dimanche 21 octobre 2012

J’ai 20 ans qu’est ce qui m’attend ? Cécile Backès



Montage de séquences écrites par Maylis de Kerangal, Arnaud Cathrine, François Bégaudeau ... et  par la ministre de la culture Aurélie Filippetti  en personne, ministre de la culture so cute, traversées par les préoccupations des associations  « Jeudi noir » et « Génération précaire »: problèmes de logement et de stages.
Nous sommes au-delà de Nizan disant :
« J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie. »
Fausse audace, trop commentée, d’un autre âge.
Ce travail collectif, sans prétention mais propre, a plu à une salle où les jeunes étaient pour une fois majoritaires. Malgré quelques acteurs insuffisants, la mise en scène inventive, sans esbroufe, donne  de la fluidité à ce théâtre trempé dans les préoccupations du quotidien.
Quand un couple à la recherche d’un appart' se retrouve coincé dans les coulisses c’est tout à fait juste.
Tous les stagiaires s’appellent Stéphane et tous les employés sont stagiaires, l’entreprise elle-même  se révèle être une fiction  ce qu’avaient deviné  chacun des surdiplômés qui rattrapent le vide de leur journée en inventant le soir des contes.
J’ai ri : « une étude statistique effectuée par deux chercheurs allemands à l’université de Princeton a montré que le fait de lire un article dévalorisant pour la jeunesse augmentait l’estime de soi des plus de 55 ans ».
Je n’ai plus vingt ans mais l’avenir des mômes me fait souci.

samedi 20 octobre 2012

Mon vieux et moi. Pierre Gagnon.



« Les vieux oublient, s'étouffent, font répéter, voient trouble, tombent, n'en veulent plus, en veulent encore, ne dorment plus la nuit, dorment trop le jour, font des miettes, oublient de prendre leurs médicaments, nous engueulent tant qu'on serait tenté de les engueuler à notre tour, pètent sans le savoir, répondent quand on n'a rien demandé, demandent sans attendre de réponse, échappent puis répandent, ont mal, rient de moins en moins, gênent le passage, s'emmerdent, souhaitent mourir et n'y parviennent pas » 
Livre court, léger, original.
Le narrateur adopte un vieux monsieur de 99 ans.
En 78 pages il nous raconte un an de leur vie commune.
L’ancien fonctionnaire désormais à la retraite est disponible pour Léo, un vieillard dont la raison décolle parfois. Cette expérience éclaire ses jours mais aussi sa vie antérieure sans grandiloquence mais avec de la franchise  et un sens du concret qui me semblent bien québécois.
Pas de leçon, ni de sentimentalité mais de la délicatesse, au cours d’un quotidien où la réalité s’examine en face, où la poésie dépose dans une grande malle des petits mots :
« Qu’est ce qui me prend d’aimer les vieux ? »

vendredi 19 octobre 2012

Taxation sur les œuvres d’art.



L'amendement concernant l'élargissement de l'impôt de solidarité sur la fortune aux œuvres d'art d'une valeur supérieure à 50 000 €uros.a été démonté avant même d’avoir été discuté. 
Libé mon journal,  la radio, le maire de Grenoble, et tant de conservateurs-on dit comme ça- de musées s’y sont opposés, et le premier ministre  lui-même s’est montré ferme sur ce coup, pour ne rien changer.
Cette unanimité m’effraie quand sont convoqués les jeunes artistes dans le même show room que les galeristes, le patrimoine confondu avec la création : l’art ne valant que par ses marchands.
Koons était trader.
Depuis les pigeons, tout bruissement d’aile fait rentrer sous terre les pusillanimes gouvernants qui gouvernent si peu : la pensée unique de la corporation journalistique qui se tient  par ailleurs  devant sa niche intouchable donne le cap : taxez la bière, il n’y en aura guère dans les vernissages !
Alors que s’approche l’hiver, quelque artiste épatera la galerie sur la situation de quelques pauvres, des actions de charité pour que les gueux dégagent de sous nos yeux se dérouleront dans les galeries marchandes.
Les officines chargées de lutter contre la solidarité  pourront toujours afficher :
« L’acquisition et la détention d’objets d’art, de collection ou d’antiquité peut constituer une excellente façon d’optimiser sa fiscalité patrimoniale. »
Mon optimisme à voir changer l’ordre des choses en prend un coup.
J’ai beau savoir que les branchages exposés dans un giga galerie qui vient de s’ouvrir en banlieue parisienne n’auraient pu servir sous aucune marmite sahélienne, les sommes indécentes qui se baladent dans ces cercles donnent le tournis.
Peut être que cet impôt aurait été contre productif, mais mes footeux bien aimés, mes toiles bienfaisantes ne peuvent-ils contribuer à l’entraide ?
Je m’en vais de ce pas feuilleter un album de photos anciennes,  est ce que j’aurai le cœur de reprendre la liste des promesses d’une fiscalité plus équitable,  je vais ramasser des noix…
Je n’ouvrirai pas une soupe Campbell, je vais éplucher une poireau-pomme de terre.
.........
Dans Politis:
 

jeudi 18 octobre 2012

La collection Merzbacher à Martigny.



Gianadda a de bons amis suisses, et peut nous offrir en sa fondation  une belle exposition d’été (jusqu’au 25 novembre). Les  Merzbacher prêtaient  déjà à des musées des œuvres qu’ils avaient acquises mais leur collection dans son ensemble était peu connue : ces toiles dont certains auteurs étaient parmi les « dégénérés » signalés par les nazis sont présentée à Martigny.
Les grenoblois qui ont découvert le groupe « Die Brücke » l’an dernier pourront réviser avec profit Kirchner, Nolde, Schmidt Rottluff,
l’autre groupe expressionniste «  le cavalier bleu » avec  des Kandinsky que j’ai beaucoup aimé,
et aussi de ceux qui leur furent proches : Ensor,  un Van Dongen lumineux ...
Placée sous le signe de la couleur, les œuvres paraissent éternellement jeunes et encore plus quand on jette un œil au musée de vieilles voitures qui est aussi  présenté dans la fondation.
Toutes ces innovations picturales sont contemporaines des tacots  exposés dont les klaxons à poire finissent par s’essouffler, depuis le temps.
Les vibrations de Sisley, des inédits de Van Gogh,  le tranchant de Lautrec, les évidences de De Wlaminck, la finesse de Ernst,  les rythmes de Delaunay, la familiarité de Renoir, le tragique de Picasso,  les surprises de Malevitch…
Calder et Tinguely débitent le ciel en plaques et mettent les rouages du temps en joie…
Il va me falloir un bon passeur pour  apprendre à aimer Miro, même si  l’intitulé : « oiseau boum boum  faisant sa prière à la tête pelure d’oignon » avait tout pour me charmer.

mercredi 17 octobre 2012

Les enfants de Belle Ville. Asghar Farhadi.



Nous sommes en Iran. 
Ala, un jeune homme, si jeune,  sortant de prison va tout entreprendre pour que son ami Akbar, ancien compagnon de détention  ne soit pas condamné à la peine de mort, maintenant que celui-ci vient d’avoir 18 ans. 
Il en appelle au pardon du père de la jeune fille qui a été tuée par amour.
Firoozeh, la sœur du condamné,  mal mariée va aider Ala dans son entreprise.
Sous les voiles palpitent les passions.
Si la religion console au moment de la mort, elle la convoque bien souvent pour briser les individus, leur vie.
Le réalisateur est l’auteur d’ « Une séparation », qui connut justement le succès.

mardi 16 octobre 2012

Girls don’t cry. Nine Antico.



Si le dessin est retro, j’imagine bien certaines jeunes filles d’aujourd’hui avoir ce type de relations bavardes. Les dialogues sont drôles :
-  Quoi ?!!Pour 1000 €uros, tu ne sauterais pas dans la Seine ?
-  Non.
-  1000…
-  Mais moi pour 100 €uros je le ferais !
- Tu te baignerais dans cette eau verdâtre, pleine de rats crevés, pour l’équivalent d’une paire de lunettes de soleil !
-  Et pour 100 €uros ce sera pas des Gucci !
-  Ouais, bon 500 €uros alors.
Futile, vachard, bébête et lucide. La mode, les garçons « habillés pour l’hiver » et dont elles enlèveraient bien le tee shirt même s’il n’est pas fashion.
Etre conforme ou originale, le grand amour ou la légèreté.
Sous le vernis frivole, la construction d’une personnalité au moment où l’adolescence vire à l’adulescence.

lundi 15 octobre 2012

Holly motors. Leos Carax.



Il devient de plus en plus rare que les cinéastes jouent avec le cinéma, alors le dernier  film de Carax (« Saints moteurs ») peut dérouter.
J’aurai aimé que ce film étrange soit muet parfois : la scène du père qui récupère sa fille à la sortie d’une soirée est tellement artificielle; pourtant j’ai accepté la fantaisie dans les autres séquences.
Les images sont belles, les décors originaux et participent à un rêve qui dure deux heures. Denis Lavant se transfigure depuis une limousine interminable pour nous faire réviser des genres cinématographiques divers en des lieux souterrains, et principalement la nuit.
Il fatigue sous ses perruques changeantes en créant onze personnages : de la mendiante jusqu’au banquier.
Il jouera au tueur qui tuera son double qui le lui rendra bien, il s’en relèvera.
L’humour ne manque pas dans ce questionnement sombre sur notre époque : des inscriptions sur des tombes invitent les passants à consulter le site internet des défunts.
Les jeux ont beau se dérouler sur les plateaux  de tournage les plus contemporains avec des personnages bardés d’électrodes en vue de motion capture, le ton est à la mélancolie même chez l’inventif réalisateur qui  vient de reprendre du service.
« On croit qu’il est midi, mais le jour s’achève. 
 Rien ne veut plus rien dire, fini le rêve.
 On se voit se lever, recommencer, sentir monter la sève. 
 Mais ça ne se peut pas,
 Mais ça ne se peut pas, 
 Non ça ne se peut… » Manset .