mercredi 23 mai 2018

1917. Jean Christophe Buisson.

Non ce n’est pas le fils de Patrick Buisson qui a relevé au jour le jour les évènements de cette année là, mais sans être d’une originalité transcendante, ces 320 pages nous donnent un aperçu agréable à lire de « L’année qui a changé le monde ».
Le premier janvier, le cadavre de Raspoutine est retrouvé dans la Neva, le 10 Buffalo Bill disparaît. Le 27 décembre, Lénine rédige un projet de décret dans lequel il propose que « les saboteurs, les fonctionnaires en grève et les spéculateurs » voient leurs biens confisqués et soient condamnés à « un emprisonnement, l’envoi au front ou [aux] travaux forcés. »
La vierge apparaît plusieurs fois à Fatima, le premier disque de jazz est gravé, pendant que le « Baron rouge » et Lawrence d’Arabie faisaient l’actualité.  
Nous suivons le fil des actualités d’alors, de Vallotton à Verdun, depuis les fronts de l’Est, ou d’Orient, de Petrograd (Saint-Pétersbourg) jusqu’à Halifax:
« Dans le port canadien de Halifax plongé dans la brume, un bateau norvégien entre en collision avec un bateau français chargé d’explosifs, le «Mont blanc », déclenchant la plus grande explosion de l’histoire provoquée par l’homme (elle est entendue à 400 km). Le bilan est épouvantable : deux mille morts, neuf mille blessés. »
La modernité s’installe dans l’art, la « fontaine » de Duchamp nous étonne encore.
Se mêlant aux péripéties politiciennes, les anecdotes alternent avec les drames :
«  Le croiseur Aurora, qui a quitté sa base de Cronstadt pour mouiller à proximité, ouvre le feu sur le palais d’hiver (une salve à blanc)[…] au théâtre Mariinsky, on donne Boris Godounov ; au Narodni Dom, le célèbre ténor Chaliapine chante Don Carlos. »
De nombreux documents photographiques agrémentent l’ouvrage et des focus sont proposés concernant des personnalités qui vont faire parler d’elles : Mussolini, Proust, Freud…

mardi 22 mai 2018

Le Teckel. Hervé Bourhis.

Dans le milieu des visiteurs médicaux ils se sont donnés des noms de chien.
Celui là est en fin de parcours flanqué d’un jeune collègue qui doit prendre sa relève, pour « allier l'expérience à la fraîcheur ».
Dans cet univers des soutiers des laboratoires pharmaceutiques, Power point fait la route avec Rimbaud. Les deux compères aux moeurs contraires, aux âges antagonistes, finissent par s’apprécier, alors que c’était vraiment mal parti : un classique.
Le scénario est rondement mené, passant de la banalité au rocambolesque; les dessins sont nerveux, les 80 pages se dégustent avec plaisir.
Des réflexions concernant le sens du travail, l’éthique, passent bien entre deux sourires, quelques caricatures efficaces et de tendres notations. Le ringard a du répondant.
« La mort, on n'a plus le droit. Le fameux acharnement thérapeutique. Il faut vivre ! Vivre ! C'est notre moderne punition ! Et on va tous se retrouver bicentenaires, en siège à roulettes ! À souffrir d'être encore en vie. La douleur !! Celle qui ne tue pas et c'est pire ! Celle qui nous retourne les tripes tant elle est insupportable. »

lundi 21 mai 2018

Cannes cinéphile 2018.

En ces temps où les trains sont souvent à l’arrêt, la ligne de chemin de fer qui longe la Côte d’Azur paraît encore plus belle. Une fois franchies les bornes rouges des rochers de l’Estérel en direction des salles obscures, comment ne pas apprécier  la lumière particulière de la capitale provisoire du cinéma ?
Pas de Croisette du tout, cette année
mais 30 films, 29 et 1/2 plus exactement, car pour « Meurs, Monstre, meurs » je ne suis pas allé jusqu’au bout des 98 minutes d’horreur, aggravées de prétention, coulées par le ridicule.
Pendant cette semaine enchantée, nous n’avons même pas vu que le ciel a été gris, campant si loin des querelles françaises, en plein courant d’air, celui de notre temps, passant d’Argenteuil à l’Argentine, des chaises en plastique de fiançailles gitanes aux portes en fer d’une cour azéri.
En cette année « Harvey Weinstein », pointer des tendances relève de la gageure tant les choix possibles sont variés et nos paniers différents.
Les relations homosexuelles sont privilégiées parmi 2000 films proposés parait-il, où nous avons dégoté quelques comédies alors que d’habitude nous les cherchons vainement.
Le retour des cigarettes à l’écran se remarque, les paysages sont souvent enneigés et il n’est pas rare d’aller faire un tour au bord de la mer.
J’ai repéré des négligences orthographiques dans les sous titres - l’UNEF n’a pas l’exclusivité des fautes - en particulier pour les verbes du 1° groupe conjugués à l’impératif, par contre la majuscule s’impose pour désigner Dieu, même sous forme de pronom.
« L’affaire de famille » de Kore Eda dont on connaît la finesse a reçu la palme d’or
http://blog-de-guy.blogspot.fr/2017/05/apres-la-tempete-kore-eda.html mais c’est une douce romance amoureuse « Asako 1&2 » que nous avons vue, par son compatriote Ryusuke Hamaguchi apprécié récemment
L’Iranien Jafar Panahi ne pouvant sortir de son pays, il aurait semblé opportun de mieux récompenser « Trois visages » où la lutte des femmes pour l’émancipation se livre bien loin des chambres du Carlton, apportant une réflexion allègre sur les images, tout en nous renseignant sur la vie d’une région.
Dans la sélection officielle nous retrouvons le cinéma italien avec « Heureux comme Lazzaro »  comme Lazare le ressuscité, dans lequel un innocent imperméable à la méchanceté fait ressortir toute la cruauté des autres.
Le film égyptien «  Yomeddine » n’a pas eu de récompense dans la compétition qui attire tous les regards et multiplie les prix spéciaux, dévalorisant ainsi les gagnants, mais c’est l’usage dans bien des domaines ; pourtant l’histoire d’un lépreux à la recherche de sa famille d’origine est poignant, bien que gâché par une conclusion lourde.
« Arctic »: l’énergie vitale d’un homme permettra-t-elle de surmonter des conditions extrêmes ?
Dans la catégorie « Un certain regard », « Euphoria » avec deux frères aux trajectoires très différentes nous fait sourire, réfléchir, nous émeut ; nous sommes à Rome.
A Damas, les passions ordinaires de femmes en rivalité dans « Mon tissu préféré »  auraient pu nous rassurer  en 2011, au moment où s’annonçaient des bouleversements meurtriers.
C’est à « La quinzaine des réalisateurs » où nous avons été les plus assidus.
« Amin » entre Sénégal et France entrouvre des portes d’un foyer de travailleurs immigrés, des tentures de cases et le portail du pavillon appartenant à Emmanuelle Devos.
Quant à « Carmen y Lola »  aux  couleurs éclatantes, elles vivent un amour difficile en milieu gitan.
Les films mexicains peuvent-ils proposer une autre image de leur pays qui ne serait pas dévoré par la violence ? « Comprame un revolver » avec une petite fille enchaînée par son père junkie, va très loin dans l’inhumanité.
Le contraste avec « En liberté » n’en est que plus vif . Pierre Salvadori traite les zones d’ombre de ses héros avec intelligence et drôlerie, comme Romain Gavras, dans « Le monde est à toi » qui répond aux spectateurs après la séance, que c’est… sa mère, l’inspiratrice pour une histoire déjantée de dealers avec Adjani et Cassel.
« Teret » (le chargement) dans un camion en Serbie en 99 est nettement plus gris.
« Cris the Swiss »  dans « La semaine de la critique » n’est pas plus gai, avec ses dessins animés intercalés dans un reportage qui découvre les engagements d’un journaliste suisse disparu en Croatie.
Mon prix d’interprétation féminine serait bien allé à Tillotama Shome, à l’énergie communicative. Elle joue une servante en Inde dans « Monsieur » où la fin des castes n’est pas pour aujourd’hui.
L’actrice principale de « Woman at war » incarne aussi avec efficacité et conviction une activiste écologiste en Islande.
« Shéhérazade » met en scène à Marseille des acteurs amateurs, eux aussi remarquables, pour illustrer le fait que la  violence prospère sur la naïveté, alors que par ailleurs le spectateur est roulé avec virtuosité par « Guy », un chanteur sur le retour.
Dans la programmation des cinéastes dite ACID, il ne se passe pas grand-chose avec « Il se passe quelque chose » ni fait ni à faire : deux femmes aux environs de Fos-sur-Mer rencontrent des gens. Par contre, une jeune Rom débarquant en Belgique parle la langue universelle de l’émotion et de la vitalité, dans « Seule à mon mariage ».
Le mot « vitalité » revient souvent pour caractériser de nombreux films, comme est répétée avec à peine quelques variantes, la réplique « Excuse moi, tout va bien se passer ».
Face à « Thunder Road », j’étais gêné de ne pas rire en même temps que d’autres spectateurs, inquiet plutôt de voir le respect de la loi confié à un policier déséquilibré, il est vrai qu’à la tête de son pays, les USA…
« Un violent désir de bonheur » sonne tellement faux qu’il me procure facilement le plaisir sadique d’avoir trouvé le film à déconseiller absolument.
Également oubliable, parmi de nombreux road movies vus cette année, « The Strange Ones », proposé par les Ecrans juniors, glauque et embrouillé, nous laisse au bord du chemin.
Les films présentés par le Cinéma des antipodes sont rarement distribués en France, pourtant « Tree summers » drôle, chaleureux, le mériterait bien. Pendant trois étés consécutifs un festival rassemble des groupes significatifs de la diversité de l’Australie. Cette proposition est  bien plus subtile et efficace que « The Pa boys », groupe de reggae maori qui nous promène de jolis paysages en paysages bien éclairés.
La rencontre d’un jeune homme et d’une jeune fille pendant une nuit et une journée dans « Ellipsis » ne marquera pas l’histoire du cinéma, mais se laisse voir.
« The changeover » tellement embrouillé, ne me réconciliera pas avec le genre fantastique.
En marge du festival, Visions sociales projette quelques films récents qui auraient pu nous échapper.
« Menina » à travers la vie d’une petite fille d’origine portugaise revient sur la situation d’une communauté peu choyée par le cinéma.
« Winter brothers » tape fort : des mineurs dans une carrière de calcaire au Danemark s’étourdissent à l’alcool frelaté.
Enfin, parce que le cinéma continue après la projection, une phrase d’une voisine de fauteuil :
« Depuis que j’ai une chaise roulante, je marche mieux ! » Elle s’en sert parfois comme déambulateur.
Et cette réplique d’une collégienne à un de ses camarades qui ne lui a pas tenu la porte :
«  Quel manque de galanterie ! Trou du cul ! »

dimanche 20 mai 2018

Le malade imaginaire. Comédiens & Compagnie.

La compagnie basée à Versailles avait posé ses tréteaux sur la scène de La Vence Scène, jouant comme on l’imagine à l’époque de Louis XIV avec musique vivante, maxi effets farcesques comme lorsqu’il n’y avait pas de micro. Les enfants rient.
Toinette la servante qui-a-du-bon-sens, anime les morceaux d’anthologie :
« Le poumon ! Le poumon ! »
Argan aux traits accusés et ses guérisseurs n’avait pas besoin d’ajouter des allusions à l’actualité pour nous laisser entrevoir quelques médecins ridicules dont :
parmi ceux qui jouissent des difficultés du pays :
 « Je veux des maladies d'importance, de bonnes fièvres continues, avec des transports au cerveau, de bonnes fièvres pourprées, de bonnes pestes, de bonnes hydropisies formées, de bonnes pleurésies avec des inflammations de poitrine : c'est là que je me plais, c'est là que je triomphe ; et je voudrais, monsieur, que vous eussiez toutes les maladies que je viens de dire, que vous fussiez abandonné de tous les médecins, désespéré, à l'agonie, pour vous montrer l'excellence de mes remèdes et l'envie que j'aurais de vous rendre service. »
Nul besoin non plus pour valoriser le théâtre vivant d’une arrangue finale tellement datée méprisant le foot et la télévision : la pièce que nous venions de voir était la plus probante des démonstrations des délices du théâtre vivant.
Du travail bien fait avec énergie, allégresse : une introduction musicale avant l’heure de la représentation tranchant avec les attentes devenues habituelles dans d’autres salles, nous avait mis dans de bonnes dispositions. 
Sous la bouffonnerie cette ultime comédie de Molière est un hymne à la vie posant un masque grotesque sur le visage de la mort qui avait saisi Jean Baptiste Poquelin à la quatrième représentation de l’œuvre de sa dernière heure.

samedi 19 mai 2018

Le géographe des brindilles. Jacques Lacarrière.

J’ai eu plaisir à retrouver l’écrivain disparu en 2005 qui m’avait impressionné par son érudition pendant « L’été grec » et ravi dans « La France sous l’écorce ».
Le marcheur partage poétiquement ses savoirs des protozoaires jusqu’aux étoiles, des temps précambriens jusqu’aux villages qui se vident. 
 « J’aime les pierres venues du fond des mers, j’aime leur mémoire friable mais fidèle. J’aime que sur elles la nature ait gravé sous forme de fossiles, les mille lithographies de nos genèses. »
Il porte la plume depuis les images de son enfance « Les merveilles du monde » insérées dans des tablettes de chocolat jusqu’aux mystères des forêts, libellules et crapauds, abeilles et éphémères, géranium et permafrost, vaches et lions, roman de renart et Félix le chat…  
Des articles de diverses provenances vont fouiller à la racine des mots quand sang et sève, bras et branche ont la même étymologie, dans l’intimité des animaux et des plantes, celle des hommes.
Alors le péché véniel de répétition d’un bon mot : «  A Vézelay on croit, à Chablis on a cru » , s’oublie dans le foisonnement des observations fines, des notations poétiques, des digressions prémonitoires d’un écolo précoce, conséquent et bon vivant.
«  C’est vrai le ciel a une odeur. Pas une odeur de lait comme pourrait le faire croire ce mot trompeur de galaxie mais une odeur d’ozone, d’aisselle d’ange, de coup de foudre en cours et d’orage à venir. »

vendredi 18 mai 2018

L’esprit du peuple. Jacques Julliard.


Le dernier livre, plus de 1000 pages, de Julliard m’a escorté quelques semaines, lui que j’ai accompagné plus de quarante ans, non comme j’aurais suivi un "maître", le mot serait malvenu chez ce libertaire, par ailleurs social démocrate et traditionaliste, mais comme un proche comprenant parfaitement son passage d’éditorialiste du « Nouvel Obs » à « Marianne ».
« La fréquentation des grands textes instaure entre tous ses pratiquants une espèce de démocratie à la fois libertaire et égalitaire, qui est comme un revanche contre toutes les petitesses de la vie. »
Ses talents de pédagogue réussissant à nouveau à faire partager son érudition sans nous regarder de haut, comme dans son ouvrage majeur à mes yeux, « Les gauches françaises » qu’il a parfaitement décrites en tant que chercheur, et pratiquées en militant à  la CFDT.
Je me suis conforté à la reprise de ses critiques étayées des trahisons de la gauche concernant l’école, la laïcité, la sécurité, la nation, pour situer la tromperie du côté des élites qui préfèrent traiter du sociétal que du social.
« Il y avait jadis de la candeur à croire au diable. Il y a aujourd’hui de l’aveuglement à ne pas y croire »
Malgré le titre, ce n’est pas un ouvrage théorique de plus qui mettrait le « Peuple » comme icône hors d’atteinte des populistes, il s’agit d’une biographie aux références développées de Péguy, Bernanos, Simone Weil, Proudhon, vécues au côté de Maire, Rocard…
Où « le refus de parvenir » empêche de persister d’appartenir à quelque « établissement ».
Parmi les nombreuses citations lorsqu’il parle de Claudel et de ses ambassades qui l’ont éloigné de la France :
«  La distance efface les accidents secondaires du terrain, mais exalte le génie des lieux, leur saveur et leur odeur, comme « le vent éteint les bougies et allume le feu » (La Rochefoucault) » 
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Il y a dix ans que je commençais ce blog: depuis 2820 articles ont été postés.

jeudi 17 mai 2018

Pissarro. Damien Capelazzi.


Le musée Marmottan et celui du Luxembourg ont relancé l’intérêt pour « Le premier des impressionnistes » comme l’honore une des expositions, alors que l’autre lui est consacrée sous le titre: « La nature retrouvée » après 40 ans d’absence de Paris.
Né en 1830 à Saint Thomas, aux Antilles alors danoises, d’un père marrane et d’une mère créole, il va étudier en France à Passy où son don pour le dessin est encouragé. Autoportrait.
Revenu dans le magasin de quincaillerie familial pour cinq ans, il part au Venezuela, avec le peintre Fritz Melbye, un ami déterminant dans sa carrière comme son frère Anton. Paysage tropical.
Il arrive à Paris juste avant la fermeture de l’exposition universelle de 1855 qui l’impressionne pour longtemps avec ses Courbet, Corot, Théodore Rousseau et surtout Millet, source de bien des sensibilités en peinture.
Avec les trois derniers de cette prestigieuse liste auquel s’ajoute Daubigny et son Bateau atelier, « l’école de Barbizon » qui peint face au sujet est au complet.  
Il fréquente l’académie du « Père suisse » où il rencontre Monet, Cézanne et  devient ami avec Sisley et Renoir. La biographie du « patriarche des impressionnistes » est une histoire collective où il avait une place reconnue.
Il se met en ménage avec la servante de ses grands parents avec laquelle il aura 8 enfants. Il vit à Pontoise. Le choix des modèles étant dicté souvent par l’économie, Jeanne dite Minette fut mise à contribution.
Route enneigée à Louveciennes. Il refait le monde dans les cafés avec Monet mais dreyfusard, il se fâchera avec Degas.
Maupassant, le canoteur, a loué une maison pas loin de La Grenouillère établissement de bains sur la Seine qu’ont peint Renoir et Monet,« Madagascar de la Seine », « Cap des torses » il avait écrit :
« Ce lieu sue la bêtise, pue la canaillerie et la galanterie de bazar. Mâles et femelles s'y valent. Il y flotte une odeur d'amour, et l'on s'y bat pour un oui ou pour un non, afin de soutenir des réputations vermoulues que les coups d'épée et les balles de pistolet ne font que crever davantage. » Les bains sont mixtes.
Dans les années 70, devant l’avancée des Prussiens, beaucoup d’artistes se réfugient à Londres où se trouve aussi le marchand Paul Durand-Ruel qui diffusera largement les œuvres impressionnistes outre atlantique. Lorsque Pissarro revient, son atelier a été pillé, il ne reste qu’une quarantaine de toiles sur les 1500 qu’il avait entreposées.
Effet de pluie au Valhermeil, Auvers-sur-Oise doit à Turner, quand les couleurs se délitent dans la lumière.
La route de Versailles, au petit matin est subtile, la peinture climatique n’est pas gelée, si on laisse les couleurs venir.
La Barrière  s’inscrit dans une narration, révèle les formes où l’arbre troue comme une portée musicale ; le vivant est respecté dans la balance entre les formes organiques et la géométrie.
La silhouette de la vache d' Un vacher à Valhermeil, provient d’une copie de Jordaens par Gachet, le célèbre docteur homéopathe d’Auvers-sur-Oise. Outre la révélation de la qualité de peintre du collectionneur, ce jeu sur l’histoire de la peinture depuis le baroque anversois jusqu’aux défricheurs du XIX° m’a semblé intéressant. .
Le semeur
La récolte des pommes de terre.
Il se lie avec Cézanne, Côte Saint-Denis à Pontoise.
L'Hermitage à Pontoise : dans un écrin de verdure, Pissarro « piquait », Cézanne plus géométrique « plaquait ». Ils avaient eu tous deux des problèmes avec des pères autoritaires, et avant de repartir loin de Paris, 
l’Aixois manifesta quelque jalousie quand celui qu’il qualifiait d’ « humble et colossal » se rapprocha de Gauguin dont les Pommiers à L'Hermitage semblent avoir été dictés par celui qui sera par ailleurs influencé par Seurat et Signac.
La Récolte des Foins.
Grâce à Monet, il avait acquis une maison à Éragny-sur-Epte avec un beau jardin.
Dans sa série dessinée des Turpitudes sociales, Jean Misère témoigne de l’engagement explicite du libre penseur du côté des anarchistes.
Dans ses dernières années, sa vue est gênée par trop de luminosité. Depuis des chambres d’hôtel derrière les persiennes, il peint en contre plongée :
Avenue de l'Opera, Place du Theatre Français
Boulevard Montmartre, Effet de Nuit
Lui qui conseillait à Matisse qui aimait ses couleurs : «Travaillez et n'écoutez personne» a pris et donné, dans le respect des autres, parlant de Cézanne :
Il a déclenché de grandes gloires de la peinture française. Auto portrait.
Il est mort en 1903.