mercredi 23 septembre 2020

Le plateau des Glières.

Lieu chargé d’histoire dont le souvenir, a été réactivé, sous forme de querelle, quand Nicolas Sarkozy voulut en faire sa roche de Solutré.
Le site difficile d’accès et éloigné de grands sommets, était favorable aux parachutages d'armes à destination de la résistance locale dirigée par Tom Morel.
Lors de l’attaque de la Milice et de la Wehrmacht  en mars 44, 129 maquisards et 20 habitants y ont perdu la vie.
La nécropole et le musée de la résistance sont situés à la Balme de Thuis à Thônes.
Là haut, le monument de Gilioli auteur également du mémorial de Voreppe, exprime l’engagement des combattants dont la devise était «  vivre libre ou mourir ».
L’alpage dont l’appellation serait antérieure même au mot Alpes est magnifique, les vaches majoritairement de race tarine n’ont que des fleurs à brouter : le reblochon aux fruitières voisines n’a pas besoin de publicités particulières pour garantir la qualité de son lait d’origine.
Depuis le parking du monument à la Résistance, les itinéraires de randonnées varient de 1h 30 à 4h 30. Parmi les nombreuses propositions de restaurants, nous avons choisi celui de «  Notre Dame des neiges » à proximité de la chapelle du même nom accessible seulement à pied.
La tartine aux champignons n’en est que meilleure, bien que la gnôle appréciable pour conclure après un plateau de fromages à disposition ne soit pas le plus efficace des produits dopants.
Notre guide qui avait fait le même circuit en raquettes un soir de pleine lune en conservait un souvenir émerveillé. Nous n’avons pas suivi une ligne directe pour rejoindre le chalet, les sentiers étant balisés pour préserver les tourbières.
En ce mois de juillet,  alors qu’il faisait bon se baigner au lac d’Annecy voisin, les doudounes furent appréciées à 1435 m d’altitude.

 

mardi 22 septembre 2020

L’amour du maillot. Hélène Georges Frédéric Rasera.

La collection «  Sociorama » aborde souvent des sujets intéressants 
mais laisse parfois un sentiment de déception que ne viennent pas apaiser des dessins sommaires.
Le suivi d’un jeune joueur professionnel dans le club de Tourval en national 2 n’apprend pas grand-chose à ceux qui savent ce qu’est « Le Mercato » et qui se régalent à composer leur équipe de rêve. 
Nous sommes loin de Barcelone mais les contraintes et les espoirs sont forts.
Les entrainements succèdent aux parties de jeux vidéos et les relations sont ambiguës quand il faut concilier l’esprit d’équipe et gagner sa place pour le match de fin de semaine. 
Les rapports sociaux sont superficiels et convenus les propos d’entraineur :  
«  on donne tout, je veux voir des guerriers ».
Ce parcours de tout jeune adulte qui a quitté sa famille depuis le centre de formation est fléché jusqu’à ce que se rompent les « croisés » comme cela arrive à un de ses coéquipiers.
« L’amour du maillot » sonne creux. Que restera-t-il de la passion initiale du jeune guyanais pour un jeu disparaissant sous les enjeux des contrats, les humeurs des dirigeants ?
Les carrières sont courtes et exacerbé le déterminisme de la chance, multiples les embuches, criant l’ennui.
Si loin de l’épopée de l’équipe de Clamecy imaginée par Raymond Poïvet et Jean Ollivier en 1949 dans le journal Vaillant, préfigurant le destin de l’AJ Auxerre, où le héros en « Rouge et Or », Jean-Pierre Gary, premier du genre, reste pour moi, le meilleur. C'était de la fiction.

 

lundi 21 septembre 2020

La Femme des steppes, le Flic et l’Œuf. Wang Quan’an.

Une pomme est un cadeau dans l'infini de la plaine mongole où la vie est rude.
Poétique, simple et profond, ce film traite de la place de la femme, du rapport aux animaux en termes éloignés des niaiseries de chez nous qui parlent de chienne « enceinte » et d’ « assassinat » de coq.
Nous mesurons le petit bonheur d’une cigarette et l’immensité des paysages sous un ciel qui occupe tout l’écran. Derrière une intrigue policière traitée à la légère, les belles images évoquent la mort, la naissance,  la beauté du monde, la vitalité de ses habitants avec humour .
"Urga", du nom de la perche-lasso plantée dans la steppe, titrait l’œuvre de Nikita Mikhalkov, il y a trente ans. L’horizon mongol avait été inspirant pour le russe, il l’est pour le chinois, qui ouvre des perspectives humanistes d’une façon originale.

 

dimanche 20 septembre 2020

Béart(s).

Les paragraphes sont moins fournis dans l’encyclopédie de la chanson française à la lettre « B » où Brel, Brassens, Barbara, des « balaises », tenaient toute la place, que pour les mélodies de Guy Béart.
Celles-ci remises au goût du jour se redécouvrent opportunément, et bien des morceaux exhumés reviennent agréablement à nos mémoires.
L’amour d’un père à la naissance d’Emmanuelle avec « L’eau vive » charma notre enfance qui a appris depuis la fatalité des séparations.
« Entre vos doigts l’eau vive s’envolera » 
Les ruptures, les éloignements, les incompréhensions, ne manquent pas : 
« Allo tu m’entends» interprété par les Brigitte manque pourtant de force alors que l’original est pathétique : 
« Je ne t’ai presque rien dit encore » 
Carla Bruni, que j’avais répudiée, est touchante dans «  C’est après que ça se passe » 
et la reprise de « Plus jamais »  par l’actrice de Manon des sources va au-delà d’une désunion amoureuse :  
« Quelle est cette nuit dans le jour ? »  
La « Poste restante » comme les cabines téléphoniques a disparu pourtant :  
« Au rendez-vous des apprentis 
Au rendez-vous des sans logis 
que sont les amours débutantes »  
est bien charmante.
Et bien vachard «Frantz »  en duo avec Julien Clerc :  
« Encore un’ danse
Je rejoindrai mon vieux mari après »
Et je trouve bien entendu tout à fait à leur place
Vincent Delerm : « Bal chez Temporel »
Laurent Voulzy : « Il fait toujours beau quelque part », 
Maxime le Forestier : « De la lune qui se souvient ? »
Alain Souchon : « Seine, va »,
et Catherine Ringer « Les Souliers (… dans la neige) ».
Je découvre Clara Luciani dans l’émouvante « Chanson pour ma vieille »
Angélique Kidjo : « Les Couleurs du temps » 
et Ismaël Lô « Couleurs vous êtes des larmes »  
Avec Akhenaton 
« Qui suis-je
 Qui puis-je
 Dans ce monde en litige» 
 s’éloigne tellement de l’original.
Et si en duo Thomas Dutronc et la comédienne de fille substituent : 
« Qu’on est bien dans les bras d’une personne du sexe opposé » par ceux d’une personne « du sexe désiré » ou du genre « qui nous va » cette mise dans la conformité du jour pour être opportune, en est également opportuniste.
De toutes façons comme le chante Vianney :  
« Il n'y a plus d'après 
 A Saint-Germain-des-Prés 
 Plus d'après-demain 
Plus d'après-midi
 Il n'y a qu'aujourd'hui
 Quand je te reverrai 
A Saint-Germain-des-Prés 
Ce n'sera plus toi 
Ce n'sera plus moi 
Il n'y a plus d'autrefois »

samedi 19 septembre 2020

La vérité sur l’affaire Harry Quebert. Joël Dicker.

Un best seller de 2012 avec d’un côté des lecteurs ravis et de l’autre des critiques critiques.
J’ai vécu dans le désordre ces deux états, trouvant sans intérêt le début où un écrivain à succès est confronté à sa page blanche et puis la tension montant, je suis devenu impatient d’arriver au bout des 670 pages pour savoir de quoi il retourne, après avoir été baladé par l’auteur qui se laisse quand même un peu trop aller à des ricochets succédant à des rebondissements.
Tous les dialogues n’ont pas la saveur de ceux d’une mère envahissante comme il se doit : 
« Markie chéri, écoute, je dois te demander : es-tu amoureux de ce Harry ? Fais-tu de l’homosexualité avec lui ? » 
Est-ce parce que ce livre policier traite aussi de la création littéraire considérée comme le noble art : la boxe, qu’il a été honoré à la fois par l’Académie Française et par le Goncourt des lycéens ?   
« Je veux divertir le public. Lui donner envie de lire des livres. Les gens achètent de moins en moins de livres, sauf lorsqu’on y trouve des histoires épouvantables qui les relient à leur propres infâmes pulsions. » 
La révision de thèmes déjà abordés par tant de romanciers: la passion amoureuse, la solitude, les stéréotypes… peut convenir aux oublieux et à tous ceux qui aiment les mises en abyme, les constructions habiles et une écriture limpide.
«  Il y eut des cris d’effroi dans la foule ; les mères de famille ramenèrent leurs enfants à la maison  et s’y barricadèrent, tandis que les pères ressortirent leurs vieux fusils et s’organisèrent en milices citoyennes pour surveiller les quartiers. » Nous sommes aux Etats-Unis.
Et même si les modes d’emploi sont parfois convenus, y a ben du vrai :
« Apprenez à aimer vos échecs, Marcus, car ce sont eux qui vous bâtiront. Ce sont vos échecs qui donneront toute leur saveur à vos victoires. »

vendredi 18 septembre 2020

L’heur.

Quand « Faire le malheur » ou « faire un malheur » sont aux antipodes, l’article est déterminant.
Ainsi vont bien des choses quand tout et son contraire ne cessent de se compléter.
Les effarouchés par le mot « ensauvagement » euphémisent et ne voient dans des crimes que des incivilités, alors qu’ils se sont délectés avec Despentes qui avait tant aimé les assassins de Charlie et lorsqu’elle récidive régulièrement dans la fureur à longueur de colonnes complaisantes.
Un croche-patte de flic indignera plus certains qu’une voiture fonçant sur un représentant de la loi.
La violence met en péril le « vivre ensemble » quand des potences ont été dressées à quelques carrefours et que des tombereaux d’injures sont déversés en travers des voix dès qu’une opinion s’aventure en dehors de sa chapelle.
« Il prêche l’amour avec haine » Gorki.
Le mot peur est sorti des bois où il se tenait depuis les contes à dents de loup : entre hypocondriaques et inconscients, les redoutants déroutés s’ils ne craignent souvent rien du Covid aiment suspecter toutes les intentions, se rassurant dans un climat anxiogène. Le principe de précaution mis à toutes les sauces appelle toutes les imprudences en miroir: les funambules au bord du vide ne portent pas le moindre casque qu’appelle la plus lente des trottinettes.
Les effarouchés perpétuels « pètent les boulons » et les adeptes de la lutte des races repeignent leurs chaînes, déboulonnent statues et statuts, englués dans un présent sans pardon qu’ils renoncent à penser en voulant purifier le passé.
Tous ces comptables indomptables passent toute leur énergie dans la contestation, sans projet, ils ne savent plus que « cocher les cases ». Et ce ne sont pas les médias anciens à la remorque des nouveaux, regrettant souvent la méfiance des français tout en l’alimentant, qui vont aller contre le vent. 
« C’était un homme vide, qui prônait la suprématie tactique du vide. » 
Antonio Scurati parle de Mussolini. 
« En cela il représente l’archétype du populiste jusqu’à nos jours. Il crée un nouveau type de leadership qui ne guide pas les masses en les précédant mais en les suivant, en les reniflant avec un instinct animal, guettant leurs angoisses, leurs peurs, leurs frustrations. » 
La fraternité est pour les lointains pendant que liberté et égalité se contrarient à nos portes. 
Jadis, les conflits se régulaient, me semble-t-il, dans le respect des interlocuteurs, ce n’est plus forcément le cas ; ressentiment et fuite en avant mettent en doute nos valeurs communes.
La « bête immonde » n’apparaitra pas par surprise sur les écrans à la prochaine présidentielle, elle métastase déjà parmi nous, en nous.
Ayant délégué à des robots le soin d’enlever la poussière de nos tapis, avec serviteurs assurant « drive » et soins aux enfants, nous accroissons les distances entre les citoyens d’un même espace, d’une même espèce.
Sans rouvrir les confessionnaux, comment faire s’évaporer nos restes de culpabilité ?
En tapant sur l’état et ses représentants, ceux-ci feront l’affaire comme boucs émissaires.
Nous avons de plus en plus les mains propres, et  bien du mal à « gérer » les contrariétés, les contraintes, les pleurs et les couches pleines, le travail et le temps. Quand pendant notre vie nous avons tant cliqué, la mort ne deviendrait-elle qu’un bug ?
Pour n’avoir pas grand-chose à dissimuler, je ne comprends pas toujours les paranoïaques braillant à la moindre innovation, bien qu’il soit tout à fait vrai que les territoires de l’intimité se sont réduits. L’ouverture permise par les réseaux sociaux a viré en son contraire lorsqu’ils se sont démultipliés aboutissant à la fermeture communautaire.
« Communautaire » qui va avec « repli » comme la rousseur à la servante anglaise, compte comme synonyme : collectif et fédérateur.  
« Le malheur n'entre jamais que par la porte qu'on lui a ouverte. » dit un proverbe chinois

 

jeudi 17 septembre 2020

Musée de la révolution. Vizille.

Bien que la peinture d’histoire fut pendant des siècles le plus prestigieux des genres, la rubrique « Beaux arts » de ce blog me semblait un peu étroite tant le passé imprègne les épaisses murailles.
Le parc attenant vaudrait à lui seul une page au chapitre « Voyage » quand « les cerfs altérés brament ».
Il n’y a pas d’exposition temporaire pour l’instant mais une révision des collections permanentes valait le détour. http://blog-de-guy.blogspot.com/2009/04/dessiner-la-revolution.html 
Les sculptures sont vigoureuses, les tableaux majestueux, les objets d’art décoratifs émouvants, les mises en valeur pédagogiques ni austères ni sommaires.
Des salles sont dans leur jus, telles la bibliothèque des Perier propriétaire des lieux au moment de la révolution ou une salle art déco destinée aux présidents de la République dont le château construit par Lesdiguières était la résidence d’été. Les transitions avec une muséographie plus contemporaine sont habilement dosées.
Les œuvres sont suffisamment explicites pour une lecture chronologique et les enjeux des commémorations qui ont suivi les riches heures de 89 sont tout aussi stimulants, lorsque par exemple Louis Philippe a passé commande de deux tableaux, l’un dénonçant le pouvoir absolu du roi et l’autre incitant à résister aux foules séditieuses.
« Boissy d’Anglas saluant la tête du député Féraud »
Les propos sont équilibrés entre la geste révolutionnaire héroïque et ses symboles s’inspirant surtout de l’antique pour les peintres français, alors que les anglais qui avaient recueilli les  nobles immigrés  travailleront plutôt l’émotion avec des accents rappelant les représentations des martyrs chrétiens.
Si l’"escalier de la Liberté" mène de "la salle de l’été 89" à la "salle de la République" ne pas manquer le petit salon de musique pas anodin du tout.