jeudi 6 décembre 2018

Caravage. Fabrice Conan.

Pour les élèves d’aujourd’hui la répétition n’est plus de mise, mais à mon âge le rabâchage est un plaisir augmenté quand il s’agit d’assister à une conférence devant les amis du musée de Grenoble. Il est question de rivalités et d’amitiés à l’époque où Michelangelo Merisi venu du village de Caravagio exerçait à Rome, de 1592 à 1606 jusqu’à ce qu’il parte en exil à Naples puis à Malte et en Sicile, après avoir tué un adversaire au cours d’un duel. Le Musée Jacquemart-André expose en ce moment dix de ses toiles sur la soixantaine qui lui sont attribuées jusqu’au 28 janvier 2019, organisant un dialogue avec des peintres de son temps.
Le « Garçon avec un panier de fruits »  figure ci-dessus plutôt que le jeune « Bacchus malade » déjà publié. http://blog-de-guy.blogspot.com/2016/03/le-caravage-et-les-caravagesques.html . Il possède le même fond sombre et un cadrage à mi-corps caractéristique d’une manière acquise lors de son itinérance dans les ateliers lombards où la représentation d’après nature était également travaillée. Caravage appartient à la maison du cardinal Del monte pour laquelle il est appointé, et il est associé aux cercles romains intellectuels influents.
« Judith et Olopherne » est un tableau majeur parmi tant des têtes coupées, bibliques de préférence : la concentration est à son comble et les visages de la jeune criminelle et de la vieille servante, œil vif, bouche haineuse, contrastés. Il était présenté sous un rideau de soie chez son propriétaire qui avait demandé à ses héritiers de ne pas se séparer du tableau.
L’œuvre concernant le même thème, d’Orazio Gentileschi, est bien plus sage, en regard également de celle d’Artémisia Gentileschi, sa fille qui l’a désormais dépassé en notoriété.  http://blog-de-guy.blogspot.com/2016/11/du-manierisme-au-baroque.html
La version de Carlo Saraceni est dans des tonalités plus douces, une lumière plus diffuse.
Pour les douleurs de l’âme, la musique est un réconfort, le luth au ventre rond et au manche vigoureux, peut y pourvoir, tandis que le crincrin s’anoblit. « Le joueur de luth » chante une partition de madrigal tout à fait lisible à côté d’une nature morte où un rugueux concombre figure parmi les fruits.
 « La Douleur d'Aminte »  de Bartolomeo Cavarozzi fut attribuée un temps au Caravage, mais cette fois la musique ne peut rien face au désespoir du berger qui vient d’apprendre que sa bien-aimée  a été dévorée par des loups.
Le jeune « Saint Jean Baptiste au bélier »  inspiré des « Ignudi » (nus) de Michel Ange est bien vivant, voire impudique,
comme « L’amour victorieux » dont le modèle est identifié sous le nom de Cecco, serviteur, amant, élève, qui deviendra peintre.
« L’Amour sacré et l’Amour profane » de Baglione est dans le style du maître du clair obscur mais le satyre est représenté avec les traits du scandaleux débauché.
« Saint François en méditation sur le crucifix » aux couleurs absentes est tout en intériorité.
Cigoli avait gagné le concours organisé autour du thème « Ecce Omo », mais pas Le Caravage, quand Ponce Pilate présente Jésus à la foule : «  Voici l’homme »... pourtant, voir ci-dessus.
Alors que Pensionante del Saraceni, livre un original et vigoureux « Reniement de Saint Pierre »
« Le souper d’Emaüs » rejoint son histoire. « Pendant qu’il était à table avec eux, il prit le pain ; et, après avoir rendu grâces, il le rompit, et le leur donna. Alors leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent ; mais il disparut de devant eux. »
Il peint en plusieurs exemplaires une sensuelle « Madeleine en extase » pleine de ferveur au moment où il se réfugie chez les Colonna, ses protecteurs de toujours, lors de sa fuite de Rome.
Sa disparition à 38 ans, lors d’une rixe ou bien épuisé par la maladie, alors qu’il revient vers la ville dont il connaît aussi bien les clients des tavernes que les puissants, laisse place au mystère et aux romans.  Par contre, sa marque dans l’histoire de l’art ne souffre pas d’incertitude.
« Si tu ne guettes pas l'inattendu, tu ne découvriras pas la vérité. » Héraclite



1 commentaire:

  1. Ça fait plutôt plaisir de voir de jeunes hommes nus manifestement fiers, (en tout cas pas honteux...) de leurs attributs.
    Même si je suis plutôt réservée sur les attributs (et la sensualité) qui colle à Dionysos depuis tous temps.
    Un dieu qui pousse les femmes à courir les collines, en désertant leurs foyers ne fait pas de bien au nécessaire ordre public...

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