dimanche 19 janvier 2014

Panorama. Philippe Decouflé.


La notoriété de celui qui émerveilla la public à l’ouverture des jeux d’Alberville se justifie dans cette rétrospective ludique de séquences de ses spectacles précédents.
L’intitulé de sa compagnie « DCA » signifie Diversité, Camaraderie, Agilité : c’est ça, avec particulièrement l’humour pour régaler le public qui se pressait à la MC2.
Le genre appelait la variété, nous entrons d’emblée dans des univers différents : du fond de la mer jusqu’aux aux étoiles, avec des musiques concrètes, slaves ou de boite de nuit, des images de lanterne magique ou de BD, utilisant des techniques spectaculaires du cirque et des mouvements de mains discrets, des costumes gais, inventifs et des dépouillements émouvants.
Une bonne introduction pour des jeunes qui en seraient à leur initiation à la danse, une agréable redécouverte pour ceux qui connaissent déjà un des maîtres du spectacle vivant et apprécient sa malice, son inventivité, sa précision.

samedi 18 janvier 2014

Balzac et la petite tailleuse chinoise. Dai Sije.


J’ai lu ce roman magnifique dans une édition destinée à des collégiens et cette intention est vraiment adaptée, bien que le vocabulaire des commentaires, « le schéma actanciel », eut tendance à dévitaliser un texte limpide.
Par contre en conclusion, je ne peux qu’approuver l’accompagnatrice de lecture qui évoque l’écriture:
« lyrique, comique, pathétique, polémique, ironique, héroï-comique… » sensuelle, poétique.
Livre d’initiation, d’amour, d’amitié, un hymne bref, léger et profond, aux conteurs et aux livres, déclencheur de réflexions et source d’un plaisir renouvelé de bouquiner.
«  Elle a fini par mettre ta foutue veste, ça ne lui allait pas mal d’ailleurs »
J’avais commencé en appréciant la liberté, l’audace, de deux jeunes gens en rééducation dans la campagne chinoise dans les années 70, par la suite l’histoire devient plus âpre : l’autre face de la liberté. Le dénouement inattendu accentue la force de cet ouvrage paru chez nous en 2000.
 « Nous nous approchâmes de la valise. Elle était ficelée par une grosse corde de paille tressée, nouée en croix. Nous la débarrassâmes de ses liens, et l'ouvrîmes silencieusement. À l'intérieur, des piles de livres s'illuminèrent sous notre torche électrique; les grands écrivains occidentaux nous accueillirent à bras ouverts: à leur tête, se tenait notre vieil ami Balzac, avec cinq ou six romans, suivi de Victor Hugo, Stendhal, Dumas, Flaubert, Baudelaire, Romain Rolland, Rousseau, Tolstoï, Gogol, Dostoïevski, et quelques Anglais : Dickens, Kipling, Emily Brontë... - Quel éblouissement! - Il referma la valise et, posant une main dessus, comme un chrétien prêtant serment, il me déclara : Avec ces livres, je vais transformer la Petite Tailleuse. Elle ne sera plus jamais une simple montagnarde. »

vendredi 17 janvier 2014

Simples.


Ce n’est pas le moment d’être faux-cul. Dans la rigolade générale retenir:  
« Trierveiler moins pour Gayet plus » ne nous distrait pas forcément des sujets plus graves, quant à savoir si la politique de « la demande » avait besoin d’un Joffre, même les économistes qui se sont tant trompés n’en savent rien.
Alors je continuerai à ne pas trop m’aventurer bien au-delà du périmètre des cours de récréation que je connus jadis.
- Il y a des façons de penser qui sont devenus des tics :
ainsi face à des sujets (voile, quenelles,…), une réponse teintée de complotisme se multiplie :
« le chômage est un sujet plus important », qui évite également d’être dérangé.
Quant au chômage il croît.
- Le sénat : à quoi sert-il ?
- Le racisme : n’est pas une opinion.
- Des limites s’imposent pour que vive la liberté. A l’entrée du camp d'Auschwitz : 
« Arbeit macht frei » (le travail rend libre) : le mot liberté mourait sur cette enseigne, le mot travail aussi.
- Le syndicaliste Edouard Martin continue sa lutte en politique, quel est le problème ? Les offusqués qui surjouent ne savent pas que le syndicalisme c’est aussi de la politique. Jacob de l’UMP qui vient du syndicalisme agricole lui reprochera-t-il ? Je fus à la CFDT puis au PS, dont j’ai fuit, il me semblait que c’était cohérent.
- Quand La France perd des places au classement PISA, plutôt que de continuer d’applaudir à l’abaissement des exigences et participer encore à la dévalorisation de l’école, ne regarderait on pas vers le haut du classement comme d’autres regardaient, il fut un temps, du côté de nos maternelles ? Il serait question de travail, de respect, d’ambition et non de flatter les attentes passives sans investissement de la part de parents et de certains enfants.
- Les brigades internationales étaient du côté républicain en 36, aujourd’hui des jeunes idéalistes de tous pays rejoignent les fondamentalistes les plus radicaux, les plus épris de contraintes dont l’obscurantisme est la réponse à la complexité du monde.
…….
Sur la couverture de 100 dessins pour « Reporters sans frontières »

jeudi 16 janvier 2014

Le Titien vs Michel Ange.


La peinture contre le dessin, « la querelle des coloris » qui sera développée au cours d’autres conférences par Michel Hochmann aux amis du musée remonte à la Renaissance et même à l’ Antiquité entre Aristote pour qui la beauté est matérielle (à l’huile) et Platon qui penche pour la beauté idéalisée (la ligne) .
A rechercher au-delà de l’heure où nous ont été présentés surtout des textes mais assez peu d’images, il y aurait aussi « la remise en question du Maniérisme (M. Ange) au nom des critères d'un classicisme ».
En tous cas lorsqu’une élève en 2013 regrette de ne pas assez dessiner en art plastique : ça remonte à loin.
Les critiques d’art s’empoignent déjà au milieu du XVI° siècle :
Vasari  auteur de « Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes » contre Dolce dont le livre « Dialogue de la peinture intitulé l'Arétin » a remis en cause Michel Ange le maître de Rome et de Florence.
Quand il est question du passage obligé par la copie de l’antique, Annibal Carrache dit :
« Je n’ai pas assez de place pour prouver la sottise de ce couillon de Vasari. » 
Querelles de campaniles entre Florence (pierre noire) et Venise (vert Véronèse) ?
L’homme (croquis) affronte la nature (fresque)
et l’idée (crayon) contrarie la spontanéité (pinceau),
mais « le maquillage n’empêche pas la laideur ».
Le graphisme comme procédé éducatif c’était jadis, la liberté a pris le pas.
Nous n’aurions pas soupçonné des prémices impressionnistes chez Le Titien (ci-dessus) pourtant Vasari le chantre du trait (ci-dessous) en personne ne disait-il pas ?
« les dernières [œuvres] sont peintes par touches apparentes, largement brossées dans un style de taches, si bien qu’on ne peut les regarder et qu’il faut s’éloigner pour les voir dans leur perfection. »

mercredi 15 janvier 2014

Ethiopie J 15. Hawasa, Awashe


La matinée commence par la visite du marché aux poissons, situé au bord du lac d’Hawasa. Nous pénétrons dans l’enceinte où des arbres sont couverts de marabouts dont quelques uns se disputent les restes de poissons lancés à la volée. Un dick dick effarouché est présenté dans les bras d’un jeune homme. Des petits restaurants bordent la plage herbeuse où des étudiants et des pêcheurs viennent manger du poisson pour pas trop cher.
Deux barques accostent et déversent leurs filets pendant que deux contrôleurs pèsent et mesurent chaque poisson d’une maigre pêche. Sous la halle couverte, des hommes coupent les filets de tilapias, gardent de côté la tête et l’arête centrale pour parfumer des soupes. Un caissier gère les comptes derrière sa table. A côté, de jolis singes verts nous suivent, les mâles sont dotés de testicules bleu cobalt et d’un pénis rouge vermillon. Leurs petites mains  fines attrapent délicatement la galette de maïs qui les a attirés.
Nous prenons la route d’Addis Abeba via la rift vallée, les ventes proposées sur la route changent encore selon les villages : carottes, pommes de terre, oignons…
Nous passons à Shashemene, village où résident les rastafarians d’Ethiopie accueillis par Hailé Sélassié, le négus.
En 1966 l’empereur d’Ethiopie arrive en Jamaïque qui subit une sécheresse depuis très longtemps, et ce jour là il pleut. Une prophétie de Marcus Garvey promettait l’arrivée d’un messie venu de l’Est qui sauverait l’homme noir. Hailé S. est haussé au rang de Dieu ; revenu chez lui, il offre l’hospitalité aux Jamaïquains et donne des terres à une cinquantaine de familles.
Mais les disciples de Bob Marley ne sont pas forcément « cool » aujourd’hui, sollicitant une « donation » pour une simple photographie de murs.  Notre guide nous met en garde contre cette « antre à racket » que constitueraient les bâtiments peints aux couleurs rasta : rouge pour le sang versé des esclaves, jaune comme l’or et vert comme la nature,  couleurs présentes sur tant de drapeaux africains : Mali, Sénégal, Guinée, Cameroun, Ghana, Congo, Ethiopie…
Nous rejoignons Iwaye, longeons des serres  tellement vastes que des vélos sont nécessaires pour s’y déplacer. Lorsqu’on arrive à la jonction Addis/Nazreth à Debre Zeit, il bruine comme en Angleterre. Nous déjeunons en attendant le mini bus qui doit nous prendre en charge en remplacement des deux 4X4  qui ne sont plus indispensables pour les routes à venir.
Nous faisons nos adieux à nos chaleureux chauffeurs, et prenons la route plus tôt que prévu. 
Nous avons bien ri avec eux qui nous racontaient:
« Dans le conseil  gouvernemental « il faut espacer les naissances » certains voulaient bien comprendre qu’il s’agissait d’un espacement géographique et non dans le temps. »
Ou alors cette autre blague :
« - Combien faut-il de temps pour relier telle ville à une autre ?
- Si tu vas lentement 6 à 7h, si tu vas vite : 3 jours car tu auras cassé des choses. »
Les paysages changent encore, un des champs inondé héberge une colonie de pélicans, les troncs d’arbre disparaissent sous les seaux. Nous traversons le champ volcanique  de Metahara et nous nous arrêtons pour admirer le cratère, les cases disséminées paraissent bien misérables. Nous sommes sur les terres des Kereyou nomades éleveurs de dromadaires. 

Comme le temps s’éclaircit, Girmay modifie le programme et avance la visite du parc d’Awashe. Nous passons la barrière de métal évidée en forme d’oryx (« Vercinge est oryx ») et suivons le chemin sans nous écarter comme il nous est demandé sur les pancartes à l’entrée. La voiture stoppe plusieurs fois et nous mimons les indiens en chasse pour nous approcher des oryx en faisant bien rire nos compagnes.
Nous avons l’occasion de voir une petite famille de phacochères bien gras mais fuyants, des pintades, des francolins et grâce à l’œil infaillible de Jean, nous débusquons deux grosses tortues. L’air embaume une sorte de jasmin.
G. nous presse, il souhaite nous montrer les chutes de l’Awash et il est plus de 18h, la nuit risque de nous surprendre. C’est fabuleux ! (« de toutes les matières c’est la wash que j’préfère ») Plusieurs bras se déversent à gros bouillons et « fument » d’embruns. L’eau marron, brassée tombe bruyamment, elle exprime une énergie surprenante, indomptable, sauvage surtout après les oueds à sec que nous avons traversés.
Sur la route goudronnée retrouvée, nous croisons une caravane de camions en provenance du port de Djibouti, débouché maritime du pays. Nous n’avions plus l’habitude d’une telle circulation à qui G. attribue la mort de chiens, alors que dans le sud les conducteurs évitent soigneusement toutes les bêtes pour échapper à la rétribution des propriétaires. Nous nous installons au « Genet hôtel » Genet est la traduction d’Eden (paradis) à Hawash. Les dallages de marbre sont luxueux mais il n’y a pas d’eau chaude. Quand il fait chaud : pas d’eau chaude.

mardi 14 janvier 2014

Les Folies Bergère. Porcel & Zidrou.


Un coup de poing à l’estomac.
« À la fin de la guerre - parce que faudra bien qu'elle se termine un jour, hein ! - on s'est tous juré d'aller fêter ça aux Folies Bergère, à Paris. C'est pour ça, le nom. »
Encore la guerre ! Et c’est le grand mérite de cet album de renouveler le genre en mêlant le fantastique qui en général ne m’embarque guère, la boue des tranchées et Monnet à Giverny loin du front quoique…
Un pantin Mimile se prend une balle dans le casque et les poilus, qui enfants chassaient les taupes, sont devenus taupes mais ne cessent de rire : « poil au pire » et s’inventent des repas de luxe quand vient le rata avec certains qui y laissent leurs boyaux dans la gamelle. Magnifiquement dessiné.
Au cœur de la folie, l’humour. L’humanité de chacun a encore plus de grandeur quand elle doit se coltiner la mort, l’absurdité, à chaque pas. J’ai rarement eu le sentiment comme cette fois de percevoir la puanteur qui pouvait émaner des tranchées au bord desquelles les cadavres de vos frères pourrissent.
Une grande BD forte avec laquelle on se dit : il n’y a que la BD pour rendre compte ainsi d’une telle folle réalité qui touche l’intime et l’universel, la folie, la colère, la beauté, les souvenirs, la chair et la fantaisie.
« Je vous salue patrie ! Vous êtes bénie entre toutes les nations et tant pis si on y laisse nos entrailles. »

lundi 13 janvier 2014

2 automnes 3 hivers. Sébastien Betbeder.


Les trentenaires peuvent être drôles et renouveler un récit d’histoires d’amour avec  légèreté et intensité.
Ils citent Moustaki de ma génération huitarde, sans faire nunuche :
« Pendant que je dormais, pendant que je rêvais
Les aiguilles ont tourné, il est trop tard
Mon enfance est si loin, il est déjà demain
Passe passe le temps, il n'y en a plus pour très longtemps »
Ils mentionnent Tanner et Munch sans être assommants.
Le reproche souvent fait au cinéma français de ne pas mentionner le contexte social est ici assumé, voire revendiqué. Le film à la fois mélancolique et subtil, très écrit, donne une impression de liberté par la sincérité des acteurs qui commentent leur vie sans être dupes, tout en restant disponibles et empathiques. Le ton est celui des BD de « Monsieur Jean » de Dupuis et Berbérian : entre bobos on se comprend.

dimanche 12 janvier 2014

Borges vs Goya. Rodrigo Garcia, Arnaud Troalic.


Je ne savais rien de l’auteur de « C'est comme ça et me faites pas chier » et je l’ai apprécié en salle de création qui est à la grande salle de la MC2 ce que le « off » est au « in » à Avignon : proximité avec les acteurs, public plus jeune, des spectacles plus risqués donc des déceptions ou des plaisirs plus vifs.
Julien Flament est un acteur qui dégage une énergie communicative et bien qu’il s’exprime en espagnol c’est lui qui tape sur un buzzer qui envoie la traduction et c’est encore meilleur tant sa démence, sa véhémence franchissent en rythme les rebords de la scène.
Deux histoires parallèles d’un côté un père  abusif qui veut entrainer ses deux jeunes fils surdoués à venir admirer des Goya au Prado, la nuit, de l’autre, dans une voiture un ancien admirateur de Borges déçu de ses silences pendant la dictature en Argentine.
Pères et fils, culture et foot, baise et coke,  la fragilité et les certitudes, la danse, le rêve et la folie, sourire jaune et humour noir, les murs, Borges était aveugle, Goya sourd.
Le spectacle d’une heure est musical et visuel.

samedi 11 janvier 2014

XXI. Hiver 2014. N° 25.

Je ne me lasse pas du trimestriel en vente en librairie, depuis son premier numéro, même si je me dis, cet article sur la censure en Chine, bon ça va, je connais, je vais faire l’impasse, et puis la force, l’humour de ce journaliste Wan Keqin emporte l’attention :
«  En Chine il est très difficile de faire des choses humaines, c’est comme grimper une montagne d’épées. »
Le thème développé sur trois articles dans ce numéro particulièrement riche est consacré à « l’argent fou, l’argent créateur »
avec le rêve réalisé d’une femme à Paris qui reçoit des cabossés de la vie dans un bel immeuble,
un dentiste canadien qui a voulu vendre de l’eau des glaciers islandais,
et le défi d’une monnaie locale à Nantes.
Le récit en photos croise les paroles de parrains et marraines d’adoption en France avec des enfants venus d’un autre monde, pas loin de chez eux.
Et ce sont encore des femmes qui nous communiquent de l’énergie :
des  co-épouses teinturières à Bamako
ou cette Maria qui a bâti des villages de la paix pour échapper à l’affrontement des FARC et de l’armée bolivienne.
300 personnes doivent partir de leur village auquel elles venaient de redonner vie :
« nous dormions à même la terre sans revêtement, tassés comme des petites fourmis. ».
Les reportages  ont le temps d’entrer dans la complexité des personnages
ainsi cette jeune russe qui s’est enthousiasmée pour Poutine et qui a abandonné la politique
ou cet ancien ami de Ben Laden avec qui il partagea sa passion des chevaux.
Le petit fils de Roosevelt qui vit en France a beaucoup de choses intéressantes à dire sur les « banksters », les usuriers.
La bande dessinée est mon dessert, c’est Tronchet qui  traverse le lac salé le plus grand du monde en Bolivie où il ne fait pas que du tourisme mais situe aussi les enjeux puisque les 2/3 du lithium mondial essentiel à l’électronique s’y trouvent. Les mines d’argent de Potosi pas très loin de là coûtèrent la vie à 8 millions de personnes du temps de conquistadors.
En pousse-café : une île où vivent sept familles : Tristan da Cunha à 2000 km de Saint Hélène.

vendredi 10 janvier 2014

Pour des humanités contemporaines. Jean Caune.

Dans la présentation par le philosophe Thierry Menissier du livre de Jean Caune à la bibliothèque du centre ville de Grenoble, j’ai bien aimé la formule  
« la culture générale permet de connaître le monde, de l’évaluer, pour y évoluer ».
Les qualités d’ingénieur, de philosophe, de cultureux, de politique engagé de Jean Caune ressortent ainsi que ses talents de comédien où dans un dialogue avec un comparse, il essayera de sortir du genre conférence depuis une table.
Très vite nous allons au-delà du réasticage du mot « humanités » au pluriel, rimant avec « humanité » au singulier.
Une citation de Giorgio Agamben définit le contemporain comme  
« celui qui fixe le regard sur son temps pour en percevoir non les lumières, mais l'obscurité. » Allons-y !
Dans notre ville dont les anneaux olympiques se sont défraichis, les « nano technologies »  dans le « Y » à la technophilie enjouée, ne sont elles qu’une appellation publicitaire destinée à pomper des subventions ?
Nous pourrions être sortis de la croyance dans le progrès depuis l’ypérite (gaz moutarde) centenaire, pourtant nous reculons d’effroi à l’idée de perdre l’idée de progrès.
Le savoir non spécialisé devrait permettre le partage, mais à l’université dans la guerre des disciplines : difficile de trouver un langage commun.  Il y a bien eu des polémiques quand un usage métaphorique du vocabulaire scientifique s’est révélé être une imposture, mais bien des mots restent piégés et les formules rhétoriques abondent, ainsi le terme « éducation populaire » a perdu de sa réalité. Les  mots de « diffusion » et de « transmission » se confondent et même « éducation artistique » n’est pas vraiment dans la formation des maîtres (oh pardon ce dernier mot est un intrus).
Ce n’est pas avec une telle assistance pas très potache que va avancer le dialogue entre les sciences empiriques et celles soumises aux interprétations pour éviter les éternelles oppositions entre disciplines dures et molles.
J’ai retenu que les cultures du sud tournées vers le passé permettaient d’envisager plusieurs choses à la fois : comme les femmes (c’est moi qui l’ajoute) ; les cultures anglo-saxonnes, elles, segmentent le temps.
Au cours de cette soirée où Malraux a été évoqué, je n’ai pas perdu mon temps en  allant à la source de son discours intégral prononcé lors de l’inauguration de la maison de la culture d’Amiens. Ça a de la gueule !
« Le temps vide, c'est le monde moderne. Mais ce qu'on a appelé le loisir, c'est à dire un temps qui doit être rempli par ce qui amuse, est exactement ce qu'il faut pour ne rien comprendre aux problèmes qui se posent à nous. »
« Si le mot culture a un sens, il est ce qui répond au visage qu'a dans la glace un être humain quand il y regarde ce qui sera son visage de mort. La culture, c'est ce qui répond à l'homme quand il se demande ce qu'il fait sur la terre. Et pour le reste, mieux vaut n'en parler qu'à d'autres moments : il y a aussi les entractes. »
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Dans "Le Point ":

jeudi 9 janvier 2014

L’école de Paris, les artistes venus de l’est.


Je croyais qu’André Paléologue, comme son nom de conférencier aux amis du musée de Grenoble ne l’indique pas, était d’origine slave, mais sa notice sur le net ne confirme pas ce que son accent laisse entendre.
Peu importe, son enthousiasme pour nous parler de Paris ne pouvait s’autoriser que  venu d’ailleurs.
L’école de Paris n’est pas une appellation académique. Au début du  XX° siècle, à la « belle époque », la « ville lumière », nommée ainsi non seulement à cause de l’éclairage de ses rues, accueille le monde.
Les loyers sont alors modestes, dans notre contrée républicaine remarquable au milieu des empires, qui vient de connaître 5 expositions universelles.
Pas loin de l’impressionnante capitale, Barbizon offre des charmes impressionnistes.
Le roumain De Bellio fut un des premiers collectionneurs des Monnet, Sisley, Renoir et inaugura une liste fournie de marchands venus de l’est qui encouragèrent les artistes.
Les œuvres de cette multitude de peintres, de sculpteurs s’évaluaient, il y a encore peu de temps essentiellement dans les brocantes, avant que leur côte n’explose avec les fortunes qui se sont levées à l’est.
Certains avaient magnifiquement saisi les lumières transparentes de la Normandie, les motifs bretons, et d’autres mis de la folie dans les « années folles ». 
Le style délié des affiches de Mucha  a plu à Sarah Bernard et  l’inventivité de František Kupka fut reconnue au temps de l’art nouveau quand Guimard décorait élégamment les entrées du métro.
La Ruche du côté de Montparnasse accueillait Brancusi, Chagall, Soutine, Modigliani.
Pascin, le « prince de Montparnasse » a vécu  aussi à Montmartre.
Guillaume Apollinaire (né Wilhelm Albert Włodzimierz Aleksander Apolinary Kostrowicki,) est mort pour la France.
Qui se soucie que Sonia Delaunay soit née à Gradijsk (Ukraine) ?
De Staël est pleinement de chez tous, et Brassaï tellement parigot.
Vasarely, le père de l’art optique, nous emballa dans les années 60 et l’attrait de Paris dura jusqu’à Christo Vladimirov Javacheff  qui  nous a offert de beaux cadeaux comme le Pont Neuf dont on n’a jamais tant parlé que lorsqu’on ne le voyait plus.

mercredi 8 janvier 2014

Ethiopie J 15. Les ordinateurs portables d’Awasa


La nuit fraîche n’a pas refroidi une chatte dont on ne pouvait ignorer qu’elle était en chaleur.
A six heures le soleil plombé assombrit le matin et une bonne polaire n’est pas de refus.
Dans l’enclos mitoyen de l’hôtel, des bouchers nous proposent un morceau de viande crue du mouton qui vient d’être dépecé. Nous déclinons le cadeau et nous nous rabattons sur les tartines au beurre de cacahuètes, nappées de miel.
Aujourd’hui nous avons 6h de route à faire jusqu’à Awasa dont certaines portions sont en reconstruction.
Peu après notre départ nous voyons des cases couvertes de plastique noir qui servent d’abris aux réfugiés somaliens.
Les paysages changent rapidement, nous passons des chameaux parmi les acacias aux cyprès en forêt puis aux encètes et à la végétation tropicale. La route se poursuit à travers un brouillard de plus en plus dense et un léger crachin. Peu à peu le ciel se dégage pour laisser apercevoir une campagne très verte. Les villages se succèdent coquets et fleuris, bien nettoyés et stockent sur les bas côtés leurs spécialités à vendre : ail, bois, qat, mangues, ananas, œufs, vanneries et régulièrement du bois destiné à la cuisine en petites plaquettes ou des longs troncs d’arbre qui pourraient servir à l’armature des cases.
Les camions chargés de livrer le qat roulent à tombeau ouvert et sont surnommés « Al-Qaïda ». Les toits des cases fument : l’évaporation s’ajoutant au feu des foyers.
Nous quittons le territoire des Boranas pour celui des Sidamos.
Arrêt repas à Dilla, dans un grand restaurant, l’équipe se régale de jus de fruits frais, mangue ou papaye, avocat qui remplacent le café.
Nous traversons la campagne verdoyante où les cases sont beaucoup plus grandes et supportent un toit de chaume écrasant qui descend très bas. Nous en visitons une en bord de route, où Girmay compte donner des photos prises lors d’un précédent voyage.

Nous sommes accueillis par un digne vieillard qui nous fait l’honneur de sa maison dont une grande partie est réservée aux animaux. Un jeune veau retenu par une corde piétine en compagnie d’une poule en liberté, en face d’une banquette pour les invités et d’un lit. La cuisine donne sur un jardin avec une ruche où prospèrent des encètes, des avocatiers, du café, des manguiers. Des barres parallèles sont installées pour les enfants. Girmay cause avec le patriarche père de 14 enfants eux-mêmes mariés et parents de petits enfants.
A  Hawasa ou Awassa, l’orthographe est variable, nous déchargeons nos bagages au Gebrekiristos Hôtel (esclave de Dieu en grec) qui offre ô miracle des douches chaudes dans toutes les chambres.
Après 20mn, nous sommes  près du lac  où nous entrevoyons un mariage sélect avec robe blanche et costards. Le marié est tiré en arrière par les hommes pour ne pas embrasser sa nouvelle femme tandis que la mariée est poussée par ses amies pour y parvenir.

Nous longeons la promenade du « sentier d’amour » qui borde le lac. Les gens nombreux et endimanchés baguenaudent tranquillement. Beaucoup de jeunes habillés à l’européenne témoignent de la présence d’universités dans cette ville importante. Des couples flirtent et se font photographier au bord de l’eau, des estancos proposent du café, des vendeurs ambulants vendent du pop corn et des pois chiches grillés. De nombreux oiseaux se plaisent dans les marécages et les vaches au bout du sentier se font un passage sans dévier de leur trajectoire.
Nous rentrons à pied à l’hôtel au milieu de la foule détendue d’un dimanche après midi. Au Lewi hôtel où une table est retenue, des employés stylés  nous servent une nourriture de qualité et bien présentée. La télé diffuse des nouvelles via la chaine Aljezeera.
A  notre sortie, les rues sont calmes, ne restent que les sans abris et quelques passants attardés.

mardi 7 janvier 2014

La revue dessinée. N°2.

Enquêtes reportages et documentaires en bande dessinées.
Passé le moment d’agréable surprise du premier numéro, nous pouvons lire trois mois après, la suite de récits amorcés dans le un, concernant les gaz de schiste, ou dans les coulisses du jardin zoologique de Paris. Des rubriques pédagogiques s’installent avec le portrait de Barro un économiste qui prône la rigueur, et sur les abus dans le langage bien vus par James.
Je n’arrive pas vraiment à m’intéresser à la préhistoire de l’informatique malgré les petits dessins, mais les technologies du futur qui corrigeraient les déficiences de l’homme sont passionnantes, et la vie de Thalès (de Milet) narrée d’une façon amusante mérite un coup d’œil.
Il ne me restera pas grand-chose du récit de la vie de Lee Scratch Ferry car il me manque quelques éléments  de base en reggae.
Par contre « Les écoutes made in France » sont le résultat d’un vrai travail d’investigation et quand apparaissent les visages connus de « Pieds Nickelés » ils sont parfaitement à leur place à plus d’un titre : la France avait vendu à Kadhafi un système de surveillance d’Internet qui avait entrainé des tortures d’opposants, il est question de Takieddine. 
Le dessinateur  Emmanuel Lepage nous rend compte de sa visite  dans la région de Fukushima avec de belles images et cette citation d’un président sorti :
« Le coût de l’électricité produite par les éoliennes est le double de celui produit par notre parc nucléaire. Pourquoi voudrions-nous multiplier par deux le coût de notre énergie ? Y a-t-il une raison autre que l’idéologie ? Mais il n’est pas le temps de revenir à l’époque du moyen-âge, des peurs moyenâgeuses où on se méfiait du progrès. On ne va pas retourner à l’époque de la bougie. »
Ouf ! Il n’est plus aux manettes.

lundi 6 janvier 2014

Le loup de Wall Street. Martin Scorcese.


D’après une histoire vraie, a-t-on besoin de se redire, tant la destinée de ce courtier semble incroyable depuis ses débuts dans un garage jusqu’à la une des journaux financiers. Récit classique d'une réussite américaine, amorale et sans avenir.
Les acteurs  sont excellents, les musiques des monuments, les plans virtuoses, le rythme survitaminé.
La drogue a beau ravager le héros principal joué par Di Caprio, les putes appeler la pénicilline, il plonge et replonge, l’argent étant l’euphorisant le plus puissant.
Le milieu de la finance le plus obscène est efficacement décrit, mais aussi l’étourdissement de toute une société menée non par des idiots comme les jugeaient les critiques du « Masque et la plume » mais par des bonimenteurs qui savent jouer des passions de leurs contemporains.
Film américain, chez qui les loups aux fortunes insolentes n’ont même pas à se proclamer décomplexés - ils n’ont jamais été empruntés avec le pognon
- mais on peut aussi penser à des personnages de chez nous qui donnent des conférences bien rémunérées, la justice leur tourne autour, les atteindra-t-elle un jour ? Sur le pont de leurs yachts, ils reçoivent les caméras, bien que trop frénétiques pour être heureux.

dimanche 5 janvier 2014

Où vont les chevaux quand ils dorment ?



Avec ce spectacle en hommage à Allain Leprest, je pensais rattraper, en un soir, des décennies d’ignorance d’un auteur adulé par une amie aux goûts chansonniers très sûrs et  par toute une génération d’auteurs compositeurs.
J’ai apprécié les textes, néanmoins la représentation m’a paru datée.
La mise en scène  de cette cérémonie des adieux aurait mérité à mes yeux plus de sobriété.
Des chanteurs de métier qui lui rendaient hommage : Romain Didier, Jean Guidoni, je connaissais surtout Yves Jamait dont j’adore la voix et ses chansons.
Leurs prestations entrecoupées de textes lus par des enfants qui ne pouvaient comprendre ce qu’ils avaient à déchiffrer, perdaient ainsi de leur saveur :
« Un jour, boum, tu tombes sur « La mémoire et la mer » du grand Ferré et c’est l’éblouissement, le cataclysme émotionnel, l’inaccessible étoile qui va affoler ton sextant… »
Pourtant le poète lui allait direct au foie et au cœur :
« J´ai peur des notes qui se chantent
J´ai peur des sourires qui se pleurent
Du loup qui hurle dans mon ventre
Quand on parle de lui j´ai peur »
Il n’y avait pas besoin d’en appeler au « poète absolu » ni aux mânes de Rimbaud pour que le public fervent passe une bonne soirée.
« J´ai trop d´paresse – esse - esse
Pour musarder – der – der
Dans votre fief – ef – ef
S.D.F. »
De l’essentiel qui balance.
« Aujourd´hui j´ai fait ma valse
Et j´ai replié mon courage
J´ai une plaie sur la chemise
Et un accroc sur le visage
Omaha Beach, pas une trace
S´en vont et reviennent les flots
Une éponge de mer efface
Un grand ciel vert comme un tableau
Y a rien qui s´passe... »
Dommage que des sentiments surlignés lors des intermèdes avec la sempiternelle répulsion /fascination  par rapport au « système » qui permet aux chansons d’arriver à nos oreilles, soient venus perturber une rencontre avec une œuvre originale, subtile et forte.
« Quand le soir nous prête sa gomme
Où vont les chevaux quand ils dorment »

samedi 4 janvier 2014

Long cours. N°5. Automne 2013.


XXI a beau être mon chouchou, je me réjouissais de trouver sur  le présentoir de la libraire du Square un trimookstriel qui lui ressemblait d’autant plus qu’il contenait un article concernant Rimbaud en Afrique. Mais si la revue au joli titre montée par l’Express est agréable au toucher il est moins lourd que le modèle de tous les mook (magazine+book), il l’est aussi dans le contenu, plus léger. L’ancêtre XXI a beau être imité dans le format, la longueur des articles, la volonté d’aller aux quatre coins du monde, sa profondeur, son originalité, ne sont pas égalées, au vu de cette livraison de ce concurrent.
Ce n’est pas indigne non plus. Mais le dossier concernant la géopolitique de l’Islam n’apporte pas vraiment du neuf en  évoquant le trésor de Kadhafi, les touaregs du Mali, la guerre fratricide des sunnites et des chiites, la série Homeland miroir tendu à une Amérique dans l’incompréhension du monde musulman et une nouvelle d’un écrivain : Enard  pour le retour d’un homme en Syrie.
Une BD en antarctique : classique, un reportage photos sur des nostalgiques des années 50 en Australie, sur les touristes chinois en Chine ou d’excentriques anglais : pas vraiment novateur.   Le reportage sur Istanbul, j’ai l’impression de l’avoir lu plusieurs fois et Djian qui se met à narrer son voyage à Shanghai à travers sa traductrice, a été en meilleure forme d’autres fois.
Par contre le récit de la construction d’un nouveau port à côté de Tanger montre les difficultés du développement quand le clientélisme n’a pas disparu et apporte des éléments nouveaux à l’idée traditionnelle d’un rif voué au kif. Le parti pris de se mettre dans les traces de Tom Wolfe à Miami est une excellente idée. Et une enquête sur les insectes nous emmène au-delà d’assiettes sensationnelles en évoquant tous les enjeux alimentaires qui se posent à la planète, les blocages et aussi les innovations possibles pour assurer par exemple une alimentation raisonnée des poissons ou des volailles. Le portrait d’un chercheur qui écoute les animaux est intéressant et la déambulation de Léonardo Padura Fuentes en front de mer à Cuba ne renvoie pas à des cartes postales mais à nos dualités suivant qu’il se tourne vers la ville pour regarder la vie ou vers la mer pour aller vers lui-même, ayant choisi de vivre « à proximité de mes regrets, de mes souvenirs, de mes frustrations et, bien entendu, de mes joies et de mes amours. »

vendredi 3 janvier 2014

Bon an mal an.


Il faut changer les calendriers, les aiguilles ont tourné.
Alors essayer de prendre la mesure du temps et pendant qu’on y est des espaces emboités:
le ciel au dessus de nos têtes est noir de charbon, les eaux sont poisoneuses.
Mondo : Les conférences environnementales à l’échelle de la planète ne font plus illusion.
Euro : Le bleu du drapeau européen comporte plus de taches que d’étoiles.
France : Mon président blague. J’avais voté pour lui à la primaire socialiste pensant qu’il susciterait moins de rejets qu’Aubry : je m’en enfonce le bonnet jusqu’aux yeux. Cahuzac.
Ceux qui ont toujours estimé que la gauche au pouvoir était illégitime par nature, arrêtés dans l’après guerre quand les chars soviétiques devaient stationner sur le mail de Voiron, ont repris du poil de la bête. Et le pouvoir est paralysé.
La mise à plat de l’impôt semble relever de la tactique et l’ajustement des rythmes scolaires qui rencontrait  pourtant le consensus passe mal ;  le « mariage pour tous » hystérisa des manifs par touffes.
Au-delà de ces péripéties surjouées, faut-il faire tout un plat des « quenelles » ?
Descendu de sa voiture de luxe, Anelka parle d’un « geste anti système », lui dont le système  en a fait un de ses rois. Il entretient la connivence avec toute une partie de la société dont la haine se cultive sous des excuses bidon, qui savent emprunter les codes clean pour continuer à pourrir le « vivre ensemble ». Bras d’honneur, doigt d’honneur et faux semblants.
Deux fractions du pays ne se voient plus.
L’école fut au moins un lieu de rencontre, mais lorsque les conditions d’apprentissage sont compromises, pompiers et vigiles sont requis. Avec des cours en ligne qui s’ouvrent dans les universités, on pourra économiser sur les profs.
Certains jeunes  pourront filer fissa, quand d’autres végèteront sur canapé, que dira PISA ?
Ariane Mnouchkine dans ses vœux sur Médiapart décrit ce climat de pessimisme qui me mine puis donne du souffle :
« Je nous souhaite d’abord une fuite périlleuse et ensuite un immense chantier.
D’abord fuir la peste de cette tristesse gluante, que par tombereaux entiers, tous les jours, on déverse sur nous, cette vase venimeuse, faite de haine de soi, de haine de l’autre, de méfiance de tout le monde, de ressentiments passifs et contagieux, d’amertumes stériles, de hargnes persécutoires.
Fuir l’incrédulité ricanante, enflée de sa propre importance, fuir les triomphants prophètes de l’échec inévitable, fuir les pleureurs et vestales d’un passé avorté à jamais et barrant tout futur. »
Les chantiers sont boueux : quand les portails écotaxe crament, la solidarité est absente, et nos souliers collés : le chômage s’aggrave et qu’y faire ?
A Saint Egrève, sous l’affichage d’une fleur tenue dans un gant, un assemblage d’intérêts particuliers concourt pour les municipales, où les opposants d’hier qui contrarièrent jadis tout projet proposé par la gauche, sont de retour. Fidèles à eux même, eux, dont la motivation essentielle est que rien ne se construise demain : illustrant avec leur divorce de la majorité actuelle, qui nous avait vaincu aux dernières élections, que les étiquettes sont trompeuses : les plus conservateurs en rosissent.
......
 Après les cadeaux de Noël, depuis Internet cette image simple:

jeudi 2 janvier 2014

Watteau Antoine.


Prononcer Ouateau comme  à Valenciennes où il est né.
Depuis 28 ans de conférences aux amis du musée, le peintre des fêtes galantes n’avait pas été présenté, le manque est désormais comblé avec Eric Conan.
Watteau, élève à Paris de Gillot, illustrateur, décorateur, peintre, fréquente le marché Saint Germain où se donnent des parodies des succès théâtraux de l’époque, « libertin d’esprit mais sage de mœurs ». Son œuvre sera marquée par la commedia del arte et s’il apprend les arabesques, les singeries, il apporte sa propre fantaisie au cours de la Régence dont il incarne par ses toiles, la légèreté, la délicatesse.
Pourtant il ne vécut que six ans après le règne de Louis XIV (54 ans au pouvoir).
En 1717, il est élu membre de l’Académie de peinture après avoir présenté  le « Pèlerinage à l’île de Cythère» dans une catégorie crée spécialement pour lui : «  peintre de fêtes galantes ». Jardin d’amour inspiré de Rubens qu’il avait eu l’occasion de voir au musée du Luxembourg.
Rodin a écrit: « … les pèlerins font monter leurs amies dans la nacelle qui balance sur l'eau sa chimère dorée, ses festons de fleurs et ses rouges écharpes de soie. Les nautoniers appuyés sur leurs rames sont prêts à s'en servir. Et, déjà portés par la brise, de petits Amours voltigeant guident les voyageurs vers l'île d'azur qui émerge à l'horizon. »
Greuze y vit des « fricassées d’amour ». Les amants s’en vont.
J’aime ses dessins aux traits efficaces. Dans les scènes bucoliques, les frottis sont légers pour des frondaisons presqu’impressionnistes. Quand s’effacent les décors, la frontière entre le réel et sa représentation est floue. La mélancolie se mêle à  la futilité, la sensualité s’esquisse.
Les musiciens accordent leurs instruments, dans un décor pastoral, les tourtereaux content fleurette.
« L’enseigne de Gersain » fut sa dernière œuvre, aux belles dimensions alors que souvent la taille de ses productions est modeste, en milieu urbain cette fois.
Des commentateurs y voient un précurseur de Degas ou Daumier pour cette scène de la vie parisienne.
Depuis la rue pavée nous entrons dans la boutique idéalisée qui permet de citer Rubens, et les flamands. La palette est lumineuse, s’anime de personnages aux tenues soyeuses, se regardant dans un miroir, un portrait de louis XIV est mis dans une caisse, alors qu’un marchand présente une scène mythologique.
En 1721, il meurt de tuberculose, il a 37 ans.
Alors que beaucoup de ses tableaux sont à l’étranger, au Louvre le grand  « Pierrot » longtemps appelé «Gilles », le clown immobile lumineux et triste, nous interroge.

mercredi 1 janvier 2014

Bon an

La photographie est prise sur le vieux port à Marseille sans montage, les reflets sont ceux d’un miroir de 46 sur 22 mètres de  Norman Foster.
Je prends un petit morceau d'un texte d'Ariane Mnouchkine paru sur Médiapart  pour présenter mes voeux aux lecteurs de ce blog :
« Et surtout, surtout, disons à nos enfants qu’ils arrivent sur terre quasiment au début d’une histoire et non pas à sa fin désenchantée. Ils en sont encore aux tout premiers chapitres d’une longue et fabuleuse épopée dont  ils seront, non pas les rouages muets, mais au contraire, les inévitables auteurs. »