Je me souviens encore d‘un professeur en 6° qui aimait tant
Colette qu’il a imprimé chez moi une curiosité persistante envers les livres en
général. Ma petite fille en étant à cette époque de ses
apprentissages, je pensais lui faire aborder la fine écrivaine par ces
dialogues entre un chat et un chien. La néo collégienne après avoir lu tous les
Harry Potter, a été passionnée par « La guerre des clans » impressionnante
série consacrée à des chats sauvages, alors après « Cabot Caboche »
et « Toufdepoil » grands classiques de la littérature jeunesse, je
tente une occasion de dialogue entre générations.
« Je veux écrire
des livres tristes et chastes, où il n’y aura que des paysages, des fleurs, du
chagrin, de la fierté, et la candeur des animaux charmants qui s’effraient de
l’homme. »
Mais je ne sais si j’ai fait le bon choix, elle me dira ou
mieux l’écrira.
Pour ma part, alors que la lecture d’un ouvrage constitué
seulement de dialogues ne m’emballe guère, j’ai aimé découvrir les caractères
typés du chien obéissant et du chat distant à travers leurs boudeuses
conversations.
C’est qu’au théâtre trop de pièces auxquelles j’assiste ont
remplacé les échanges entre personnages à découvrir progressivement par des
monologues souvent déclamatoires désignant d’emblée les méchants.
Quand les deux compères choyés s’expriment, les tournures,
la suavité de l’écriture font passer l’exercice de style au-dessus du point de
vue des animaux par ailleurs finement observés.
Kiki la Doucette, le chat, parle de sa maîtresse :
« Son esprit
court comme un sang subtil le long des veines de toutes les feuilles, se
caresse au velours des géraniums, à la cerise vernie, et s'enroule à la
couleuvre poudrée de poussière, au creux du sentier jaune ».
La ressemblance m’a semblé trop évidente au pays de
l’autofiction, mais on peut savourer la
richesse des sensations, et vérifier si le vocabulaire a pu traverser le temps.
Toby-Chien :
« Tout le bien et
tout le mal me viennent d’Elle… Elle est le tourment aigu et le sûr refuge.
Lorsque, épouvanté, je me jette en Elle, le cœur fou, que ses bras sont doux,
et frais ses cheveux sur mon front ! Je suis son « enfant-noir », son «
Toby-Chien », son « tout petit h’amour »… Pour me rassurer Elle s’assoit par
terre, se fait petite comme moi, se couche tout à fait, pour m’enivrer de sa
figure au-dessous de la mienne, renversée dans sa chevelure qui sent bon le
foin et la bête ! Comment résister alors ? Ma passion déborde, je la fouis
d’une truffe énervée, je cherche, trouve, mordille le bout croquant et rose
d’une oreille- Son oreille !- Jusqu’à ce qu’Elle crie,
chatouillée : « Toby ! c’est terrible ! au secours, ce chien me mange ! »