samedi 26 septembre 2009

Je ris de me voir si bobo en ce miroir…

Peut-on parler de culture ?
Soyons fous, osons une citation de Paul Viriglio :
«… la culture est un tempo. Elle forme à la fois à l’emploi du temps et à l’emploi de l’espace.
Aujourd’hui la rapidité, l’instantanéité interrompt ces lignes mélodiques.
Il n’y a plus que des accidents et des catastrophes, ce n’est pas très excitant. »

Voilà, ça y est, j’ai rejoué au potache des sixties où une citation agrémentait le propos, quand les intellectuels convoqués sur les pages blanches nous poussaient un peu plus haut. Aujourd’hui, ma main se referme sur des cendres.
Sur le versant politique que j’ai arpenté, la culture et la politique étaient mêlés, mais les pratiques désormais bousculent ces évidences de jadis.
Le « vivre ensemble » disparaît sous l’individualisme à oreillette. Les dialogues de Shakespeare ne passent pas au dessus du mur du fond de la cour du palais des papes et les politiques relèguent à la sphère privée leurs préférences. Sauf pour se construire une nouvelle image où un De Funès féroce avec les faibles et servile avec les riches renseignait plus utilement sur l’ami de Christian Clavier que les Rougons Macquart que ses attachés de presse lui découvrent maintenant.
Karmitz va cachetonner au conseil de la vie artistique, Jack tourne autour du pot de déconfiture, les jeunes UMP scandent : « Mitterrand ! Mitterrand ! ».
La gauche qui a perdu la boussole, en courant derrière les opposants à Hadopi, adopte les réflexes du libéralisme le plus débridé. Localement la construction d’une salle culturelle par la majorité suscite des réserves pour des raisons de lourdeur d’imposition.
Tout l’envers de valeurs humanistes qui consentaient à l’impôt comme outil de la solidarité et vivaient la culture comme levier de l’émancipation, la régulation comme garantie pour les créateurs et une borne à la consommation sans frein : la gauche, non ?
Pour une princesse de Clèves quelque peu ennuyeuse qui a repris un brin de notoriété grâce à l’ami de Bigard, dans le même registre, que de sourires en coin quand on s’essaye à aborder les sujets concernant la culture !
A ranger dans l’attirail bobo avec quelque contribution climat énergie et autres interrogations qui portent sur des durées dépassant un week-end.
En raillant ceux qui méprisent la Culture, je m’enferme dans une posture symétrique à ceux qui déprécient ceux qui n’ont pas leurs codes.
A évoquer la culture populaire, difficile de décoller l’autocollant TF1, et sans même aller fouiller dans les couches du crétacé où est enfouie la culture prolétarienne, j’ai le sentiment que tout est en miettes, folklorisé pour ce qui est de savoirs paysans, et moquées les exigences enseignantes.
Finalement le fils de « pagu » (paysan) vaincu n’a pas forcément éloigné les sarcasmes en devenant prof se frottant à la bobosphère.
Alors quel miel, quand un mail m’annonce qu’une de mes anciennes élèves vient de réussir à l’ENS et que les poésies à dose quotidienne dans ma classe primaire ne sont pas pour rien dans cette trajectoire ! Elle avait elle-même composé un recueil pour les prochains élèves qui viendraient après elle. Je n’ai pas hésité à lui envoyer cette citation du père Hugo : « Au reste, le domaine de la poésie est illimité. Sous le monde réel, il existe un monde idéal, qui se montre resplendissant à l’œil de ceux que des méditations graves ont accoutumés à voir dans les choses plus que les choses »

1 commentaire:

  1. Bonjour Guy,

    Juste quelques mots pour dire que je suis heureux de trouver par les hasards d'une recherche, une vision sur nos passé et présent que je partage profondément. Ma jalousie est grande, mon ami, parce que je ne l'aurais certainement pas écrit de façon aussi lumineuse. Pouvons-nous jouter avec des mots et des idées ? myspace.com/janus.bozyeux
    Sachons préserver nos indignations, nos espoirs et nos rires.
    Janus

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