Passé parmi d’autres d’un siècle à l’autre, je prends mon
temps pour déguster les histoires de l’oncle d’Amérique (latine), mon maître,
dont je m’aperçois que je n’ai lu finalement qu’une petite partie de ses
écrits.
…
et je suis loin d’être exhaustif car j’ai pu le citer par
ailleurs à propos de l’école ou de Venise et même lorsqu’il apparait en BD.
Certains thèmes développés dans les quelques livres énumérés
plus haut se retrouvent dans les 300 pages découpées en chapitres aux titres
essentiels :
« Unir », « Transmettre », « Croire »
en des lieux primordiaux « L’Ecole », « La Prison », « Le
Forum »,
scandés par des citations de Marx, Pascal, Valéry, Malraux,
Flaubert … Julien Gracq :
« Tant de mains
aujourd’hui pour bouleverser ce monde et si peu de regards pour le contempler ».
Le témoin du passage du siècle américain au siècle asiatique
est à la hauteur de ses prédécesseurs et j’ai du mal à faire un choix parmi ses
formules chantantes :
« Qui avait cru
un jour aura chu le lendemain mais qui n’a pas cru un seul jour sera déchu pour
toujours ».
J’ai décroché quand il est question de logique, et je ne
peux me situer dans les querelles philosophiques qu’il nous permet cependant
d’entrevoir, par contre je me sens complètement en phase avec ses évolutions politiques « passant
du treillis au costume-cravate », vues d’un œil attendri et malicieux.
Il n’a pas attendu que ce siècle saigne pour des questions
religieuses, il les situe au cœur et en amont du politique.
« Nation c’est
narration » et il débusque avec gourmandise les abus des
euphémismes :
« Ainsi un
système d’inégalité et d’injustices peut-il devenir « l’ordre
international » fondé sur le droit et le respect d’autrui ; vassalité
peut muer en « solidarité … un strapontin en
« partenariat »»
Attentif aux techniques, il sait que « le collier d’attelage a plus fait
pour l’abolition du servage que les lettres de saint Paul » et s’il
admet que la prochaine déesse ressemblera à Gaïa ( la terre dans la mythologie
Grecque), « un retour salutaire au
fétichisme après le stade positiviste, en particulier dans notre rapport à la
terre », il n’abandonne pas « l’Histoire
qui s’interpose entre la nature et nous ».
La fresque où la réflexion se marie à l’action, haute en
couleurs chaudes, poétique et drôle, n’est pas que rétrospective, elle est
d’une vive actualité:
« On localise de
mieux en mieux, on périodise de moins en moins. « Où es-tu ? »
notre première question sur le portable. « Dans quelle suite tu
t’inscris, » serait insolite et déplacé. Le numérique désosse le temps et
met Clio (Muse de l’Histoire) cul par-dessus tête. Des traces de tout mais
pêle-mêle. Plus de chronologie. On cueille à la diable dans le répertoire et
qu’importent les continuités pourvu qu’on ait la connexion ; qu’importent
les lignées pourvu qu’on soit en ligne .»
Ça fait un certain temps que tu me donnes envie de lire Régis Debray, auteur curieusement absent de ma bibliothèque de l'Université Inter-âges que je n'ai vue que 3 ou 4 fois en tout depuis mars dernier...
RépondreSupprimerMais, mais, mais... cela me fatigue l'éternel désir de renvoyer la parole à une chose vaine à côté de la technique, ou l'acte. Je persiste à dire qu'on voit les idées DANS le monde, pas au dessus du monde, mais DANS le monde, et il n'y a pas d'idées sans langage. Le langage est tissé DANS le monde, dans nos actes, dans nos techniques, qui ne peuvent pas se tenir seuls sans lui.
Pour le retour salutaire au fétichisme, je ne sais pas si j'ai envie d'être SAUVEE de cette manière là.
Oui, c'est vrai, je suis fatiguée de l'envie de mon pas si prochain que ça de vouloir ME SAUVER, coûte que coûte (ou même.. SAUVER LE MONDE, SELON SES PROPRES IDEES DU SALUT).
Son incroyable bienveillance à mon égard m'épuise, surtout à l'heure actuelle où la bienveillance prend des formes si.. TOTALISANTES. Je dirais même que cette bienveillance, de plus en plus, s'entoure d'une auréole... religieuse à mes yeux.
Voilà bien longtemps que mes lecteurs doivent être perplexes. Tant de personnes qui croient que je défends la Grande Romaine à certains moments parce que je suis catholique, et ne comprennent pas que je n'aime pas qu'on attaque des acteurs pour des choses dont ils ne sont pas.. coupables, parce que ce n'est pas JUSTE, dans le sens de JUSTESSE, et non pas de JUSTICE. (une nuance à maintenir)
Il y a une histoire dans ma famille qui me parle beaucoup : ma mère, qui avait été élevée en terrain mormonne, était Protestante presbytérienne aux U.S. Quand les Mormons venaient évangéliser à sa porte, elle les accueillait avec un sourire d'hospitalité, une parole gentille, et était prête à discuter avec eux, parce qu'elle était réellement une personne ouverte et tolérante, et pas simplement une.. PROFESSANT la tolérance et l'ouverture. Mais elle leur disait : je veux bien discuter avec vous, mais j'ai ma propre religion, ma propre foi. Et ils étaient contents au moins de RECEVOIR L'HOSPITALITE de ma mère, et ça leur suffisait.
De mon côté, je serais... contente ? de recevoir les personnes qui EVANGELISENT pour la nouvelle religion de l'Etat ? chez moi, et leur donner l'hospitalité, tant qu'elles n'exigent pas que je me COURBE pour ME PLIER A LEUR "FOI", qu'invariablement, ils présentent comme la vraie vérité.
Pour revenir à Gaïa, je me demande si le retour au fétichisme.. RELIGIEUX pourra réellement remplacer une intimité charnelle de vie AVEC la terre, une paysannerie qui ne ferait pas du HORS SOL. Je me demande comment ce nouveau fétichisme va remplacer des personnes qui ont pu vivre par le passé DANS LA MÊME PIECE avec leurs bêtes, dans certains cas, et les connaissaient personnellement.
J'attends de voir que la nouvelle.. GESTION FETICHISTE du vivant NOUS SALISSE UN PEU, pour nous permettre de NOUS SALIR LES MAINS, et pas que, sans crier scandale, ou courir chercher un bidon de gel hydro-alcoolique pour enlever.. LA SOUILLURE.
Là, je serai plus à l'aise...