est dimanche. Nous sommes hélés constamment par les conducteurs de tuk tuk insistants. Nous devenons sourds. De gros 4X4 des ONG contrastent avec des gens d’un dénuement extrême, des mendiants handicapés et mutilés. Le dollar supplante la monnaie locale, tout est affiché en dollars dans les magasins et restaurants. Notre première promenade dans la ville passe par le palais royal , la pagode d’argent, le monument de l’indépendance, la rue Norodom et le quartier des ambassades où subsistent encore des maisons coloniales, protégées jusqu’à quand, et dans quelle mesure échapperont-elles à la corruption immobilière ?
Nous rentrons le long de la Ton Lay Sap river qui rejoint le Bassac et le Mékong , sur Le Preah Sisovath Quay, pour nous rapprocher de l’hôtel et casser une petite graine ; comme le restau que nous visons recommandé par le Petit Futé affiche complet, nous nous rabattons sur le bar de l’hôtel où les trois bières consommées équivalent à deux repas vietnamiens. Le bar n’accueille que des occidentaux. Aux murs des photos rappellent que l’hôtel était fréquenté par un club de reporters photographes étrangers. Nous découvrons, ravis, notre chambre à la salle de bain luxueuse, du nom d’un monument de Siem Reap : Péah Khan. Nous nous offrons sans vergogne un vrai café et des brownies au chocolat au café Fresco contigu à notre chambre accessible par une autre entrée que celle de la réception.Nous décidons de visiter le musée national abrité dans un bâtiment de style khmer et construit par les français en 1917. De couleur pourpre, il est gardé par deux magnifiques éléphants à la tête en bronze et au corps constitué d’arbustes. L’intérieur expose essentiellement des statues de dieux, de tailles différentes en bronze ou en grès, une cabine de jonque tout en bois et deux palanquins d’éléphants associant bois et ivoire. Des femmes vendent des bâtonnets de jasmin à déposer en offrande devant certaines statues. Un éclairage efficace met en valeur des œuvres de toute beauté et si ce n’était l’heure de la fermeture nous aurions aimé contempler encore ces trésors dans leur écrin bien adapté.
Nous avons pour objectif d’atteindre le marché central construit par les français, mais nous papillonnons au gré des surprises de la rue. Ce que nous prenons pour un mariage se révèle être une cérémonie de funérailles. Sur le trottoir, les cuisines en plein air, de l’autre côté de la rue, derrière des rideaux noirs et blancs, des invités mangent des fondues, alors que dans un magasin transformé pour l’occasion, des bonzes récitent des prières entrecoupées par un chant de femmes émouvant. Plus loin nous pénétrons, après avoir demandé la permission, dans un lieu clos qui comprend une pagode centrale et des bâtiments plus ou moins récents habités par des bonzes, qui accueillent des nécessiteux. Comme ailleurs dans la ville, un sourire déclenche un élan de sympathie ou un sourire en réponse. Il bruinasse par intermittence. Nous commençons à fatiguer et avant la ruée de nos semblables affamés, nous nous installons au restau « Fortune Phô » en face de notre chambre. Une panne d’électricité sûrement pas inhabituelle, nous permet de manger à la lumière romantique de la bougie : nems, croustini et noodle.
En récupérant notre clef et en discutant à la réception, un petit jeune homme souriant, qui s’exprime assez bien en français, nous propose ses services pour visiter les lieux de triste mémoire marqués par la sauvagerie de Pol Pot. Nous acceptons et prenons RDV pour demain midi.
Le chauffeur et Thien accomplissent la fin de leur mission, nous guident une dernière fois jusqu’à un embarcadère que nous aurions bien été en peine de trouver. Deux employés du bateau se chargent de nos bagages et nous sommes les premiers clients à embarquer. Se joignent à nous une famille française d’origine asiatique, le grand père et la grand-mère, deux couples dont un mixte et quatre enfants. « Vous êtes français vous aussi » prononcé par le grand père nous réjouit. Nous sommes treize passagers en tout, plus le pilote et deux stewards dans le bateau effilé. Le grand père nous sert gentiment d’interprète, quelle peut être son histoire ?.
Les formalités de douane nous sont grandement facilitées par le steward : il a récupéré tous les passeports, rempli à l’avance tous les papiers, préparé les formulaires de visas pour le Cambodge et récupéré les dollars des visas.
Le poste frontière sur l’eau se situe à environ 1h 30 de Chau Doc. Nous attendons sur un ponton couvert avec bar et toilettes pendant que notre steward se dépatouille avec la douane vietnamienne. Suivant l’exemple du grand père, nous changeons 20€ (1€ = 5000 Riels). A peu de distance de bateau nous devons nous arrêter au poste frontière cambodgien installé dans un joli jardin, avec beaucoup de douaniers dont certains jouent aux cartes. Les autels ont changé d’allure respectant l’architecture khmère avec des toits terminés comme de faux ongles des danseuses d’ici. Le bateau repart sur le Bassac à vive allure pendant plus de deux heures et nous n’apercevons pas grand-chose sur les rives, sinon quelques îlots inondables de septembre à décembre. Peu à peu nous distinguons nos premières pagodes khmères, des cultivateurs et leur buffle. Comme dans les avions, on nous sert un petit déjeuner sur un plateau repas. Nous arrivons avec de l’avance, personne ne nos attend sur le ponton mais guides rabatteurs et chauffeurs de taxi, s’accrochent déjà à nous. Notre contact, chauffeur de Phoenix voyage ne tarde pas à apparaître avec son panneau « Bienvenue » avec nos noms. Il parle bien l’anglais et s’occupe déjà de l’horaire de départ pour Siem Reap après demain, avec un autre chauffeur. Il nous installe à l’hôtel FCC (Foreign Correspondants Club of Cambodgia), décharge nos bagages avec l’aide d’un policier en rangers. Notre chambre n’est pas encore prête, il nous faudra patienter jusqu’à 14h. Nous partons à la découverte de la capitale de un million d’habitants. Nous sommes surpris par la largeur de routes pratiquement désertes, peut être parce qu’aujourd’hui c’est dimanche. Nous sommes hélés constamment par les conducteurs de tuk tuk insistants. Nous devenons sourds. De gros 4X4 des ONG contrastent avec des gens d’un dénuement extrême, des mendiants handicapés et mutilés. Le dollar supplante la monnaie locale, tout est affiché en dollars dans les magasins et restaurants. Notre première promenade dans la ville passe par le palais royal , la pagode d’argent, le monument de l’indépendance, la rue Norodom et le quartier des ambassades où subsistent encore des maisons coloniales, protégées jusqu’à quand, et dans quelle mesure échapperont-elles à la corruption immobilière ?
Nous rentrons le long de la Ton Lay Sap river qui rejoint le Bassac et le Mékong , sur Le Preah Sisovath Quay, pour nous rapprocher de l’hôtel et casser une petite graine ; comme le restau que nous visons recommandé par le Petit Futé affiche complet, nous nous rabattons sur le bar de l’hôtel où les trois bières consommées équivalent à deux repas vietnamiens. Le bar n’accueille que des occidentaux. Aux murs des photos rappellent que l’hôtel était fréquenté par un club de reporters photographes étrangers. Nous découvrons, ravis, notre chambre à la salle de bain luxueuse, du nom d’un monument de Siem Reap : Péah Khan. Nous nous offrons sans vergogne un vrai café et des brownies au chocolat au café Fresco contigu à notre chambre accessible par une autre entrée que celle de la réception.Nous décidons de visiter le musée national abrité dans un bâtiment de style khmer et construit par les français en 1917. De couleur pourpre, il est gardé par deux magnifiques éléphants à la tête en bronze et au corps constitué d’arbustes. L’intérieur expose essentiellement des statues de dieux, de tailles différentes en bronze ou en grès, une cabine de jonque tout en bois et deux palanquins d’éléphants associant bois et ivoire. Des femmes vendent des bâtonnets de jasmin à déposer en offrande devant certaines statues. Un éclairage efficace met en valeur des œuvres de toute beauté et si ce n’était l’heure de la fermeture nous aurions aimé contempler encore ces trésors dans leur écrin bien adapté.
Nous avons pour objectif d’atteindre le marché central construit par les français, mais nous papillonnons au gré des surprises de la rue. Ce que nous prenons pour un mariage se révèle être une cérémonie de funérailles. Sur le trottoir, les cuisines en plein air, de l’autre côté de la rue, derrière des rideaux noirs et blancs, des invités mangent des fondues, alors que dans un magasin transformé pour l’occasion, des bonzes récitent des prières entrecoupées par un chant de femmes émouvant. Plus loin nous pénétrons, après avoir demandé la permission, dans un lieu clos qui comprend une pagode centrale et des bâtiments plus ou moins récents habités par des bonzes, qui accueillent des nécessiteux. Comme ailleurs dans la ville, un sourire déclenche un élan de sympathie ou un sourire en réponse. Il bruinasse par intermittence. Nous commençons à fatiguer et avant la ruée de nos semblables affamés, nous nous installons au restau « Fortune Phô » en face de notre chambre. Une panne d’électricité sûrement pas inhabituelle, nous permet de manger à la lumière romantique de la bougie : nems, croustini et noodle.
En récupérant notre clef et en discutant à la réception, un petit jeune homme souriant, qui s’exprime assez bien en français, nous propose ses services pour visiter les lieux de triste mémoire marqués par la sauvagerie de Pol Pot. Nous acceptons et prenons RDV pour demain midi.
mardi 16 mars 2010
Agiassos #2
"Tout droit je descendrai vers l'agora. Sous la voûte de feuilles rouges je boirai le café brûlant, très lentement. Je rêverai dans le sexe des feuilles écarlates. Silencieuse, j'enfanterai un chant en écho au saxo jamais vu qui joue pourtant sur les terrasses d'Agiassos. Saxo du Dieu caché.
Et puis il sera temps de filer ailleurs. »
C'est ici que le texte s'arrête, dit la jeune femme en décroisant ses bottes métallisées. Elle redresse son dos tandis que se meuvent ses beaux seins sous la combinaison souplement ajustée. Son compagnon allume une nouvelle cigarette sans la quitter des yeux.
- Tu ne lis plus...
- Il n'y a plus rien. Le carnet de ma grand-mère s'arrête là.
Le jeune homme se penche vers le sol, la fumée embrume les brodequins à semelles d'acier.
- Comment était-elle ?
- J'avais deux ans quand elle est morte. Sur les photos, elle est plutôt ordinaire. Elle avait la bougeotte. Ses carnets, elle me les a légués. Avant de partir en Grèce, elle a dit à mes parents que ses carnets, ses livres seraient pour moi. Bien brave ce pope du bas quartier d'avoir gardé les derniers carnets de grand-mère.
- Comment sont-ils tombés entre ses mains ?
- La police les lui a confiés et il a oublié de les renvoyer en France. Les popes ne sont pas riches...
La jeune femme caresse le casque anti U.V. posé sur la table de faux marbre. " Quel style ringard quand même !
- Je ne suis pas de ton avis, Electre, c'est une époque où il y avait encore des Grecs. Regarde autour de nous, regardons-nous. Qui sommes-nous dans nos armures de métal et de plastique ?
Le jeune homme se tait, il sourit un peu parce qu'il est amoureux. Ses bagues et ses bracelets lancent des feux agressifs. La lumière du crépuscule traverse la coupole de verre au-dessus de l'agora et des rues d'Agiassos. Elle se difracte, éclabousse les tenues brillantes des consommateurs. Il n'y a pas de musique aujourd'hui. L'Association Européenne des Oto-rhino a obtenu de Bruxelles la trêve d'une journée par semaine. Les coupoles, la climatisation autorisent les touristes à se découvrir. Les peaux roses et blanches sont de fragiles lumières dans la lumière du couchant. Le jeune homme repose son verre d'eau minérale deux fois recyclée :
- Tu ne trouves pas que l'humanité, ici, ressemble à un ramassis de vers blancs sous un bocal renversé ?
- Arrête, tu n'es pas drôle !
- Et ta ringarde de grand-mère faisait du vélo sans masque, sans scaphandre. Elle dormait à la belle étoile. Les étoiles elle les voyait, et le ciel de Grèce, toujours bleu l'été... C'est ce que disent les vieux guides...
Main dans la main les jeunes gens gravissent une des huit avenues de la cité. Les néons annoncent des spectacles pornographiques ou des films d'épouvante. Des garçons très maquillés, attirent les consommateurs à des tables minuscules. Des familles s'agglutinent aux vitrines des magasins : Bonbéton, Monkikian, Zony... Les lasers balafrent le ciel composant et décomposant les silhouettes de dieux et de héros helléniques.
Ils s'arrêtent devant le musée des arts et techniques. Sous un globe de verre un âne empaillé, gueule ouverte, oreilles dressées. Pour un Euro, on entend braire le dernier baudet de l'île décédé en 2008. Pour deux Euro supplémentaires on assiste à l'érection de son pénis, dit la pancarte. La mécanique est tombée en panne. Une petite fille s'obstine à appuyer sur le bouton, ce qui provoque le rire du père occupé à vider une boîte de bière. Un cinéma annonce des succés européens : "Quand l'ozone reviendra", "A nous, les petites mongoliennes", "Les Requins sont fatigués".
- Je me demande si on a eu une bonne idée de venir à Métylène...
- Et les carnets de ma Grand-mère ? On va y trouver une foule d'informations sur la faune... La pauvre elle n'était pas douée pour les prophéties... mais elle s'y connaissait en oiseaux...
- Ouais... "Rien ne change jamais à Agiassos..." Vaut mieux en rire...
- Allez, ne perd pas le moral. Nous irons travailler dans les mines d'eau douce au Spitzberg l'été prochain. Il paraît que trois mois de boulot là-bas, ça te donne de quoi vivre bio pendant un an. Trois ans si tu bouffes n'importe quoi !
Dans le parking souterrain l'air de la climatisation souffle comme un vent d'Odyssée. Les jeunes gens referment leurs tuniques, ils enfilent leurs gants. La moto bondit à l'extérieur du réseau couvert. Le jeune homme fait le plein à une pompe automatique tandis que le visage de la jeune femme soudain s'immobilise en direction du Mont Olympe brillant comme un os de seiche dans la nuit. Ce n'est pas la montagne qui brille, c'est un immense écran sur lequel un type aux yeux dégoulinants distribue des cadeaux à un couple obèse.
- Ecoute... Ne remets pas le moteur en marche... On dirait un saxo... quelqu'un joue du saxo... Tu n'entends pas ?
- Ton casque est mal vissé, Electre. Tu vas te prendre une giclée de saloperies. Si Pan a échappé à la syphillis et au sida, les U.V. et le plomb auront sa peau. En route, accroche-toi, y a douze virages dans la descente.
Au carrefour de Vassilika et d'Ipio, elle lui demande d'arrêter leur bolide. "C'est ici que Grand-mère s'est défoncé le crâne. Le pope a dit que sa bicyclette était irrécupérable. Mon oeil !
- Les popes sont pauvres, c'est toi qui l'as dit... Tu as les carnets et la sacoche de cuir... Qu'est-ce que tu ferais d'un vélo ?
- Rien. Mais j'aurais aimé le voir, na !
- Ton ancêtre savait couper les fils, prends en de la graine !
La moto fonce vers Molivos où se trouve un des camps des Jeunesses Ecologistes Européennes. On y élève des requins. Le requin métabolise le plomb et le mercure et ne développe pas de cancers. Les chercheurs du génie génétique espèrent greffer dans un avenir très prochain des gènes du squale sur les chromosomes humains. L'avenir est à ceux qui savent couper. La moto fonce.
Marie Treize
Et puis il sera temps de filer ailleurs. »
C'est ici que le texte s'arrête, dit la jeune femme en décroisant ses bottes métallisées. Elle redresse son dos tandis que se meuvent ses beaux seins sous la combinaison souplement ajustée. Son compagnon allume une nouvelle cigarette sans la quitter des yeux.
- Tu ne lis plus...
- Il n'y a plus rien. Le carnet de ma grand-mère s'arrête là.
Le jeune homme se penche vers le sol, la fumée embrume les brodequins à semelles d'acier.
- Comment était-elle ?
- J'avais deux ans quand elle est morte. Sur les photos, elle est plutôt ordinaire. Elle avait la bougeotte. Ses carnets, elle me les a légués. Avant de partir en Grèce, elle a dit à mes parents que ses carnets, ses livres seraient pour moi. Bien brave ce pope du bas quartier d'avoir gardé les derniers carnets de grand-mère.
- Comment sont-ils tombés entre ses mains ?
- La police les lui a confiés et il a oublié de les renvoyer en France. Les popes ne sont pas riches...
La jeune femme caresse le casque anti U.V. posé sur la table de faux marbre. " Quel style ringard quand même !
- Je ne suis pas de ton avis, Electre, c'est une époque où il y avait encore des Grecs. Regarde autour de nous, regardons-nous. Qui sommes-nous dans nos armures de métal et de plastique ?
Le jeune homme se tait, il sourit un peu parce qu'il est amoureux. Ses bagues et ses bracelets lancent des feux agressifs. La lumière du crépuscule traverse la coupole de verre au-dessus de l'agora et des rues d'Agiassos. Elle se difracte, éclabousse les tenues brillantes des consommateurs. Il n'y a pas de musique aujourd'hui. L'Association Européenne des Oto-rhino a obtenu de Bruxelles la trêve d'une journée par semaine. Les coupoles, la climatisation autorisent les touristes à se découvrir. Les peaux roses et blanches sont de fragiles lumières dans la lumière du couchant. Le jeune homme repose son verre d'eau minérale deux fois recyclée :
- Tu ne trouves pas que l'humanité, ici, ressemble à un ramassis de vers blancs sous un bocal renversé ?
- Arrête, tu n'es pas drôle !
- Et ta ringarde de grand-mère faisait du vélo sans masque, sans scaphandre. Elle dormait à la belle étoile. Les étoiles elle les voyait, et le ciel de Grèce, toujours bleu l'été... C'est ce que disent les vieux guides...
Main dans la main les jeunes gens gravissent une des huit avenues de la cité. Les néons annoncent des spectacles pornographiques ou des films d'épouvante. Des garçons très maquillés, attirent les consommateurs à des tables minuscules. Des familles s'agglutinent aux vitrines des magasins : Bonbéton, Monkikian, Zony... Les lasers balafrent le ciel composant et décomposant les silhouettes de dieux et de héros helléniques.
Ils s'arrêtent devant le musée des arts et techniques. Sous un globe de verre un âne empaillé, gueule ouverte, oreilles dressées. Pour un Euro, on entend braire le dernier baudet de l'île décédé en 2008. Pour deux Euro supplémentaires on assiste à l'érection de son pénis, dit la pancarte. La mécanique est tombée en panne. Une petite fille s'obstine à appuyer sur le bouton, ce qui provoque le rire du père occupé à vider une boîte de bière. Un cinéma annonce des succés européens : "Quand l'ozone reviendra", "A nous, les petites mongoliennes", "Les Requins sont fatigués".
- Je me demande si on a eu une bonne idée de venir à Métylène...
- Et les carnets de ma Grand-mère ? On va y trouver une foule d'informations sur la faune... La pauvre elle n'était pas douée pour les prophéties... mais elle s'y connaissait en oiseaux...
- Ouais... "Rien ne change jamais à Agiassos..." Vaut mieux en rire...
- Allez, ne perd pas le moral. Nous irons travailler dans les mines d'eau douce au Spitzberg l'été prochain. Il paraît que trois mois de boulot là-bas, ça te donne de quoi vivre bio pendant un an. Trois ans si tu bouffes n'importe quoi !
Dans le parking souterrain l'air de la climatisation souffle comme un vent d'Odyssée. Les jeunes gens referment leurs tuniques, ils enfilent leurs gants. La moto bondit à l'extérieur du réseau couvert. Le jeune homme fait le plein à une pompe automatique tandis que le visage de la jeune femme soudain s'immobilise en direction du Mont Olympe brillant comme un os de seiche dans la nuit. Ce n'est pas la montagne qui brille, c'est un immense écran sur lequel un type aux yeux dégoulinants distribue des cadeaux à un couple obèse.
- Ecoute... Ne remets pas le moteur en marche... On dirait un saxo... quelqu'un joue du saxo... Tu n'entends pas ?
- Ton casque est mal vissé, Electre. Tu vas te prendre une giclée de saloperies. Si Pan a échappé à la syphillis et au sida, les U.V. et le plomb auront sa peau. En route, accroche-toi, y a douze virages dans la descente.
Au carrefour de Vassilika et d'Ipio, elle lui demande d'arrêter leur bolide. "C'est ici que Grand-mère s'est défoncé le crâne. Le pope a dit que sa bicyclette était irrécupérable. Mon oeil !
- Les popes sont pauvres, c'est toi qui l'as dit... Tu as les carnets et la sacoche de cuir... Qu'est-ce que tu ferais d'un vélo ?
- Rien. Mais j'aurais aimé le voir, na !
- Ton ancêtre savait couper les fils, prends en de la graine !
La moto fonce vers Molivos où se trouve un des camps des Jeunesses Ecologistes Européennes. On y élève des requins. Le requin métabolise le plomb et le mercure et ne développe pas de cancers. Les chercheurs du génie génétique espèrent greffer dans un avenir très prochain des gènes du squale sur les chromosomes humains. L'avenir est à ceux qui savent couper. La moto fonce.
Marie Treize
lundi 15 mars 2010
Fantastic Mr Fox
Roald Dahl, un des maîtres de la littérature enfantine sort enrichi par ce film d’animation de Wes Anderson. Ce n’est pas tous les jours que l’on peut se retrouver dans la peau d’un renard, et c’est bien bon ! En tant que rédacteur de blog, comment ne pas s’identifier à cet élégant journaliste, bien qu’ayant un attribut notoire endommagé, qui se demande s’il est lu.
Et tout à l’avenant : la transmission, l’ai-je bien élevé ? Et ma jeunesse ? J’ai ri à bien des trouvailles crépitantes, d’un rat reconverti en agent de sécurité, été séduit par la façon d’envisager le temps qui passe, la belle vie dans un arbre, et notre société où la sauvagerie est intacte mais où l’authenticité s’efface. Le dernier toast porté dans le supermarché vide vaut bien des déclarations besogneuses de quelques pontifiants pas aussi finauds que Mr Fox.
(Pour les fidèles lecteurs : des ennuis d’écran et de carte graphique ont empêché les mises à jour quotidiennes pendant une semaine; cependant dans le dernier mois ce sont plus de 2000 pages qui ont été lues)
Et tout à l’avenant : la transmission, l’ai-je bien élevé ? Et ma jeunesse ? J’ai ri à bien des trouvailles crépitantes, d’un rat reconverti en agent de sécurité, été séduit par la façon d’envisager le temps qui passe, la belle vie dans un arbre, et notre société où la sauvagerie est intacte mais où l’authenticité s’efface. Le dernier toast porté dans le supermarché vide vaut bien des déclarations besogneuses de quelques pontifiants pas aussi finauds que Mr Fox.
(Pour les fidèles lecteurs : des ennuis d’écran et de carte graphique ont empêché les mises à jour quotidiennes pendant une semaine; cependant dans le dernier mois ce sont plus de 2000 pages qui ont été lues)
dimanche 14 mars 2010
Ciels.
Il faut déposer son manteau au vestiaire pour mieux pivoter sur les tabourets réservés au public au centre du dispositif. Une ambiance particulière s’installe et le pari théâtral est déjà gagné de nous étonner, de nous interroger, de nous embarquer. Tout au long des 2 h 30, une brillante mise en scène nous réserve des surprises, des moments forts. Le propos de Wajdi Mouawad est ambitieux, mêlant les histoires intimes tout en embrassant le siècle. L’art contemporain est sollicité et aussi quelques œuvres du patrimoine universel, avec une forte présence des outils informatiques et audio visuels, et la musique et le cinéma. Parfois un peu trop nourrissant, emphatique, mais un souffle passe avec des comédiens investis et de belles scènes sensibles entre un adolescent et son père. Le scénario est bâti autour d’une affaire d’espionnage où les connaisseurs retrouvent des manières du « Da Vinci Code » en ce qui concerne le décryptage sophistiqué et inattendu de messages envoyés au monde par des jeunes énigmatiques, alors que les chefs s’aveuglent à chercher des coupables du côté d’Ali l’alibi. La poésie va-t-elle sauver l’humanité ? Le conformisme accompagnant la compétition individuelle, est-il devenu si puissant qu’il faille crier pour appeler à la résistance, pour qu’émerge la vérité, l’authenticité ? Les spectateurs applaudissent debout.
dimanche 7 mars 2010
L’ébauche d’un portrait
Transposition sur scène du journal de l’écrivain et metteur en scène Jean Luc Lagarce par son collaborateur François Berreur. Les sept dernières années de l’auteur de théâtre contemporain, le plus joué avant sa mort du SIDA, sont les nôtres, avec le nom des disparus qui défile, elles sont des années intenses. La mort, l’écriture, la notoriété, la solitude, la tendresse, l’exaltation, les dernières fois, la lucidité, la survie, la province, la musique. Il faut un comédien remarquable : Laurent Poitrenaud pour que les deux heures passent en un éclair comme une vie belle et fragile. La mise en scène originale sans être tape à l’œil nous conduit au-delà de l’agréable moment de spectacle à considérer nos existences, en toute limpidité : fort et léger.
Et découvrir ce morceau d’Aragon en retrouvant la voix de Colette Magny :
« Vivre n’est plus qu’un stratagème
Le vent sait mal sécher les pleurs
Il faut haïr tout ce que j’aime
Ce que je n’ai plus donnez-leur
Je reste roi de mes douleurs
Le cœur peut s’arrêter de battre
Le sang peut couler sans chaleur
Deux et deux ne fassent plus quatre
Au Pigeon-Vole des voleurs
Je reste roi de mes douleurs
Que le soleil meure ou renaisse
Le ciel a perdu ses couleurs
Tendre Paris de ma jeunesse
Adieu printemps du Quai-aux-Fleurs
Je reste roi de mes douleurs »
Et découvrir ce morceau d’Aragon en retrouvant la voix de Colette Magny :
« Vivre n’est plus qu’un stratagème
Le vent sait mal sécher les pleurs
Il faut haïr tout ce que j’aime
Ce que je n’ai plus donnez-leur
Je reste roi de mes douleurs
Le cœur peut s’arrêter de battre
Le sang peut couler sans chaleur
Deux et deux ne fassent plus quatre
Au Pigeon-Vole des voleurs
Je reste roi de mes douleurs
Que le soleil meure ou renaisse
Le ciel a perdu ses couleurs
Tendre Paris de ma jeunesse
Adieu printemps du Quai-aux-Fleurs
Je reste roi de mes douleurs »
samedi 6 mars 2010
« Réussir Ensemble Saint Egrève » est en train de se dissoudre.
RESE : C’était le nom de la liste qui regroupait le PS, Le PC, le PG et d’autres citoyens engagés à gauche lors des élections municipales. Nous avons été un certain nombre à vouloir poursuivre le travail sur le long terme pour éviter de nous retrouver, à la prochaine échéance, une fois encore, avec davantage de candidats, se réclamant de la même famille, que d’électeurs. Le dosage entre changement et continuité que nous pensions équilibrer, n’a pas été perçu par la population : nous portions essentiellement l’image de la dernière campagne.
Au moment, où pour la première fois des militants des trois listes concurrentes se retrouvaient, le chef de file des élus du groupe d’opposition démissionnait de notre association en empêchant désormais toute expression sur notre blog associatif.
Ces quelques gargouillis dans un verre d’eau plate ne concerneront qu’une poignée de militants. Nous avions fait le pari de dépasser les querelles enracinées depuis des années, elles ressurgissent, mitonnées par une machine à perdre toujours en pleine forme qui excelle à reproduire les échecs aux élections municipales alors que les votes sont favorables à la gauche à bien des scrutins. Le verbe "réussir" devient ironique.
Un de nos thèmes de campagne insistait sur la cohérence des choix au sein du bassin grenoblois. La posture d’opposant systématique adoptée au plan local est difficile à accorder avec la culture de gestion qui prévaut au sein des villes motrices de l’agglomération. Il fut un temps ou le terme de progressiste était synonyme du parti de la réforme; maintenant certains de nos camarades sont affublés du terme « conservateur ». L’absence de propositions en termes de politique pour la jeunesse, les réticences, par peur de se faire « piquer l’idée » émise bien timidement d’un chèque culture/sport pour les écoliers, justifient des appréciations défavorables, quant à notre manque de courage.
Nous étions pourtant arrivés à accorder nos paroles sur le thème inflammable de la sécurité - non pardon de la tranquillité publique - et puis des incendies récents ont radicalisé l’expression. Un développement concernant des propositions dans le domaine social tel que le micro- crédit vaudrait mieux que l’insistance sur les caméras de surveillance. Se contenter d’une protestation contre l’augmentation des impôts ou la remise en cause d’une salle culturelle prend à contre pied quelque tradition socialiste, et contredit certains choix à l’intérieur de la Métro.
Nous n’avons guère proposé pour une ambition urbaine à la hauteur des enjeux environnementaux à l’entrée Nord de l’agglomération.
1000 tracts, 15 présents à la réunion. Le découragement des militants peut se comprendre, quand tant d’heures de travail payent si peu. A vouloir faire revivre des démarches coopératives repeintes aux couleurs participatives, le constat est amer face au mur solide des susceptibilités et des calculs politiciens.
Le temps d’un congrès, le terme le plus usé est « rénovation », alors que l’archaïsme des pratiques, les stratégies les plus improbables assumées avec désinvolture, perdurent. Quel gâchis ! Notre projet politique est peu lisible, seuls restent exposés des individus. Les conditions d’une élaboration collective étaient devenues difficiles, les démissions sont venues s’accumuler au sein du groupe d’élus. Nos capacités à analyser et projeter pour la commune pouvaient être mises en doute quand à côté de soi les problèmes s’accumulaient et que leur gravité était niée. Pour tracer des perspectives d’avenir qui ne soient pas incantatoires, que des équipes nouvelles dans des dispositifs nouveaux se mettent au travail !
Au moment, où pour la première fois des militants des trois listes concurrentes se retrouvaient, le chef de file des élus du groupe d’opposition démissionnait de notre association en empêchant désormais toute expression sur notre blog associatif.
Ces quelques gargouillis dans un verre d’eau plate ne concerneront qu’une poignée de militants. Nous avions fait le pari de dépasser les querelles enracinées depuis des années, elles ressurgissent, mitonnées par une machine à perdre toujours en pleine forme qui excelle à reproduire les échecs aux élections municipales alors que les votes sont favorables à la gauche à bien des scrutins. Le verbe "réussir" devient ironique.
Un de nos thèmes de campagne insistait sur la cohérence des choix au sein du bassin grenoblois. La posture d’opposant systématique adoptée au plan local est difficile à accorder avec la culture de gestion qui prévaut au sein des villes motrices de l’agglomération. Il fut un temps ou le terme de progressiste était synonyme du parti de la réforme; maintenant certains de nos camarades sont affublés du terme « conservateur ». L’absence de propositions en termes de politique pour la jeunesse, les réticences, par peur de se faire « piquer l’idée » émise bien timidement d’un chèque culture/sport pour les écoliers, justifient des appréciations défavorables, quant à notre manque de courage.
Nous étions pourtant arrivés à accorder nos paroles sur le thème inflammable de la sécurité - non pardon de la tranquillité publique - et puis des incendies récents ont radicalisé l’expression. Un développement concernant des propositions dans le domaine social tel que le micro- crédit vaudrait mieux que l’insistance sur les caméras de surveillance. Se contenter d’une protestation contre l’augmentation des impôts ou la remise en cause d’une salle culturelle prend à contre pied quelque tradition socialiste, et contredit certains choix à l’intérieur de la Métro.
Nous n’avons guère proposé pour une ambition urbaine à la hauteur des enjeux environnementaux à l’entrée Nord de l’agglomération.
1000 tracts, 15 présents à la réunion. Le découragement des militants peut se comprendre, quand tant d’heures de travail payent si peu. A vouloir faire revivre des démarches coopératives repeintes aux couleurs participatives, le constat est amer face au mur solide des susceptibilités et des calculs politiciens.
Le temps d’un congrès, le terme le plus usé est « rénovation », alors que l’archaïsme des pratiques, les stratégies les plus improbables assumées avec désinvolture, perdurent. Quel gâchis ! Notre projet politique est peu lisible, seuls restent exposés des individus. Les conditions d’une élaboration collective étaient devenues difficiles, les démissions sont venues s’accumuler au sein du groupe d’élus. Nos capacités à analyser et projeter pour la commune pouvaient être mises en doute quand à côté de soi les problèmes s’accumulaient et que leur gravité était niée. Pour tracer des perspectives d’avenir qui ne soient pas incantatoires, que des équipes nouvelles dans des dispositifs nouveaux se mettent au travail !
vendredi 5 mars 2010
Poil de Carotte
Je proposais régulièrement à mes CM2 un chapitre du livre de Jules Renard. Ils pouvaient partager l’injustice qui s’abattait sur un enfant à travers un texte du patrimoine à l’issue surprenante et au style efficace. Quelques adaptations télévisuelles de ce court roman ne m’avaient pas convaincu, alors quel plaisir de découvrir cette œuvre dans son intégralité ! Les productions d’aujourd’hui pour la jeunesse sont parfois noires mais n’arrivent pas à la cheville de la cruauté de madame Lepic. Ces temps là étaient sauvages; les lièvres saignent du nez à la cave et les griffes ne sont pas que pour les chats. Poil de Carotte lui-même mérite souvent les beignes qui lui pleuvent dessus, mais elles ne le feront plus pleurer, et il faut qu’il se fasse saigner les joues pour imiter un de ses camarades qui rosit facilement.
« D’ordinaire les habits de toute la famille accrochés au portemanteau l’impressionnent. On dirait des suicidés qui viennent de se pendre après avoir eu la précaution de poser leurs bottines, en ordre, là-haut sur la planche. »
La rudesse des conditions de vie est aggravée par cet amour sans espoir du petit qui use de la ruse et de paroles sentencieuses pour tenter de survivre. Afin de ne pas désespérer le lecteur, il faut savoir qu’une fois la mère se montrera magnanime, et une fois Poil de Carotte refusera une corvée.
C’est du brutal, mais de la littérature à son sommet, d’une sobriété essentielle :
« - Personne ne m’aimera, jamais, moi !
Au même instant madame Lepic, qui n’est pas sourde, se dresse derrière le mur, un sourire aux lèvres, terrible.
Et Poil de Carotte ajoute, éperdu :
- Excepté maman. »
Terrible, éperdu.
« D’ordinaire les habits de toute la famille accrochés au portemanteau l’impressionnent. On dirait des suicidés qui viennent de se pendre après avoir eu la précaution de poser leurs bottines, en ordre, là-haut sur la planche. »
La rudesse des conditions de vie est aggravée par cet amour sans espoir du petit qui use de la ruse et de paroles sentencieuses pour tenter de survivre. Afin de ne pas désespérer le lecteur, il faut savoir qu’une fois la mère se montrera magnanime, et une fois Poil de Carotte refusera une corvée.
C’est du brutal, mais de la littérature à son sommet, d’une sobriété essentielle :
« - Personne ne m’aimera, jamais, moi !
Au même instant madame Lepic, qui n’est pas sourde, se dresse derrière le mur, un sourire aux lèvres, terrible.
Et Poil de Carotte ajoute, éperdu :
- Excepté maman. »
Terrible, éperdu.
jeudi 4 mars 2010
Résonances/ raisonnances
Des images et des musiques pour jouer « Ecoute ce que l’œil peut voir, regarde ce que l’oreille entend » avec Catherine De Buzon, historienne de l’art qui théâtralise ses analyses et Daniel Jublin pianiste et musicologue en harmonie avec elle. Une conférence par des professionnels vraiment affutés, des passionnés. Des mots choisis avec une construction rigoureuse pour des correspondances parfois évidentes. Par exemple, les chevaliers de l’apocalypse de Dürer avec Wagner. Même si nous avons aimé réviser encore quelques toiles du Caravage, c’est Schonberg qui sera souvent appelé pour accompagner des tableaux mais il y a eu du Nougaro avec Narcisse et du Morricone et du Bach et Pablo Casals, du Satie avec Matisse. Clins d’œil avec quelques œuvres remarquables du musée grenoblois : Chagall, Morellet, les vases de Mac Collum, De La Tour, le Dominiquin, Vuillard … et des découvertes ; j’essaierai de me souvenir du nom de Lega Silvestro et la belle lumière qui vient sur une petite fille qui tient la laine enroulée sur ses bras pour aider sa maman. Kandinsky associait les couleurs à des instruments de musique : « le jaune serait figuré par une trompette, le bleu céleste par un violoncelle, le vert de la nature par un violon, le rouge par une fanfare de tubas et de timbales, l’orange par une voix de contralto, le violet par un basson ». Mais rien de mécanique, du pétillant, des escapades loin du froid. La pavane de Fauré sur le tableau le plus célèbre de par chez nous, le lac de l’Eychauda par Guétal a conclu cette belle soirée sur une émotion qui me prend à chaque fois avec ce morceau : c’était ce qui venait à la fin du film de Depardon sur les paysans. Délice déchirant.
mercredi 3 mars 2010
J 25. Chau Doc « Good bye Vietnam »
Nous partons pour l’embarcadère puisque qu’aujourd’hui le marché flottant de Cai Rang est au programme. Nous avons droit à un bateau à moteur exclusivement pour nous. Nous glissons entre les embarcations qui vendent leurs noix de coco d’eau, choux, oignons, courges, signalés par un de ces légumes suspendu à une tige de bambou. De petites barques circulent pour faire des emplettes, pour leur propre consommation ou pour la revente, d’autres pour proposer à boire ou à manger. Notre conducteur s’emberlificote dans les cordages et nous devons nous y mettre à tous pour nous désempêtrer du pneu protecteur d’un autre bateau. Les habitants vaquent à leurs occupations et nous saluent, d’un sourire et d’un signe de la main. Nous apercevons des touristes, et comme chacun d’eux sans doute, nous nous félicitons de ne pas avoir l’impression de participer au troupeau d’un tour organisé. Les photographes ne savent plus où donner de l’objectif.
Le bateau s’engage ensuite dans un arroyo jusqu’à un verger. Nous y dégustons des fruits et du thé et Dany prend quelques secondes pour essayer un hamac, produit local fort répandu. Nous revenons sur Can Tho, remarquant le rose vif de quelques maisons sur les berges. Nous croisons des barques où les rameuses se tiennent debout à l’arrière du bateau, maniant leurs rames croisées. Sur les rives, on assiste à la lessive, à la toilette des habitants des maisons sur pilotis en bord d’eau. Avant de quitter Can Tho, nous passons en vitesse au marché couvert entrevu hier soir. Nous prenons la route pour la ville de Chau Doc qui nécessite en gros trois heures de voyage, interrompues par un repas au bord de route.
Nous posons nos bagages à l’hôtel « Chau Pho » et après un petit temps de repos, la voiture nous conduit vers le centre, puis nous lâche à l’embarcadère au bord du Bassac. Nous nous approchons de maisons flottantes. Certaines abritent des familles n’ayant pu acquérir un terrain pour construire. D’autres possèdent des cages en dessous de l’habitation pour l’élevage des poissons. Nous accostons sur l’une d’elles. Une trappe sur la terrasse en bois laisse apparaître l’eau et quand Thien jette une mesure de boulettes de balles de riz mixées avec des restes de poissons, c’est l’effervescence « dans le bocal ». Nous prenons la dimension de ce village flottant et nous atteignons un village Cham. La première maison que nous voyons est un magasin où travaille une tisseuse coiffée d’un foulard. Sur l’un de ces piliers est indiquée la hauteur des crues selon les années, en 2000 l’eau a grimpé à presque 2 m, jusqu’à l’étage. Un panneau en anglais à l’accostage recommande « de ne pas acheter de gâteaux aux enfants, les gâteaux étant vieux et pouvant entrainer de coliques ». Vrai ? Faux ? Nous nous abstenons. Nous nous rapprochons de la route après avoir gravi un escalier et un chemin cimenté d’où nous pouvons observer les maisons sur leurs hauts pilotis et les ponts étroits en bambous qui y accèdent. Le village, où s’entassent des immondices, parait pauvre. Nous nous dirigeons vers la mosquée, où nous y pénétrons après avoir quitté nos chaussures. Il y a des hommes en sarong et avec calotte. A l’intérieur le muezzin appelle à la prière, avec un certain talent. Nous nous éclipsons. C’est la dernière visite du programme assuré par « Phénix voyage » au Vietnam.Nous découvrons ensuite la ville après avoir observé la circulation et les changements des cyclopousses d’un nouveau genre, comme des calèches en miniatures où l’on ne peut s’asseoir qu’en tailleur. Nous tombons inévitablement sur le marché, puis sur une place où les hommes jouent avec adresse au badminton avec les pieds. Nous rêvons d’une bière. A côté d’une maison coloniale jaune, nous dégotons l’endroit idéal pour la bière fraîche d’abord puis un repas de nems et de calamars ensuite. Il fait bon et les moustiques mangent autant que nous. Face à l’eau sur la promenade des vendeurs ont déployé leurs marchandises sur le trottoir et des jeunes en kimono travaillent leur art martial avec leur professeur. Avant de quitter le pays que l’on a aimé, il faut noter le goût prononcé des vietnamiens pour le karaoké ; lorsqu’il est signalé avec massage, c’est coquin.
Le bateau s’engage ensuite dans un arroyo jusqu’à un verger. Nous y dégustons des fruits et du thé et Dany prend quelques secondes pour essayer un hamac, produit local fort répandu. Nous revenons sur Can Tho, remarquant le rose vif de quelques maisons sur les berges. Nous croisons des barques où les rameuses se tiennent debout à l’arrière du bateau, maniant leurs rames croisées. Sur les rives, on assiste à la lessive, à la toilette des habitants des maisons sur pilotis en bord d’eau. Avant de quitter Can Tho, nous passons en vitesse au marché couvert entrevu hier soir. Nous prenons la route pour la ville de Chau Doc qui nécessite en gros trois heures de voyage, interrompues par un repas au bord de route.
Nous posons nos bagages à l’hôtel « Chau Pho » et après un petit temps de repos, la voiture nous conduit vers le centre, puis nous lâche à l’embarcadère au bord du Bassac. Nous nous approchons de maisons flottantes. Certaines abritent des familles n’ayant pu acquérir un terrain pour construire. D’autres possèdent des cages en dessous de l’habitation pour l’élevage des poissons. Nous accostons sur l’une d’elles. Une trappe sur la terrasse en bois laisse apparaître l’eau et quand Thien jette une mesure de boulettes de balles de riz mixées avec des restes de poissons, c’est l’effervescence « dans le bocal ». Nous prenons la dimension de ce village flottant et nous atteignons un village Cham. La première maison que nous voyons est un magasin où travaille une tisseuse coiffée d’un foulard. Sur l’un de ces piliers est indiquée la hauteur des crues selon les années, en 2000 l’eau a grimpé à presque 2 m, jusqu’à l’étage. Un panneau en anglais à l’accostage recommande « de ne pas acheter de gâteaux aux enfants, les gâteaux étant vieux et pouvant entrainer de coliques ». Vrai ? Faux ? Nous nous abstenons. Nous nous rapprochons de la route après avoir gravi un escalier et un chemin cimenté d’où nous pouvons observer les maisons sur leurs hauts pilotis et les ponts étroits en bambous qui y accèdent. Le village, où s’entassent des immondices, parait pauvre. Nous nous dirigeons vers la mosquée, où nous y pénétrons après avoir quitté nos chaussures. Il y a des hommes en sarong et avec calotte. A l’intérieur le muezzin appelle à la prière, avec un certain talent. Nous nous éclipsons. C’est la dernière visite du programme assuré par « Phénix voyage » au Vietnam.Nous découvrons ensuite la ville après avoir observé la circulation et les changements des cyclopousses d’un nouveau genre, comme des calèches en miniatures où l’on ne peut s’asseoir qu’en tailleur. Nous tombons inévitablement sur le marché, puis sur une place où les hommes jouent avec adresse au badminton avec les pieds. Nous rêvons d’une bière. A côté d’une maison coloniale jaune, nous dégotons l’endroit idéal pour la bière fraîche d’abord puis un repas de nems et de calamars ensuite. Il fait bon et les moustiques mangent autant que nous. Face à l’eau sur la promenade des vendeurs ont déployé leurs marchandises sur le trottoir et des jeunes en kimono travaillent leur art martial avec leur professeur. Avant de quitter le pays que l’on a aimé, il faut noter le goût prononcé des vietnamiens pour le karaoké ; lorsqu’il est signalé avec massage, c’est coquin.
mardi 2 mars 2010
Agiassos #1
Sur son front est tatoué un requin de profil, gueule fermée. Elle lit à haute voix un carnet jauni. Le jeune homme l'écoute en fumant, les yeux levés vers la coupole de verre. Elle tousse et poursuit sa lecture : "...Je retournerai à Agiassos. J'y retournerai. Je sais que je retrouverai la cité inchangée. Rien ne peut jamais changer à Agassios. Tout y tourne à la suite du soleil. Dès l'aube, la ville tourne sa corolle vers le mont Olympe, recompose ses ombres, ses parfums et ses bruits, lâche ses chapelets d'ânes à demi sauvages, testicules écorchés aux épineux, sabots ébréchés, museaux blessés... Elle lâche, Agiassos, ses touristes à scooter, ses bandes de cupidons. Ils ne lancent pas de flèches mais des pierres aux visiteuses, aisselles et seins dévoyés sous les débardeurs. Cette ville que personne ne peut prendre, je la reverrai, pieds nus pour ne pas glisser. Je pactiserai à nouveau avec la traîtrise des pavés et tant pis si la pestilence des rats crevés me lève le cœur, et tant pis si midi me frappe. Je serai un insecte sur ton ventre, Agiassos car tout tourne et roule autour de ton ventre, Agiassos, ville-piège, ville-bousier. Je braverai les vieilles des ruelles, leurs cheveux pris dans des filets noirs. Leurs yeux fixes et doux comme ceux des chiennes de cette île, gardent les ombres de la ville haute... Je tracerai ma ligne de vie dans la main aux quarante rues, aux quarante doigts. Une jeune fille, un marmot morveux entre les jambes, me poussera vers le bas de la ville, me croyant égarée. J'éviterai le traquenard de ses :"Agora ! Agora !"Je ne me plierai pas à sa feinte sollicitude mais j'éviterai son regard sagace. J'irai plus haut que les boutiques de céramiques, plus loin que les derniers bistrots où se figent des dix heures les hommes pris à la ronde des cafés limoneux sous les yeux indéchiffrables des popes joufflus.
J'arriverai où elles m'attendent, dans le bric-à-brac de leur cour. Ce sera l'automne. Elles auront un pull noir sous leur robe noire, le noyer aura gardé quelques feuilles. Les quatre chèvres seront à grignoter ; le cabri sautera sur le toit de sa cabane, dressé sur ses sabots. Il bêlera :"C'est toi ! Bienvenue !
Une des femmes sera occupée à tourner le lait dans la marmite de fonte. Elle lâchera le bâton pour ajouter des sarments au feu, sous le trépied. Preste, elle reprendra le brassage de peur que le monde ne s'arrête. Comme la première fois je la contemplerai, la naïve, la travailleuse sans mémoire. J'agiterai mon carnet, elle comprendra, elle me désignera ma place sur la pile de planches. J'écraserai les épluchures, les crottes sèches, je m'assoirai face à la marmite. Je ne lèverai pas mon crayon, le fil sera tenu. Alors l'autre apparaîtra, forte et joviale. Elle me proposera le lait, elle m'offrira une chaise, apportera le pain grillé et les noix.
Et je couperai le fil.
Leur signe s'assentiment sera discret. Je leur donnerai le dessin. Je me lèverai, elles me presseront dans leur odeur de chèvrerie, elles laisseront à mes joues leur sueur.
Et le fil sera coupé.
Tout droit je descendrai vers l'agora. Sous la voûte de feuilles rouges je boirai le café brûlant, très lentement. Je rêverai dans le sexe des feuilles écarlates. Silencieuse, j'enfanterai un chant en écho au saxo jamais vu qui joue pourtant sur les terrasses d'Agiassos. Saxo du Dieu caché.
Et puis il sera temps de filer ailleurs. »
Marie Treize
J'arriverai où elles m'attendent, dans le bric-à-brac de leur cour. Ce sera l'automne. Elles auront un pull noir sous leur robe noire, le noyer aura gardé quelques feuilles. Les quatre chèvres seront à grignoter ; le cabri sautera sur le toit de sa cabane, dressé sur ses sabots. Il bêlera :"C'est toi ! Bienvenue !
Une des femmes sera occupée à tourner le lait dans la marmite de fonte. Elle lâchera le bâton pour ajouter des sarments au feu, sous le trépied. Preste, elle reprendra le brassage de peur que le monde ne s'arrête. Comme la première fois je la contemplerai, la naïve, la travailleuse sans mémoire. J'agiterai mon carnet, elle comprendra, elle me désignera ma place sur la pile de planches. J'écraserai les épluchures, les crottes sèches, je m'assoirai face à la marmite. Je ne lèverai pas mon crayon, le fil sera tenu. Alors l'autre apparaîtra, forte et joviale. Elle me proposera le lait, elle m'offrira une chaise, apportera le pain grillé et les noix.
Et je couperai le fil.
Leur signe s'assentiment sera discret. Je leur donnerai le dessin. Je me lèverai, elles me presseront dans leur odeur de chèvrerie, elles laisseront à mes joues leur sueur.
Et le fil sera coupé.
Tout droit je descendrai vers l'agora. Sous la voûte de feuilles rouges je boirai le café brûlant, très lentement. Je rêverai dans le sexe des feuilles écarlates. Silencieuse, j'enfanterai un chant en écho au saxo jamais vu qui joue pourtant sur les terrasses d'Agiassos. Saxo du Dieu caché.
Et puis il sera temps de filer ailleurs. »
Marie Treize
lundi 1 mars 2010
Gainsbourg(vie héroïque)
La personnalité complexe du peintre devenu chanteur a inspiré le créateur de BD Johan Sfarr bienvenu au cinéma. Sous la surexposition, Lucien gardera ses mystères. Des épisodes incontournables sont traités avec chaleur : BB et la passion créatrice, la Marseillaise poignante de l’ancien titulaire de l’étoile de shérif- jaune- et d’autres tableaux sont tracés avec originalité : les doubles jeux de la personnalité, la laideur et le charme, la sophistication et les facilités du bizness, la délicatesse et le versant suicidaire, le rideau de fumée, le révélateur des hypocrisies et l’inattendu, le vrai et le faux, les femmes, le petit garçon. Un excellent film qui allie le divertissement et la profondeur.
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