mercredi 8 avril 2009

Musique. Faire classe #28

« Quand la musique était rare, sa convocation était bouleversante comme sa séduction vertigineuse. Quand la convocation est incessante, la musique repousse. Le silence est devenu le vertige moderne. » P. Quignard
Les petites phrases convaincantes, bien tournées ne manquent pas pour traduire les délices subtils de ces heures passées à écouter et chanter. Rien moins que le temps ( tac! tac ! tac !), l’enfance ( dodo) et la mort (tatatam) seraient convoqués avec l’amore, les secrets, la solitude et le « tous ensemble ». Les grandes orgues jouent pour naviguer vers ces contrées sublimes. Les clichés empesés trouvent leur symétrique dans le stéréotype du pipeau nasillard qui accompagnerait des heures tristes et un beau bordel ! Omniprésente dans les oreilles calfatées au M.P.3, si fluette dans l’enseignement, le respect ne tient pas à la matière. Silence et « Laaaaa ! » Chantons à l’unisson, harmonie.
Mes difficultés à tenir un rythme, mes timidités de chanteur, mon inculture musicale m’ont empêché d’aborder tranquillement ses heures en solitaire. Heureusement des moniteurs sont venus saisir la baguette. Quelques minutes au guide - chants pour un C.A.P. me coûtaient trop de temps pour rendre serein des apprentissages que je n’ai finalement pas eu à mener. Cependant j’ai vécu bien des moments de grâce dans l’attente d’un train où j’entraînais une classe à chanter ; moments trop rares et d’une qualité moindre que ce que les éducateurs musicaux ont apporté chaque année à la guitare, à l’accordéon, au violon. Je leur ai suggéré des thèmes autour de l’amitié, de la défense de la planète, de l’enfance, sur différents pays, autour de l’école. J’ai repris par exemple en histoire ce qui avait été le fil rouge d’une année comme les chants emblématiques d’une époque même s’il est avéré que les vrais maquisards in situ chantaient plus souvent « la digue, la digue » que « le chant des partisans ». J’ai appris aussi à ne pas mettre la musique à toutes les sauces, ne pas la proposer lorsque les enfants s’exercent à une autre activité, ne pas ancrer dans les oreilles l’idée de musique arrière - plan. Pour une écoute exclusive, je m’en remis souvent à d’autres, ne délivrant qu’avec parcimonie des ouvertures : « c’est pas l’homme qui prend la mer… » pour annoncer notre départ en classe de mer, ou quelque conclusion tonitruante avec « Bella cio » qui accompagnait une fin de journée de classe. D’avoir trop patienté au son des « quatre saisons », nous avons des réticences à proposer des classiques aux risques de l’oubli et d’un appauvrissement de la connaissance qui ne serait bâtie qu’avec du neuf … pour nous. Tentatives de musique dans les cars de ramassage, mais j’y renonçais pour ne pas vouloir non plus combler absolument chaque minute vacante dans ma frénésie de transmettre. Laisser se reposer les esgourdes, se laisser aller à la mauvaise blague régressive du voisin. Je ne suis pas « Le roi de la montagne » dans son hall, ni « la reine de la nuit ». Maître par intermittence, il me fallut bien reconnaître que je n’étais pas Dieu.
Les tensions de la mode, viennent s’agripper autour des partitions. A quoi bon ressasser à l’école ce que les jeunes savent d’ailleurs ? Pourtant, quand Sinsemilla reprend Brassens, nous nous gagnons quelque légitimité. Et l’année des « choristes» le chœur mettait plus de cœur à chanter. La Star Ac aide à prendre de l’assurance et à s’exposer. Piocher dans le répertoire de l’heure, attire des adhésions fortes et des rejets puissants ; attention territoire balisé par les tribus. Par contre, le patrimoine nous sauve et tisse le lien entre les générations: Goldman, Perret, Le Forestier, Fugain, Berger, Nougaro… C’était bien quand arrière grand -mère venait de reconnaître « tout va très bien madame la Marquise » chanté à la fête de fin d’année. Les futurs « muants » avaient leurs timidités de pré ados mais ensemble, dans la chaleur, c’était fête ! La fête de l’école, et cette batoucada pour les dix ans ! Abdelrezac en fendit un tambourin.

2 commentaires:

  1. j'ai oublié de recopier le robot
    le commentaire était
    chante, mais chante donc !
    tu as sans doute commis de la poésie
    y en a plein dans tes longs textes où tu te parles à toi-même tout en nous parlant
    je crois que tu es un rossignol ou un merle c'est mieux dans sa coquille!

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  2. j'ai oublié de te dire que le chant c'est le corps
    pas le mental
    que le mental tue les poètes qu'il est un terrible despote inconnu des petits enfants .Alors si on peut parler et crier et pleurer et rire et lire c'est que déjà on chante. Il y a ce démon penché sur notre épaule dans notre dos qui chuchotte "T'es pas cap ! Tes émotions tu les ravales !"
    C'est celui -là qu'il faut tuer sans pitié !
    Ces cons qui ne peuvent s'empêcher de vous dire quand vous chantez "il va pleuvoir"
    Cette honte de chanter alors que dans le chant humain il y a toutes les émotions de l'humanité
    Faut-il avoir fait le Con-servatoire pour se pâmer dans la musique !
    Chanter c'est jouir pour de vrai, c'est sentir son corps, son air vivants.
    Jubiler ! Ouvrir la bouche non pour l'invective -alors là on est tous bons-
    mais pour fraterniser en millions de vibrations.

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