samedi 5 janvier 2013

XXI. Hiver 2012.



J’apprécie depuis cinq ans cette revue mais ce numéro particulièrement réussi dans sa cohérence, son exigence, redonne du sens au métier de journaliste qui avait tendance pour moi à disparaître derrière l’image d’un Pujadas passant les plats : « merci de votre analyse » après deux diapos et trois chiffres.
Certes on ne ressort pas des 200 pages avec un optimisme débordant : déjà avec les informations ordinaires il y a du souci, alors les récits de la vie dans les prisons russes, américaines ou les trafics d’armes entre le Monténégro et l’Arménie ne sont pas  particulièrement réjouissants.
Pourtant le thème principal de ce trimestre porte sur le courage : trop grand mot que la rédaction de XXI réhabilite comme elle va farfouiller dans des territoires oubliés.
Mohamed Chelali qui a sauvé Chirac d’une tentative d’assassinat ou un criminaliste au Salvador ont des destins plus originaux qu’un condamné américain à perpétuité qu’on a fini par reconnaitre innocent au bout de 26 ans : banalité de l’injustice US.
Des portraits mettent dans la lumière des personnalités qui n’ont pas habituellement les faveurs des magazines et même lorsqu’il s’agit de Platini un recueil de quelques unes de ses déclarations est éclairant. Quant au patron du Crédit Mutuel -CIC et  également d’une part très importante de la presse de province (Le Dauphiné Libéré entre autres) les pages qui lui sont consacrées justifieraient à elles seules les 15,50 € du numéro.
De plus, il y a tant d’autres sujets passionnants : le reportage photos consacré aux bénévoles qui font vivre les associations de Clermont-de-l’Oise, les planches dessinées consacrées à un faux ambassadeur en Centre Afrique, et même le regard porté sur le loup m’a semblé original, alors que la visite de Tronchet auteur de BD en Amazonie est plaisant et essentiel. Même lorsque Sylvie Caster se heurte à l’omerta à Calais autour de la reprise de Sea France, les silences sont éloquents, comme ses pêcheurs chinois au Maroc qui témoignent de la mondialisation nourrissant des hommes et ravageant les mers.   

vendredi 4 janvier 2013

Obsolescence programmée.



La période est fertile en bilans, best off, classements, rétrospectives définitives et prospectives ambitieuses.
Le soulagement de mai 2012 persiste encore quand réapparaissent les Copé, Morano, comme un rappel qu’ils sont hors du jeu, mais pour ce qui est de l’année à venir, je n’ai pas perçu d’étoile à laquelle se fier : peu de marges pour nos mages.
Je mets ma tête sous le robinet d’informations que quelques inhumains éclaboussent de  noirceur.
La Syrie, le Mali sont évidemment les lieux rougeoyants de la perte de toute raison.
A Doha le  règlement des problèmes fondamentaux de notre planète fut « un four ».
Je relève seulement quelques anecdotes dans des feuilles à l’obsolescence dépassée pour user d’un mot usité ces jours, je parlais de journaux en papier.
Un sourire désabusé suffira quand j’apprends avec  beaucoup de retard que le service d’ordre d’un meeting de Chevènement était jadis assuré par les nationalistes corses de la SMS (Société Méditerranéenne de sécurité) : l’intransigeance du Républicain en prend un coup, après coup.
Obama a versé une larme après une nouvelle tuerie dans une école. Les humoristes favorables à l’interdiction des armes, font dire à un personnage armé : « il faut interdire l’école ». Mais la réalité dépasse la caricature, les ventes d’armes ont explosé et aussi la vente des cartables blindés.
Après « vingt deux v’la les flics » le mariage pour tous nous fournit quelques trouvailles :
« vingt trois, v’la l’archevèque ! ».
Dans la polémique Depardieu, tout le monde se défend de « faire la morale ».
Mais pourquoi pas ? Quelle défaite du sens moral !
Près de la moitié des éligibles au RSA n’en font pas la demande.
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Dans une liasse d'images laissée par un de mes amis Facebook:
 

jeudi 3 janvier 2013

Le Caravage et le caravagisme à Montpellier : corps et ombres.



Si l’influence de Michelangelo Merisi da Caravagio dit Caravage a été marquante  au XVII° sur une durée de cinquante ans, aujourd’hui sa  forte notoriété est éclatante.
A Montpellier dans le beau musée Fabre sont exposées neuf toiles de l’italien qui s’arrangea fort bien à se trouver sous juridiction espagnole, alors qu’il était en difficulté avec la loi papale. Une soixantaine d’œuvres de peintres du sud de l’Europe qu’il influença ont rejoint le maître alors que le musée des Augustins à Toulouse se consacrait à ses émules du Nord.
Bien qu’il n’ait pas aimé du tout être copié, des caractéristiques fortes permettent de le reconnaître :
-  utilisation de modèles vivants,
-  le clair obscur,
-  une palette de couleurs restreinte,
-  des cadrages à mi-corps.
L’art religieux devient accessible au commun des mortels. La vérité avance.
Le journal « Le Midi Libre » citait Beckett pour introduire un article sur ses apports… en photographie :
« Elles accouchent à cheval sur une tombe,
le jour brille un instant puis c’est la nuit à nouveau »
Le même journal rapproche les tableaux du lombard avec ceux qui l’ont imité autour de thèmes communs.
Danaé endormie d’Artémisia Gentileschi est sensuelle, magnifique et l’amour endormi du Caravage est bouleversant ; pour la présentation du Christ (« Ecce homo ») Cigoli a beau s’essayer au réalisme : « il n’y a pas photo ».
Entre Saint Jean Baptiste, Holopherne, Goliath, à qui la tête fut décollée et d’autres martyrs, notre visite est éclaboussée de sang.
Ribera, Zurbaran sont puissants et le français Vouet reprend avec virtuosité des sujets populaires avec « une diseuse de bonne aventure », qui nous cause.
Georges De La Tour fait entrer la source de lumière dans ses toiles et la chandelle fuligineuse de Madeleine  nous éclaire encore.
En tapant « Le Caravage »  en haut à droite du moteur de recherche de ce blog vous pourrez lire d’autres articles sur le bougre.

mercredi 2 janvier 2013

Mauriac à Malagar.



« Tant pis ! J’oserai dire ce que je pense : paysage le plus beau du monde, à mes yeux... »
Autour de la maison de maître située sur la commune de Saint-Maixant, des citations de l’académicien ponctuent nos pas. Celle là n’est pas la plus incontestable, elle grave cependant dans le bronze la subjectivité assumée de l’académicien que je jugeais jusque là avec trop de distance.
L’écrivain catholique livrait ses blocs notes au Figaro et à l’Express mais il s’est montré critique vis à avis de l’église, courageux dans ses positions lors de la guerre d’Espagne et celle d’Algérie.
Le panorama qui domine Langon au bord de la Garonne et la forêt Landaise n’est  pas exceptionnel pour le visiteur d’une après midi, mais cette visite est un passage utile pour aller plus loin dans l’œuvre du prix Nobel  de littérature, sous la conduite d’une guide élégante.
Dans ce lieu de villégiature,  dont le nom signifie « mauvaise garenne », nous n’avons pas le sentiment d’être indiscret dans la lumière qui pénètre dans les pièces donnant sur une campagne paisible avec une allée de cyprès aux allures toscanes. 
L’étreinte d’un  « Nœud de vipère », qui fut écrit là, peut se desserrer, ou se donner à lire ou à relire.
La cuisine a le charme des lieux anciens, et  dans le bureau persiste comme une présence qui a eu le temps de prendre consistance avec une exposition  bien fournie en images dans le chai du domaine où se cultivait la vigne : nous sommes en Sauternais.
"Une oeuvre, tant qu'elle survit, c'est une blessure ouverte par où toute une race continue de saigner."
 A proximité un calvaire, situé sur les hauteurs près d’un moulin à vent restauré, ne nous éloigne pas du contexte catholique, surtout si l’on va faire un tour dans la basilique mariale de Verdelais qui faisait partie des arguments attractifs lors d’une revente du domaine. Elle est tapissée  d’émouvants ex-voto de tous les affligés qui y furent guéris.

mardi 1 janvier 2013

Jour de l'an.




 « Tenez dit l’avare : voici un calendrier neuf et qu’il vous fasse toute l’année ! » 
 Jules Renard
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Sur le site de Médiapart: effet miroir

lundi 31 décembre 2012

Tabou. Miguel Gomes.



Ce Tabou n’a rien d’une transgression, c’est le nom d’un film de Murnau qui a fait s’extasier des générations de critiques, quant à moi, au cinéma, les œillades expressionnistes me laissent indifférent. Le film du jeune réalisateur portugais était par ailleurs accompagné de dithyrambes qui auraient pu le plomber. Il n’en est rien.
La chronique d’une fin de vie à Lisbonne, « Paradis perdu », où une vieille  femme se joue un ultime film auprès d’une bonne impassible et d’une voisine compatissante, est menée avec tendresse et sympathie. Les uns passent à côté des autres.
Le récit en seconde partie d’une adultère au « Paradis » dans une colonie en Afrique est bien servi par le noir et blanc qui filtre les outrances, permet la réinvention d’un passé exprimé par une voix off.
La piscine de la villa ne paraissait pas tragique à celui qui portait beau avec son chapeau : elle était le luxe, c’était la jeunesse. De cette époque romantique révolue ne subsistent que le bruit des bêtes de l’herbe, les voix des personnages ne nous parviennent plus. La passion est passée.
On peut croire à l’innocence revendiquée par l’auteur.
Sa poésie  aux formes nouvelles fait passer la mélancolie : les crocodiles servent de balançoires aux enfants dans les centres commerciaux, il suffit de glisser une pièce.

dimanche 30 décembre 2012

Thomas Dutronc. Jeune, je ne savais rien.



C’est bien le fils de son père et de sa mère, avec valeur ajoutée du jazz manouche et saucisson corse.  Léger, fin, ironique.
Alors l’écoute est cool, et nous guérit des harangues râpeuses, des insipides de trois minutes, des inaudibles tapages.
Surtout ne pas se prendre au sérieux :
« quand le temps passe toujours trop vite, hélas
Nos amis, souvent, les plus chers, les meilleurs, sont partis
Sont loin, sont malades, sont morts »
… il se commande un steak frites
« Un bon gros steak, avec des frites »
Clins d’œil dans « J’aime plus Paris » :
« Prépare une arche
Delanoë
tu vois bien,
qu'on veut se barrer
même plaqué or, Paris est mort
il est 5 hors, Paris s'endort »
 D’abord musicien, même s’il « n’est pas d’ici » :
« Un coude en l'air, le vent est doux, la lune fidèle,
Un chant tsigane, j'me sens tsigane
Le cœu
r léger, je vois passer une fleur d'été
Hello jolie, j'suis pas d'ici, j'suis musicien
Un soir je suis le roi, un soir je suis le chien
Qu'on caresse ou qu'on laisse en solo »
Et l’humour qui éloigne tous les maux :
« Comme un manouche sans guitare ».
« Comme une pizza sans olive
Une page de pub sans lessive
Si t'es pas là, je ne suis plus moi
Comme un arbre sans racine
Comme le théâtre sans Racine
Sur cette plage sans Aline. »
Il parait qu’en concert il est excellent, alors s’il passe dans les parages, je me mets dans la file. Un CD est en route: l’automne aura un air de printemps.