mercredi 10 décembre 2014

Iran 2014 # J 9. Ispahan.

Nous quittons l’hôtel après le petit déjeuner et la récupération des vêtements donnés à laver. Première étape à la poste, nous achetons des timbres pour nos cartes postales de moins en moins nombreuses à envoyer. Puis nous filons vers le grand bazar, vite freinés par l’achat d’une pierre ponce et de bracelets en cuir masculins, chaperonnés par un petit monsieur qui veut se mêler à toutes les négociations. 
Nous déambulons dans le labyrinthe des petites boutiques, assez tranquilles, parfois salués gentiment, au milieu du trafic des carrioles à vide ou surchargées poussées par des hommes. Puis nous rejoignons le bazar moderne qui nous permet d’accéder à la porte de la mosquée du vendredi.
Depuis 841 elle témoigne des évolutions de l’architecture suivant les époques « abbasside, bouyide, seldjoukide, ilkhanide, muzaffaride, timouride et safavide ». Elle se distingue des autres, car elle est en briques, sans carrelage ni mosaïque, très sobre. Elle abrite un très ancien mehrab du XIV ° siècle avec une chaire au bout d’un escalier. Elle a subi un tremblement de terre, un incendie, un bombardement pendant la guerre contre l’Irak. Une salle avec plus de 400 piliers de traviole témoigne du séisme. Les coupolettes diffèrent par leurs briques disposées de façons variées. Sur des piliers il y a des sortes de croix qui participent à l’acoustique de la salle.
Repas derrière le rideau baissé d’un restau : c’est ramadan.
Nous allons tous au café repéré hier qui délivre des expresso.
Le palais des 40 colonnes n’en comporte que 20, mais elles se reflètent dans un bassin. Comme dans le palais d’Ali Qapou des miroirs alvéolés agrémentent un plafond extérieur soutenu par ces piliers avec des têtes de lion à leur base. 
Nous nous promenons dans le parc où nous pouvons  pénétrer dans un tronc gigantesque d’un arbre mort.
A l’intérieur de magnifiques fresques représentent des scènes de guerre, des assemblées de notables avec danseurs et musiciens et en plus petit des scènes galantes aux couleurs magnifiques avec même une salle ouverte spécialement pour nous grâce à notre guide.
L’église arménienne Saint Sauveur comporte  aussi beaucoup de fresques dont un immense jugement dernier, il n’y a pas un espace laissé libre. Une barrière sépare l’espace de prêtres et celui des fidèles. Un arménien parlant français nous explique que l’immigration arménienne a été bénéfique pour l’Iran en fournissant en particulier des ingénieurs pour le pétrole.
Un petit musée sur deux étages est installé dans un bâtiment annexe  avec des manuscrits remarquables, des vêtements, des objets religieux , des instruments de musique, mais surtout un cheveu où l'on peut voir sous microscope, une phrase entière écrite avec une pointe de diamant.
En mangeant une glace au safran nous longeons la rivière Zayanderoud, à sec à cause d’un barrage en amont. Le pont Si-o-se Pol à deux étages compte  trente trois arches, il est le rendez vous des amoureux. Deux footballeurs nous sollicitent pour correspondre avec des clubs français. Nous revenons à l’hôtel en passant par un ancien caravansérail occupé par  le luxueux hôtel Abbasi.
Nous accédons par minibus à un restau en terrasse qui domine la ville, où il fait bon : c’était une surprise. A la sortie échange de photographies avec des dames en noir et humour universel : un gendre veut nous refiler sa belle mère. Les ponts magnifiques au dessus du fleuve à sec sont éclairés,  nous imaginons Lyon sans le Rhône.   
D'après les carnets de voyage de Michèle Chassigneux.

mardi 9 décembre 2014

Fête des lumières Lyon 2014.

J’en étais resté à 3 millions de visiteurs pour ces quatre jours lumineux, certains parlent de huit millions, en tous cas: beaucoup de monde pour 75 propositions. 
Avec forcément une part de frustration à la marge d’un plaisir renouvelé chaque année http://blog-de-guy.blogspot.fr/2013/12/fete-des-lumieres-lyon-2013.html
Nous sommes restés dans le centre de la ville ancienne aux bâtiments magnifiés en ce début décembre pour entrer, au vin chaud, dans l’hiver.
 A Bellecour nous n’avons pas tout vu, mais le passage d’acrobates sur leur bicyclette ailée devant une lune à portée de main était magique, en hommage à Saint Ex. Au fond la basilique de Fourvière sous une boule à facettes en oublie ses airs de Reconquista.
La lampe de chevet construite sur la fontaine de la place des Jacobins prépare les enfants à leurs rêves.
Nous sommes devenus bien difficiles en jetant seulement un coup d’œil distrait sur les lanternes chinoises rue de la Ré ou sur les fleurs tête bêches de la rue Edouard Herriot.
De petits esquimaux facétieux sur les murs de l’ Opéra ouvrent l’appétit.
Les poissons de papier du parc de la Tête d’or et les globes sur l’eau du lac donnent parmi les arbres, un air de féerie  et d’humus au cours d’une déambulation forcément urbaine.
Le clou de la fête est toujours Place des Terreaux,  où cette année beaucoup s’accordent à trouver la performance artistique particulièrement réussie. Des tableaux évoquant les œuvres contenues au musée s’animent en musique et éclaboussent de couleurs l’hôtel de ville et toute la place.
 En passant de l’autre côté de la Saône la gare Saint Paul a pris des allures de machine à sous, et la cathédrale Saint Jean offre ce qui a été pour moi le plus cohérent des spectacles de cette cuvée : un coloriage original met en évidence l’architecture, la requinque en s’accordant parfaitement à des musiques qui nous élèvent.
Il parait que les arbres en tutu  de la place Sathonay ou les champs de lavande de l’amphi des trois gaules valaient le détour, mais ce que j’ai préféré ce sont les petits pots colorés qu’a préparés ma petite lyonnaise pour mettre sur sa fenêtre le 8, le vrai jour.

lundi 8 décembre 2014

Timbuktu. Abderahmane Sissako.

Les bandes djihadistes au  Nord Mali, très bêtes et très méchantes interdisent le foot et la musique, lapident et font mettre gants et chaussettes aux femmes. Une poissonnière n’en veut pas, et les femmes les plus exposées aux machos qui ne tuent pas que leur ennui, une fois de plus, seront les plus courageuses.
Il y a de quoi désespérer des hommes quand ceux-ci  affrontés à la misère s’appliquent à asservir encore plus leurs sœurs et frères.
Des séquences utiles dont la force s’amoindrit parfois en se liant à une intrigue aux traits appuyés, à des images lumineuses trop lisses qui banalisent un message politique indispensable.
Le réalisateur aurait du s’appliquer plus souvent l’expression d’un de ses personnages : «  ce que je ne te dis pas, tu le sais déjà ». 

dimanche 7 décembre 2014

Oncle Vania. Tcheckov.Lacascade.

Que serait un automne sans Anton (Tchekhov) ?
Si des durées de plus de deux heures deviennent habituelles, les plateaux avec onze acteurs se raréfient.
Les comédiens, celui qui joue Vania en tête, sont parfaitement au service du metteur en scène qui a adossé « L’homme des bois » à la célèbre pièce titre, même si tous ne correspondent pas à l’idée que je me faisais de leur âge. Je ne voyais pas non plus une exposition des sentiments aussi soulignée d’autant plus qu’amours et amitiés sont chahutés, mais rien ne semble grave dans cette tragédie traitée parfois de burlesque façon, jusqu’à la fin des rêves.
La vie du groupe réuni à la campagne comporte des scènes très enlevées, sans les ambigüités  que j’imagine chez l’auteur, mais il est vrai que l’alcool  tient sa place et l’outrance slave ne contredit pas forcément les subtilités.
Lacascade qui avait déjà monté du Gorki ici http://blog-de-guy.blogspot.fr/2011/06/les-estivants-de-maxime-gorki-eric.html dit : « pour Tchekhov existe un combat permanent entre une intériorité et une extériorité, entre le fond et la forme»
Nous attendons l’arrivée des invités comme les premiers acteurs qui patientent, et si la musique accompagnant cette réunion à la campagne de familles recomposées a des accents mélancoliques, la vigueur des verres qui s’entrechoquent nous donne soif. Le discours qu’on dirait écologiste du médecin est époustouflant, la pièce a été écrite en 1897. Faut-il se réjouir de sa modernité, car le constat n’a fait que s’aggraver ?
Et de toutes façons : « Que faire ? Il faut vivre ! Nous vivrons, oncle Vania ! Nous vivrons une longue série de jours, de longues soirées. Nous supporterons patiemment les épreuves que nous enverra le destin […] Et quand notre heure viendra, nous mourrons soumis. Et là-bas, au-delà du tombeau, nous dirons combien nous avons souffert, pleuré, combien nous étions tristes […] Nous nous en réjouirons, et nous rappellerons avec une humilité souriante nos malheurs d’à présent. Et nous nous reposerons. »
Les lumières sont magnifiques.

samedi 6 décembre 2014

Un été avec Proust. Laura El Makki et compagnie.

Ouvrage collectif dont le collaborateur le plus connu est Antoine Compagnon qui produisit l’été d’avant un succès de librairie avec Montaigne en digest. Ce fut aussi une série d’émissions sur France Inter pendant les vacances.
Craintif devant la cathédrale représentée par les sept tomes de la centenaire « Recherche »,  j’ai acheté ce petit livre, comme un guide de voyage avant de m’embarquer peut être pour ce pays impressionnant.
Les 230 pages explorent le temps, les personnages, l’amour, les mondanités, les lieux et l’imaginaire de l’écrivain majeur et son art de révéler musique, peinture… Pour conclure avec ses rapports avec les philosophes, lui, le cousin de Bergson.
"Comme le dit Bergson, on ne voit jamais les choses mêmes, mais on voit les étiquettes qu'on a posées sur elles"
Ses phrases sont si longues afin d’approcher subtilement les objets, qu’un empilement de citations ne pourrait qu’être grotesque, pourtant :
« Tâchez de toujours garder un morceau de ciel au-dessus de votre vie » est bien joli.
L’entreprise est sympathique car elle ne prend pas le lecteur de haut, tout en faisant confiance à son attention :
« même si on ne s'intéresse pas du tout aux salons du tournant du XIXe siècle, qu'on ne veut rien savoir du milieu des Guermante ou du monde des Verdurin, on peut comprendre qu'il y a un Proust à l'intérieur de nous-mêmes, et qu'il nous décrit »
Parce que « la lecture est une amitié » :
« Et dire que tout à l'heure, quand je rentrerais chez moi, il suffirait d'un choc accidentel pour que mon corps fût détruit, et que mon esprit, d'où la vie se retirerait, fût obligé de lâcher à jamais les idées qu'en ce moment il enserrait, protégeait anxieusement de sa pulpe frémissante et qu'il n'avait pas eu le temps de mettre en sûreté dans un livre. »
De quoi occuper quelques automnes.

vendredi 5 décembre 2014

Panneaux.

Decaux.
Quand l’actualité nous accable, il est bien tentant d’aller vers quelques nouvelles positives.
Il se trouve que la non-reconduction des contrats publicitaires avec Decaux par la ville de Grenoble en constitue une bonne. Mais le tintouin qui s’en est suivi fait paraitre d’autant plus dérisoire la sympatoche mesure. Ne plus voir la dernière publicité d’Aubade dans le centre ville ne console guère des monstrueux placards qui prospèrent dans les zones périphériques.
Mais ne boudons pas cette petite annonce.
Sénat.
Les sénateurs qui n’étaient qu'à peine une douzaine lorsque le prix Nobel d’économie s’est rendu au Palais du Luxembourg ne peuvent sauver la si peu honorable assemblée d’un discrédit qui ne cesse de se creuser. Et surtout si Tirole n’est pas leur tasse de thé qu’ils aillent aiguiser leurs arguments !
Foot.
Elections chez les profs. Le SNES titre : « droit au but », c’est le slogan de l’OM qui se redresse grâce à un entraineur exigeant surnommé « El Loco ».  Je suis supporter de l’Olympique de Marseille, la ville réprouvée, mais que la publicité avant les élections professionnelles ne comporte, sous cette banderole, que les portraits de ses candidats, sans aucun article de fond posant quelques enjeux actuels est navrant.
L'école, l'école, ben qu'est ce qu'elle a l'école?
"Aux armes! Aux armes! Nous sommes les marseillais et nous allons gagner! "
Orthographe.
Dans des avis concernant des élèves, enrobés d'un vocabulaire genre Diafoirus se piquant de pédagogie, l’orthographe est  parfois négligée. Cette discipline ringarde ne va quand même pas ralentir le flot de paroles émollientes qui évitera à chacun de sortir d’une adolescence éternelle !
Et pas besoin de panneaux 4X3 déroulants pour vanter cet état au sourire factice qui n’est que le masque d’une société qui flatte ses mômes tout en acceptant le chômage et une planète délabrée.
Pan !
Pour avoir négocié avec la région  C.G. T. Basse Normandie une prime de départ quand il devait prendre ses fonctions au national, Lepaon, plante le dernier clou sur le cercueil de nos illusions.
A l’Elysée, dans les ministères, on commence à s’y faire, à la litanie des escrocs, mais là, alors qu’il est censé incarner une organisation des plus intransigeantes au service des plus humbles, cette position de syndicaliste mégoteur à l’égard de sa propre organisation est atterrante quand on sait les milliers de militants qui ont sacrifié tant d’heures, tant d’argent pour les idées auxquelles ils croyaient. Quand  on s’était mis dans les années 80 à faire circuler des feuilles pour défrayer des responsables syndicaux de leurs déplacements, les feuilles revenaient bien peu remplies. Ces vicissitudes ne réjouissent pas le cédétiste que je fus, j’en suis triste, anéanti.
……………
Dans le Courrier International de cette semaine, le dessin de Chapatte du Temps, journal suisse.

jeudi 4 décembre 2014

A l’arrière comme au front. Musée dauphinois.

Si les façons d’exposer se sont banalisées depuis que le musée dauphinois fut innovateur en la matière, la présentation, jusqu’en juin 2015, consacrée au conflit centenaire qui fit 18 000 morts parmi les isérois, renouvelle le genre. Une habitude http://blog-de-guy.blogspot.fr/2013/04/les-dessous-de-lisere-musee-dauphinois.html
Les batailles tellement meurtrières sont bien sûr évoquées, 
mais ce sont les répercussions dans la vie quotidienne, celle des femmes en particulier qui sont développées, en commençant en amont par la guerre de 70 où furent préparés à l’affrontement les esprits et les corps, et se finissant avec le traité de Versailles qui contenait les prétextes du conflit suivant.
Alors qu’un habitant de Grenoble sur neuf est militaire à la veille de la guerre, une carte atteste la présence de toutes ces casernes, cette géographie va être bouleversée.
Des hôpitaux temporaires se multiplient, des réfugiés arrivent, ainsi que des émigrés pour travailler dans les usines qui produisent armes, uniformes, produits chimiques. Des jeux patriotiques sont prévus pour les enfants.
Les lettres qui sont toujours le support dans le récit de cette guerre sont là, ainsi que les restes d’un zeppelin de 200 m de long qui s’est écrasé dans la région de Laragne, à côté de photographies d’un train surchargé qui dérailla en Maurienne tuant  435 permissionnaires.
Le chariot d’un mutilé qui vendait des glaces, voisine avec des médaillons de « morts pour la France » de Le Pin, mon village natal.
Un petit tour à l’exposition attenante qui s’arrêtera en janvier 2015 s’impose.
Sous le titre « Voir midi à sa porte », elle met en lumière les cadrans solaires, où s‘inscrivent.
« Le temps est vieux, l'heure est nouvelle »
« Veillez sur toutes, craignez la dernière ».
Un bâton de berger, des gnomons, voire un escalier où s’inscrivaient d’abord les moments de prières, se servent de l’ombre. Les cadrans solaires pouvaient être portatifs. L'horloge universelle des jésuites du lycée Stendhal datant de 1673 est présentée comme l'une des plus complètes au monde « par le jeu de deux miroirs fixés sur l'appui des fenêtres, le reflet du soleil indique les heures solaires locales, babyloniennes, italiques, le calendrier lunaire, l'horloge universelle, les signes du zodiaque... jusqu'aux dates anniversaires des victoires de Louis XIV »
Clepsydres, sabliers matérialisaient les heures quand il faisait noir.