lundi 20 octobre 2008

« Imaginez Royal à la tête de l’état en ce moment ? »


Je réponds à la suggestion sargrossiste de l’heure en réservant mon imagination pour d’autres terrains : la réalité suffit déjà à mon accablement. Bien sûr les bataillons médiatiques se seraient déchaînés, par exemple si la non extradition de Marina Pétrella avait été décidée par la gauche. Cette fois, la droite se tait ... la gauche aussi. Fécondité des paradoxes : certaines décisions peuvent être prises surtout si elles sont en contradiction avec les traditions de son camp. Il a fallu que se soit sous la gauche que le cœur d’acier de la Lorraine cesse de battre, et il fallait une Simone Veil pour faire passer la pilule de l’avortement à la droite. Comme Jospin avait pu privatiser à tour de bras, est ce que seul l’ami des banquiers peut réformer le système financier ? Il y eut des votes dits révolutionnaires où les consignes pour les initiés visaient à se reporter sur l’adversaire pour mieux faire avancer ses idées. La promotion d’un Besancenot fait plus l’affaire de la droite, comme celle de Le Pen fit celles de la gauche et pas seulement en termes électoraux mais aussi en fournissant un ciment idéologique qui aime se faire peur avec des idées simples.
Pour les élections internes au P.S., j’ai essayé de m’appliquer à la lecture des motions mais celles-ci me sont tombées des mains dans ce contexte où tout est chamboulé. Les intentions me semblent bien dérisoires et hors du temps même si un congrès ne peut se soumettre au marché du jour, il est justement le moment pour faire le point comme on dit en photographie. Alors il reste les impressions générales, les réassurances instinctives. Hamon dans sa tonalité anticapitaliste est le plus en phase avec l’épiderme actuel, mais comme j’ai pu le lire il est entouré de « pousse-au-crime notoires ». Ségolène a construit son originalité en grande partie contre le parti, il semble difficile qu’elle le dirige aujourd’hui bien qu’elle soit entourée de personnalités qui renouvelleraient avec bonheur une façade immuable que représente Aubry et même Delanoë. A partir de mon expérience de terrain, le renouvellement des pratiques me semble indispensable, si nous voulons porter un espoir pour ceux qui persistent à gauche. Je pencherais pour une motion Royal, sans Ségolène qui réussit à capter les applaudissements de beaucoup de ceux qui se sont éloignés des partis traditionnels, mais sa candidature est trop clivante et ses improvisations parfois séduisantes nous mettent, ses supporters, trop souvent dans l’appréhension. Un score trop faible de la présidente qui réussit en région conforterait trop les jospiniens qui n’ont pas besoin de cela pour être trop sûrs d’être les meilleurs. L’ancien premier ministre avait fait du bon boulot à son poste, il en a fourni un détestable depuis son départ. Mon entraînement petit bras au billard à trois bandes quand il se dévoile essaye de préserver une authenticité qui fonde les camaraderies véritables, tout en s’éloignant d’un premier degré bien stérile.

dimanche 19 octobre 2008

Chop shop Ramin Bharami


La Jamaïque qui se lève tôt et qui se couche tard. La caméra plantée au cœur d’une rue du Queen’s à New York où se désossent, se rafistolent des voitures avec une histoire bien rythmée d’un frère et d’une sœur à l’énergie revigorante. Où sommes nous ? Dans le tiers monde ? Non, au fond un stade gigantesque où brille la devise : « vivez vos rêves » : mais c’est réservé aux spectateurs des matchs de base ball.

samedi 18 octobre 2008

La nage de l’enclume


Papagalli en Auguste et Arbona en clown blanc, bien sûr, quoi que… Présentée dans son jus, à la MC2 avec clins d’œil aux vieux abonnés, la 49 ième pièce de l’amuseur dauphinois joue avec finesse de cette connivence dans sa rencontre avec Gilles Arbona acteur représentatif d’un théâtre exigeant. Dans cette « tragédie burlesque », le duo fonctionne à merveille, en reprenant les rites du spectacle clownesque, sans la jouer trop mélo au démaquillage, en évoquant l’ambition pathétique des théâtreux de changer le monde, sans raillerie. Nous rions : « tu tarabiscotes trop. On comprend que des miettes ». Là tout est clair, rigolo, une petite touche de tendresse, une évocation de Godot, Fellini, le temps qui passe , les rêves, les rivalités, les identités, le théâtre renouvelé et familier, les mots. Tout juste.

vendredi 17 octobre 2008

Premières neiges


Film de Begie Aïda . Femmes fortes. Dans un hameau au cœur de l’Europe verte, les confitures familiales pourraient constituer la sauvegarde d’une communauté de femmes bosniaques qui se tiennent entre elles pour rester debout malgré leurs deuils. Six femmes et un vieil homme, un enfant. Chronique de cette survie si fragile. Les spectateurs sont dans la place, mais pouvons-nous tout comprendre des fantômes qui se tiennent pas loin de ces vies dévastées qui s’arrangent ? “La neige ne tombe pas pour couvrir la colline, mais pour que chaque animal laisse une trace de son passage.”

La Marsifflaise.


Je me suis débrouillé pour ne pas assister au début du match Tunisie - France redoutant la présentation des équipes qui sonne souvent faux. Mais le bruit des sifflets de ce soir là est allé bien au delà des gradins. La Marseillaise m’émeut souvent quand elle est jouée au violon dans les champs de blé de Wajda qui la ré ancre dans son origine de chant pour la liberté des peuples ; je l’étudiais dans mes classes avec le Chant des partisans, Bella ciao, l’Internationale. Et je ne suis pas d’accord avec ceux qui voudraient lui substituer une symphonie new âge. Si le match avait eu lieu en Tunisie, il est probable que les sifflets aient été plus rares : ce sont bien des français qui ont sifflé. Les mêmes qui pourraient reprendre une version détournée qui connaît son succès : « Aux armes ! Aux armes ! Nous sommes les Marseillais et nous allons gagner… » Il en va d’une identité complexe qui apprécie Ribéry un soir et le « chambre » une autre fois. Ce sont des jeux pour impressionner l’adversaire parfois lourdingues mais significatifs d’une époque railleuse. Je suis allé cette saison pour la première fois au Parc des Princes, plus connu désormais pour sa sinistre tribune Boulogne que pour le souvenir des coups de pattes Platiniens. Et pendant une bonne partie du match ce fut un concert de sifflets dès que Bordeaux, en particulier Goufrand, prenait la balle, plutôt que d’encourager leur équipe. Gourcuff éclairait pourtant la partie de toute sa classe, et d’autres amateurs pouvaient regretter que les réactions se portent plus sur le dénigrement de l’adversaire que sur une adhésion positive. Valable en tous domaines, ne l’observe-t-on pas avec Ségolène ? Les commentaires ont tendance à sur interpréter ce qui n’est qu’un amusement qui a le mérite d’exciter les Laporte et Bachelot : retour du « banlieusard » au milieu du concert de louanges de la Sarkosie. J’ai aimé le but de Titi, sa rage, mais je ne serai pas gêné si les îles Féroé inquiétaient nos millionnaires, et ce ne sera pas moi forcément le plus traite à la patrie.
Dans Libé : « La marseillaise, ça se chante ou ça se siffle ? »:
Des internautes
« Ça se chante bien sûr et si les supporters français la chantaient plus fort, ça ferait peut être taire les sifflets ! »
« Allons au fond de la partie, le joueur de foire est arrivé »

Un enfant prodige


Quatre-vingts pages fulgurantes d’une auteure que je me promets de mieux connaître : Hélène Némirovsky. Une langue dont la poésie naît de la clarté dans le récit d’un destin tragique qui peut toucher chaque lecteur : des promesses de l’enfance, de sa grâce, de son génie, aux maladresses de l’adolescence et au silence. Superbe. Un enfant juif, d’un milieu misérable, se fait remarquer dans une taverne par un riche qui vient s’y encanailler ; il offre le petit chanteur à son amoureuse fantasque. Lavé, nourri, blanchi, chez la belle, il aura accès aux livres et perdra son innocence, sa fraîcheur, son inspiration. De retour chez son père, qui avait monnayé son départ, il se pendra.

mercredi 15 octobre 2008

Premier art - « Faire classe » #6


Nous étions sceptiques, nous les instit de la primaire, quand les dames de service en maternelle arrangeaient les réalisations enfantines, recadrées harmonieusement ; attention à ne pas tromper trop!
C’est gratifiant de mettre sous cadre quelques traits : charmant premier art. Mais ne pas faire passer quelques taches pour l’œuvre de Pollock.
L’art s’échappe, se cache, il est bien chez lui dans le territoire de l’enfance avant que celui-ci ne fasse l’impasse sur cette forme d’expression en adoptant les icônes des ordinateurs. Qui dans la société dessine encore pour maman ? Qui soigne la page blanche en face de la chanson ou d’un poème ?
Les grands ont oublié ces fariboles, ils les retrouveront au troisième temps de la valse au club aquarelle. Mes dessins partaient tous les jours en poussière sous le tap-tap de la brosse à tableau dans la cour. J’ai beaucoup appliqué : « un croquis vaut mieux qu’un long discours » et fais le malin avec des esquisses vite tracées pour accompagner une difficulté orthographique, un obstacle dans un problème. J’ai également sollicité souvent les élèves dont j’affichais en ribambelles les créations pour illustrer des sigles imaginaires, par exemple, ou jouer avec les expressions au sens figuré.
Le pinceau redresse les fous, les normaux le laissent dessécher.
Le lieu commun regrettant la créativité de l’âge maternel qui disparaîtrait à l’étape de l’objectivité a moins cours aujourd’hui. Il ne faut pas renoncer à donner des indications concernant la perspective, donner du relief avec les ombres.
Ci dessous quelques étapes dans un calendrier où les variations saisonnières s’invitent et s’articulent autour des préoccupations d’autres domaines d’apprentissage :
- Calligrammes et calligraphie (pour donner des idées pour de belles premières pages de cahiers) lettres personnifiées.
- Dessins en réserve : à la bougie recouverte d’encre, au drawing-gum, craies foncées recouvrant craies claires, à gratter.
- Portraits de monstres avec cadres adéquats.
- Portrait réciproque de profil avec son voisin.
- Planètes imaginaires à monter en mobiles.
- Vitraux en papier cristal avec armature en Canson noir évidé : Noël et cartes de Jour de l’An.
- Maquettes qui réinvestissent les solides géométriques, une occasion de réalisation concertée en équipe, petites maisons et quartiers.
- Les boîtes en carton d’un magasin de chaussures constituaient une manne pour ranger trésors miniatures, petites cochonneries à réinvestir dans des créations d’univers pour poupées à modeler. Ces territoires intimes s’empilent avec les autres pour réaliser une belle tour.
- Poèmes inventés à écrire en très grand pour s’afficher dans la rue le jour où les portes de l’école s’ouvrent. Bannières.
- Bandes dessinées envisagées comme une autre manière de raconter : une planche chacun, un album à tous, édition spéciale du journal de classe.
- A partir de l’œuvre de Keith Haring : le mouvement et le rythme, grande fresque collective avec des papiers affiche.
- Arbres, maisons, animaux, personnages permettent des assemblages spectaculaires. Une œuvre individuelle, posée avec les autres, va grandir.
- Effet facile garanti avec les découpages et assemblages à partir de magazines à déchirer en gros confettis pour fournir des tableaux impressionnistes inédits.
- Idées prises dans les inventifs albums pour enfants : jouer avec les habillages en décalant les pages composées d’un cow-boy pour le haut et d’un cosmonaute pour le bas.
- En préalable à des films d’animation ou plus ponctuellement : dessins avec mouvement pendulaire Une feuille pliée en deux : sur une partie l’araignée est en haut de la page, sur l’autre elle est descendue, en enroulant le premier dessin autour d’un crayon et en frottant l’araignée monte et descend ; persistance rétinienne.
- Affiches pour annoncer la prochaine représentation théâtrale.
Multiplier les supports : papiers de verre, galets, sculptures de véhicules avec matériaux de récupération comme là bas en Afrique. Changer de lieux : chacun porte sa tablette en bois dans le parc comme les peintres de Barbizon, les chauds après-midi de juin.
Les suggestions ne manquent pas sur les sites Internet, reste la disponibilité pour exécuter qui se préserve en refusant de prolonger le temps de math au détriment de celui d’éducation artistique : tout le monde y gagne.