mercredi 5 février 2020

Lacs italiens 2019 # 8. San Pellegrino

Temps maussade, changement de tenue vestimentaire pour parer au froid et à l’humidité avant de partir à San Pellegrino, à une trentaine de kilomètres au nord de Bergame.
Nous arrivons dans la petite ville autrefois thermale (San Pellegrino terme) par l’immense usine d’embouteillage qui ne se visite pas pendant les travaux en cours. Nous nous parquons au centre-ville, où nous croisons peu de monde,  au pied du funiculaire lui aussi en réfection. Un automobiliste nous propose son ticket  de stationnement valable pour encore une bonne heure.
San Pellegrino est un modèle de style Liberty que ce soit pour son funiculaire, son casino ou son grand hôtel voire aussi l’hôtel Excelsior.
Nous essayons de nous rapprocher du casino fermé au public, en pénétrant dans le jardin en pente des thermes mitoyens,  arboré de cèdres. Il conduit d’abord à une billetterie adorable, avec des ferronneries d’un beau rouge basque.
En longeant les thermes luxueux et vitrés qui laissent apercevoir les curistes en peignoirs blancs, on peut accéder à une barrière d’où l’on aperçoit la façade du  casino : 2 tours latérales font penser aux clochers d’une église, séparant le bâtiment principal des 2 terrasses soutenues par un portique ; de grands luminaires ou appliques art déco encadrent l’entrée, des bas-reliefs floraux complètent les éléments caractéristiques de cette époque. Derrière se cache une construction moderne en métal rouillé.
 
A part l’activité des thermes qui se sont modernisés et étendus à côté du casino, et malgré les travaux,  l’ambiance de la ville est empreinte de nostalgie. San Pellegrino  semble endormie après sa splendeur d’antan dont il reste des traces dans beaucoup de bâtiments, maisons thermes + anciens et fermés, hôtels plus modestes.
Dans notre déambulation nous tombons sur l’info Point. Un jeune homme 18/20ans se montre tout à fait à la hauteur de la situation et jauge assez vite ce qui nous intéresse : explications en français, plans, renseignements sur la ville en grande rénovation pour ses monuments remarquables afin de relancer le thermalisme de cure en plus du thermalisme de confort (« relax »).  
Il nous apprend aussi que 1500 personnes sont employés à l’usine d’eau minérale, que la population actuelle  à San Pellegrino tourne autour de 5 000 âmes. Il répond à toutes nos demandes.
Avant de quitter la ville, nous essayons de nous rapprocher du grand hôtel derrière ses  palissades et sous échafaudages. La toiture est pratiquement refaite, l’intérieur complètement chamboulé pour être réorganisé et la façade de brique attend encore d’être reprise. Nous voulons nous garer, mais avec les travaux d’un nouveau parking de l’hôtel et une signalisation qui manque de clarté, nous nous engageons malencontreusement sur une piste cyclable certes large mais barrée à l’autre bout qui oblige Guy à une longue marche arrière.  Nous renonçons à poser la voiture, de toutes les façons, nous ne verrons guère plus à cause des travaux.
Nous suivons le circuit proposé par le jeune du syndicat d’initiative vers le nord à San Giovani Bianco où après une erreur  d’aiguillage, nous bifurquons vers l’Est, vers Borgo di Aneto recommandé pour sa Casa di Arlecchino.  
Nous sommes contents de découvrir ce village de montagne médiéval, loin d’un tourisme tapageur, loin de tout tourisme d’ailleurs malgré la présence d’une auberge surmontée du musée (casa di Arlecchino) ouvert malheureusement pour nous de 14h30 à 17h30. Pourtant les maisons de pierre avec balcon de bois et les fresques à moitié effacées d’une partie de l’église extérieure, occupée par des tables et des chaises de l’auberge aux couleurs d’Arlequin (rouge vert jaune), ne sont ni des ruines ni des musées mais des lieux habités. Aujourd’hui tranquille et sans grande activité, ce bourg connut la richesse et  une fréquentation bien plus importante  car il se situait sur l’une des voies  de commerce du moyen âge.

 Nous roulons ensuite vers le Val de Taleggio, dans des gorges étroites du torrente Enna que D. trouve particulièrement longues. Nous y croisons assez peu de véhicules heureusement.  Le site est vraiment pittoresque et sauvage jusqu’à l’arrivée à  Sottochiesa, petit bourg montagnard dans les nuages  avec un seul restaurant « chez Marco » que nous croyons d’abord fermé jusqu’à ce que nous poussions  la portière anti-mouches et entendions le brouhaha de conversations. Il nous est servi un bon repas à l’étage de la maison en bois style chalet : pâtes tomates ricotta ou sauce viande et champignons, tarte au chocolat ou tiramisu ou mystère, ½ de rouge et 4 cafés pour presque 60 € pour quatre.
Dehors, il fait froid, il nous faut superposer pull et imper et nous protéger la gorge avec un chèche. Nous reprenons notre circuit en voiture  en passant à Olda, tournons vers Peghera qui offre une belle vue  sur Olda et Sottochiesa mais malheureusement  la brume cache le panorama sur la vallée.
La route continue vers Bura, Gerosa di val Brembilla, A Brembilla nous  faisons une halte rapide pour photographier un vieux pont de pierre, le pont del cappello et des panneaux pédagogiques expliquant la route du fer à dos de mulet ; à côté, une grosse cimenterie donne une idée de l’activité économique du coin.
Lorsque nous rentrons  sur Bergame, la ville est  ensoleillée.
Une fois la voiture mise au garage, nous visitons un peu mieux la ville basse avec ses rues commerçantes s’étirant vers la piazza Pontida dans une douceur de septembre et moins d’épaisseurs sur le dos.
Un marchand de Tshirts, qui crée lui-même les dessins et  les slogans qui les caractérisent  nous accueille dans son magasin avec hospitalité, il prend le temps de discuter et nous offre des bonbons.
C’est tout près de notre bercail, et, à la maison,  nous nous apprêtons à prendre  notre dernier repas bergamasque avant de faire nos valises.

mardi 4 février 2020

Mc Curry, NY 11 septembre 2001. JD Morvan June Gi Kim.

La couverture nous renseigne sur la présence de photos au sein d’une BD.
Le photographe dont il est question est l’auteur du portrait devenu emblématique d’une jeune afghane aux yeux verts.
Quant à la date figurant en titre : le chiffre est resté dans les mémoires, mais il n’est pas inutile de revenir sur l’évènement matrice de tant de basculements.
Le photographe revenait du Tibet quand il a entendu des explosions dans New York comme il en avait subies en Afghanistan, pays qu’il connaissait bien depuis la guerre menée par les russes. Il avait contribué à populariser la résistance des moudjahidines qui se verront armés par les Etats-Unis à cette époque : le retournement historique n’en est que plus cruel.
Il va se précipiter avec son assistante sur les lieux de la déflagration jusqu’à déjouer les interdictions de s’approcher, et mitrailler, on dit comme ça pour prendre de nombreuses photos.
Le récit commence le 13 novembre 2015, et cette date ne me disait plus rien : mais si le Bataclan !
Il est alors au stade de France pour le match amical France/Allemagne où deux hommes se sont fait exploser, créant une panique monstre. Il n’est pas en reportage, mais décidément il est toujours là où explose l’histoire !
Les dessins nerveux disent bien l’effarement de ces instants et les photographies prouvent que la notoriété du reporter n’est pas usurpée. Le propos qui se consacre au parcours de Mc Curry n’a pas la prétention d’évoquer toutes les dimensions des attentats dont les victimes ont été enfouies pas seulement sous les gravats mais par nos mémoires saturées. Les indulgents envers les fanatiques ont ajouté quelques pelletées sur ces cadavres comme sur tant d’autres.
Les écrits en conclusion de cette centaine de pages ne font que redire ce qui figurait dans le récit. Si souvent des albums cultivent l’ellipse, cette fois les entretiens redondants sont inutiles, la BD était suffisamment explicite.

lundi 3 février 2020

1917. Sam Mendes.

Comme lorsque j’étais enfant et qu’on allait au monument aux morts, avant le vin chaud, je me suis rendu au cinéma, façon de secouer la poussière qui a recouvert quelques médailles ancestrales oubliées dans leur cadre. J‘avais surmonté la lassitude qui m’avait assailli à l’annonce d’un nouveau film sur la guerre de 14 -18 traitée à la télévision
en littérature
en bandes dessinées
en peinture
au cinéma
Et j’ai été happé dès le départ, haletant derrière deux jeunes anglais bravant tous les dangers pour apporter un message qui doit éviter le massacre de milliers d’hommes. La façon de filmer est efficace mais je me suis essoufflé à partir du moment où l’ennemi méchant et fourbe apparaît. Le danger était plus palpable quand il n’était pas montré. Lorsque de multiples balles sont tirées qui ne font qu’effleurer le héros dans un décor d’incendie trop photogénique, on se met à compter les invraisemblances depuis la communication instantanée entre une jeune française et l’anglais qui a conservé opportunément du lait pour le bébé jusqu’à la lettre portant les ordres du général qui a résisté à un séjour dans des eaux tumultueuses après un plongeon vertigineux depuis une cascade comme il y en a peu du côté de Bapaume.
Rarement un film m’a donné ce sentiment contrasté de tant d’adhésion du départ tournant à la déception. 
  

dimanche 2 février 2020

White dog. Latifa Laâbissi.

Il y a tromperie sur la marchandise.
Nous avions bien lu qu’il était question du roman de Romain Gary, « Le chien blanc » qui « interroge sur la haine raciale » et que ce spectacle était de la danse.
Pendant une demi-heure quatre personnes tressent des cordes, tirent dessus, font des nœuds,  les défont, et puis se mettent à gesticuler, crier et retombent pour s’enfouir dans quelques paquets de macramé fluo. Ils portent une chasuble en jean et sourient nous montrant leurs dentitions dorées.
A défaut de commentaire plus laconique qui se résumerait à un sentiment de « foutage de gueule », je me réfère au journal de salle :
«  une lutte contre les assignations, une invitation à casser les codes, une fuite loin des identités et des genres ».
Ce ne sont pas les codes que la pièce nous a cassés, quant à la fuite c’était peut être la dernière solution raisonnable.
Le seul point positif est une durée d’une heure, égale au temps mis pour couvrir les dix kilomètres qui séparent ma maison de celle qui fut de la culture. La limitation à trente km/h est une promesse inatteignable.  
Je n’aurai pas perdu totalement ma soirée puisque j’ai appris ce qu’était un « lore » grâce à Wikipédia : « le lore, emprunt à l'anglais signifiant « folklore », « tradition orale », « diégèse », est l'histoire d’un univers de fiction ne constituant pas l’intrigue principale d’une œuvre. Ce terme est notamment utilisé dans le domaine des jeux vidéo. »
Voilà qui éclaire la note d’intention : « Un pas de côté, une fiction, une science-fiction pour entrer le temps d’une ronde, dans un lore sans folk à quatre corps… ».
On entend quand même quelques chiens : « Oua ! oua ! » Waf waf.

samedi 1 février 2020

Tous, sauf moi. Francesca Melandri.

Le titre donne une idée de la croyance d’Attilio Profeti vis-à-vis de la mort, c’est vrai qu’il a eu de la chance tout au long de sa vie, lui qui a failli porter le prénom d’Attila en l’honneur d’un opéra peu connu de Verdi, mais qu’il aurait pu conserver tant il a pu commettre des actes horribles. Sa fille va avoir envie de connaître ce passé quand un jeune éthiopien se présente chez elle avec les papiers d’identité où figure dans son patronyme « Attilaprofeti ».
Sur 565 pages, en Italie et en Ethiopie, une histoire du dernier siècle se révise à travers le destin de toute une famille.
« L’Italie était un ancien alcoolique qui, comme tout nouvel adepte de la sobriété, ne voulait pas être confondu avec le comportement qu’il avait eu lors de sa dernière et tragique cuite. Elle ne désirait que les petits progrès quotidien du bien-être moderne, qui germait comme les pissenlits de mars sur les décombres. »
Un livre puissant où les époques se mêlant ne constituent pas un procédé qui embrouille mais offre un moyen efficace pour mesurer le poids de l’histoire dans les problèmes du présent.
« Quand on avait le « grazie »
Avec ton savon
Tu te lavais toi.
Quand il y avait le « thank you »
Avec ton savon
L’Anglais se lavait.
Maintenant il y a l’ « amaseghenallo »
Et ton savon
Tu le manges parce que tu as faim. »
J’en étais resté à l’idée que l’Ethiopie était le seul pays d’Afrique à ne pas avoir été colonisé, alors que les fascistes italiens ont occupé le pays partiellement cinq ans durant mais ont perpétré des massacres et tenté d’humilier tout un peuple. Ceux qui ont été l’instrument de ces ignominies ont été marqués aussi et sur plusieurs générations.
«… le but était d’enseigner aux 70 élèves, « notre langue, nos coutumes, nos mœurs, les amenant ainsi à une vie éduquée, cherchant à leur inculquer des sentiments aimables, le germe du Bien, l’amour du Devoir et du Travail, la gratitude envers l’Italie qui fait tant pour leur éducation. »
Mais le ton n’est pas à la condamnation à postériori, et les contradictions, les éléments de compréhension autour du parcours qui a amené aux malheurs rendent plus fortes les révélations. 
Le phénomène des réfugiés qui arrivent en Italie est traité avec une profondeur historique passionnante. La psychologie complexe des personnages rend la lecture agréable d’autant plus que le style est efficace et original.
« Tu sais la confiance, c’est comme une corde. On doit la tenir à deux, sinon ce n’est pas valable »
La formule m’avait plu mais peu après son énonciation, elle est démentie par la vie.
D’autres ont la saveur de l’expérience :
« Les malheurs marchent comme les chèvres, un derrière l’autre. »
« Les définitions définissent celui qui définit, non pas celui qui est défini. »
« Ne te regarde pas trop souvent dans un miroir […] si tu veux savoir qui tu es, regarde comment te regardent les autres. 

vendredi 31 janvier 2020

« Qui n’en veut ? »

L’expression « Qui n’en veut » est désuète comme les sketchs des Deschiens qui imposèrent un label qui toujours m’embarrassa tant je reconnaissais dans leur miroir impitoyable, un milieu familier.
Mais aujourd’hui qui a la "grinta", de l'appétit, qui n’en veut ?
Alors que la dépression travaille la société française, l’énergie de ceux qui construisent et investissent était jusque là plutôt chinoise et la vigueur spirituelle tournée vers La Mecque, alors que chez nous la détermination en politique, de préférence négative, verserait vers la haine faute de construire des perspectives crédibles à partager par une majorité. C’est que les Incompris arthritiques, soumis à l’air du temps, courent en tous sens, après tout ce qui bouge pour que rien ne bouge.
Dans un espace public asséché par les écrans, la couleur jaune des maillots de l’an dernier a tourné à la veste lors du tour d’Europe devant les électeurs. De braséros en torches dans la nuit, l’émotion a mangé la raison.
Le pli a été pris pour une radicalité des comportements revendicatifs. Blocages, cadenas, piquets sont rédhibitoires en signant des difficultés à convaincre quand bluff, mensonges et courte vue compromettent la crédibilité des argumentaires.
Je ne déroge pas à la règle commune en vilipendant  Facebook tout en y étant constamment collé, regrettant que les réseaux sociaux, où la tricherie et les faux semblants deviennent viraux, acceptent si peu la contradiction.
Pris dans l’engrenage, je participe à l’agressivité générale, mais difficile de se taire quand la France est traitée de dictature. Tant de mauvaise foi me radicalise dans mes postures légitimistes.  Il n’y a pas de raison que la polarisation des débats n’électrise qu’un côté de la borne !
Pour prolonger un article précédent
http://blog-de-guy.blogspot.com/2020/01/verites.html
la formule «  la vérité existe en dehors de nous même » me semble féconde puisqu’elle incite à aller voir ailleurs, chez l’autre.
Mais au jeu des citations, les  phrases qui claquent ne manquent pas et si «  seul on va plus vite, à plusieurs on va plus loin » valable pour un spectacle de danse, la question de la destination reste entière.
Par un effet de balancier lui aussi très banal, je suis désormais d’avantage porté à admirer des individus que transporté par les effusions collectives. J’eus le goût jadis de travailler avec des gens différents, je fuis désormais les assemblées unanimes et me désole solo derrière mon écran des copiés/collés qui abondent en des lieux où on pourrait attendre des opinions originales.
« Il y a beaucoup de vertu à vaincre sa volonté et à se soumettre à celle des autres » 
Le proverbe est chinois.

jeudi 30 janvier 2020

Du noir et blanc à la couleur. Voyage dans les Etats-Unis de 1950 à 1980. Hélène Orain.

Si les années 50 ont constitué une rupture en matière de photographie, la conférencière devant les amis du musée de Grenoble devait rappeler quelques personnalités qui avaient marqué les décennies précédentes colorisées de nostalgie.
Tel, Paul Strand, en 1916, un pionnier. « Blind woman ».
Déjà Alfred Stieglitz, « Old and New »  à New York, avait impulsé la modernité et fait reconnaître la photographie en tant qu’art.
« Le photographe est l’être contemporain par excellence, à travers son regard, le maintenant devient du passé. » Berenice Abbott « Nightview »
Walker Evans, célèbre pour ses portraits : « Floyd Burroughs », sonde les profondeurs d’une nation, ses routes, son architecture, il est exposé en 1933 avec Edward Hopper.
Mais c’est peut être à partir de Cartier Bresson, le plus imité, et son fameux « moment décisif », que se situeront de nombreux novateurs. « Simiane-La-Rotonde »
En 1955, Edward Steichen donne une impulsion nouvelle aux façons d’exposer avec une scénographie originale avec «  The family of man » (500 photos, 273 photographes, neuf millions de visiteurs). Son contenu optimiste présente  tout ce qu’un monde pacifié possède en commun : une maman, un travail. « La vie, l'amour, la mort ».
Loin de ces cimaises, William Klein  qui vivait à Paris, revient chez lui : «New York avait des comptes à me rendre. La ville m'avait toujours paru moche et inconfortable. Mes souvenirs étaient gris. »
Il réalise un journal photographique où il saisit le bouillonnement de tous les quartiers. « New York », d’abord publié en France, comme dans l’imagerie du fait divers, a du grain, du flou, des cadrages inédits. Le grand bonhomme provoque ses sujets.
«  Gun »
« Gun, gun, gun »
Alors que le photo journalisme est à son apogée, le suisse Robert Frank choisit de partir avec sa famille à travers les Etats-Unis grâce à une bourse Guggenheim. Il n’apprécie pas que ses cadrages lui échappent, comme le choix des clichés, voire les légendes. Jack Kerouac préface son livre « Les Américains » dont il retient 87 photos sur 23 000 prises : « Vous regardez ces photos, et à la fin vous ne savez plus du tout quel est le plus triste des deux, un jukebox ou un cercueil ».
En 1967, au MOMA, John Szarkowski présente «  New Documents » avec Diane Arbus, aux images sans concession dont « Les jumelles identiques » inspireront les personnages de Shining.
Sa photographie d'un « Enfant avec une grenade en plastique dans Central Park » a pesé sur la jeunesse de ce garçon qui finalement a reconnu la violence qui le tenaillait alors. Plus tard, il a appelé sa société « Grenade Boy Productions ».
Gary Winogrand disparu prématurément laissant 250 00 photos inédites, « le péquenot de la photographie » comme l’appelait un confrère, est un des maîtres de la photographie de rue. Avec humour et énergie, il rend compte d’une nation prise entre angoisse et optimisme.
« El Morocco »
« Central park Zoo »
Lee Friedlander joue sur les reflets, multiplie les autoportraits où on ne le voit pas, bien avant les « selfies ». « Self Portrait »
Vivian Maier, amateur ignorée n’avait pas vu les photos qu’elle prenait dans ses moments libres ou lorsqu'elle  promenait les enfants qui lui étaient confiés. Avec une ironie teintée de poésie, elle est attentive à ceux qui comme elle, « la nounou » n’apparaissaient pas aux yeux de  certains de leurs contemporains. « Enfant qui pleure ». Elle est exposée actuellement au musée de l’Ancien Evêché.
Alors que le titre de la conférence annonçait la couleur, la rareté des Kodachrome a mis en évidence leur beauté. Discrètement avec  « Snow », de Saul Leiter, peintre à ses débuts ou d’une façon affirmée par Meyerowitz pour qui « la photographie de rue c’est du jazz ». Il a été le seul accepté à Ground zero, il y est resté 9 mois.