mardi 22 janvier 2013

La page blanche. Boulet. Pénélope Bagieu.



Un des articles le plus lu sur mon blog concerne Boulet qui tient un des blogs des plus couru, il est  au scénario dans cette BD de 200 pages dessinée par Pénélope Bagieu autre auteur à succès. 
Le graphisme élégant qui se retrouve souvent dans les magazines féminins permet d’alléger le récit d’une amnésique qui pourrait être angoissant.
A la recherche de son identité, Eloïse, qui est arrivée à retrouver peu à peu son nom, sa maison, porte un regard  distancié sur les bribes de son existence revisitée.
Je m’attendais tout au long de ce parcours à voir surgir des gags qui dénoueraient l’énigme; bien que l’humour aux couleurs tendres soit là, l’histoire débouche sur un questionnement plus profond qu’il n’en a l’air, sur le sens de nos vies. 
La mémoire finalement accessible de son ordi, s’avèrera décevante.
« Et la boite de chez tes parents ?
 Des merdouilles, des bijoux en fer blanc… Rien qui ait une histoire. Ils sont morts et n’ont pas laissé la moindre trace… Moi c’est pire j’ai disparu de mon vivant. »
Moderne solitude d’une vendeuse de la FNAC quand il y avait encore des clients qui cherchaient des livres.

lundi 21 janvier 2013

Les bêtes du sud sauvage. Benh Zeitlin.



Hushpuppy, une petite fille, vit dans le bayou avec son père, elle ne veut pas connaître le reste du  monde « sec et laid ».
Tant de critiques ont été séduit par la poésie de ce film que je m’y suis rendu mais je n’ai pas adhéré à cette fable apocalyptique dont la seule énergie est celle du désespoir.
La petite est contrainte à partager son repas avec les chiens, sa survie serait-elle dans l’animalité ?
Elle a beau porter sur le monde un regard décalé, sa situation est précaire.
Les catastrophes climatiques menacent la planète, elles se déchainent en Louisiane, où se déroulent pourtant des vacances perpétuelles. 
Les enfants  sont laissés à eux-mêmes  par des adultes alcoolisés, quand le père, auquel la petite est attachée, intervient, c’est sur le mode violent. Leur liberté consiste à se laisser dériver sur de pauvres embarcations parmi de photogéniques images de chaos.
Nous sommes plus près de la maltraitance que de l’émancipation.
Oui les contes sont sombres et les parcours initiatiques ne sont pas aisés par définition mais  tant de fange, de fatalisme mènent au renoncement. Il ne sera guère contrarié par des froncements de sourcils tellement mignons.    

dimanche 20 janvier 2013

Dominique A. Vers les lueurs.



La voix est agréable, les mélodies aussi.
De plus en plus, j’ai du mal à la première écoute, sauf pour mon chouchou Souchon, alors j’ai réécouté le neuvième disque d’un auteur longtemps présenté comme le favori de Libé -Télérama, il avait donc tout pour me séduire.
Mais je n’arrive toujours pas à accrocher, je trouve ses images démesurées :
« Des femmes fendaient l'eau sous la chaleur étale
Et donnaient aux marées la saveur du métal,
En rangs serrés glissant comme des parapentes
Les tentations hélaient les bêtes chancelantes »
Pourtant je me suis soumis avec délices au lyrisme de Ferré, même si je trouve que c’est peut être ce qui a vieilli le moins bien chez notre père à tous, en chanson.
« Dans les rues des civières passaient incessamment
Portant des illusions qui perdaient trop de sang
Des brancardiers filaient sous une pluie d'étoiles
Tombant pour soulager ou appuyer le mal... »
Je préfère les écorchés Thiéfaine, Baschung ou l’ironique Bénabar, au garçon sage dont les allégories sont tellement surchargées que je n’arrive pas à les partager :
« Du jardin j'entendais du verre se briser
Et des pleurs d'enfants que la vie instruisait.
Je me voyais partir, dévaler des vallées
Et fuir les cris de verre et les éclats d'enfant. »
Je retrouve comme un air d’exercice que je donnais à mes CM2 en introduction aux compléments de nom, à partir du Prévert d’ « Un vieillard en or avec une montre en deuil, Une reine de peine avec un homme d'Angleterre »
Son « convoi » rappelle le roman « La route » de Cormac McCarthy, et il se trouve que je n’avais pas apprécié non plus les excès charbonneux du livre à succès ; décidément :
« Ils avancent lourdement dans le jour qui surgit
La route s'ouvre comme une plaie
Qui se referme sur leur passage
Qu'ils ouvrent comme une plaie »

samedi 19 janvier 2013

14. Jean Echenoz.



Le livre claque comme le titre,  et nous empoigne sur un sujet pourtant tellement parcouru : la guerre.
« Tout cela ayant été décrit mille fois, peut être n’est-il pas la peine de s’attarder encore sur cet opéra sordide et puant. Peut être n’est - il d’ailleurs bien utile non plus, ni très pertinent, de comparer la guerre à un opéra, d’autant moins quand on n’aime pas tellement l’opéra, même si comme lui c’est grandiose, emphatique, excessif plein de longueurs pénibles, comme lui cela fait beaucoup de bruit et souvent , à la longue, c’est assez ennuyeux. »
Traité avec un ton contemporain qui nous entraine un siècle en arrière avec les poux, les rats et la mort inattendue. Il y a bien sûr l’inhumanité des gradés, l’absurdité de cette boucherie, la sauvagerie mais aussi la rapacité de ceux qui profitèrent de la guerre pour faire monter les prix, les fusillés, quand un bras en moins est une chance.
A travers des détails du quotidien, la fatalité de la tragédie nous saute à la gueule, sans coup de clairon. Les musiciens ont été décimés.
« …et Charles, béant, par-dessus l’épaule affaissée d’Alfred, voit s’approcher le sol sur lequel il va s’écraser, à toute allure et sans alternative que sa mort immédiate, irréversible, sans l’ombre d’un espoir-sol présentement occupé par l’agglomération de Jonchery-sur- Vesle, joli village de la région Champagne-Ardennes et dont les habitants s’appellent les Joncaviduliens. »

vendredi 18 janvier 2013

Ce n’est pas le problème !



Depardieu, le mariage pour tous, les anciens présidents au conseil constitutionnel : il y a plus important objectent ceux « qui ne se font pas avoir ».
Et  pour certains le Mali serait un dérivatif également !
Accoudés au comptoir de l’actualité, ils ne se font pas berner par les débats secondaires, ils savent les remèdes au chômage, au réchauffement de la planète, à la financiarisation des échanges, à la judiciarisation des actes…
Ils savent débusquer tous les leurres.
Pourtant les provocations d’un comédien en déshérence, des milliers de  personnes s’accrochant à un monde immobile le temps d’une promenade dominicale, et des institutions  qui devraient être immuables même pour des progressistes,  peuvent interroger.  
Les femmes maliennes à la face cachée, me concernent.
Celui qui « ne parle qu’en présence de sa vodka » comme dit le Canard est divertissant et cet écho mondial dit beaucoup de notre système médiatique mais aussi de nos passions.
Il est question de justice fiscale : à cet égard le mot de Cahuzac disant que la réforme fiscale était achevée m’a achevé : parce qu’elle avait eu lieu ?
Les niches n’ont pas tremblé, les riches trichent, beaucoup s’en fichent.
Des trains, des cars, dimanche, pour s’élever contre la pauvreté ? Non, nous nous, papa, maman, nounou. Je ne vais pas rejouer à mon tour le coup de « l’essentiel est ailleurs ».
Dans une société minée de solitude où les mono mamans ont les bras qui tombent, que de donneurs de leçons pour les autres ! Sur les sujets de société comme la dépénalisation du cannabis, le vote des étrangers, les éternels contre PACS s’enferment dans l’hypocrisie, le repli entre soi, homonymes, homophones. Leur aversion pour tout ce qui évolue, s’alimente du procès éternel contre une gauche illégitime par nature : les réacs même  colorés en rose layette viennent  en héritiers de ce fond chouan des temps obscurs.
Merci de nous remettre côté lumières, c’est la faute à Copé.
Le temps passe et les réformes institutionnelles tardent. Que n’auraient-ils dit si la réforme du présent conseil constitutionnel avait concerné les Chirac, D’Estaing,  ou le "Teigneux Monarque " (Rambaud est revenu) ?
Refrain : Toujours est-il, régler sans tarder, ce non cumul des mandats, ce n’est pas compliqué et ça redorerait le blason des politiques. Et pis ce qui est dit est dit !
Les brigades internationales se forment en Syrie, au Mali, elles se nourrissent au fanatisme religieux : l’idéal  des combattants compte plus que leur vie.
Nous, nous payons des soldats pour lutter contre l’obscurantisme.



jeudi 17 janvier 2013

Soulages XXIe siècle. Lyon.



Pour le premier samedi des soldes, la rue qui conduit au musée des Beaux- Arts est noire de monde, un monde habillé de noir. Dans le jardin, une mariée noire passe dans sa robe blanche.
Nous nous rendons chez  Soulages, le maître du noir qui expose 26 de ses dernières toiles jusqu’à la fin janvier. Les spectateurs s’y pressent.
« J’aime l’autorité du noir. C’est une couleur qui ne transige pas. Une couleur violente mais qui incite pourtant à l’intériorisation. A la fois couleur et non-couleur. Quand la lumière s’y reflète, il la transforme, la transmute. Il ouvre un champ mental qui lui est propre. »
J’ai beau savoir que ce n’est pas du noir mais de la lumière que peint celui qui peut être considéré comme un sculpteur, j’ai été surpris en regardant mes photographies cadrées en toute liberté. Certaines sont carrément de couleur argentées voire blanches.
Hors du viseur, nous jouons avec les reflets, les textures, les rythmes, mais la mère des couleurs domine notre vision noire. La notification des formats constitue le titre des tableaux.
L’un des plus célèbres peintres contemporains a 93 ans.
A 90 ans il a présenté 90 toiles à Beaubourg, et bientôt va s’ouvrir un Musée qui lui sera entièrement consacré à Rodez sa ville natale. Son atelier est à Sète.
Si j’avais préféré son accrochage de Montpellier sous une lumière naturelle, dans un espace plus aéré,  avec des œuvres tenues par des filins, cette recherche de toute une vie où il a posé désormais le mot « outrenoir », est impressionnante. 
Des touches de blanc de chez blanc sont présentes. La variété des surfaces juxtaposées prend encore de l’ampleur. Les toiles à la matière épaisse sont scarifiées avec des instruments de maçon ou de pâtissier, des bâtons. Il utilise l’acrylique, mais des œuvres acquises par le musée témoignent que le brou de noix, et le goudron sont aussi des matières avec lesquelles il a travaillé.

mercredi 16 janvier 2013

Saint Emilion.



Le village du Libournais n’est pas qu’une appellation prestigieuse, il est remarquable avec ses ruelles en pente (des tertres), reliées par des escalettes, et des édifices religieux aussi nombreux que ses caves. L’ancien ermitage  a conservé ses  remparts.
Sur la carte  des vins qui nous a été proposée pour accompagner une salade sur la place où un arbre de la liberté a été replanté, la bouteille de Château Lafitte Rothschild était à 4800€ ;  sans tomber dans la provocation d’une bière pression nous avons pris du vin au verre.
Il était trop tard pour visiter l’église monolithe (d’une seule pierre) creusée dans la falaise entre le IX° et le XIII° siècle, édifice unique en Europe. Depuis son clocher à 130 m au dessus de la place du marché nous avons une vue magnifique sur les toits ou aucune antenne ne dépasse ni fil électrique : nous sommes  comme dans un amphithéâtre, patrimoine mondial.
 Au moyen âge déjà le vin était qualifié d’ « honorifique » et offert aux souverains. Pendant la guerre de cent ans, la commune fut prise et reprise par la France et l’Angleterre ; Jean sans terre lui donnera un statut particulier avec ses jurats qui vêtus de leur robe rouge (bordeaux) en procession en juin et septembre, jugent de la qualité des productions et ouvrent le ban des vendanges depuis la tour du roi.