mardi 26 mars 2013

La villa sur la falaise.



Pour les dix ans de la collection « Ecritures » chez Casterman, Benoit Sokal a invité dix auteurs de BD à inventer une histoire courte à partir d’une idée commune : une jeune femme revient constater l’écroulement de la maison de ses parents dont il ne reste qu’une moitié en haut d’une falaise.
Cette situation initiale où les souvenirs sont convoqués en bord de mer va permettre une variété réjouissante d’interprétations.
Celle de la Suissesse Cati Baur est ma préférée avec l’omniprésence d’un smartphone au milieu d’une vie affolée.
L’américain Nate Powell  livre un récit  très noir, la britannique Hannah Berry est originale et habile. 
Le français Saulne sous influence japonaise m’a bien plu aussi avec ce qu‘il faut  de représentation imaginaire et de subtile évocation du temps qui a passé entre celui qui est resté dans l’île et celle qui revient.
Les dessins de l’allemande Isabel Kreitz sont forts et s’accordent à l’ambiance cinématographique d’une tragédie.
Davide Reviati est élégant, italien.
Jirô Taniguchi  va vers la science fiction.
Fred Bernard est le plus radical en ne délivrant ses seules paroles que dans la dernière case après un trajet aux dessins naïfs auxquels il ne faut pas se fier.
Gabrielle Piquet est plus emberlificotée alors que Takahama est limpide.

lundi 25 mars 2013

Django Unchained. Quentin Tarantino.



« Pulp fiction »  a 20 ans et j’ai attendu un mois et même plus avant d’aller voir ce film porté aux nues. Ma jubilation n’en est que plus forte, ne faisant pas partie à priori des fans qui mettent  le tonitruant amateur de série B au plus haut.
A l’occasion des avis que j’ai pu parcourir concernant cette œuvre de 2h 40,  j’ai eu le temps de copier/coller des éléments de langage :
« western  blaxploitation » qui résume bien cette histoire d’un esclave héros de western,
« revenge movie » : la  vengeance est le moteur à explosion d’un scénario inventif,
« buddy movie » : film avec deux personnages très différents au départ qui finiront par se rapprocher.
Les clins d’œil au cinéma n’alourdissent pas les images magnifiques accompagnées d’un patchwork musical emballant, aux dialogues délicieux servis par  des acteurs excellents.
Le souvenir d’un fuyard déchiqueté par des chiens reviendra au raffiné chasseur de prime à la gâchette forcément agile quand Beethoven sera joué à la harpe par une jeune femme très « Autant en emporte le vent » ; cette fois il ne supporte pas la violence qui ne manque pas tout au long de la fresque.
Nous passons de l’horreur au sourire dans des scènes carrément comiques, baroques, « too much » bien contents que ce soit du cinéma, tout en nous interrogeant une fois encore sur cette proximité du raffinement et de la barbarie.
Un beau feu d’artifices.

dimanche 24 mars 2013

Carbonnade.



C’est du mitonné, pas du carbonisé, comme braiser une viande ce n’est pas cuire sur la braise.
Un  bourguignon ch’ti à la bière et au pain d’épices, un régal.
Faire roussir dans l’huile, ou huile et beurre, le bœuf coupé en cube, pris dans la macreuse (épaule) ou à proximité dans le paleron (près de l‘omoplate), voire dans le gîte ( jarret), puis faire blondir les oignons ; ne pas les pleurer.
Recouvrir le tout de bière en ajoutant sel, poivre, bouquet garni, bouillon cube et  vers la fin du mijotage des tranches de pain d’épices tartinées de moutarde qui donneront une saveur originale à ce plat d’hiver.
Une heure à la cocotte minute. En cocotte en fonte, deux heures voire trois et demie, si on n’est pas à la minute, avec du persil avant de servir.
S’accompagne de pommes de terre ou de pâtes, j’ai évité les frites, incontournables pour certains. Beaucoup ajoutent de la cassonade, je ne l’ai pas essayée, ni à la place du pain d’épices les spéculos qui deviennent vraiment tendance en cuisine.

samedi 23 mars 2013

Le radeau de Victoire. Marie Thérèse Jacquet.



Dernier livre d’une amie de ce blog dont vous trouverez de nombreuses nouvelles dans la rubrique : « écrits de lecteurs ».
 J’ai annoncé également son livre précédent sous le titre « Marie Treize » à retrouver avec le moteur de recherche figurant en haut à droite de cette page.
La quatrième de couverture nous met en appétit :
« Elle « rame », cette enfant, dans le monde tel qu’il se révèle à ses yeux naïfs et implacables.
Petit Quinquin, née dans un vieux quartier lillois, rame parce que c’est la Seconde Guerre mondiale.
Elle rame parce que dans la boulangerie familiale, ses parents, leurs proches se livrent à des guerres où tous les coups sont permis.
Elle rame dans la débâcle vers le sud, l’exode vers l’est. Sa mère, gagnée par les terreurs de l’époque, fuit au volant de sa voiture. Son père alsacien reste dans sa boulangerie, se livrant à des commerces louches.
Quand l’enfant perd sa boussole, elle retrouve calme, tendresse et protection auprès d’une vieille dame sur sa terrasse aux géraniums, chez des oncles et tantes dans la famille de substitution de son petit frère.
Elle apprend à protéger sa frêle périssoire en dépit des naufrages menaçants. Son héros c’est Tarzan, protecteur des animaux de la Jungle, figure paternelle sans peur et sans reproche ».
À propos du recueil de nouvelles de l’auteure « Allumez le four » publié en 2010 aux éditions Alzieu :
« J’ai lu vos nouvelles et je les trouve excellentes, drôles, couillues, vraies. Continuez, allez-y ! Décidément, vous êtes bourrée de talents. Vous savez quoi ? Nos écritures se ressemblent. C’est pour cela que vous aimez ce que je fais et que j’aime ce que vous faites ; nous utilisons le même terreau." Françoise Xénakis
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Souscription Le radeau de Victoire chez Zonaires éditions,
218 pages, 17 euros
Bénéficiez d’une offre de lancement en souscrivant
avant le 5 avril 2013 au prix de 15 euros Frais de port en sus (2 euros) pour les commandes hors canton de St Egrève
Commande à envoyer avec le règlement à :Zonaires éditions 35 rue du Rocher 38120 Fontanil Cornillon

vendredi 22 mars 2013

Pleins et déliés.


Plumes :
Aux Etats Unis, l’apprentissage de l’écriture sera optionnel dans la moitié des états.
Peut-on apprendre à lire sans écrire ? Dans quel état vont être nos enfants ?
On s’amusera avec les mots : corps d’écriture et écriture des corps, on ouvrira des ateliers de calligraphie pour oublier que dans la patience d’un apprentissage, la courbe venue d’un crayon tenu entre ses doigts pouvait épouser une pensée plus humainement qu’un Tweet.
On n’enseigne plus le dessin depuis longtemps, quelle sera la signature de chaque personnalité dans un monde policé par défaut ? Une croix.
Oiseaux et autres bestiaux:
Après les « pigeons », patrons contre des réformes fiscales, qui effrayèrent quelque poule mouillée, les « dindons », collectif d’enseignants,  on s’est fait jouer  à la grosse caisse: « tiens voilà du bourrin ».
Quand les Spanghero étaient deuxième ligne et pas en première ligne, un steak de cheval était un luxe et il me semble que les vaches à l’équarrissage étaient données aux truites.
Avant que les étables soient sur tapis roulants, en début de chaine, le minerai s’extrayait de la mine. Ce mot  « minerai » appliqué à la bidoche, que l’on vient d’apprendre ces jours, signe un basculement du sens des choses.  
Du temps où dans les fermes ont donnait un prénom aux vaches, je me souviens de
« La  Marquise » comme celle à qui appartenait l’usine de soierie voisine; il y eut le baudet appelé « Roméo » et la jument percheronne  qui s’appelait « Juliette ».
A Pâques un bœuf était exposé sur la place, les éleveurs étaient fiers de leurs bêtes, de leur travail.
Vautours :
Lu récemment : Les 400 américains les plus riches détiennent deux fois le produit intérieur brut de 1,2 milliard d’Indiens. Oui j’ai relu : 400 = 1 200 000 000.
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Dans Charlie Hebdo de cette semaine :

jeudi 21 mars 2013

Fragonard à Grasse.



Jean Honoré Fragonard le peintre des scènes galantes a son musée dans sa ville natale  grâce à l’entreprise de parfumerie qui porte son nom, bien en vue dans la place parmi les Galimard  et autres Molinard.
Après avoir apprécié dans une boutique du vieux Grasse le parfum « Cambouis » d’un créateur pour les délices olfactifs, présenté dans sa burette aux fragrances presque trop discrètes, nous nous sommes rendus à l’hôtel de Villeneuve rénové pour recevoir les visiteurs en route vers le XVII°.
C’était le temps des robes soyeuses où une jeune fille blanchette et rondelette délivrant un oiseau de sa cage le retient par un ruban délicatement tenu entre deux doigts. 
Quand elles se retrouvent à plusieurs à s’ébattre au bord de la rivière, les eaux en bouillonnent.
J’aurais tendance à moins m’attarder sur les  peintures religieuses, paysages, ou d’autres charmants portraits plus conventionnels comme ceux de sa belle sœur Marguerite Gérard visible dans les murs.
Mallet (Jean Baptiste) est aussi présenté, il sera un témoin du directoire et de l’Empire, alors que son ainé est lié aux images qu’il a contribué à former d’une époque où régnait la du Barry, dernière maîtresse de Louis XV.
Une lettre faisait toute une histoire.

mercredi 20 mars 2013

Le Louvre # 3 : le Grand Dessein s’achève.



Voltaire en 1745 dénonçait le délabrement du Louvre.
« Louvre, palais pompeux dont la France s'honore,
Sois digne de Louis, ton maître et ton appui
Sors de l'état honteux où l'univers t'abhorre
Et dans tout ton éclat montre-toi : comme lui »
Sous Louis XV des édifices accolés au palais et à ses ailes sont démolis.
Louis XVI et Marie Antoinette reviennent  prendre place dans leur cage dorée en septembre 1789 ; au cœur de la ville pourront-ils mieux comprendre la vie de leurs sujets qu’à Versailles ? Le palais est remeublé et l’assemblée nationale investit la salle du manège.
En août  1792 l’assaut du Palais des Tuileries marque la fin du règne monarchique.  
La Convention s’y installe. Un hémicycle et des tribunes pouvant recevoir 1800 spectateurs sont installés dans l’ancienne « salle des machines ». La décoration est sobre.
Une première exposition de l’académie royale de peinture avait eu lieu dans les appartements  occupés par Anne d’Autriche et la galerie du bord de l’eau préfigurait un musée. Dans le salon carré sont présentés jusqu’au haut plafond des œuvres destinées à présent à  un public  plus large pour redonner vigueur à un « grand genre » qui n’est plus enseigné.
Dans l’encyclopédie parait un plaidoyer pour que le palais multiséculaire devienne un musée.
En attendant Rubens peut être vu au palais du Luxembourg.
En  1792, le musée est opérationnel, les collections sont élargies avec des biens saisis du clergé et des émigrés.
La voûte de la Grande galerie est percée pour un éclairage zénithal.
Le produit des conquêtes napoléoniennes  amènent de nombreuses œuvres installées par Vivant Denon. Le buste de l'Empereur sera en bonne place après un bonnet phrygien qui surmontait la coupole.
L'Arc de Triomphe du Carrousel est édifié avec à son sommet les chevaux de la basilique Saint-Marc de Venise, qui seront restitués en 1815.
Balzac dans La cousine Bette : « L’existence du pâté de maisons qui se trouvent le long du vieux Louvre est une de ces protestations que les Français aiment à faire contre le bon sens, pour que l’Europe se rassure sur la dose d’esprit qu’on leur accorde et ne les craigne plus… Voici bientôt quarante ans que le Louvre crie par toutes les gueules de ces murs éventrés, de ces fenêtres béantes : "Extirpez ces verrues de ma face !" On a sans doute reconnu l’utilité de ce coupe-gorge, et la nécessité de symboliser au cœur de Paris l’alliance intime de la misère et de la splendeur qui caractérise la reine des capitales. »
Après bien des aléas Napoléon III bouclera le « Grand Dessein », celui d’Henri IV, avec des guichets portes d’entrée d’un très vaste espace dévolu désormais à l’art.
En 1871, un incendie allumé par les communards consumera la Palais de Tuileries.
Edouard Balladur aura beau retarder l’échéance, les derniers occupants du ministère des finances déménagent à Bercy en 1989.
François Mitterrand a voulu le grand Louvre qui s’ouvre à 10 millions de visiteurs annuels sous la pyramide de Peï que le conférencier Fabrice Conan n’apprécie guère pas plus qu’il ne voit d’un bon œil les décentralisations du Louvre à Metz et Lens.
Je suis au contraire content que l’histoire ne se fige pas, que les œuvres voyagent. Nous irons à Paris, mais Delacroix chez les cht’is ça me convient, n’en déplaise aux enfants d’Edouard.