samedi 5 mars 2016

J’ai vu la fin des paysans. Eric Fottorino.

Les articles rassemblés dans ce livre de 200 pages publiés dans le quotidien « Le Monde »  comptent parfois 35 ans d’âge, ils passent l’épreuve du temps, sans un soupçon d’obsolescence.
Même si l’idée des paysans «  jardiniers de l’espace » apparait plusieurs fois:
« le paysan sera-t-il le lynx du siècle prochain qu’il faudra réintroduire dans les campagnes pour y rétablir un équilibre ? L’avancée de la friche agricole est pour beaucoup le fruit d’une friche des idées »
Je connais ce monde paysan, même si quelques soubresauts récents soulignent la distance entre « connaître » et « comprendre ». Si mon père fut pour moi à un moment « un homme qui transpire beaucoup pour faire de son fils un monsieur qui rougira de lui plus tard » selon la formule de Julien Decourcelle, j’en rougis encore, de confusion.
Les photos de Depardon
ont joué pour moi dans l’appel à une lecture de ces dernières décennies du XX° siècle expliquant les racines d’une situation présente qui pose des problèmes allant bien au-delà d’une profession.
Le mot dérivé du latin « pagu », qui fut une insulte, est désuet : « paysan » signifie un état alors qu’ « agriculteur » désigne un métier.
Le maïs hybride a remplacé le « grand roux basque » malgré sa « mauvaise mine comme les gens des villes ». Ce milieu routinier comme les saisons est entré dans les rendements à coups d’intrans au bruit des moteurs, avec un sens de l’adaptation insoupçonné.
Et bien que l’on sache la diversité des situations, le rappel de la cour des comptes de 1987 notant qu’un producteur de moutons du Limousin touchait 11 000 F d’aides pendant qu’un céréalier recevait 195 000 F, est utile.
Bien des commentateurs s’extasient devant la cogestion syndicale allemande ; celle qui existe en France pour les agriculteurs est jugée néfaste par ces mêmes éditorialistes.
«  Combien de volets se ferment pour ne plus s’ouvrir, chaque année, dans les villages du Sud de la France pas seulement  dans la Lozère ou dans la Corrèze ? Les quotas laitiers, les limitations de productions céréalières, les importations massives de produits de substitution aux céréales, la course à la concentration des élevages ont, au fil du temps, donné à l’agriculture un visage nouveau, moderne, mais effrayant, une agriculture hyperproductive qui produit plus sur moins d’espace, rétrécit ses bases au risque de se dénaturer »
Si le mot crise figure souvent dans les titres des courts chapitres, nous révisons quelques paroles de ministres qui ne furent pas tous des « Lalonde de choc »,  François Guillaume syndicaliste devenu ministre, Raymond Lacombe resté paysan, Nallet, Cresson, Rocard et je ne m’en souvenais pas : Mermaz.
L’auteur, rédacteur aujourd’hui de la revue « 1 », est aussi un écrivain

1 commentaire:

  1. Au delà des problèmes de l'agriculture industrielle qui est en place depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, pour des raisons que Galbraith 1 a éclairci, avec la hantise autour du blocus alimentaire de l'Angleterre à cette époque, il y a aussi des problèmes de transmission des élevages, et des terres à des moments où le relève n'est souvent pas familial.

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