vendredi 26 octobre 2012

Peut-on encore produire en France ?



Au forum de Libération désormais lointain, dont je donne un dernier compte rendu, ce débat majeur concernant le « made in France » est revenu alors que les produits Apple par exemple sont « made in Monde ». Quand en Allemagne il s’agit plus d’assemblages : « Made by Germany », avec externalisation des productions dans les pays de l’Est.
Le rappel que depuis les années 80 la France a perdu 2 millions d’emplois industriels, pose des questions cruciales. Cette saignée est sans égal en Europe.
Parmi les intervenants Pascal Canfin alors député européen EE, les verts, très pédagogique :
« J’ai visité récemment une scierie dans les Ardennes : les arbres sont coupés en France puis les troncs partent en Chine pour être transformés en planches de parquet qui sont ensuite vendues en France. »  
« Dans le tunnel du Mont Blanc, un camion français chargé de bouteilles de Badoit croise un camion italien chargé de bouteilles d’eau San Pellegrino. »
Jacques Rigaudiat, économiste : 
« la mondialisation, c’est d’abord et principalement l’Europe : elle représente les 2/3 de notre commerce extérieur. L’Allemagne - cliente ou vendeuse - est notre premier partenaire ; et il faut sans doute quelque peu se forcer pour admettre que nos importations depuis la Belgique, ou l’Italie, ne sont que de peu inférieures à celles en provenance de Chine ! Et que c’est avec la Grande-Bretagne que notre excédent est le plus important ! »
De quoi secouer des idées toutes faites avec de surcroit Gérad Mancret de la  CGPME de l’Isère qui souligne les blocages culturels de « la France qui n’aime pas son industrie », en témoigne l’orientation dans l’éducation nationale quand Polytechnique produit  aujourd’hui plus de traders que d’ingénieurs !
Ce n’est pas le coût du travail qui plombe la France, la main d’œuvre représente seulement 10% de la valeur des produits, par contre l’absence de politique en matière de change pénalise les entreprises qui attendent une harmonisation fiscale et sociale.
La relocalisation semble peu plausible sauf dans l’agro alimentaire mais le rapport de force avec la Chine néo-impérialiste suppose un volontarisme qui dépasse les effets d’annonce d’un jour en appelant à la réciprocité.
Les intervenants ne se sont pas attardés sur  les causes d’une situation dégradée gravement  avec la grande distribution en outil de destruction ni sur le blocage des prix qui a coûté cher au tissu industriel.
Les propositions n’empruntent pas les facilités tribuniciennes du protectionnisme, quand l’état   reprendrait vigueur en stratège répondant aux besoins sociaux par le développement des services collectifs.
Avec la simple idée d’augmenter la durée de garantie des biens comme l’électro ménager nous avancerions vers une économie plus durable. Investir dans l’isolation des logements permettrait  aussi de diminuer l’importation d’énergies fossiles.
Plus récemment Rocard  rappelait: « les délocalisations pèsent pour moins de 9% de notre chômage. »
...............
Proposé sur Facebook:
 

jeudi 25 octobre 2012

L’histoire de France vue d’ailleurs. Books.



Un dessin du chapeau de Napoléon figure en première page de la revue « Books » de juillet août pour illustrer les cent pages consacrées à notre histoire vue depuis l’étranger.
C’est que le corse est le français le plus connu dans le monde, il fut populaire jusque chez les anglais.
Nous sommes invités à réviser bien de nos images : Charlemagne n’a pas vraiment créé l’Europe, cependant « il œuvra pour le renouveau des écoles et de la connaissance », Saint Louis ne gardait point l’épée dans son fourreau,  Jeanne ne s’appelait point d’Arc, et la figure de Robespierre reste encore énigmatique, le couple Thorez/Vermeersch élevé hors sol témoigne de la foi d’alors dans l’URSS. L’instrumentalisation ne date point d’aujourd’hui : pourquoi Jeanne  oubliée après sa mort renaitra ? La sanctification du Louis vint à un moment où l’église s’affaiblissait.
«Les morts vivent plus longtemps en France que partout ailleurs » Sudhir Hazareesingh
Tout aussi mythiques, des phénomènes collectifs tels que la sorcellerie sont revisités, ainsi que la légion étrangère, l’exode de 1940 venant après celui de 14, la guerre franco anglaise de 1940 à 42…
La pauvreté sous la révolution française ne régressa point.

mercredi 24 octobre 2012

Jacques Danguit, peintre.



L’ancien président de L’ACDA (Atelier de Création et de Développement Artistique) où j’ai trainé un moment mes crayons exposait  récemment à Saint Egrève.
Je suis allé voir ses toiles au moment où des enfants qui étaient à l’accueil péri scolaire arrivaient.
Cette exposition  pleine de couleurs et d’optimisme est  vraiment faite pour eux.
Les villages sont ensoleillés, les champs emplis de fleurs et lorsque une petite fille apparait au bord d’une falaise, soyons sûr qu’elle atterrira sur ses pieds.
Les rochers de son Vercors rythment agréablement ses toiles de différents formats et ses maisons charmantes au bord de la Méditerranée sont celles des livres d’images que l’on a envie d’habiter.
Une de ses comparses avait beau lui reprocher de m’avouer qu’il avait recouvert d’anciennes toiles pour présenter ses nouvelles productions, j’aime imaginer sous la riante couche d’acrylique quelque mystère sous-jacent.
Il est aussi un des responsables de l’organisation du mois du graphisme d’Echirolles, alors ses compositions se devaient d’être rigoureuses.
Si l’on trouve un aspect bande dessinée à ses peintures, l’ancien conseiller municipal de la banlieue sud  n’y verra pas noise, il élargira un peu plus son éternel sourire.

mardi 23 octobre 2012

Storeyville. Frank Santoro.



Quinze cases par page au format d’un journal américain sur 40 pages forment un album hors norme dans sa version cartonnée (28 x 40 cm).
Pendant les années 30, Will un jeune vagabond, circule clandestinement dans des trains de Pittsburgh à Montréal à la recherche de son père « spirituel ». Le découpage est intéressant et convient bien  pour décrire l’errance. Les paysages sont bien dessinés mais le crayonnage à l’état d’ébauche ne m’a pas convaincu quand il s’agit de traiter les personnages.
Et le ton dithyrambique de la préface n’a fait qu’accroitre ma déception en regard d’une complaisance qui se rencontre assez souvent dans les chapelles de la BD.
« Malgré sa diffusion réduite, ce travail n’en est pas moins considéré comme majeur par de nombreux auteurs et spécialistes de bande dessinée. »
Moi, je n’ai pas vu tout ça. Une histoire d’initiation, nonchalante, où le dessin à son premier jet peut traduire une certaine énergie mais aussi une posture arty qui éloigne l’attention.

lundi 22 octobre 2012

Adieu Berthe ou l’enterrement de mémé. Les Podalydès.



Cette comédie servie par de bons acteurs n’est pas expéditive comme peut  le laisser penser le titre ; elle ne fait pas sa maline.
Loufoque et mélancolique, délirant et tendre, le film traite de l’indécision, de l’amour, de la mort,  légèrement : alors crémation ou ensevelissement, ma femme ou ma maîtresse, funérailles cool ou new age?
Quand les affèteries 3D ne fonctionnent pas, la bonne vieille magie opère ; c’est affaire de famille.
Léger, il nous parle de notre époque  où les SMS ont remplacé les lettres.
La poésie circule sur une trottinette électrique pour aller de l’enfance vers des rivages plus âpres où l’humour permet de s’échapper. 

dimanche 21 octobre 2012

J’ai 20 ans qu’est ce qui m’attend ? Cécile Backès



Montage de séquences écrites par Maylis de Kerangal, Arnaud Cathrine, François Bégaudeau ... et  par la ministre de la culture Aurélie Filippetti  en personne, ministre de la culture so cute, traversées par les préoccupations des associations  « Jeudi noir » et « Génération précaire »: problèmes de logement et de stages.
Nous sommes au-delà de Nizan disant :
« J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie. »
Fausse audace, trop commentée, d’un autre âge.
Ce travail collectif, sans prétention mais propre, a plu à une salle où les jeunes étaient pour une fois majoritaires. Malgré quelques acteurs insuffisants, la mise en scène inventive, sans esbroufe, donne  de la fluidité à ce théâtre trempé dans les préoccupations du quotidien.
Quand un couple à la recherche d’un appart' se retrouve coincé dans les coulisses c’est tout à fait juste.
Tous les stagiaires s’appellent Stéphane et tous les employés sont stagiaires, l’entreprise elle-même  se révèle être une fiction  ce qu’avaient deviné  chacun des surdiplômés qui rattrapent le vide de leur journée en inventant le soir des contes.
J’ai ri : « une étude statistique effectuée par deux chercheurs allemands à l’université de Princeton a montré que le fait de lire un article dévalorisant pour la jeunesse augmentait l’estime de soi des plus de 55 ans ».
Je n’ai plus vingt ans mais l’avenir des mômes me fait souci.

samedi 20 octobre 2012

Mon vieux et moi. Pierre Gagnon.



« Les vieux oublient, s'étouffent, font répéter, voient trouble, tombent, n'en veulent plus, en veulent encore, ne dorment plus la nuit, dorment trop le jour, font des miettes, oublient de prendre leurs médicaments, nous engueulent tant qu'on serait tenté de les engueuler à notre tour, pètent sans le savoir, répondent quand on n'a rien demandé, demandent sans attendre de réponse, échappent puis répandent, ont mal, rient de moins en moins, gênent le passage, s'emmerdent, souhaitent mourir et n'y parviennent pas » 
Livre court, léger, original.
Le narrateur adopte un vieux monsieur de 99 ans.
En 78 pages il nous raconte un an de leur vie commune.
L’ancien fonctionnaire désormais à la retraite est disponible pour Léo, un vieillard dont la raison décolle parfois. Cette expérience éclaire ses jours mais aussi sa vie antérieure sans grandiloquence mais avec de la franchise  et un sens du concret qui me semblent bien québécois.
Pas de leçon, ni de sentimentalité mais de la délicatesse, au cours d’un quotidien où la réalité s’examine en face, où la poésie dépose dans une grande malle des petits mots :
« Qu’est ce qui me prend d’aimer les vieux ? »