jeudi 10 février 2022

Design et architecture. Laurent Abry.

« La pyramide du Louvre »
de 1983 conçue par Ieoh Ming Pei introduit la conférence devant les amis du musée de Grenoble pour illustrer le dialogue des arts quand la lumière contemporaine met en valeur le patrimoine.
 Sa forme élémentaire évoque la toute
première pyramide édifiée par Imotep 2600 ans avant notre ère comme lorsque s’écoule le sable depuis une main, dans le désert à « Saqqara ».
Autre projet pharaonique, « Le château de Chambord » réalisé en un siècle parait, dans sa perfection, avoir poussé dans la journée.
Concernant la réalisation d’objets où l’utile rejoint l’agréable, l'« Opéra » illustre la notion de design
« un processus proche de l’architecture en raison de la forte implication de la fonction et de la technique dans la méthode de création ». Son architecte Garnier remporta le concours devant un certain Violet Le Duc.  
Eugénie, l’impératrice demanda :  
« - Qu’est-ce que ce style ? Ce n’est pas un style, ce n’est pas du grec, ni du Louis XVI.
- Non, ces styles ont fait leur temps. C’est du Napoléon III » 
aurait répondu son concepteur qui dessina jusqu’aux grilles d’aération. 
Le style est effectivement éclectique, s’inscrivant dans le courant historiciste.
Surmontant la salle qui peut accueillir 2000 personnes, la coupole décorée par Chagall supporte un lustre de 8 tonnes.
La loge numéro 5 était affectée au fantôme de l’Opéra.
Les grands volumes de l’intérieur se devinent à l’extérieur. Inauguré en 1885, Napoléon III ne peut franchir l’entrée qui lui était réservée.
L’Exposition Universelle de 1900, « bilan du siècle » ouvre sur l’avenir. « La Porte Binet »  surmontée par la statue de « la parisienne » devient un symbole de l’Art Nouveau, dit aussi Liberty, Tiffany ou Macintosh.
Il s’exprime à Nancy avec
Majorelle où dans sa maison il y a peu d’angles droits.
A Bruxelles subsistent 200 maisons de ce style dont « l’Hôtel Tassel » et sa rampe d’escalier en coup de fouet.
A Vienne, au
« Palais de la  Sécession » s'inscrit la devise : 
« A chaque époque son art, à chaque art sa liberté ».
De Saint-Pétersbourg, avec la « maison de la compagnie Singer » exprimant son universalisme,
à la
« Sagrada Familia » de Gaudi à Barcelone, les ambitions sont affirmées. 
Le monument emblématique de la ville catalane visité par 3,2 millions de personnes en 2012, commencé en 1882 après avoir été consacré en 2010 devrait être achevé en 2026.
Garnier n’avait pas voulu d’entrée pour le métropolitain de
Fulgence Bienvenüe dessinée par Hector Guimard  devant « son » opéra pour ne pas mélanger les styles. Pourtant malgré leur caractère indissociable de l’image de Paris, rares sont les édicules qui subsistent.
La maison de Charles Mackintosh et Margaret MacDonald  où l’art déco rejoint l’art nouveau a été reconstituée à Glasgow.
Frank Lloyd Wright  considéré comme le meilleur architecte américain a conçu «  La maison sur la cascade ».
Oscar
Niemeyer mort à 104 ans a construit Brasilia. 
« Le béton suggère des formes souples, des contrastes de formes, par une modulation continue de l’espace qui s’oppose à l’uniformisation des systèmes répétitifs du fonctionnalisme international »
On reconnaît facilement les bâtiments chiffonnés de Frank Gehry :  
« Hôtel Marqués de Riscal »
Les lampes qui éclairaient les pêches traditionnelles au cormoran inspirent les lumineuses « Akari » (lumière) d’ Isamu Noguchi.
Le haricot, « Cloud gate » de Anish Kapoor est bien l’œuvre d’un sculpteur étonnant.
Au jeu des échelles le « viaduc de Millau » de Forster  au bord du Causse approche le ciel.
Construite selon les plans de Thomas Heatherwick, « The vessel » s'élève sur 16 étages.
Santiago Calatrava choisit la forme d'un oiseau pour « La gare TGV » de l’aéroport Saint Exupéry.
Dans un format plus modeste, « Le cône en verre » d’Arnaud Lapierre remplaçant le sapin municipal à Bordeaux conclut l’exposé pour nous souhaiter de bonnes fêtes (de Noël avec foie gras). 
 A cette occasion on peut utiliser un des ustensiles conçus par l’architecte Arne Jacobsen, mais un Opinel branché ( en bois) pour trancher fait l’affaire.

mercredi 9 février 2022

Kaysersberg. Ribeauvillé.

Nous quittons Colmar vers 8h30, sous un beau temps qui ne tient pas et s’ennuage https://blog-de-guy.blogspot.com/2022/02/rouffach-neuf-brisach.html
Notre programme aujourd’hui  tourne autour  des villages réputés de la route des vins.
- KAYSERSBERG, la patrie du Docteur Albert Schweitzer est notre première étape.
Nous déposons la voiture au parking  extérieur place des « Malgré nous » ; cette appellation particulière désigne tous les Alsaciens enrôlés sans leur acquiescement dans les armées allemandes lors de la seconde guerre mondiale, une manière de rappeler leur engagement forcé du mauvais côté.
Habituellement envahi de touristes, ce gros village médiéval s’éveille en douceur, sauf au marché place Gouraud où les chalands  apostrophent  les clients potentiels.
Nous arpentons ensuite la rue descendante bordée de maisons à colombages jusqu’au pont. Là, la voie  dévie  sur la droite et se prolonge, nous menant vers la très belle église Sainte Croix de style roman.
A l’intérieur, un superbe jubé en crucifixion
et un très beau retable doré nécessitant tout l’emplacement du chœur,
établissent  la richesse de la communauté de Kaysersberg.
Durant toute notre flânerie dans le bourg,  nous levons sans cesse  le nez  pour voir les belles et rutilantes enseignes métalliques de Winstubs, de boutiques ou d’hôtels.
A hauteur d’yeux, les vitrines des magasins étalent d’appétissants produits, des kouglofs, des assiettes d’écureuil, des pains d’épices, des saucisses, toutes les spécialités locales d’un pays qui aime la bouffe.
- Nous enchainons notre visite des villages avec RIQUEWIHR. De nombreuses  traces et vestiges du moyen âge survivent  dans les fortifications, la tour des voleurs, ou encore les maisons avec leurs fenêtres à meneaux.
Les façades offrent une grande variété dans le choix des couleurs fraiches des crépis, notamment dans la rue principale où abondent  les boutiques de souvenirs et de gourmandises charcutières ou boulangères.
- Nous ne nous éternisons pas et nous nous rendons à RIBEAUVILLÉ pour notre halte repas. Nous mangeons tôt dans le restaurant « la ville de Nancy » avec quelques hésitations quant à l’option terrasse car le tonnerre et le ciel anthracite nous inciteraient à la prudence.
La météo nous épargne néanmoins  le temps de déguster une soupe froide et une cuisse de canard aux pleurotes et pommes de terre, de même nous évitons les gouttes lors de la traversée de la bourgade dont les caractéristiques architecturales et patrimoniales ressemblent à celles des villages précédents.

mardi 8 février 2022

L’enfant, la taupe, le renard et le cheval. Charlie Mackesy.

«- Qu'est-ce que tu veux être, toi, quand tu seras grand ?
- Gentil », dit l'enfant. »
Succès mondial, concert de louanges sur le web gagné par la bienveillance de ce livre « dédié à ma si gentille maman et à mon merveilleux chien Dill ». celui-ci a laissé la marque de ses pattes sur l’un des dessins. 
Les tracés en pleins et déliés se révèlent plus convaincants que les textes dans cette centaine de pages venues d’Angleterre. 
- Ton verre est à moitié vide ou à moitié plein ?  demanda la taupe.
- Je suis déjà content d'avoir un verre.  dit l'enfant. »
Les conversations sur l’amitié entre les amis en promenade sont d’une mièvrerie confondante de platitude qui donne envie de plonger dans quelque conte où le loup boulotterait la grand-mère, comme ça on saurait pourquoi le Chaperon est rouge !
Le format très bref ne permet aucune profondeur aux personnages réduits à la gourmandise pour la taupe, à la méfiance pour le renard, à la solidité pour le cheval, à rien pour l’enfant, si bien que les grands mots,  liberté, peur, courage, amitié… en sont gâchés, vidés de leur sens. 
« Il est de ces livres dont on tombe amoureux instantanément, qui semblent avoir été écrits rien que pour nous, avec lesquels le lien tissé est si fort que chaque page tournée est un déchirement. »
Le concert d’avis dithyrambiques avec Saint Exupéry en référence m’a conduit de l’indifférence à l’accablement et a réveillé chez moi quelque aversion envers Paulo Coelho dont les maximes douceâtres revenues du diable vauvert me mirent jadis les nerfs en pelote.
Houellebecq ou Mortelle Adèle peuvent servir de contre-poison.

lundi 7 février 2022

Red Rocket. Sean Baker.

Les dithyrambes avec entre autres : « une pépite » pour les Inrocks, figurant sur l’affiche aux couleurs flashy seraient peut être à prendre au second degré, comme si le dynamisme du "éros" principal n’était pas essentiellement toxique. 
Même si j’essaye de ne pas confondre personnage et film, il s’agit d’obscénité, non parce que le mot « pornographique » éborgnerait quelque puritain regard, mais l’ancien acteur porno revenu chez son ex et sa mère va repartir avec une jeune fille qu’il destine à cette industrie. Quelques diminutifs très chewing-gums n’amoindrissent pas l’âpre réalité, avec raffineries texanes en fond d’écran et pas un rond. 
« Red Rocket » signifie un sexe (de chien) en érection et c’est bien de chienne de vie dont il s’agit, à tirer des coups à coup de Viagra, de joints roulés dans du papier aux couleurs de l’Amérique, alors que dans les télés toujours allumées parviennent les échos d’un Trump en campagne. 
Il y a bien longtemps que le terme « rêve américain » a disparu même quand il s’agirait de son envers venu sur les claviers formatés alors que bien d’autres auteurs ont parlé de ces zones déglinguées avec un once de tendresse  de plus 
A voir.

 

dimanche 6 février 2022

Le jour se rêve. J. C. Gallotta.

Notre « classico » de la danse de proximité qui a fait ses classes à New York revient chez lui comme à chaque saison.
Je retrouve dans le plaisir pur ses petits pas et ses réinventions avec une vigueur nouvelle sous les musiques envoutantes de Rodolphe Burger, le complice de Baschung. Les transitions sont magiques et la troupe évoluant dans une harmonie parfaite transmet une bonne dose d’énergie.
D’abord masqués, ils tombent veste et masques, et les cinq hommes et cinq femmes vêtus de couleur vives, dont un en slip kangourou - la marque est déposée - nous régalent pendant une heure trente en trois séquences intenses séparées par un intermède. J.C. Gallotta vient danser comme son maître Cunningham et causer avec une bonne dose d’auto dérision, il imite un lapin.
A part l’expression «  abstraction ludique » que j’ai trouvé féconde, je suis toujours étonné de la reproduction à l’identique sur différents sites internet des éléments de langage soufflés par le service de presse : 
«  Souvent la danse de Jean-Claude Gallotta, afin de souscrire à l’ici et maintenant que le corps des interprètes lui impose s’est cherché des thèmes qui la protègent du présent : les mythologies, le répertoire, les hommages. » Certes.
J’aime broder parfois autour d’une aiguille mais je regrette aussi la complaisance des critiques des spectacles vivants qui n’ont pas trouvé leur équivalent « Allo ciné ». On peut aussi  être simple: ici à la MC2, Jean-Claude galopa et ce soir là la salle comble était ravie.