vendredi 3 février 2017

Les uns, les autres.

Quand vient le froid, le solitaire demande la solidarité et s’agrippe au groupe, alors que la société a déjà bien émietté les individus depuis des saisons.
Il fut un temps où la distinction politique séparait le « particulier » du « partageux », à présent tout se brouille.
De nos digicodes à Trump, l’individu boursouflé d’aujourd’hui attaque les constructions communes, et tant de coups de griffes dans le contrat social peuvent nous conduire à claquer la porte derrière nous et nous barricader.
Alors classe contre classe, ma pomme sur le dessus du panier, ski plutôt que foot ?
Rien n’est simple: le sport co n’est pas forcément coco et bien des avancées pour tous ont tenu à des individus hors pair.
De nos années ferventes, on aurait pu croire qu’aurait subsisté un peu de compréhension à l’égard de son « prochain ».
Ce terme «  prochain » renvoie au catalogue catholique et son cortège de cagoules pointues quand d’autre part, les circonvolutions autour du terme « ensemble » sentent le samovar collectiviste.
Les contradictions crient lorsqu’un réfugié sur une plage s’envisage plus fraternellement au loin qu’un immeuble nouveau sous nos fenêtres.
Quelques surlignages de paradoxes feront-ils avancer une dialectique qui va et vient de l’individu au collectif ?
Les élèves sont de plus en plus placés en « îlots » pour travailler en groupe, alors qu’ils n’ont jamais été aussi individualistes, bâchant leur coreligionnaires à coup de réseaux dits sociaux,  tout en se protégeant d’un milieu qui n’a jamais été aussi agressif sous ses bienveillances rabâchées.
Dans les milieux qui cherchaient en pédagogie, ceux qui prônaient avec le plus de conviction le travail en équipe étaient les personnalités les plus fortes aux qualités individuelles les plus manifestes.
Il me semble que les directives d’aujourd’hui, à propos de travail en commun, visent plus à une mise en conformité qu’à l’émergence d’intelligences collectives. Les formations bricolées aux accents autoritaires ignorent les paroles des professeurs tout en « vendant » par ailleurs le respect de la parole des jeunes.
Les maîtres d’hier, encore des termes proscrits, qui mettaient en place des démarches coopératives s’escrimaient aussi à fabriquer des outils qui permettaient à chaque élève d’avancer à son rythme. Ces pratiques se forgeaient dans la délibération entre adultes, ô combien jaloux de leur indépendance, de leur liberté. Ceux qui en ont exprimé les principes les plus appréciés étaient avant tout des praticiens dont les mots ont été capturés par  quelques bavards opportunistes squattant désormais les officines ministérielles. 
Par exemple les livrets de compétences dont on causait dans les groupes Freinet étaient élaborés sur le terrain et chacun se les appropriait comme il l’entendait, sans obéir à une quelconque circulaire, bien mal nommée en l’occurrence, puisque la forme ronde symbolise l’égalité des délibérants, des décideurs.
Pour les familiers du blog, il ne s’agit pas seulement du sempiternel retour vers les mômes,  mais à voir les positionnements des nations par rapport à l’ Europe ne peut-on parler de postures infantiles ?
Et parmi ceux qui présentent les alternatives les plus radicales à nos embourbements démocratiques, qui voit de convaincants leaders, des collectifs entraînants ? 
Dans les altitudes démocratiques où aime se situer par exemple le monde libertaire, l’autoritarisme est souvent de mise et les dissidents en son sein ne prospèrent guère, quant aux compromis, ce n’est pas le genre de la maison.
Pourtant : « La vérité finale de l’indépendance de chacun, c’est l’interdépendance de tous.»
Marcel Gauchet
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Trop tard encore cette semaine pour « Le Canard » mais dans "Marianne" ce dessin de Tignous assassiné il y a deux ans.

1 commentaire:

  1. Les temps sont durs, Guy.
    Durs pour quiconque est capable de parler avec conviction de ce qu'il croit.
    Des fois, celui qui parle avec conviction de ce qu'il croit est taxé d'autoritarisme quand l'individu se met à ressentir confusément son manque de liberté dans un contexte où on nous bassine du matin au soir avec la nécessité encore et toujours d'être libre.
    Je crois qu'on perd le Nord, là.
    Mais je ne suis pas prête à chanter des hymnes à la gloire du collectivisme.
    Et si on construit dans mon quartier, j'aimerais mieux que ce soit de belles constructions... nobles qu'il fait bon regarder, et où il fait bon vivre. Où l'âme de l'Homme n'est pas ratatinée par la grisaille.. de l'esprit collectiviste ?
    Ce n'est pas évident de nos jours, n'est-ce pas ?

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