jeudi 24 septembre 2009

André François

Après Beaubourg, des œuvres du peintre sont exposées à la chapelle du Méjan à Arles
L’illustrateur, sculpteur, graphiste est identifiable par la simplicité, l’évidence de son trait. La disparition d'une grande partie de ses oeuvres dans un incendie de son atelier n'avait pas entamé la belle énergie qui se dégage des ses travaux.
Dans nombre d’expositions, il peut y avoir pléthore de compositions autour d’un morceau de branche, d’un tesson; pourtant même dans cet exercice banal, on peut facilement reconnaître sa patte.
Si Ungerer, Claveloux lui rendent hommage, c’est bien la même lignée qui connut Savignac. La rue souriait avec ses publicités et les crocodiles dans les livres pour enfants avaient connu Prévert.

mercredi 23 septembre 2009

J3 : Ho et le pont.

Aujourd’hui nous nous consacrons à Ho Chi Minh. Le taxi nous laisse à proximité du mausolée et nous marchons un long moment en remontant la file d’attente impressionnante pour entrer et prendre notre tour. Un gardien surveille les resquilleurs à tous les points stratégiques, heureusement, car on sent bien qu’autrement… La foule avance régulièrement composée de jeunes, de vieux, de classes sociales des plus mélangées. Nous devons confier sac à dos et appareil photos à la consigne où il faut jouer des coudes pour défendre sa place. La déambulation circonscrite continue, en zig et en zag jusqu’au cube sombre, but de notre « longue marche », toujours encadrés par des soldats habillés de blanc. Ils surveillent la tenue des visiteurs, font enlever chapeau et lunettes de soleil. Après deux étages nous pénétrons dans la salle sombre où est présenté le corps momifié d’Ho Chi Minh, tel un mannequin du musée Grévin. Au centre de la pièce, il est encadré par quatre soldats dans une lumière très douce dirigée sur son catafalque. Le héros international aurait souhaité l’incinération plutôt que cette exhibition idolâtre imposée par le parti. A la sortie la foule nous guide vers la petite maison en bois de l’Oncle Ho, qu’il préféra au palais qu’on lui construisit. On aimerait bien l’investir dans ce parc verdoyant avec sa salle à manger extérieure, abritée sous les pilotis avec ses deux pièces simples : bureau et chambre à l’étage. Membre fondateur du PC français, marin, instituteur, retoucheur de photos, cet homme qui a façonné l’histoire, a vécu modestement jusqu’en 1969, ne trahissant pas son idéal. Toujours portés par la foule nous nous rapprochons du temple du pilier unique détruit par les français avant leur départ et depuis reconstruit au dessus de l’eau. Il fait chaud, la sueur ruisselle. Nous nous dirigeons à pieds vers le temple de la littérature. En passant nous prenons le frais dans une boutique d’art située dans une vieille maison coloniale puis entamons la visite du temple, proche de ceux que nous avions visités en Chine. Il s’agit d’une université ancienne avec des stèles dressées sur des tortues, des cours, un temple dédié à Confucius, des bonzaïs en pot, des salles avec d’énormes piliers et des autels. Des étudiants frictionnent le nez des tortues : si cela suffisait à intégrer des connaissances ! C’est là que nous achetons une marionnette buffle à la couleur passée, marchandée à 15€ au lieu de 25.
Fatigue et faim nous poussent vers une adresse du Routard : restaurant végétarien Nang Tam 79 A Tran Hung Dao qui ne nous revient vraiment pas cher. Bon plan, la patronne parle bien français. Nous roulons en taxi vers le pont Long Biên, anciennement Paul Doumer, construit dans le style d’Eiffel, et le traversons à pied. La voie de chemin de fer en son centre, et deux voies pour les cyclomoteurs et en principe pour les piétons, occupent cet édifice rouillé qui surplombe le Fleuve Rouge, ainsi que quelques vieilles bâtisses en murs tressés et des jardins ouvriers. En retournant vers la gare, point de départ du pont, nous tombons sous le charme d’un couple de jeunes mariés en blanc assis sur les rails sous les ordres d’un couple de photographes accroupis sous un miroir réflecteur, en plein travail artistique ! Déjà nous avions croisé un couple de mariés et leur photographe au temple de la littérature. Il est de coutume de réaliser les photos avant le mariage où elles seront exposées dans toute leur théâtralité. Nous sirotons notre eau fraîche dans une salle d’attente de la gare. Notre nouvelle recherche sera le grand marché Dong Xuan, marché couvert construit par les français. C’est une vraie fourmilière comme un « grand magasin » aux tissus essentiellement sur plusieurs étages. Il semblerait que la fermeture approche car les commerçants comptent leurs sous et remballent les marchandises. Notre itinéraire nous conduit encore dans la rue aux lanternes. Nous nous arrêtons acheter des tampons en bois sympas (30 000 Dongs) avant de terminer à l’hôtel devant bière et jus de fruits. Nous attendons tranquillement l’heure du rendez-vous avec Manh, porteur de nouvelles météorologiques (typhon au Nord Est) et annonçant un retard de près d’une heure du train.
Un minibus pour 15 nous conduit à la gare, héritage français sans grand charme, et assez vite nous pouvons gagner notre wagon aux couchettes molles, heureux de la tranquillité climatisée que nous offre notre cabine privée. La lumière de la couchette est douce.

mardi 22 septembre 2009

Université populaire et participative de la connaissance près de chez nous

Les temps sont difficiles pour la gazelle du Poitou, et je suis loin d’être toujours d’accord avec notre ancienne candidate à la présidentielle, mais quand elle cite Rancière« Pour aller de l'avant, il faut parfois en revenir aux sources ». Il est temps de rendre au mot démocratie « sa puissance de scandale »et de se souvenir qu'elle signifie d'abord le droit égal de « ceux qui n'ont pas de titre à gouverner »à s'occuper des affaires communes. Il est temps de réaffirmer la compétence légitime des citoyens ordinaires, ce pouvoir des « n'importe qui » toujours dénié par les élites autoproclamées », j’ai foncé au sein de l’association « Désirs d’avenir » d’autant plus que le sujet de cette journée était « crise de l’action collective, désenchantement démocratique. Retrouver la capacité à agir pour reconquérir l’avenir ». Vaste programme qui fut abordé ce samedi en huit dans notre ville.
C’est émouvant pour les têtes chenues de voir évoquer les GAM (Groupe d’Action Municipal) par une jeunette énergique : Laure Masson, même si un représentant venant de Savoie vient modérer l’hommage à ce qui constitue une référence en matière de démocratie participative. Chez Louis Besson qui est un des historiques de la mouvance, à Chambéry, la démocratie dans les quartiers est plutôt informative, en retrait par rapport à la démarche dans la ville de Brème en Allemagne où les habitants ont droit de véto sur des investissements de la commune, où les projets viennent des usagers. Bien des points abordés conviaient pour beaucoup les problématiques autour de la Villeneuve de Grenoble : les espoirs, les nouvelles questions qui seront d’ailleurs évoquées au cours de cette journée.
Une vidéo nous avait informés d’une façon précise sur cette ambition démocratique ancrée dans le quotidien des plus modestes. Le témoignage du regain de vitalité d’une paroisse où le charisme d’un prêtre rencontre une plus grande implication des paroissiens est vraiment dans le sujet, de même que les précisions apportées sur la démarche exigeante d’une association d’Eybens qui se substitue à une épicerie en faillite pour promouvoir une consommation plus équitable pour les producteurs et plus responsable pour les consommateurs. Les développements théoriques d’un ami du Monde Diplomatique se croisent avec les impatiences d’une travailleuse sociale qui partage la souffrance des plus démunis comme la verve d’un conseiller municipal d’un village du Nord Isère par ailleurs chercheur en biologie moléculaire qui développe son concept d’ « anarchie féconde » en s’appuyant sur son vécu professionnel et ses propositions d’élu. Un organisme vivant n’est jamais fini, il est constamment en train de se modifier pour agir. Le consensus est relatif, il s’éclaire par le débat où les « professionnels » ne sont pas coupés des « amateurs » concernés. La confiance est de mise, chacun se respecte.
Des rapprochements entre la période qui vit l’émergence des GAM au moment où la SFIO se délitait sur fond de guerre d’Algérie et l’actualité chahutée est inévitable pour les membres de cette assemblée encore membres du PS. Cependant il ne me semble pas que le NPA soit le nouveau PSU qui eut le mérite de poser les bases d’un débat sur une nouvelle façon d’exercer la politique. En 2009, les tactiques prennent le pas sur l’éthique. Le débat aujourd’hui ne porte plus sur la façon d’accéder au pouvoir comme le pose encore Besancenot mais sur la façon d’exercer ce pouvoir.
Après l’examen, le matin de quelques outils politiques au service de l’action citoyenne, et ayant bien à l’idée que nous sommes dans un contexte instable où le temps s’accélère, l’après midi était consacré à la citoyenneté dans l’économie, les SCOP, le livre de Cohen : « la prospérité du vice » fut conseillé, mais les débats vifs ne coïncidaient pas forcément avec la diversité des appréciations de syndicalistes parce que l’un cotisait à la CGT et l’autre à la CFDT. Il fut question des abus dans l’emploi des stagiaires aussi bien que du sens donné au travail ou de la relégitimation des services publics. Cet aller retour entre des considérations très concrètes et des perspectives qui nous sortent des tourments de l’heure me va bien et les raisins du pique-nique étaient excellents.

lundi 21 septembre 2009

Un prophète

Rarement les critiques et les spectateurs n’ont été autant d’accord pour apprécier une œuvre.
Malgré ma tendance à me méfier des unanimités, je me joins aux louanges pour ce film d’Audiard qui met l’esthétique au service de la politique, où une histoire bien racontée transcende le documentaire. 2 H 35 d’intensité. Et ce n’est pas parce que c’est devenu un lieu commun que cela n’est pas vrai : « la prison est l’école du crime ». Le jeune qui arrive pour six ans en centrale, ne sait pas lire, mais n’hésitera pas à tuer. La violence qui fait détourner le regard à plusieurs reprises, éclate dans la conversation, après un café. La candeur se mêle au mépris le plus féroce. La noirceur des destins qui se cognent à tous les murs dans le milieu carcéral, est aussi le fruit des violences de la société, son image exacerbée. Quand l’administration abandonne le pouvoir aux caïds dans ses tôles, est-ce seulement la pénitencière qui est en cause ?

vendredi 18 septembre 2009

Le voyage dans le passé

Quel régal de découvrir un livre aussi vif, sensible profond ! La nouvelle du grand Zweig, encore inédite 80 ans après, était en évidence à la librairie du Square et c’est un bonheur accru d’oublier encore plus vite les coups éditoriaux bling de nos années bling.
« “Te voilà !”, dit-il en venant à sa rencontre les bras ouverts, presque déployés.
“Te voilà”, répéta-t-il et sa voix grimpa dans les aigus, passant de la surprise au ravissement, tandis qu’il embrassait tendrement du regard la silhouette aimée.
“Je craignais tant que tu ne viennes pas !” »

C’est ainsi que commencent ces 100 pages avec cette clarté, cette force.
Un homme et une femme se sont voués un amour idéal et platonique, ils se retrouvent après dix ans de séparation. Sur un thème simple, évident, la subtilité de l’auteur nous rend cette histoire présente, bien que le contexte historique ait pesé sur ces destins. Il n’y a rien de daté dans ce récit nerveux, où la différence des classes sociales n’est pas qu’une tapisserie, où la tragédie vous empoigne doucement.
C’est la vie et quand c’est dit ainsi que c’est beau !
La littérature nous rend plus riche même si Zweig dit que la littérature n’est pas « pas la vie » mais un « moyen d’exaltation de la vie, un moyen d’en saisir le drame de façon plus claire et plus intelligible ». Tout à fait.
Elle lui avait lu ce poème de Verlaine, innocemment.
« Dans le vieux parc solitaire et glacé, Deux formes ont tout à l’heure passé.
Leurs yeux sont morts et leurs lèvres sont molles, Et l’on entend à peine leurs paroles.
Te souvient-il de notre extase ancienne ? Pourquoi voulez-vous donc qu’il m’en souvienne ?
Ton cœur bat-il toujours à mon seul nom ? Toujours vois-tu mon âme en rêve ? -Non.
Ah ! les beaux jours de bonheur indicible Où nous joignions nos bouches ! -C’est possible.
Qu’il était bleu, le ciel, et grand l’espoir ! L’espoir a fui, vaincu, vers le ciel noir.
Tels ils marchaient dans les avoines folles, Et la nuit seule entendit leurs paroles. »
Pour les lecteurs quotidien du blog: je reprends les publications lundi.

jeudi 17 septembre 2009

L’œil du photographe

A travers l’ouvrage de John Szarkowski essayer de « mettre au clair », et jouer avec quelques mots à propos de mes propres prises de vue photographiques.
La chose en elle-même : tout ce qui rentre fait ventre.
Le détail : tout est dans tout.
Le cadrage : le peintre commence par le centre, le photographe par le tour.
Le temps : la géo(le cadrage) est bien plus facile que l’histoire(le temps) qui court toujours !
Le point de vue : c’est moi que je fais la photo, mais elle se tirera de toutes façons.
« Si vos photos ne sont pas bonnes, c’est que vous n’êtes pas assez près » Robert Capa
« L’industrie, faisant irruption dans l’art, en devient la plus mortelle ennemie » Charles Baudelaire
« L’instant décisif » dont parle Cartier Bresson … « à ce moment précis, le flux des formes et des motifs changeants semble avoir atteint un équilibre, ordre et clarté parce que l’image est devenue l’espace d’un instant, une photo »John Szarkowski.

mercredi 16 septembre 2009

J2 : Musée d’ethnologie d’Hanoï

Nous traversons les 7 km, de la vieille ville jusqu’au musée d’ethnologie dans le même effarement qu’hier concernant la circulation, tandis que le compteur du taxi défile jusqu’à 100 000 dongs. Chaleur moite, environ 30°, mais le ciel bleu qui apparaît n’a pas la luminosité blanchâtre d’hier.
Entrée du musée d’ethnologie : 25 000 dongs par personne (1€). Nous commençons la visite par le musée intérieur où une plaque rappelle l’aide apportée par Jacques Chirac. Le musée est d’une grande richesse, les objets proviennent de différentes ethnies, nombreuses et surprenantes dans leur diversité, mais aussi dans leur fonction et représentations universelles.
Citons : les vélos chargés, très chargés de nasses en bambous, l’explication filmée de la fabrication des chapeaux pointus, le mât coupé en deux tant il est haut, les « mobiles » en papier des chamans, les paniers, les sacrifices de buffles filmés , les statues funéraires, les différents vêtements et les mises en situation avec mannequins et vidéos…des jouets d’enfants, des pièges à écureuils entre autres, fourreaux à couteaux…info en français. La poésie tient une place très importante ainsi que le papier. Le rapport à la mort ici semble loin de nos oublis, de nos dénis, de nos hypocrisies occidentales. Cette visite est importante pour mieux comprendre le pays qu’on commence à découvrir.
Une pause s’impose au café du musée, en plein air, avec la bière d’Hanoï (470cl), des nems, des rouleaux de printemps.A l’extérieur, nous visitons des maisons cédées par des familles et installées dans l’enceinte du musée. Se déchausser avant de franchir les seuils des maisons étonnantes des Banhars au toit vertigineux, longue maison de 200 m sur pilotis avec chambrette individuelles, une maison qui a aussi servi d’école et abrite pour l’instant un musée émouvant de vieilles marionnettes ainsi qu’une démonstratrice de broderies si fines que l’on ne voit plus que son tableau aux tons nuancés et dégradés, maisons en pisé…reproduction de tombes avec une enceinte de personnages sculptés naïvement et grossièrement (Jaraï) l’autre avec un toit offrant un abri au cercueil et sous la protection de têtes de buffles. Bois, bambous sous toutes ses formes, pisé, terre battue, paille.
Petit tour à la boutique de commerce équitable. La circulation s’est plutôt amplifiée. C’est un régal de regarder les gens sur les mobylettes, avec des casques semblables par leur forme à ceux des soldats mais agrémentés des signes distinctifs des grandes marques (Burberry, Calvin Klein..) de compter jusqu’à cinq personnes sur le même véhicule, d’admirer l’adresse des conducteurs pour éviter l’obstacle.
Les ramasseur de poubelles s’annoncent avec une clochette et embarquent les ordures avec une petite benne à bras.
Repas au Old Hanoï (Ma May 106) Chemin faisant, nous tombons sous le charme de cartes de vœux en papier découpé, croisons un marché nocturne et manquons presque le restaurant. Bon repas : noddles avec poulet légumes et champignons noirs. Nous prenons rendez-vous pour un cours de cuisine dispensé par le personnel du restau, puis nous rentrons nous coucher.