Les poètes ne sont pas pareils :
« Ah ! revienne l’automne, et revienne l’hiver
La mer déserte et grise
Avec ses îles nues
Et les nuages qui se déplacent
Dans un ciel sans éclat. » Louis Brauquier
A la recherche de poèmes sur l’hiver qui s’est bien fait et qui s’en va, la question :
« Est-ce que les oiseaux se cachent pour mourir?" est de François Coppée (Non, pas Jean François !)
Le saule sur la tombe de Musset n’a jamais vraiment pris, et les laboureurs ont disparu, pourtant ces disputes atmosphériques ont de l’allure :
« Du pauvre mois de mars il ne faut pas médire,
Bien que le laboureur le craigne justement :
L’univers y renaît ; il est vrai que le vent,
La pluie et le soleil s’y disputent l’empire.
Qu’y faire ? Au temps des fleurs, le monde est un enfant ;
C’est sa première larme et son premier sourire… »
Alfred de Musset
mardi 3 mars 2009
lundi 2 mars 2009
Combalimon
Le film de Mathié Raphaël va pâtir de la sortie récente de « la vie moderne » de Depardon, pourtant son reportage était visible un an avant celui du bourguignon au festival de Cannes. Un paysan de Corrèze a demandé au cinéaste de transmettre des images de son coin d’humanité qui meurt. Il avait bien essayé de sortir de sa solitude, et avait marié une camerounaise qui n’est pas restée. Chronique de la fin d’un monde. Des lumières, les chiens, et des questions éternelles au fil des saisons qui ne peuvent que tendre à l’économie de paroles.
dimanche 1 mars 2009
Cabrel : des roses et des orties.
Après le Souchon des villes, le Cabrel des champs.
Le meilleur vendeur français 2008 a livré un dernier album, bien accueilli, après quatre ans de maturation.
Quelques accents de flamenco, le troubadour gascon contente son public d’images simples :la vie est faite de roses et d’orties. A voir sur Daily motion, les clips de ses aficionados, type calendrier des postes où quand il est question de fruits, la corbeille est là, mon œil critique s’écarquille.
Et en même temps je m’en veux de ne pas me laisser aller à l’innocence des halos sur prairies fleuries.
« On est lourd, tremblant comme des flammes de bougies »
Je ne sais si je dois saluer la sincérité ou repérer la facilité.
La recherche de la rime peut amener à des tableaux enluminés, plus qu’à un réel qui risquerait d’être brutal
« Adossé à un chêne liège, je descendais quelques arpèges, par un après midi pluvieux ».
Humide et inconfortable, pourtant la mélodie vous embobine.
Nous avons besoin de ces accents nostalgiques où glisse « le manteau de l’enfance » même si l’image est mal ajustée. Ces « cardinaux en costume » indifférents au monde qui saigne, ce n’est pas nous, toutefois les illusions sont évanouies : « les chansons se fanent ».
« Les gens nous aiment et puis nous laissent
Et c’est sans doûte mieux »
Le meilleur vendeur français 2008 a livré un dernier album, bien accueilli, après quatre ans de maturation.
Quelques accents de flamenco, le troubadour gascon contente son public d’images simples :la vie est faite de roses et d’orties. A voir sur Daily motion, les clips de ses aficionados, type calendrier des postes où quand il est question de fruits, la corbeille est là, mon œil critique s’écarquille.
Et en même temps je m’en veux de ne pas me laisser aller à l’innocence des halos sur prairies fleuries.
« On est lourd, tremblant comme des flammes de bougies »
Je ne sais si je dois saluer la sincérité ou repérer la facilité.
La recherche de la rime peut amener à des tableaux enluminés, plus qu’à un réel qui risquerait d’être brutal
« Adossé à un chêne liège, je descendais quelques arpèges, par un après midi pluvieux ».
Humide et inconfortable, pourtant la mélodie vous embobine.
Nous avons besoin de ces accents nostalgiques où glisse « le manteau de l’enfance » même si l’image est mal ajustée. Ces « cardinaux en costume » indifférents au monde qui saigne, ce n’est pas nous, toutefois les illusions sont évanouies : « les chansons se fanent ».
« Les gens nous aiment et puis nous laissent
Et c’est sans doûte mieux »
samedi 28 février 2009
Main basse sur l’école.
Eddy Khaldi est venu présenter son livre écrit avec Muriel Fitoussi à l’amphithéâtre de l’IUFM à l’invitation du cercle laïque de l’agglomération grenobloise. Les cheveux blancs dominaient dans l’assistance, même si un des derniers jeunes professeurs des écoles stagiaires de retour de manif est venu préciser le sens de leur lutte en illustration de la gravité des attaques adressées à l’école publique.
Nous avons le tournis devant l’avalanche des réformes, mais c’est une stratégie qui vient de loin, pas de l’improvisation : une déconstruction cohérente du service public. Agir vite, pour échapper à la confrontation avec les enseignants tenus dans le plus grand mépris au plus haut de l’état (voir le Canard Enchaîné de cette semaine).
Sous le beau nom de « créateurs d’école » depuis 1991, la droite des héritiers du club de l’horloge, dans son identité la plus décomplexée, prépare la remise en cause de la carte scolaire.
La gauche, complexée, refuse le débat idéologique, et c’est ainsi que le seul thème de la présidentielle- même pas approfondi- concernant l’école a été : la carte scolaire.
L’école privée n’est plus une variable d’ajustement : dans notre région, autant de Lycées professionnels dans le public que dans le privé. Le modèle institutionnel du privé devient la référence. Où en parle-t-on ? L’état français finance un lycée Jean Paul II (ils osent tout) à Sartrouville alors que les lycées sont la prérogative des régions. Un exemple où l’état favorise ses concurrents. J’ai révisé quelques une de mes idées reçues, pensant que ce n’était plus un problème, les curetons se raréfiant, mais dans la galaxie des organisations qui ont préparé cette révolution, il y a l’Opus Dei. Il y a encore 500 communes avec une école privée et pas de publique, les effectifs dans le privé sont en général plus faibles et la taille des établissements plus petits. Alors que les établissements publics sont sommés d’être autonomes, le privé en réseau est réactif puisqu’il n’est pas soumis aux obligations du public. Certains vont offrir des préparations à la formation de professeur du public. On pourrait croire que les ultras libéraux baisseraient d’un ton dans la période, pas du tout, ils sont au cœur de l’état sarkozien, avec le secours des ultras conservateurs qui tiennent le discours vantant l’école d’antan.
L’ancien IA de l’Isère a été limogé, après avoir été déplacé. Tout est calme.
Nous avons le tournis devant l’avalanche des réformes, mais c’est une stratégie qui vient de loin, pas de l’improvisation : une déconstruction cohérente du service public. Agir vite, pour échapper à la confrontation avec les enseignants tenus dans le plus grand mépris au plus haut de l’état (voir le Canard Enchaîné de cette semaine).
Sous le beau nom de « créateurs d’école » depuis 1991, la droite des héritiers du club de l’horloge, dans son identité la plus décomplexée, prépare la remise en cause de la carte scolaire.
La gauche, complexée, refuse le débat idéologique, et c’est ainsi que le seul thème de la présidentielle- même pas approfondi- concernant l’école a été : la carte scolaire.
L’école privée n’est plus une variable d’ajustement : dans notre région, autant de Lycées professionnels dans le public que dans le privé. Le modèle institutionnel du privé devient la référence. Où en parle-t-on ? L’état français finance un lycée Jean Paul II (ils osent tout) à Sartrouville alors que les lycées sont la prérogative des régions. Un exemple où l’état favorise ses concurrents. J’ai révisé quelques une de mes idées reçues, pensant que ce n’était plus un problème, les curetons se raréfiant, mais dans la galaxie des organisations qui ont préparé cette révolution, il y a l’Opus Dei. Il y a encore 500 communes avec une école privée et pas de publique, les effectifs dans le privé sont en général plus faibles et la taille des établissements plus petits. Alors que les établissements publics sont sommés d’être autonomes, le privé en réseau est réactif puisqu’il n’est pas soumis aux obligations du public. Certains vont offrir des préparations à la formation de professeur du public. On pourrait croire que les ultras libéraux baisseraient d’un ton dans la période, pas du tout, ils sont au cœur de l’état sarkozien, avec le secours des ultras conservateurs qui tiennent le discours vantant l’école d’antan.
L’ancien IA de l’Isère a été limogé, après avoir été déplacé. Tout est calme.
vendredi 27 février 2009
On n’y voit rien. Daniel Arasse
Je n’avais pas compris pourquoi dans l’édition de poche, le tableau de Picasso « les Ménines » figurait sur la couverture d’un livre consacré à Bruegel, au Titien , au Tintoret ; et puis lors du dernier chapitre où Daniel Arasse détaille à son tour les Ménines de Vélasquez, l’explication arrive avec évidence. A partir d’une image, chacun compose à sa manière une interprétation qui recrée l’original. Si certains discours peuvent obscurcir notre vue, cet ouvrage d’un spécialiste de la renaissance italienne nous aide. A la façon d’un magicien qui gagne encore plus de notre admiration en dévoilant ses tours, il nous conduit avec humour « Marie-Madeleine, la putain tombée en sainte » et son érudition nous semble accessible. Dans les musées j’évitais les étages consacrés aux peintures mythologiques car je n’avais pas assez de références ; désormais, j’essaierai d’y porter plus d’attention. Ces tableaux tellement bavards me semblaient muets. La sophistication des symboles, les intentions des peintres peuvent entraîner des sur interprétations mais ces exercices appliqués par exemple à l’interprétation de la présence d’un escargot dans une scène de la visitation, nous amènent à apprendre à débusquer sous les évidences du quotidien, un sens profond.
jeudi 26 février 2009
Jean Achard
D’avoir laissé son nom à un lieu dans notre chef lieu de département, le natif de Sassenage a émoussé peut être de sa faculté à se laisser découvrir. La place aurait pris la place de l’artiste qui fera école à Proveysieux. Le musée Hébert à La Tronche convient bien à ces peintures assez classiques d’une campagne idéalisée, où les artistes commençaient à venir sur le champ. Nous pouvons voir d’autres tableaux que ceux qui sont installés au Musée de Grenoble. Paysages de montagne mais aussi de Normandie ou d’Egypte où il rejoint des Saint Simoniens expatriés là bas. Pour l’anecdote, nous sommes surpris à l’étage par des dessins des uniformes de ces adeptes du philosophe socialiste qui rêvaient de la fin de l’exploitation de l’homme par l’homme. Entrée gratuite et photographies sans flash autorisées.
mercredi 25 février 2009
« The » langue étrangère. Faire classe # 22
« Depuis la toute première enfance, l’enfant devrait avoir deux langues, ce qui rend impossible une certaine étroitesse d’âme, un certain dédain pour autrui. Mais c’est un idéal, une utopie. » G. Steiner.
Je glisse cette petite pastille de Steiner pour aérer une réflexion qui risque d’être plombée par des insuffisances personnelles tenaces. Un des charmes de notre métier réside bien dans la diversité des centres d’intérêt. Mais ajouter la cornemuse aux divers instruments de l’homme orchestre, ça use la mule.
Le débat sur l’apprentissage d’une langue étrangère à l’école s’est accéléré après la bonne fortune du linguiste Claude Hagège à "Apostrophe", quand les prescripteurs n’étaient ni Ruquier (ha ! Ha !) ni Ardisson (hin ! hin !). Sa conviction s’était avérée tellement communicative qu’il fut approuvé par tous et même la machine éducation nationale, promptement, se bougea : nominations avec profil, stages, assistants…pour des résultats me semble-t-il anodins.
Mon échantillon de profs d’anglais en collège, qui n’a pas perçu de progrès notoires depuis que des cours existent en primaire, ne constitue pas un panel assez large pour en tirer des généralités. Cependant, la légitimité de leurs avis vaudra bien celle d’expérimentations jamais évaluées : par exemple les cycles qui habitaient les circulaires mais pas la réalité.
Sur le terrain ces enseignants n’ont rien vu de durable et regrettent plutôt l’affaiblissement des capacités des élèves à apprendre et à repérer des structures grammaticales. Ne pourrait-on former des soupçons vis à vis de ce zèle inédit de l’administration quand les horaires de langue en sixième sont au plancher puisque des professeurs des écoles agréés (en vitesse) ont déjà formé (si peu) les néos-collégiens ? Prof d’anglais, c’est un métier. Faudra-t-il attendre son exposition dans un écomusée à côté du rétameur pour le reconnaître ?
De mon expérience personnelle, je ne retiens pas beaucoup de progrès par assistants interposés, américaines ou mauricien, scrupuleux ou désinvoltes, avec demi ou grand groupe. Ce n‘est pas faute d’avoir exploré, échangé, multiplié les supports, valorisé le travail qui présentait tous les attraits de la nouveauté. L’évidence de la pertinence de cet apprentissage éclata lorsque la classe, dans un téléphérique en route vers la mer de glace, entonna « Old Mac Donald », il s’ensuivit un gentil dialogue avec quelques touristes britanniques. Cette année là, une prof débutante assura amicalement quelques heures seulement pour sensibiliser mes mômes à l’anglais : elle savait y faire, elle.
La sixième perd ce charme des premières fois sans que les timidités adolescentes se résolvent, quand ce n’est pas la loi du silence qui s’impose aux filles dans certaines classes de collège. Mais faut pas dire, c’est pas la faute du pape.
Le désenchantement et le sentiment d’impuissance gagnent le collège unique qui lâche ses jeunes sur les chemins de l'orientation où tôt ou tard intervient la question de compétences. L’école s’ouvre à tous mais tous ne peuvent pas. Il y a trop loin des ambitions à la réalité. Comment accepter encore de retrouver la langue de bois en lisant les programmes édités par le ministère sur les soi-disant acquis linguistiques des élèves du primaire ? Comment sortira- t- on de la démagogie ambiante ?
L’oralité doit primer nous dit-on ; la vache espagnole « is french ». Il y a tant de demeures dans la maison de l’Oncle Sam. "The" bon accent : ça se discute. « Tri roupies » détrône Shakespeare : « Moi Ronald » « Toi Bill ». Tarzan n’use pas avec Jane de beaucoup de circonvolutions langagières. Cet anglais règne sans partage. Quant au rital, il se consolera du carton abandonné d’une Pizza …Hut.
L’étrangère ne s’apprend pas comme la maternelle. Alors la formation continue s’en remettra aux rencontres, à des voyages recadrés par les logiciels à reconnaissance vocale. Cette rose vision échappe à l’éduc.nat.
La supercherie de cette priorité ne trompe personne. Dans une séquence au collège : une fois enlevé le temps de l’installation, de correction des exercices, restent 35 minutes pour faire cours ou court et inciter à parler donc en comptant large 20 minutes pour 30 élèves = 40 secondes par élève. Des élèves s’entassent parfois à trente en collège.
En primaire, qui bénéficie d’un instituteur capable d’émailler sa journée de tournures, de vocabulaire, d’établir des ponts ? Ces bienheureux peuvent prétendre entrer dans un processus enrichissant : cette chance existe. Se pose la question du suivi, ces bonheurs peuvent s’oublier ou diffuser.
L'initiation à l’anglais s’empile par dessus d’autres nouvelles missions de l’école, au détriment de quels autres apprentissages ? L’horaire destiné au français en pâtit d’autant plus que l’engouement pour ce nouvel espéranto débarque dans un contexte où la France-qui-décline ne croit plus en son destin ni en sa langue. Lorsque les « bleus » ont le « blues », la nation a mal au crâne : dans quel état sommes nous tombés ?
« Le Monde de l’éducation » en souriait, le « Diplo » déplore. Le « Monde 2 » fait la photo.
A défaut du luxe d’une salle dédiée à l’anglais, les chansons me semblent un support efficace pour inventer une frontière à franchir afin d’aiguiser les curiosités. La musique s’installe, les mots semblent moins étranges, les blocages s’atténuent.
A l’école :
- Vous ferez de l’anglais.
- Mais je n’ai pas de formation...
- Vous passerez des cassettes.
Au collège…
- Vous remplacerez ce professeur de mathématiques.
- Mais je ne peux pas préparer un cours du jour au lendemain pour une classe inconnue.
- Vous passerez des cassettes.
« Ma cassette ! » Molière.
Des machines. Les psychologues consoleront les élèves à console dans leur solitude.
Ils consulteront sur la toile. Ils iront au Fight- club pour le contact.
Encore une touche à l’entreprise de démolition du travail des enseignants.
Quand un clavier ou un mange-disque remplace madame, qu’est ce qui peut rester de l’estime de soi, de la conviction à transmettre quand sont méprisés à ce point les contenus apportés aux élèves ?
Je glisse cette petite pastille de Steiner pour aérer une réflexion qui risque d’être plombée par des insuffisances personnelles tenaces. Un des charmes de notre métier réside bien dans la diversité des centres d’intérêt. Mais ajouter la cornemuse aux divers instruments de l’homme orchestre, ça use la mule.
Le débat sur l’apprentissage d’une langue étrangère à l’école s’est accéléré après la bonne fortune du linguiste Claude Hagège à "Apostrophe", quand les prescripteurs n’étaient ni Ruquier (ha ! Ha !) ni Ardisson (hin ! hin !). Sa conviction s’était avérée tellement communicative qu’il fut approuvé par tous et même la machine éducation nationale, promptement, se bougea : nominations avec profil, stages, assistants…pour des résultats me semble-t-il anodins.
Mon échantillon de profs d’anglais en collège, qui n’a pas perçu de progrès notoires depuis que des cours existent en primaire, ne constitue pas un panel assez large pour en tirer des généralités. Cependant, la légitimité de leurs avis vaudra bien celle d’expérimentations jamais évaluées : par exemple les cycles qui habitaient les circulaires mais pas la réalité.
Sur le terrain ces enseignants n’ont rien vu de durable et regrettent plutôt l’affaiblissement des capacités des élèves à apprendre et à repérer des structures grammaticales. Ne pourrait-on former des soupçons vis à vis de ce zèle inédit de l’administration quand les horaires de langue en sixième sont au plancher puisque des professeurs des écoles agréés (en vitesse) ont déjà formé (si peu) les néos-collégiens ? Prof d’anglais, c’est un métier. Faudra-t-il attendre son exposition dans un écomusée à côté du rétameur pour le reconnaître ?
De mon expérience personnelle, je ne retiens pas beaucoup de progrès par assistants interposés, américaines ou mauricien, scrupuleux ou désinvoltes, avec demi ou grand groupe. Ce n‘est pas faute d’avoir exploré, échangé, multiplié les supports, valorisé le travail qui présentait tous les attraits de la nouveauté. L’évidence de la pertinence de cet apprentissage éclata lorsque la classe, dans un téléphérique en route vers la mer de glace, entonna « Old Mac Donald », il s’ensuivit un gentil dialogue avec quelques touristes britanniques. Cette année là, une prof débutante assura amicalement quelques heures seulement pour sensibiliser mes mômes à l’anglais : elle savait y faire, elle.
La sixième perd ce charme des premières fois sans que les timidités adolescentes se résolvent, quand ce n’est pas la loi du silence qui s’impose aux filles dans certaines classes de collège. Mais faut pas dire, c’est pas la faute du pape.
Le désenchantement et le sentiment d’impuissance gagnent le collège unique qui lâche ses jeunes sur les chemins de l'orientation où tôt ou tard intervient la question de compétences. L’école s’ouvre à tous mais tous ne peuvent pas. Il y a trop loin des ambitions à la réalité. Comment accepter encore de retrouver la langue de bois en lisant les programmes édités par le ministère sur les soi-disant acquis linguistiques des élèves du primaire ? Comment sortira- t- on de la démagogie ambiante ?
L’oralité doit primer nous dit-on ; la vache espagnole « is french ». Il y a tant de demeures dans la maison de l’Oncle Sam. "The" bon accent : ça se discute. « Tri roupies » détrône Shakespeare : « Moi Ronald » « Toi Bill ». Tarzan n’use pas avec Jane de beaucoup de circonvolutions langagières. Cet anglais règne sans partage. Quant au rital, il se consolera du carton abandonné d’une Pizza …Hut.
L’étrangère ne s’apprend pas comme la maternelle. Alors la formation continue s’en remettra aux rencontres, à des voyages recadrés par les logiciels à reconnaissance vocale. Cette rose vision échappe à l’éduc.nat.
La supercherie de cette priorité ne trompe personne. Dans une séquence au collège : une fois enlevé le temps de l’installation, de correction des exercices, restent 35 minutes pour faire cours ou court et inciter à parler donc en comptant large 20 minutes pour 30 élèves = 40 secondes par élève. Des élèves s’entassent parfois à trente en collège.
En primaire, qui bénéficie d’un instituteur capable d’émailler sa journée de tournures, de vocabulaire, d’établir des ponts ? Ces bienheureux peuvent prétendre entrer dans un processus enrichissant : cette chance existe. Se pose la question du suivi, ces bonheurs peuvent s’oublier ou diffuser.
L'initiation à l’anglais s’empile par dessus d’autres nouvelles missions de l’école, au détriment de quels autres apprentissages ? L’horaire destiné au français en pâtit d’autant plus que l’engouement pour ce nouvel espéranto débarque dans un contexte où la France-qui-décline ne croit plus en son destin ni en sa langue. Lorsque les « bleus » ont le « blues », la nation a mal au crâne : dans quel état sommes nous tombés ?
« Le Monde de l’éducation » en souriait, le « Diplo » déplore. Le « Monde 2 » fait la photo.
A défaut du luxe d’une salle dédiée à l’anglais, les chansons me semblent un support efficace pour inventer une frontière à franchir afin d’aiguiser les curiosités. La musique s’installe, les mots semblent moins étranges, les blocages s’atténuent.
A l’école :
- Vous ferez de l’anglais.
- Mais je n’ai pas de formation...
- Vous passerez des cassettes.
Au collège…
- Vous remplacerez ce professeur de mathématiques.
- Mais je ne peux pas préparer un cours du jour au lendemain pour une classe inconnue.
- Vous passerez des cassettes.
« Ma cassette ! » Molière.
Des machines. Les psychologues consoleront les élèves à console dans leur solitude.
Ils consulteront sur la toile. Ils iront au Fight- club pour le contact.
Encore une touche à l’entreprise de démolition du travail des enseignants.
Quand un clavier ou un mange-disque remplace madame, qu’est ce qui peut rester de l’estime de soi, de la conviction à transmettre quand sont méprisés à ce point les contenus apportés aux élèves ?
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