jeudi 24 décembre 2020

Dérogation de Noël.

« Le choix de la dérogation opéré par le gouvernement en faveur de la soirée de Noël au détriment de celle du 31 décembre est gravement discriminatoire »
Françoise Dreyfus professeur émérite Paris I Sorbonne.  
« Gravement » : ma colère ferait trop d’honneur à ces bêtises plutôt accablantes pour ce qu’elles révèlent de l’époque.
J’avais bien eu sur Facebook un aperçu de ces billevesées tellement banales sur le web qu’elles tendraient même à fortifier chez le lecteur blasé une certaine résistance nommée mithridatisation (ingestion d'un produit toxique afin de se préserver des poisons).
Les employés du journal « Le Monde » version numérique, dont les prérogatives consistent à obtenir le maximum de clics n’avaient pas valorisé la plaidoirie pourtant remarquable de Richard Malka concernant la liberté d’expression, bien que la version papier lui ait donné toute son importance, mais ils ont choisi l’originalité avec l’avis de cette politiste. Opinion à la hauteur de milliers de commentaires d’un jour sur les réseaux sociaux mais ayant eu aussi l’honneur  d’une demi page de la version papier du journal de référence ⸮ (point d’ironie). Faurisson donnait aussi dans le genre anticonformiste et me fait gagner d’emblée le « point Godwin ».
Je ne m’enferrerai pas outre mesure dans la tristesse de voir une « émérite » s’exprimer d’une façon qui accréditerait l’idée d’une décadence de l’université. 
« Noël est une fête religieuse chrétienne qui est indifférente notamment aux juifs, aux musulmans… » Et alors ?
Au temps où des élèves m’offraient des gâteaux à la fin du ramadan, je n’étais pas indifférent, me rappelant le moment où j’apportais du boudin à mon maître après que fut tué le cochon à la ferme.
Alors que la politiste insiste pour voir dans cette mesure gouvernementale une « inconnaissance de la société française », j’hésite à développer une banalité en rappelant que Noël est essentiellement la fête des enfants d’aujourd’hui et de ceux que nous fûmes. Mais s’il y a tout lieu de croire que le père Noël n’existe pas, l’extinction de la bêtise n’est pas à l’ordre du jour. Journée pour les cadeaux comme en faisaient (en font ?) aussi des familles de tradition musulmane à cette occasion.
Oui les religions se sont succédé bâtissant leurs chapelles sur des lieux de cultes d’autres dieux, mais la célébration de la venue au monde d’un bébé dans la paille a fait naître de bien belles histoires qui parlent d’espérance, de lumière dans la nuit…  Rendez-vous avec le temps et les symboles qui nous unissent : solstice et grand sapin vert, rouge trogne de Santa Claus.
Je plains ceux qui n’ont pas connu : 
« Ah ! Quel beau matin, que ce matin des étrennes !
Chacun, pendant la nuit, avait rêvé des siennes
Dans quel songe étrange où l’on voyait joujoux,
Bonbons habillés d’or, étincelants bijoux,
Tourbillonner, danser une danse sonore,
Puis fuir sous les rideaux, puis reparaître encore !
On s’éveillait matin, on se levait joyeux,
La lèvre affriandée, en se frottant les yeux … » 
Rimbaud
Ces « bijoux » pouvaient être seulement la fameuse orange qui a force d’avoir servi n’est même plus ressortie à l’heure des monceaux de présents et autres bibelots revendus le lendemain sur le net, mais combien d’attentions délicates, de plaisirs éclatants ce soir là ou au matin ?
Les cadeaux livrés possiblement par Amazon à cette employée de l’éducation nationale qui a profité tout au long de sa carrière des congés de Pâques, Toussaint, Ascension … éviteront peut être le 25 décembre pour attendre le premier janvier. Se dispensera-t-elle de dire : « bonne année 2021 », pour ne pas humilier ceux qui ont d’autres calendriers ? 
A défaut de faire la police parmi les commentaires paraissant sur son site Facebook, alors qu’il ne manque pas de demander aux autres une démarche éthique, « Le Monde », dans sa version  en papier en principe plus scrupuleuse, pourrait éviter la publication de tels laïus  ridicules.

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