En essayant de me tenir au courant de l’actualité, j’ai
l’impression d’être dans une séquence qui avait servi de générique à l’émission
« Cinéma/cinémas » avec un personnage d’« Alphaville » de
Godard, ouvrant les portes d'un hôtel les unes après les
autres pour les refermer aussitôt. Que cherchait-il ? Que voyait-il ? En 2021, on peut imaginer une chambre : « crise
sociale », une « crise sanitaire », une autre « crise
morale » ou « culturelle », « financière »,
« écologique »…
Ce n’est qu’en se détournant de ces putains d’écrans pour
apercevoir le regard plein de confiance d’un enfant, que celui-ci pourrait nous
obliger à ne pas nous enfouir dans les lointains, et à le regarder dans les yeux.
Les masques devant la bouche conduisent à scruter le haut des visages.
Les réseaux sociaux, que je compulse trop, m’accablent et
accusent nos contradictions.
Plus personne ne prétend donner de leçons - surtout pas les
profs - mais chacun délivre ses prescriptions sans
filtre de « laissons mourir les vieux ! » à « obligeons
tout le monde à se vacciner ! » et surtout « j'fais ce que j'veux! »
Et bien sûr toujours « no no
l’état » pour certains alors qu'ils
attendent tout de « nounou l’état ».
Le journal « Le Monde » jadis référence de
papier, se garde désormais d’apparaître comme tel aujourd’hui. Ses critiques à
l’égard des GAFAM trop indulgents face à des contenus discutables ne pèsent pas
dans la mesure où aucun modérateur ne semble intervenir pour écarter les
commentaires hors sujet qui abondent autour de ses propres publications
« putaclics » sur Facebook. Le courage n’est plus une vertu
tendance, alors il est demandé aux autres d’agir afin de les critiquer ensuite,
mais hors de question d’intervenir dans son aire de responsabilité. Twitter et
consorts se sont gavés avec Trump, ils sont plus qu’inconvenants lorsqu'ils s'érigent
en moralisateurs de la dernière heure au moment où le fou est out.
Il est commun de constater que la COVID a accentué des
traits esquissés avant la pandémie : égoïsme, étroitesse d’esprit,
arrogance, grossièreté tiennent le crachoir. Au pays où les
corvidés parlent aux bovidés, les covidés broient du noir et éclaboussent les alentours de leur encre sombre.
Les
médias montreurs de lune en prennent plein les dents quand ils se mettent
l’index dans l’œil en surévaluant par exemple le nombre de français hostiles à
la vaccination. Des prophéties auto réalisatrices pour avant hier sont pourtant
déversées sur les plateaux où les nuances et la complexité n’ont pas bonne
presse.
Me voilà à geindre sur l’époque tout en regrettant que mes
semblables exagèrent à se poser sans cesse en victimes. La séquence « pauvre
teuffeur » est en voie d’être supplantée par les remontés en neige de la
mécanique.
Les contrariétés du quotidien en temps de pandémie ne
disparaissent pas lorsqu’on en cause. Nos mots reproduisant « ad nauseam » la fameuse tendance caractéristique
de la gauche en particulier; sûre dans ses analyses mais
pusillanime dans ses actions.
Alors quand l'atrabilaire devient trop visible, Victor Hugo donne des alibis:
« Quand les
vieillards croient gémir sur leur temps, ils se trompent ; ils ne gémissent que
sur leur âge. »
Cependant je penserais garder un peu de dignité en n’acquiesçant
pas à toutes les facilités juvéniles qu’absolvent d’abord les démagogues à l’âge
du barbon. « La vieillesse
ne devient médiocre que lorsqu’elle prend des airs de jeunesse »
Hermann Hesse.
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Ci-dessus le dessin provient de « Courrier international »
et ci dessous le dernier dessin de Xavier Gorce pour « Le Monde » qui n'a pas défendu son collaborateur.