jeudi 27 avril 2023

Herboriser au musée. Catherine de Buzon.

La conférencière en visioconférence chez les amis du musée de Grenoble sait bien que 
« nul n’a jamais eu besoin de personne pour s’émerveiller devant la Nature » 
mais que « les tournesols sont autrement tournesols depuis Van Gogh ».
Baudelaire convient bien en surimpression d’un tableau d’Ernest Quost, « Fleurs de Pâques » : 
« La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles;
L’homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l’observent avec des regards familiers. »
« Vertumne »
par Giuseppe Arcimboldo peut aussi illustrer Marcel Proust : 
« Le véritable voyage de découverte ne consiste pas à chercher de nouveaux paysages, mais à avoir de nouveaux yeux. » 
La nature rencontre la culture par le regard singulier des peintres, parfois.
Verlaine organise  cet exposé : « Voici des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches… » Dans « Le jardin des Hespérides » Frédéric Leithon,
les pommes d’or de l’immortalité portent en leur centre comme une étoile visible dans une coupe à l’horizontale, celle de l’esprit dans la chair.
Mais ce fruit peut être objet de discorde quand Minerve, Junon et Vénus demandent au troyen Pâris de remettre une pomme d’or à la plus belle. « Le Jugement de Pâris » Sandro Botticelli.
En croquer, apporte la connaissance et la liberté, en abuser approcherait du mal quand le ver est dans le fruit« Adam et Eve », Hans Holbein.
Ne pas confondre une pomme et sa représentation, les mots et la chose : Magritte.
Qui dit « pomme » dit Paul Cézanne, « Nature morte aux pommes et aux oranges »,
alors que la « Nature morte, pichet et fruits » de Picasso is "still life".
Dimitri Tsykalov
a participé  en 2010 à l’exposition du Musée Maillol : Vanités : C’est la vie ! 
Le raisin était sacré du temps de Dionysos dieu grec « aux trois naissances »,
alors que la fonction était plus sociale quand les romains diffusaient la culture de la vigne dans leur empire.
Le vin est au centre de « 
La Bacchanale des Andrians » Le Titien.
À Saint-Étienne-du-Mont, « Le pressoir mystique » voit le sang du Christ  mis en tonneaux.
« Moi, je suis la vigne, et vous, les sarments. »
dit celui-ci dans la chapelle Suardi près de Bergame où Lotto a peint ses fresques des murs au plafond.
« Les raisins »
de Juan Fernandez El Labrador vont bien avec la générosité de Mucha.
Quant au lys marial et royal, il serait une goutte de lait d’Héra tombée sur terre au moment de « La Naissance de la Voie lactée » de Pierre Paul Rubens.
Au moment du « Jugement Dernier » de Rogier van der Weyden,   
il représente la parole qui sauve face au glaive qui juge.
Le soir tombe, 
« Carnation, Lily, Lily, Rose » de John Singer Sargent enthousiasma le public.
Si on n’a pas le temps d’en faire un roman,  la rose, reine des fleurs, ne perd pas de sa délicatesse en se multipliant : « La vierge au buisson de roses » Martin Schongauer.
Mais la mère pleure quand
« L’enfant Jésus se blesse à la couronne de roses »  
de Fransisco Zurbaran.
Osons le rapprochement de « La Rose de Malmaison » tellement française avec Joséphine de Jean-Louis Victor Viger du Vigneau et
« Le jardin enchanté »
so british par John William Waterhouse.
Lawrence Alma-Tadema montre les convives de l’empereur romain ensevelis sous les fleurs, « Les roses d'Héliogabale ».
 
Le « Jardin de Roses » de Paul Klee est moins étouffant :  
« L'art ne reproduit pas le visible, il rend visible ».
Des branches : celle d’olivier que porte « La colombe de la paix » de Picasso durera ce que durent les guerres. 
Le land art est branché https://blog-de-guy.blogspot.com/2017/09/nils-udo-gilbert-croue.html
« L’Amandier en fleurs »
de Vincent van Gogh a perdu parait-il de ses nuances, 
il reste un bel annonciateur du printemps
et « L'arbre des fées » de Richard Doyle permet à l’enfant émerveillé 
d’avoir 200 occasions de rêver.
Le balai, assemblage de branchages, occupe le premier plan dans « Vue d’intérieur » de Samuel van Hoogstraten
Après avoir évoqué l’extraordinaire aussi bien que le plus ordinaire, l’arbre quand il devient généalogique, nous relie dans le temps à notre lignée et
dans le « Dessin du système nerveux »  par André Vésale révèle notre arborescente intimité.
« Voici des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches.
Et puis voici mon cœur qui ne bat que pour vous.
Ne le déchirez pas avec vos deux mains blanches. »

mercredi 26 avril 2023

Royan # 3

Ce matin rien ne presse, nous disposons de plus de temps pour nos ablutions.
Lorsque nous sortons,  J. en jardinage dans ses bordures nous abreuve en renseignements intéressants qui influenceront les visites de la journée.

Dès le départ, nous suivons ses conseils en commençant par la visite de TALMONT- estuaire Gironde sur la route de Mescher. Un grand parking à l’entrée du village prédit un lieu touristique  très fréquenté.  Effectivement la bourgade proprette possède beaucoup de petites  boutiques d’artistes ou d’artisanat populaire: savonnettes, souvenirs.  Dans les ruelles, les maisons anciennes me font penser à celles de l’île de Ré avec leur façade blanche et leurs volets bleu / gris, devant lesquelles s’élèvent des roses trémières.

Mais le détour vaut surtout pour l’église romane, son cimetière attenant et ses murailles dont les pieds plongent dans l’eau. La fragilité de la falaise inquiète sur l’avenir de l’église  aux pierres bien endommagées.

Nous pénétrons à l’intérieur caractérisé par une grande sobriété. Puis de l’église, nous empruntons la promenade aménagée au-dessus de la Gironde, avertis par des panneaux des dangers d’effondrements.

En s’éloignant un peu nous pouvons distinguer des carrelets d’évidence plus authentiques que le village trop léché où j’aurais aimé croiser plus d’habitants ou apercevoir des marques de la vie quotidienne alors que nous n’avons vus que des touristes. Nous nous accordons un café tardif à l’entrée du village dans un restaurant destiné à nos semblables.

Nous récupérons la voiture sur le parking (3€), et nous passons par  Mescher  en délaissant ses grottes troglodytes.

 Nous nous dirigeons vers le musée de Royan, il est situé à l’intérieur de l’ancien marché Pontaillac, dans un quartier tranquille avenue de Paris, où le stationnement est facile.
Une heure convient bien à la découverte de ce petit musée consacré à l’histoire de la ville de la préhistoire à nos jours à travers des affiches, des photos, un cabinet de curiosités. Une seule grande salle contient toutes les expositions à parcourir chronologiquement.
Nous nous intéressons aux études et vieilles gravures du phare de Cordouan, aux dangers maritimes surmontés par les pilotes de la Gironde, aux images témoignant de la période dorée des débuts de la station balnéaire,
mais aussi à l’histoire des guerres mondiales à Royan et à la présence de Picasso.

Nous nous contenterons d’une restauration rapide à un rond-point, dans une boulangerie type Marie Blachère avant de nous déplacer vers LA TREMBLADE.

A cause de la chaleur, nous n’avons guère d’énergie pour visiter le village, bien que nous ayons remarqué de jolies halles de petite taille et peut-être passons nous à côté d’autres édifices dignes d’intérêt.
Nous faisons un crochet quand même par l’Office du tourisme à la recherche d’infos et plans concernant le secteur pour des balades  en voiture avec clim, abandonnant le circuit proposé à pied. Nous partons vers Ronce-les-bains et poursuivons jusqu’au phare de la Coubre (un phare « paradis » puisque sur le continent).
Nous l’atteignons en logeant des plages signalées tout au long de la route, accessibles par des sentiers tracés à travers la forêt domaniale, ce qui entraine des files de voitures garées sur le bas-côté de la chaussée.
Dans le parking ombragé de 300 places près du vieux  phare, l’enchevêtrement et la quantité des voitures montrent la présence importante des vacanciers. Nous dégottons une place  près de l’enceinte du phare. Il se présente comme une grande cheminée percée comme un hautbois, de forme conique, blanc en bas et rouge au deux tiers en haut. Une petite queue patiente pour monter les 300 marches, nous n’insistons pas, persuadés que nous n’éprouverions pas le même plaisir qu’à Cordouan.
 

mardi 25 avril 2023

Cher pays de notre enfance. Davodeau Collombat.

Au moment où je réévalue « Mongénéral », ainsi le nommait Le Canard Enchaîné, ma bible d’alors, voilà en noir et blanc un rappel d’un passé qui ne fut pas si héroïque. 
Le fondateur de la cinquième République payait pourtant ses factures d’électricité.
Cet album de 220 pages vient rappeler de noires affaires d’un pouvoir où le SAC (Service d’Action Civique), bien mal nommé, jouait un rôle important, utilisant des anciens combattants contre le FLN ou l’OAS après le traumatisme algérien, des truands pour les sales besognes.
L’assassinat du juge Renaud, rappelé par Yves Boisset dans « Le juge Fayard » ou l’affaire Boulin sont encore dans les mémoires, bien que les moyens pour étouffer les affaires aient été efficaces dans ces années 70/80.
Par contre, je ne savais pas que « Le gang des Estafettes » avait commis le plus grand casse du siècle (le XX°) à la poste de Strasbourg et que le butin avait été « rapatrié » à l’UDR (ancêtre du RPR) qui pouvait  être ainsi en bonne santé financière avant la réglementation du financement des partis politiques, d’autant plus que les réseaux de la Françafrique activés par Focard crachaient du fric à pleins tuyaux.
Le prolifique dessinateur avait déjà publié une partie de ces histoires dont l’effet d’accumulation est accablant    
Il se met en scène avec un journaliste de France Inter, lors des entretiens qu’ils mènent auprès d’autres confrères, des magistrats, des dirigeants des services secrets, des politiques.
Les propos sont tellement chargés qu’il n’est pas besoin de mise en scène spectaculaire.
En conclusion le procureur général de Palerme, Roberto Scarpinato dit : 
« Après avoir lu le livre de Benoît Collombat et d’Etienne Davodeau, je me suis rendu compte que ces entrelacs secrets entre crime et pouvoir ne font pas partie de l’histoire italienne, mais aussi de l’histoire française. » 
Du lourd !

lundi 24 avril 2023

La colline. Denis Gheerbrant Lina Tsrimova.

Du fin fond de la misère, sur un gigantesque tas d’ordures au Kirghizistan, ce documentaire pourrait échapper à tout jugement esthétique tant cette approche du dénuement le plus absolu est forte. 
Sous un parasol un couple de gitans dort, un ancien snipper de l’armée russe qui se sait sorti de l’humanité, boit des fonds de bouteille de vodka, une kirghize mère de huit enfants dont cinq sont morts a choisi la déchetterie pour avoir quelque argent chaque jour... 
On peut imaginer l’odeur, être étouffé par les vapeurs de feux continuels, et trouver beaux comme l’enfer ces feux dans la nuit, et dignes les portraits de ces humains brassant nos déchets à la frontale.