mercredi 14 octobre 2020

Côte d’Azur 2020 # 2. Moans Sartoux. Valbonne.

 
« Mouans-Sartoux a toujours été une des communes les plus pauvres du département. Cela nous a donné l'obligation d'avoir des idées »
La commune de gauche de père en fils Aschieri, forcément « Aschierix » dans un environnement pas vraiment progressiste, a été depuis longtemps un îlot de résistance à la bétonisation et à la privatisation de l’eau, elle est pionnière en ce qui concerne la cantine bio.
« Chez nous, on ne jetait rien, on ne gaspillait rien. On consommait peu car on n'avait pas d'argent. »
Alors quand on se promène dans ses rues on peut penser que les habitants prennent leur part dans l’embellissement des rues sans attendre que tout vienne d’en haut.
Nous sommes retournés à son Musée d’art concret 
http://blog-de-guy.blogspot.com/2008/11/art-concret.html où sont exposées des œuvres de Francisco Sobrino.
L’espagnol,  cofondateur du G.R.A.V. (Groupe de Recherche en Art Visuel) a connu Vasarely et Morellet. 
Dans le genre cinétique, il utilise l’inox et le plexiglas connoté année soixante mais redevenu tendance avec les hygiaphones qui ont poussé dans tous les lieux d’accueil.
Le contraste est important avec le tout proche Musée rural installé dans les anciennes écuries du château évoquant un passé où la culture des fleurs était dominante.
Nous poursuivons notre visite du pays de Grasse par Valbonne, appelée aussi Valbonne Sophia-Antipolis car la première technopole d’Europe est installée dans les bois de la commune. La cité ancienne aux rues à angles droits est chic et charmante, avec un des plus beaux magasins d’antiquités et de décoration que nous connaissons.
La commune dont la population est équivalente à Saint Egrève (15 000 habitants) sera désormais administrée elle aussi par les écologistes, elle rejoint Moans Sartoux, la doyenne verte,qui pourra se sentir un peu moins atypique dans ce département des Alpes Maritimes.

 

mardi 13 octobre 2020

The New Yorker. Encyclopédie des dessins d’humour.

Un anniversaire à chiffres ronds m’a valu ce beau cadeau de 1506 pages pesant ses six kilos en deux volumes. 
«Donc, ce livre parle de tout : de sexe, d’histoire, de conscience et de chats.» 
Les milliers de dessins extraits du magazine qui avait mis Sempé à plusieurs reprises en une ne pouvaient être qu’excellents, même si le plaisir d’une nouvelle surprise se partage avec la nécessité de ne pas tout avaler d’un coup.
Les commentaires ponctuant les dessins sont à la hauteur et le traducteur Jean Louis Chifflet nous facilite bien la tache.
L’ordre alphabétique fantaisiste ne sera pas forcément d’un grand recours puisque nous commençons avec « A la maternité » jusqu’à « Ivrognerie » pour le premier volume et de « Jalousie » à « Zorro », endormi qui laisse échapper un « Z » caractéristique du sommeil en BD.
Tant de douce ironie en dose massive nous rachète des caisses de niaiseries ou de grossièretés devenues tellement habituelles sur les réseaux qu’on les prendrait pour « traits uniques » si possibles gribouillés, comme on dirait « pensée unique »… encore que le terme pensée paraitrait exagéré dans certains cas.
Si je n’ai pas compris deux dessins, je n’ai cessé de me régaler de tous les autres, au goût parfois un peu rétro, qui ont l’élégance de ne pas paraître démodés, toujours fins, inattendus, exprimant le meilleur d’une contrée assombrie par l’ombre de Trump.
Les dessins consacrés au mari de Mélania  ne comptent d'ailleurs pas parmi les meilleurs, alors que rien qu’à la lettre T figuraient « Téléphones portables », « Tennis », « Thanksgiving », « Tortues », « Travaux en cours », « Tricot » et « Tunnel de l’amour »…



lundi 12 octobre 2020

La femme qui s'est enfuie. Hong Sang-Soo.

J’ai choisi de préférence, aux comédies près de chez-nous proposées en ce moment, un film  des contrées lointaines, pensant retrouver les délices d'une cérémonie du thé qui m’avait bien plu récemment http://blog-de-guy.blogspot.com/2020/09/dans-un-jardin-quon-dirait-eternel.html.
Chaque réalisateur a sa façon de voir mais je confirme mon imperméabilité envers le coréen que j’avais trouvé déjà bien vain dans un film de l’entre-soi 
Le titre lui-même n’est même pas vérifié quand une jeune femme va chez ses copines dont on n’est pas sûr non plus de leur proximité tant leur conversations sont vaines, dépourvues de toute émotion, de tout intérêt.
Alors qu’un film lorsqu'il est réussi sait nous révéler sous la banalité des mots ou des situations, la profondeur, l’ambigüité des relations humaines, pendant une heure et quart nous attendons en vain. Les hommes filmés de dos sont des intrus et vus méchants comme des coqs. Aucune subtilité n’émerge de la lenteur et l’étrangeté des rapports entre ces femmes n’évoque nullement l’universalité des délices de la sororité.  

 

dimanche 11 octobre 2020

Stance II / Dentro. Catherine Diverrès.

Premier spectacle d’une saison enmasquaillée : une silhouette noire sur fond noir s’anime au bout d’un moment, sa main accroche l’œil d’un projecteur solitaire.
Venant d’émerger tout juste du livre de Carrère, « Yoga », je me dis que la danse est une bonne source de méditation, et dans le prolongement de mes photographies de vacances, je persisterais volontiers à vouloir saisir les belles postures qui s’enchainent, fuyant à toute vitesse.
Je ne me souvenais pas d’avoir été enthousiaste à ce point lors du dernier passage de la chorégraphe à la MC2http://blog-de-guy.blogspot.com/2020/01/jour-et-nuit-catherine-diverres.html .
Cette fois assis au premier rang, nous percevons l’implication totale de la soliste et des duettistes qui se partagent l’heure, d’abord sur un poème de Pasolini (La terra di lavoro) dont je ne peux retrouver la traduction, puis sur un texte espagnol. Le silence est fort après quelques notes ténues de piano et des bruits de mécanique. 
La remarque sera bénigne concernant la personne créditée comme costumière qui n’a pas eu beaucoup de travail pour t-shirts noirs, pantalons noirs et robe noire.
La rencontre des deux danseurs est belle et remarquable la soliste dans un exercice toujours périlleux sur des musiques peu liantes. Solitude et tendresse se traduisent dans des mouvements à la fois retenus et explosifs que des critiques comparent à des calligraphies alors que cette forme d’écriture se fait dans une fluidité qui me semble fugace s’excusant presque.
Des pieds nus jouent dans les cercles d’une lumière insaisissable et parcimonieuse, les tensions s’affrontent à l’harmonie ; à la sortie de la salle Rizzardo nous rallumons nos écrans.       

samedi 10 octobre 2020

Un couple. Emmanuelle Bernheim.

Faut-il être amateur de second degré pour trouver que le titre peut convenir ?
Un homme et une femme finiront par coucher ensemble, il et elle comblent leurs silences par de paresseuses et conventionnelles présomptions. 
« Loïc sonna à la porte d'Hélène. Il l'entendit marcher sans hâte. Elle ne courait pas pour venir lui ouvrir. Elle n'avait pas guetté son arrivée, feuilletant un journal sans pouvoir le lire. » 
Leurs solitudes n’essayent même pas de se retrouver côte à côte, alors on se dit : tiens ça doit être moderne, comme l’enseigne d’une boutique intitulée « mercerie moderne » qui aggrave son cas dans la désuétude avec cet adjectif devenu rare.
Cependant une écriture clinique courant sur 95 pages concises traite parfaitement cette non- relation entre un médecin et l’employée d’une agence.
«  Il s’endormit en même temps qu’elle. » 
Des envies de récits sucrés peuvent vous venir après tant de rendez-vous manqués, de pièges, de goujateries, de tue-l’amour, mais comme pour le café, avec le temps on s’est mis à  en apprécier surtout l’amertume.

 

vendredi 9 octobre 2020

Le monde pendant.

Pour s’extirper d’un présent peu satisfaisant quelques Cassandre ont prédit un « monde d’après » de gourmandise et de paix à portée de clic. 
En attendant le « monde d’avant » persiste à se regarder le nombril redécouvert sous les crop tops, pour éviter les postillons des Trump et autres Erdogan.
Le débat public est d’une affligeante pauvreté et les fake news ne viennent pas que de Fox News. Me suis-je trompé quand je comprends que les néonicotinoïdes ayant obtenu une dérogation afin de protéger les betteraves sucrières n’affecteraient pas les abeilles qui ne butinent pas cette plante?
Les néo experts agronomes de chez Facebook à peine sortis d’une prestation d’économiste simpliste et d’épidémiologiste complotiste s’époumonent à trouver le coupable en toutes  circonstances : « le Macron vous dis-je ! » 
Geoffroy de Lagasnerie aux accents Robespierristes est bien reçu chez ceux qui aimeraient tant purifier les chaines concurrentes alors qu’aucun syndicat étudiant ne s’est ému de ses excès ni a appelé à détruire ses livres, il n’a pas besoin de protection policière.
Méprisant la démocratie, il ne crache pas sur les salaires que lui verse l’état et il se servira de ses lois avec zèle quand cela lui conviendra. Un tel escroc peut séduire ceux qui ont perdu tout sens commun, tout espoir, et le respect des autres, mais comment peut on lui tendre si complaisamment un micro ? Il se le demande, tout en ne manquant pas de cracher sur ceux qui l’invitent. 
La tolérance devient une qualité annexe et la liberté d’expression ne vaut que pour ceux qui sont d’accord avec moi. 
Par ailleurs, le déni est le plus répandu des réflexes : après s’être impatienté envers le président qui mettait trop de temps à s’exprimer à propos de la laïcité; lorsqu’il le fait, certains estiment qu’il aurait pu attendre. Et de vénérables organes de presse lorsqu’ils s’encanaillent sur Facebook ne se gênent pas pour prôner dans la même semaine la jupe à ras le bonbon, comme disait Ferré, pour les collégiennes, après avoir excusé le voile pour des mômes de huit ans. L’exploration du terme « séparatisme » et de sa réalité attendra.
Parler d’autre chose : quand est annoncé le million de morts de la COVID, les autruches se soucient des morts du paludisme ou de la famine, comme ceux qui en reviennent aux SDF quand il est question des réfugiés.
De prétendus rebelles chassant souvent en meute sont sur la même longueur d’onde que les populistes qui affolent la toile avec des querelles destinées à détourner l’attention et foncent dans tous les chiffons si possible merdeux qu’on leur tend.
Je suis d’un autre bois mais du même fagot, à opiner à mes chouchoux, à ne pas voir d’alternative à la pensée unique économique, éruptif parfois devant des commentaires de trolls pas drôles.
J’oscille entre modestie et prétention:
qui suis-je pour juger écrivains, cinéastes, politiques ?
Mais de quel droit les bouffis de mauvaise foi, les fiers de leur inculture, les paresseux auraient-ils le monopole de la parole ?
Révulsé par ceux qui prêtent toujours de noirs desseins à la moindre des initiatives, j’essaye de ne pas céder à l’accablement et persiste à consulter quelques fiches de morale jaunies, comme j’eus à en développer une le jour de mon CAP à propos de la calomnie, illustrée par un texte de Maupassant : « La ficelle ». 
« Le paysan, furieux, leva la main, cracha de côté pour attester son honneur, répétant :
- C’est pourtant la vérité du bon Dieu, la sainte vérité, m’sieur le maire. Là, sur mon âme et mon salut, je l’répète. » Les autres riaient.

 

jeudi 8 octobre 2020

Le MAMC Saint Etienne.

En art contemporain Sainté est plus accessible que le Magasin de Gre
Cette année nous sommes revenus au MAMC, Musée d’Art  Moderne et Contemporain, presque vide.
Une 1ère  exposition concerne  Maurice Allemand, le conservateur qui a créé le musée.
Il a  cherché à allier techniques et arts de son temps dans le même lieu et a acquis des œuvres  du XIX° et XX° : Greuze,  Carpeaux, Picasso, Matisse et son « Algue verte », de l’art africain,  des peintures de Delaunay, des collages, de l’abstraction….
Nous interrompons la visite pour une halte au restau du musée, « le carré des nuances »: au menu, merlu sauce palourde  et petits légumes suivi d’un café gourmand .
Nous retournons découvrir les expositions temporaires proposées : Le corps perceptif de Robert Morris présente de grands morceaux de feutre découpé dont un ressemble terriblement à une œuvre de Viallat visible dans l’exposition des collections de M. Allemand. Le feutre a été travaillé aussi pour donner de  grandes structures  en L, debout, couchées, assises.
Dans la 2ème  salle,  des miroirs sous forme de cubes démultiplient les images et dans la 3ème  trainent des débris de métal bois et feutre répandus au sol.
L’exposition d’Alexandre Léger s’appelle « Hélas rien ne dure jamais ». Son travail  manifeste une grande influence de la médecine, des ordonnances médicales, de l’anatomie, les productions occupent tous les espaces des supports, à la manière de l’art brut.
« L’équilibre des blancs » de Firenze Lai tourne autour de personnages à grandes et grosses jambes et petites têtes, trop à l’étroit dans leur cadre.
Nous sortons de toutes ces expos sans grand enthousiasme, avec l’impression une nouvelle fois  que l’art contemporain est en panne d’inspiration, de nouveauté, de surprise, ne parlons pas d’émotion.