jeudi 20 octobre 2011

La peinture « Pompier »

A travers l’histoire de l’Ecole des Beaux Arts de Paris et la tradition des prix de Rome, Gilbert Croué revient en deuxième semaine, présenter aux amis du musée, des peintres qui connurent la gloire au XIX° siècle et l’oubli au XX°.
Il ne fait qu’évoquer Gérôme dont il présenta le travail récemment ; le chef de file des orientalistes fut un membre émérite des « académistes ».
Académiciens pour la plupart, dont les casques brillent comme ceux des soldats du feu, figés dans les références antiques d’un Pompéi sous les cendres, voire pompeux parfois : les « pompiers ». La pompe et les ors pour une peinture finie.
Le dessin est la base de tous les enseignements à l’Ecole des Beaux arts de Paris avec l’anatomie, la perspective, l’histoire. C’est là qu’étaient choisis, jusqu’en 1968, les lauréats du prix de Rome qui pouvaient bénéficier d’un séjour de trois ans dans la ville mère des arts.
Chaque candidat avait une centaine de jours pour réaliser dans sa loge « La mort de Thimophane » ou « Thémistocle au Pays d'Adméte » : bien que tant de grecs et de cadavres commençaient à sérieusement lasser au sein même de l’école.
Il fallut attendre 1925 pour que la première femme obtienne le prix convoité qui ouvre les portes des salons, et les commandes de l’état.
Les ateliers sont gérés par « les massiers » ainsi que la rémunération des professeurs et des modèles. Ils organisaient aussi Les Bals des Quat'zarts. Mythique moment de réjouissance dont les thèmes : « Enlèvement des Sabines », « Orgies romaines, « Entrée des barbares dans Rome » respectent la tradition antique et permettent de développer la créativité des étudiants rejoints par les carabins avec lesquels ils partageaient les cours d’anatomie qui invitaient à quelques blagues macabres.
Le style « pompier » projette les gestes emphatiques des héros anciens dans les périodes révolutionnaires et impériales.
Jean Louis Ernest Meissonnier : «Le siège de Paris » et ses sujets militaires, ses peintures animalières remarquables est cité par Dali comme un peintre éminent, est-ce de la dérision ?  
Charles François Jalabert: « Les nymphes écoutant le chant d’Orphée »sont mignonnes.  
Evariste Luminais : « La fuite du roi Gradlon », se consacre à des sujets mérovingiens
et Laurens Jean Paul : « L'Excommunication de Robert le Pieux », retourne au moyen âge.  
Alexandre Cabanel cite Le Tintoret, Michel Ange, Raphaël, il a formé douze prix de Rome, et a peint, entre autres portraits à succès, une magnifique« Albaydé » dont Hugo disait :  
« Car elle avait quinze ans, un sourire ingénu, 
Et m'aimait sans mélange, 
Et quand elle croisait ses bras sur son sein nu, 
On croyait voir un ange ! »
Sur les 12 000 tableaux présentés aux salons, 5 à 7000 étaient retenus dont un tiers de nus féminins aux lueurs plâtreuses, ce qui n’est pas le cas de la « naissance de Vénus » de William Bouguereau, un maître du genre érotico kitch dont les sujets mythologiques sont un bon prétexte pour dévêtir les modèles.  
« Charlotte Corday » pose en héroïne dans le tableau de Paul Baudry.  
Léon Bonnat, le bayonnais a peint les hommes célèbres du XIX° et son « Job » ni trop vrai, ni trop faux est resté dans le patrimoine de nos rétines ;  
Carolus-Duran (Charles Durand), portraitiste mondain, fit cependant scandale avec une « femme au gant » qu’elle venait de laisser choir.
La frontière est ténue entre chef d’œuvre mièvre et croûte séduisante.
« La leçon de catéchisme » et les scènes campagnardes de Jules Alexis Muenin peuvent se rapprocher de Courbet, alors que « mère et fille au jardin » d’Édouard Debat - Ponsan sont baignées de lumières impressionnistes. Lui qui signa « une Vérité sortant du puits » empêchée par un spadassin et un ecclésiastique, évoquant l’affaire Dreyfus, fut acquis par la famille Debré (« L’entonnoir ») pour figurer en bonne place dans la mairie d’Amboise.

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