46° édition autour de photographies dans la commune la plus
étendue de France, année de la mort de son fondateur Lucien Clergue, avec changements de commissaire et nouveaux
investisseurs : c’est « le chantier », dont les enjeux dépassent
le badaud qui vient prendre l’air du temps au pays des images.
Un photographe américain, parait-il considérable, à qui est
consacré une exposition sera-t-il satisfait si son nom ne s’est pas imprimé
dans notre mémoire ? Il a tellement aimé s’inspirer des amateurs, fuyant
le pittoresque, l’émotion, l’esthétique, gagnant par là la faveur des musées,
épatant les galeries.
A quoi bon répertorier les noms de tant d’auteurs qui
ont assez peu d’émotions, ou d’idées à
faire partager ?
Pourtant pour nos numériques mémoires c’est Thierry Bouët
qui m’a semblé le plus chaleureux inventif et drôle en présentant des vendeurs
du « Bon coin », mis en scène avec ce qu’ils proposent : une
paire de botte, un cercueil, un bateau…
Et si nous n’avons plus en tête, les noms des italiens qui ont
ramené des images du Congo nous n’oublierons pas leur mystère.
« Nous avions eu une
expérience à New York avec d'autres photographes il y a dix ans d'une
exposition sans légende, sans nom où l'individualité disparaissait pour que les
différentes voix n'en fassent qu'une. C'est ce que nous avons eu envie de
retrouver, Alex et moi, dans ce travail. »
Les façades d’églises de Markus Brunetti en imposent par
leurs dimensions, leur précision : un travail de titan rassemblant des
centaines de clichés, voire des milliers pour restituer une vérité de monuments
dont la perspective est abolie.
C’est autre chose que les enseignes et les architectures de
Las Vegas vues et revues même si une
série consacrée aux « canards » : bâtiments ou véhicules aux
formes des objets qu’ils ont à vendre, est gaie.
Le détour par l’abbaye de Montmajour, vaut le coup pour le
lieu en lui même, mais Marcello en couleurs sur le tournage de 8 ½ de Fellini
n’a rien de rare, ni Malkovitch reprenant la pose de Guévara, Einstein,
Marylin, Wharholl depuis leurs portraits
iconiques.
Plus originaux sont les autoportraits de Diop posant avec
des attributs de footballeurs en costumes XVIII°.
Nous n’avons pas vu les 35 expositions proposées mais
revient un portrait de groupe d’où se dégage une atmosphère particulière comme
dans une salle d’attente aux patients tendus.
Quelque carnet personnel semble
intense mais difficile à aborder dans la frénésie d’une journée, alors émerge
une fulgurance : une photographie très noire avec quelques taches blanches
minuscules : là une danseuse.
La confrontation d’images de propagande en Corée du Nord avec
la réalité m’a parue un peu convenue et la série de poses auprès d’un ours dans
l’entre deux guerres en Allemagne intéressante, alors que l’enquête sur les
lieux opaques du pouvoir, les paradis fiscaux, est accablante et apporte une
touche politique plus développée me semble-t-il du côté de Perpignan.
Portant les prises de vues concernant des groupes sur des
lieux de commémoration : Auschwitz, Tchernobyl, le Rwanda, le Cambodge…
nous interrogent en profondeur sur notre place dans l’histoire, l’actualité.
Nous n’aurions pas eu l’idée d’écrire sur un mur : « J'étais là » mais
nous fûmes dans certains de ces lieux.
Désormais une image réside dans nos têtes : Aylan, dont
le père retourné à Kobané enterrer sa famille disait :
« Il est
impossible de s’imaginer comment les gens vivent ici. »