vendredi 8 janvier 2016

Le Postillon. N° 33. Hiver 2015-16.

Les collaborateurs du trimestriel essentiellement satirique concernant le bassin grenoblois, montrent à chaque fois la haute idée qu’ils se font de leur métier de journaliste. Avec ce qu’il peut y avoir d’exigence et d’honnêteté, d’originalité, de fraîcheur, mais avec aussi une désagréable tendance à se croire au dessus de leurs interlocuteurs ou de leurs confrères.
En ces temps politiquement corrects, le titre de cette livraison est accrocheur :
«  Etat d’urgence trop mou : la presse toujours pas contrôlée » au dessus du dessin qui figure pour illustrer la critique ci dessous en passe de devenir inévitable à chaque sortie de ces 16 pages impertinentes. http://blog-de-guy.blogspot.fr/2015/10/le-postillon-automne-2015.html
Ferrari, le patron de la Métro est dans le collimateur, à partir de témoignages d’employés de la mairie de Pont de Claix dont les prénoms ont été changés, tant il semble que l’atmosphère ne soit pas très saine au Sud de l’agglo. Mais l’absentéisme des personnels des collectivités locales demanderait une enquête contradictoire qu’ils ne me semblent pas prêt de mener, les employés étant par nature des victimes comme les musulmans qu’ils ont interrogés sur un autre sujet à la sortie de la prière.  Finalement, le phare urbain installé sur un château d’eau désaffecté au pied des falaises du Vercors ne peut signifier qu’une quelconque lumière préside ces lieux où « piston, dérapages et mauvais goût » sont relevés.
Il allait de soi que dans le petit jeu où le journal invente les chansons qui accompagneraient les politiques locaux : Christophe Ferrari mériterait « Le phare » des Têtes Raides, alors que Piolle écouterait en boucle « Help » des Beatles, Carignon « Vieille canaille », et eux au Postillon : « Quand on arrive en ville » de Balavoine…
Comme dans la rubrique hebdomadaire du Canard Enchainé, les compte-rendus d’audience au palais de justice sont éclairants et  particulièrement ici la comparution immédiate d’interpelés à l’occasion des perquisitions au début de l’« état d’urgence ». Un rappel historique de semblables dispositions en 1958 à partir la lecture des « Allobroges » est bienvenu.
De la même encre, les témoignages de personnes venues témoigner des difficultés dans leur travail, marquent des évolutions préoccupantes : dans un centre de prévention en addictologie, au Codase, à l’Alliance française, pour un conducteur de cars, un maître nageur ou chez Tornier entreprise rachetée par des américains qui fabrique des prothèses. Dans bien des lieux de travail les salariés n’osent pas s’exprimer.
Le Postillon est précieux pour rappeler aux politiques leurs promesses et mettre en regard le côté procédurier que les verts cultivaient dans l’opposition, alors qu’il a fallu beaucoup de patience à un citoyen pour obtenir les chiffres du coût de la fête des tuiles : 351 000 € au lieu des 200 000 annoncés. Des nuances ont été apportées à la transparence informatique, des assouplissements de quelques principes, et autres contradictions avec des discours imprudemment définitifs, voire des petits arrangements entre amis.
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Dans le « Charlie » de cette semaine :

jeudi 7 janvier 2016

Georgia O’Keeffe. Etienne Brunet.

Les visites guidées me deviennent indispensables : le professeur Brunet qui s’adresse à d’autres professeurs, nous a apporté une fois encore des éléments passionnants pour mieux voir, tout en se montrant d’une prudence de Sioux quant aux commentaires univoques.
Ainsi pour l’artiste américaine, n’a-t-il fait qu’effleurer l’interprétation freudienne de toutes ces coroles et pistils de fleurs, plis et replis de pétales, respectueux en cela de la belle aux allures parfois androgynes, lassée des exégèses de cette eau.
J'ai fait paraitre dernièrement sur ce blog un compte rendu de la conférence de Sophie Bernard la conservatrice concernant l’exposition O’K au musée de Grenoble qui dure jusqu’à début février 2016. 
J’éviterai de me répéter dans l'article ci-dessous ou dans celui de la prochaine parution au sujet de « La modernité photographique au temps de Georgia O’Keeffe » par Hélène Horain. 
C’est l’histoire d’une américaine, née à 15 km de chez  Laura Ingalls Wilder auteure du roman « La petite maison dans la prairie » qui étonna Stieglitz dont la galerie newyorkaise, fenêtre sur l’Europe, pourra enfin exposer une forte novatrice du « nouveau monde ».
L’exposition chronologique montre bien les évolutions de l’artiste née en 1887 dans le Wisconsin, et morte en 1986 à Santa Fe :
dialectique abstrait / concret, des horizons infinis aux recoins infimes, collines du Middle West et contre plongée aux pieds des gratte ciels, lumières du Nouveau Mexique… 
Il s’agit bien comme  le disent les affiches, de Georgia  O’Keeffe « et ses amis photographes » où sont évoquées  les influences réciproques des créateurs d’un art à ses débuts et des peintres :
cadre, zoom, lumière, rythmes, lignes…
Peut-on dire qu’elle fera « de belles photos peintes »?
La photographie apporte à Georgia O’K un autre regard sur ses productions et avec la multiplication des portraits par Stieglitz, elle « adopte » son propre corps après avoir eu le sentiment de n’être qu’un objet. Ses nus sont magnifiques et ses mains magnifiées, bien que jamais saisies dans des moments de travail.
A l’époque des fleurs en volutes présentes dans les arts décoratifs, ses toiles aux allures d’aquarelles s’éclairent de couleurs. Le gris domine alors chez les cubistes parisiens.
Le ciel de Lake Georges ou du Nouveau Mexique, passage du réel à l’abstraction, est aussi un terrain de rencontre avec la musique.
Les fleurs sophistiquées jouent des équilibres, semblent pousser le cadre, se multiplient, des zones s’estompent, d’autres jaillissent.
La ville lumière est sombre, trépidante, elle est déserte chez O’K.
Dans sa voiture transformée en atelier elle sillonne le désert, rencontre des habitants dont les croix telles des poteaux indicateurs se superposent au dessus de leurs croyances premières.
Les arbres des Amériques sont plus hauts que les édifices construits par les hommes et toujours sources d’émerveillement.  
Comme les os détournés de leur pauvre destin devenus des viseurs de lune, des cadres insolites rompant les hiérarchies souvent présentes dans les sujets européens. A la façon des montagnards de par chez nous qui reviennent  de leurs courses avec des cailloux, elle amasse pierres et os.
Elle viendra à Chartres et en admirera les vitraux.
Elle sait bien ce qu’est la lumière, l’exposition au musée de Grenoble jusqu’à début février 2016, nous en redonne.
Les précisions qui nous ont été apportées sur les conditions de préparation d’une telle exposition ne sont pas inutiles : il a fallu quatre ans pour que celle-ci soit installée. La richesse des collections grenobloises permet des échanges avec d’autres institutions dans le monde entier comme en témoigne encore cette fois cette présentation exceptionnelle, facile à regarder et qui peut nous emmener loin. 
  

mercredi 6 janvier 2016

Valence. Auvergne Rhônes Alpes.

Sur la façade de la patrimoniale  « Maison des têtes » quatre médaillons sur vingt sept  représentent quatre vents, c'est que par Valence, "la porte du midi", passent bien des vents .
Cette maison d’un consul de la ville entre gothique qui a flamboyé et renaissance naissante représente bien la ville à mes yeux de grenoblois : riche d’histoire et d’histoires.
Si Championnet est honoré dans notre capitale des doudounes Quechuas, sa statue est en bonne place à Valence : le général  de la révolution est né à Alixan pas loin de là.
Le kiosque de Peynet, dessinateur d’amoureux très années soixante en est le symbole validé par l’office du tourisme qui fournit une brochure bien faite sur les curiosités du chef-lieu de la Drôme.
Les mails de la ville le long desquels s'entassaient Juva 4 et  tractions « citron » du temps de la nationale 7 , sont réservés désormais aux piétons en bordure de la vieille ville aux ruelles charmantes et aux places consacrées à des marchés réputés.
Une statue de Bonaparte émerge du trottoir et rappelle le rôle stratégique que joua l’école d’artillerie.
Depuis la cathédrale Saint Apollinaire du XI° siècle, nous surplombons le fleuve puissant.
Le monument funéraire voisin portant le nom de « pendentif », fut classé  parmi les premiers monuments historiques en 1885.
Le vaste parc Jouvet s’apprécie aussi depuis le Champ de Mars voisin.
Nous n’avons pu nous rendre au centre du patrimoine arménien où une exposition «  Bande dessinée et immigrations » parcourt un siècle d’histoire jusqu’au 28 février 2016.
Nous sommes enfin allés au musée d’art et d’archéologie installé dans le palais épiscopal qui vient d’être rénové. Sans être accablés, nous passons de la préhistoire à l’art contemporain.
Au dernier étage nous avons une vue panoramique sur le Vercors d’un côté et les monts d’Ardèche de l’autre, avec le château médiéval de Crusol en silhouette.
Des mosaïques d’un siècle avant JC ou un après lui, sont belles, et une gardienne  nous renseigne à propos d’un impressionnant dolium (pluriel dolia), jarre antique parfaitement conservée qui contenait plus de 1000 litres.
La collection de peintures consacrée aux paysages  donne de l’importance à Hubert Robert qui  aima tant les ruines romaines, à André Lhote… Wlaminck et Boudin furent nos préférés ainsi qu’une histoire émouvante de Sophie Calle déposant des bijoux de sa mère au pôle Nord.

mardi 5 janvier 2016

Sincères amitiés. Sempé.

Le dessinateur culte s’entretient avec Marc Lecarpentier ancien patron de Télérama, mais la délicatesse de celui que je porte au plus haut
est bien plus explicite en une planche que dans ce dialogue qui tient trop de place parmi 150 pages dans lesquelles le vieux monsieur tente surtout d’échapper aux phrases définitives:
« amitiés sincères : pléonasme ou oxymore ? »
Il sait que nos prétentions, notre vanité rendent difficile ce lien rare et précieux, fragile.
 «Rien n’est facile en amitié. Il faut de la discrétion, de la pudeur, de la fidélité».
2015 dans la fureur est passé, il devient plus difficile de croire à l’innocence, aux connivences,
dans l’air léger des squares où des messieurs se saluent en soulevant leur chapeau,
sur les plages où les chiens batifolent,
dans les pavillons en meulière quand la complicité accompagne la pudeur.
Impossible Facebook :
« Plein d’amis, trop d’amis, c’est suspect, non ? »
A une terrasse une dame se rassure :
« Je ne me laisse pas abattre, je me dis : « j’ai des amis ». Je leur téléphone et je tombe sur leurs répondeurs. Le lendemain, je me dis : j’ai des amis et en plus ils ont des répondeurs »
Il s’agit surtout de solitude et d’un décalage par rapport au présent, loin de toute poésie.
Les dessins rassemblés sur le thème de la complicité, de l’harmonie, de la confiance, valent souvent par leur ironie. Les plus parlants sont sans parole, comme ces copines sur leur vélo qui papotent au carrefour ou se tirent la bourre sous les platanes.
Et quand à la sortie d’un restaurant, le cigare à la main, un des convives conclut alors qu’un troisième a tourné le dos :
« Délicieux déjeuner, un peu long. Sa culture peut paraitre séduisante mais toutes ces anecdotes, ses citations, je te les retrouve en cinq minutes sur internet. »
 C’est que le monde a changé.

lundi 4 janvier 2016

Pauline s’arrache. Emilie Brisavoine


Montage efficace d’une histoire familiale où chacun en « faisant son cinéma » met en évidence violences et mensonges, dextérité verbale et balourdises, gravité et n’importe quoi…
Cette famille atypique révèle de nouvelles normes dans les rapports contemporains où l’amour s’expose dans les moments festifs et s’oublie dans la durée.
Les couples tiennent par leurs affrontements ; les adultes par intermittence sont à la fois lestés et boostés par leur enfance prolongée.

samedi 2 janvier 2016

Roman en 2015 :

Non pas dix, ni cinq, un roman de l’année, je n’en dis pas d’autres :
Réparer les vivants. Maylis de Kerangal.
Pour la confiance qu’elle nous redonne dans notre société avec un style palpitant.