mercredi 31 décembre 2008
Conjugaison. Faire classe#15
Une des matières des plus rébarbative, et pourtant au fil des ans je trouvais que cela devenait plus aisé de l’enseigner.
Où le conditionnel s’avère plus confortable à apprendre que cet indicatif impérieux qui nous réserve tant de surprises.
Le schéma habituel des cours de français :
- Une phrase courte avec la notion du jour : « écoute ! »
- Remarques en évitant les litanies baragouinées : « il ou elle ou on », décalées de la vie courante.
Le subjonctif qui fait figure d’épouvantail s’emploie aisément : « il faut que je fasse mes devoirs ! »
- Systématisation : relevé des terminaisons des verbes sur le gros bristol marque-pages du livre de Français
- Vérifications à l’ardoise
- Exercices oraux à partir du manuel des élèves
- Exercices écrits rapides sur le livret mixte de français
- Exercice écrit sur le cahier de français : correction
- Repérage des défaillances : exercices supplémentaires : conjugaison + pour les nécessiteux.
Je compte bien qu’un de mes anciens devenu professeur ne colle pas un « s » à une consigne impérative avec un verbe du premier groupe : « écoute ! »
« J’hésitais encore entre les passés simples et le simple présent, et sûrement je préférais celui-ci quoique je sache déjà que mon trop grand appétit pour lui me vouait à l’autre, l’étique, le renfrogné, l’anorexique. » P. Michon
mardi 30 décembre 2008
Soir de foot.
J’étais avec les 15 000 spectateurs pour le retour d’une victoire au stade des Alpes. Je n’y avais plus mis les pieds depuis la montée en ligue 1; et une place pour le match contre le Mans était plus accessible que contre les Olympiques.
L’environnement électronique n’est plus mis en évidence comme auparavant.
Le public de la tribune présidentielle a délégué ses encouragements aux supporters de derrière les cages qui assument un spectacle à eux tout seuls. Cette animation tient de la chorale, de la chorégraphie, mais les autres spectateurs m’ont semblé bien frigorifiés.
Le matin avait été annoncé la mort de Roger Jonquet. Mais non, madame la présentatrice de France Inter : Robert Jonquet. C’est vrai c’était l’époque des Raymond, des Armand, des Bruno pas celle des Steve ni des Kévin, vous pouvez confondre.
Le Dauphiné Libéré n’a pas mis une note élevée à Feghouli, pourtant dès qu’il touche la balle, l’étincelle peut être là : quelque chose va se passer, même si cela n’aboutit pas forcément. La marque des grands, une intensité. Baning lui a été omniprésent en première période, autant en deuxième il a été approximatif, cuit.
C’est intéressant de revenir au stade, en vrai, pour mesurer combien la télévision nous formate. Devant l’écran, même si nous ne sommes pas d’accord avec le Larqué de service, notre vision est déformée, nos jugements induits. Faut-il en tirer des conclusions pour d’autres domaines ? Oui, notre vision de la politique tient à un extrait de petite phrase, alors que le champ est bien plus vaste, et qui décide de l’angle de vue ?
Débarrassés des gros plans, des ralentis, nous sommes dans la surprise : chaque but m’a semblé arriver par inadvertance, dans un temps suspendu.
20€ pour une pincée de réalité, quitter ses moufles, un samedi soir.
Je l’avais vu jouer, Jonquet, Grenoble avait gagné contre le grand Reims.
lundi 29 décembre 2008
Schreck 3
Quand le premier film est sorti, j’étais assez réticent à l’égard de l’enthousiasme critique qui avait accompagné l’apparition de l’ogre vert, craignant le conformisme anti Disney. Et puis j’ai été emballé à mon tour. Ce numéro 3 n’a pas épuisé la veine de la gentille insolence, de la délicieuse régression avec une qualité de création impressionnante. Le numérique ne tue pas l’emploi, à voir la flopée de collaborateurs qui défilent au générique. Cette fois le géant connaît les affres de la paternité : ce n’est pas triste, poétique parfois, rythmé toujours, avec une tchatche revigorante et quelques scènes telles que la mort du roi et un regard sur la comédie du pouvoir qui vaut bien des discours sentencieux.
dimanche 28 décembre 2008
« Ecoutez d’où ma peine vient »
La dernière livraison de Souchon entretient nos désirs contradictoires: celui d’aimer retrouver le familier qui « voulait des matins doux » et aussi le nouveau chanteur à Sidi Ferouch.
Certains titres trouvent leur correspondant dans des productions précédentes « elle danse », « 8m2 » avec « les cadors » quand ce n’est pas une reprise entière de « bonjour tristesse », mais pas de petite perle telle que « petits tas tombés » où la manière originale rencontre un fond essentiel. La patte perso pour une société à décrire, à rectifier. Pour tout dire, c’est un peu mou du genou, comme nous. La chanson où il doute de Guévara n’a pas ses paroles inscrites dans le livret accompagnant le C.D. Je me laisse bercer par « rêveur », les « saisons » « la compagnie » et emballer par « parachutes dorés », je découvre un Aragon : « la guitare », mais qui croit que c’est un grand cru ?
samedi 27 décembre 2008
Lucien. « Toujours la banane ».
Le dernier album de Margerin m’a filé un coup de vieux.
En général les héros de B.D. ne vieillissent pas. Tintin n’est pas devenu arthritique, Gaston n’a pas pris les idées noires de son auteur, pas plus qu’Obélix ne mesure son taux de cholestérol.
Présentement, Lucien, le rocker, n’a pas que des problèmes de prostate, mais son fils joue à la pléstécheune et sa fille MP3 aux oreilles se fait tatouer, sa femme surfe sur le web, lui tient boutique « Grat’ en vrac ».
Que des groupes musicaux reconstitués pour de vrai lui jettent leur premier vynil, car dans cet album, Lucien chausse ses lunettes de presbyte pour un concert avec ses potes « les quinquas vener » et même si le costard craque aux entournures, ils emballent.
Ce qui rend cet album émouvant, c’est sa vision gentille de la société, avec ses bistrots joviaux, ses copains solidaires, où le fils racketté au début se voit remboursé à la fin, il va abandonner la PS3 pour la guitare.
Alors même si la partie de flipper est aujourd’hui à 1€, nous avons gagné un sourire (la banane) le temps d’un tour en Dauphine sans ceinture de sécurité.
vendredi 26 décembre 2008
Vocabulaire. Faire classe # 14
Le vocabulaire, signe distinctif de classe, parcourt chaque matière, « transversal » en quelque sorte, comme n’oserait même plus le dire le moindre conseiller pédagogique.
C’est pour cela que jadis je n’organisais pas de séances spécifiques.
Et puis un ami, pilier de l’école moderne, qui tirait des pépites des apports enfantins, m’avait indiqué qu’il consacrait un temps à l’étude de la langue. Si lui aussi !
Alors pour dépasser l’aléatoire, j’ai réservé une plage dans l’emploi du temps pour étudier la formation des mots, mettre de l’ordre. Familles, préfixes, suffixes, contraires, homo et synonymes, les abréviations, les niveaux de langue, propre et figuré mais peu de sessions thématiques hormis celles sur les sports divers avant d’attaquer nos journées de ski.
Des séquences, pour que le dictionnaire ne soit pas un poids de plus dans les cartables mais un recours léger, s’appuyaient sur des stratégies ludiques comme des concours de vitesse.
Il semble extravagant le temps où les encyclopédies offraient un tremplin à toutes les rêveries d’un lecteur dans un centre culturel en Afrique qui pensait saisir tous les mystères du monde en lisant le Larousse comme un roman.
- Porte-vues pour la double page hebdomadaire.
- Recours aux dessins à exécuter dans la semaine et à faire deviner aux autres :
Quelle expression figurée se prend au pied de la lettre ?
Un petit haïku pour que deux homonymes et même plus si affinités se télescopent...
« … la rhétorique. Elle est restée presque jusqu’au bout, une énigme anguleuse et noire, comme son nom, revêche, cléricale, morte, que j’ai laissé à d’autres le soin d’éclaircir si cela, d’aventure, les amusait. » P. Bergounioux
jeudi 25 décembre 2008
Petit Coca Noël
Il fut un temps péremptoire où la politique était reine, aujourd’hui elle s'étiole dans la recension de petites phrases. Alors que Sarkos savait comme Gramsci que la lutte sur le plan culturel était déterminante : il a gagné. Avons-nous perdu de nous être tant goinfré d’ironie, de joyeuses démolitions, laissant la place aux trafiquants de valeurs ?
Je reviens sur ces années bousculantes pas seulement pour compter en rond, mais parce qu’elles ont formé la matrice de nos pensées.
Quand j’entends aujourd’hui un chroniqueur de France Inter prétendre dépuceler les oreilles des enfants, en leur révélant pour la dixième fois que la père Noël est un produit Coca Cola, je me dis que les humoristes ne sont plus forcément du côté de l’anti-conformisme.
Je n’ai pas le sentiment de courir au secours du grand commerce en pensant que nous avons besoin des Noëls.
Nous avons besoin de croire, encore plus si nous sommes athées, à la lumière au cœur de l’hiver, comme les hommes l’ont fait bien avant le christianisme.
Dans nos sociétés digicodées, un bébé dans la paille, sans papier, est un beau symbole de croyance en la vie. Sous le souffle de l’âne réprouvé et de la bête de somme : la majesté de l’homme.
Je me défends d’être atteint par quelque tardive piqûre mystique et souris toujours à la remarque de Julos Beaucarne qui trouvait approprié l’encens offert par les rois mages pour masquer les odeurs d’étable. Mais je crois les mythes nécessaires à notre construction d’homme. Un enfant grandit lorsqu’il apprend que le père Noël n’existe pas, et quand il y a cru de toute son âme, c’est encore meilleur.
mercredi 24 décembre 2008
« Les artistes du bord des routes »
C’était le titre d’un livre que l’on m’avait offert concernant ceux qui transforment leur pavillon en palais fantastique avec une conviction qui entre dans la catégorie « durable ». Tels le facteur Cheval, pierre après pierre, tesson après tesson, ils offrent aux passants leur créativité.
C’est parfois « too mutch », mais il ne viendrait à l’idée de personne de qualifier ainsi « le Palais Idéal » d’ Hauterives, monument historique.
A Noël fleurissent - pour reprendre le jargon art moderne - les « ready made » autour de la thématique dévolue aux confiseurs sans trêve.
Oui il y a le barnum commercial, et je maugrée en constatant le maintien des décorations de décembre en plein mois d’août. En outre, il me semble bien abusif, voire nocif pédagogiquement et écologiquement que les communes illuminent leurs rues trop longtemps à l’avance.
A Carrefour dès le 20 décembre, des galettes pour les rois garnissaient les gondoles.
La magie tient certes plus à une bougie qu’à une guirlande clignotante mais la naïveté de ces installations est souvent émouvante. Ces initiatives me ravissent, leur geste est gratuit : ces balcons, ces jardinets illuminés ne sollicitent pas de subvention, ils sont tournés vers les autres.
Rare.
mardi 23 décembre 2008
Vacances ,
lundi 22 décembre 2008
L’apprenti.
Premier film de Samuel Collardey. Pour revenir à la campagne, je vais au cinéma. Oui, j’avais porté aux nues le dernier Depardon qui touchait au cœur d’un monde à sa fin, à la gravité du monde. Ici, c’est autre chose mais tout aussi juste : il est question de transmission, et elle est problématique. Dans cette chronique où il m’est impossible de séparer la fiction du documentaire : je crois tout. J’ai été ému, effrayé, j’ai souri. Le jeune arrive à la ferme avec des responsabilités à assumer qui peuvent sembler démesurées car il est encore avec ses jouets d’enfants et tellement fragile, écorché. Le paysan, qui doit lui apprendre plus qu’un métier, est remarquable de vérité, de pédagogie. Dans cette ferme du Jura, il y a bien des signes de modernité, l’ordinateur, mais les cours sont toujours aussi boueuses, la naissance d’un veau toujours aussi émouvante, le cochon a beau être pendu pour sa mort à la fourche hydraulique du tracteur mais c’est sa graisse qui sert à traiter les mammites. Les paysages sont beaux, la vie violente : les beuveries, les scènes avec le père et la mère séparés, mais aussi tendre : une partie de luge, un au revoir tout en pudeur.
dimanche 21 décembre 2008
La flûte enchantée
C’est bien le même spectacle de Comédiens & Compagnie qui est joué au théâtre des Mathurins à Paris et celui que nous avions vu à Avignon au théâtre du Bélier.
Le « Canard enchaîné » sous titre cette semaine : « déjantée ». C’est ça.
Dans la chaleur et l’excitation du off, sa magie, j’avais noté : la légèreté de Mozart convient bien aux diablotins de cette Comédia del arte. Des tréteaux comme à l’aube du théâtre, du talent, de l’invention, du rythme, des clins d’œil, de la virtuosité aussi bien chez les musiciens qu’avec les acrobates. Nous sommes enchantés et ce n’est pas du pipeau. De la fraîcheur, de la jeunesse : pour tous !
samedi 20 décembre 2008
« Le niveau baisse »
Pour m’attarder dans le registre des idées simplistes sensées justifier les réformes dans l’éducation nationale, je retourne volontiers cette évaluation sommaire contre Xavier Darcos.
Mais la riposte à la mise à bas de l’école n’est guère plus brillante, pour l’instant.
Entre deux entretiens avec le camelot de l’Elysée, Jack Lang est le seul au P.S. à être promu par les médias au sujet de l’école; c’est qu’il est bien usé.
Les lycéens ont gagné, provisoirement, poussés par des motifs d’inquiétude qui dépassaient le sujet de la classe de seconde, seul thème d’ailleurs où il y avait une amorce de discussion.
Contre l’hécatombe des postes, faut-il sortir les cagoules ? Quelques militants qui n’ont pas fini de pleurer leurs années CRS, humeraient volontiers encore le parfum de quelques lacrymos. Mais depuis qu’ils crient « Au loup ! Au loup ! » à chaque printemps quand ils croisent le moindre caniche, ils ne sont plus entendus, alors que la situation est grave.
Le contexte est délétère, les chefs et petits chefs pesants, les médias aux ordres, mais je ne peux croire que des collègues aient eu peur de se rendre à des réunions ou de distribuer des tracts. Afficher sa couardise serait ainsi moins indigne que d’exprimer son désaccord avec des critiques adressées au gouvernement. Dans leur obéissance, qu’ils relisent alors la lettre de Guy Mocquet pour leur propre compte. Le niveau de courage baisse.
Si c’est le cas, il ne sera même plus utile à l’état de mettre en place des Etablissements Publics d’Enseignement Primaire(EPEP) pour assurer un quadrillage hiérarchique de la profession : elle serait déjà aux ordres.
Dans les mesures prises il y a bien évidemment, comme dans le domaine de la justice, de la sécurité, de l’emploi, des annonces d’un jour.
Mais aussi l’aboutissement de longs processus qui ont leur cohérence funeste.
Les personnels chargés de l’aide aux enfants en difficulté n’ont plus, depuis des années, de postes qui leur sont proposés aux concours : maintenant ça se voit, et il est tard. C’était dans les tuyaux.La régression des taux de scolarisation des tout-petits en maternelle préparait l’arrivée des « jardins d’éveil ».
L’affaire des couches-culottes nous a choquée, mais elle entre avec grossièreté dans une stratégie visant à déprécier les enseignants aux yeux des parents, à diviser les personnels.
Prime pour ceux qui sont en place -logique du paquet fiscal- et personnels précaires pour assurer les remplacements, et vous m’en virez un max !
Dans une école, des maîtres responsables des CE1 et CM2 envisagent d’utiliser la prime qui leur est promise pour acheter des livres aux élèves. Sont-ils ringards à s’opposer au chacun pour soi ! Refuser la division de la profession, ce doit être ça la culture instit’ !
Comme d’hab’ la grosse stratégie de com’ parle d’aide aux enfants quand les postes des personnels spécialisés sont fermés.
Les enseignants sont amenés à poser des pansements sur les blessures générées par un nouveau rythme d’enseignement qui lèse les plus fragiles.
Mais pour le samedi matin supprimé, je n’ai pas vu de tracts pour réclamer son rétablissement : la glissade était amorcée depuis un moment.Sur une scolarité, ce sera l’équivalent de six mois d’apprentissage en moins. L’école, une activité entre deux week end.
La suppression des IUFM ne mobilise guère, leur mépris à l’égard des praticiens de terrain n’a pas été oublié ; ils seront remplacés par l’Université à l’efficience bien connue !
Une révision des programmes était nécessaire, les cycles ne s’étaient pas imposés et une meilleure structuration du français n’était pas inutile pour ceux qui l’auraient abandonnée.
Les programmes sont plus ambitieux avec des horaires amoindris !
Des remèdes pires que le mal, des élèves promis à la fatigue, des personnels découragés ou qui doutent, des parents inquiets.
L’érosion des mots de « solidarité », d’ « émancipation » parmi les agents même de leur promotion a préparé ces désertions, cette atonie. Le moral est à la baisse.
Le pouvoir, ses scribes et ses sbires, ne doit pas se réjouir trop vite d’avoir comme assommé ses enseignants. Ils seront en tous cas un peu plus imperméables aux roucoulades mécaniques concernant leur mission sacrée entre une génuflexion, une perquisition et une intimidation. Le Wall de Street s’effrite après le mur de Berlin qui tomba ; et si le mammouth sortait allègrement de sa glace ?
vendredi 19 décembre 2008
Le petit livre des couleurs
Le drapeau de l’Europe est bleu : sage et consensuel.
Peu importe que le rouge se retrouve dans les flammes de l’esprit saint qui n’évoque plus grand-chose à nos sociétés marchandes mécréantes, par contre Satan, plus connu, est associé à cette couleur qui est la couleur par excellence.
Le blanc est innocent, même si les nuances portaient sur le mat et le brillant attestées par le latin albus et candidus (d’où candidat).
Vert est le numéro gratuit, pourtant le dollar est de cette couleur longtemps instable.
Mais n’atteint pas l’infamie du jaune.
Le noir est plutôt élégant.
L’auteur Michel Pastoureau qui a consacré des ouvrages exhaustifs à chacune des couleurs, résume vivement ses investigations dans ce plaisant recueil de 95 pages à 12€.
Il conteste la hiérarchie entre couleurs primaires et secondaires et nous fait voyager dans le temps et l’espace parmi les symboliques parfois contradictoires et les sens cachés de ces six couleurs auquel il adjoint rose bonbon et gris pluie.
jeudi 18 décembre 2008
Du nouveau à l’ancien musée?
Le « magasin » ou Centre National d’Art Contemporain installe une trentaine d’artiste rhônalpins pour la deuxième année à l’ancien musée place Verdun.
Entre parenthèses : si l’on emploie des termes de l’industrie comme « la chaufferie », la « sucrière », « l’entrepôt » c’est qu’il s’agit d’un lieu culturel. Les usines deviennent des écomusées.
Un cerf empaillé écroulé sous ses bois dorés démesurés est bien à sa place sous ses verrières protégées par des filets.
La juxtaposition des œuvres permet de constater que la thématique de l’incendie est volontiers partagée cette année. Des objets usuels surdimensionnés telle une tapette à souris ou un tricot en tubes au néon, des photographies de bord de trottoir graisseux comme j’en dispense sur ce blog, ne font pas preuve d’une originalité saisissante. Il y a des paysages évitant tout pittoresque, des aquarelles bien réalisées sur l’univers d’Ozu, ou des reprises sur toile de pages de la toile, mais cette fois encore l’art contemporain s’adosse à d’autres pour s’exprimer.
Ces dessins et peintures sont bien au-dessus de quelques vidéos oubliables, ou de vagues gribouillages ne pouvant prétendre être publiés en B.D., qu’ils parodient pourtant frileusement. Et ce n’est pas un baratin prétentieux qui pourra sauver de la fumisterie, les tableaux en traits soufflés comme ceux que je faisais exécuter à des élèves de C.P. dans un autre siècle.
mercredi 17 décembre 2008
Ecrite, l’expression. Faire classe#13
L’oral ne peut se substituer à l’écrit. Pourtant sa légèreté a contaminé l’élaboration laborieuse d’argumentations structurées. Comme les Lacoste devenus apanage d’une certaine jeunesse des banlieues, la tchatche a cessé d’être le monopole des promis à l’oral de l’E.N.A. L’enjeu est de taille pour que subsistent des moyens pour accéder aux nuances, pour sortir du réactif, pour inscrire une pensée.
Je consolais ma mauvaise conscience d’avoir abusé d’exercices à trous vite comblés, par la fastidieuse correction d’au moins un texte par élève, par semaine.
- Ecriture au brouillon, c’était alors chaque samedi : avec sollicitation à raturer, gommer.
J’annonçais le sujet à l’avance. Pour contourner la difficulté d’inventer une nouvelle planète pour le Petit Prince comme ça, au sortir de la récréation, inviter à imaginer à l’avance.
Réfléchir à :
Portrait d’un grand - parent, d’un ami, son auto - portrait.
La façon de mener des dialogues.
Poèmes avec contraintes, à la manière de…
Comptes-rendus de visite, d’expérience.
Une lettre, est que ce serait utile aujourd’hui ?
Beaucoup d’histoires à terminer, pour prolonger la fantaisie d’un auteur, se servir de Calvino, de Pennac, d’un père Noël maboul.
Conte des origines : du type pourquoi le léopard a des taches sur sa robe ?
Des histoires avec des narrateurs différents, changer d’angle de vue.
La critique d’un spectacle vu en commun puis d’une émission préférée, en argumentant. Expression intime : un petit plaisir comme ceux de Delerm distillés chaque jour pendant deux semaines. Une invitation à positiver, à chercher ce qui aiguise l’appétit de vivre : pas forcément un luxe pour des enfants grognons, frustrés, ou désabusés avant d’avoir goûté.
Un reportage, des résumés…
A la fin de l’année : le « chef d’œuvre » individuel parachève ces divers travaux.
« Mon roman » arrivait à être entièrement tapé à l’ordinateur, tiré à quatre épingles, monté sur les présentoirs de la bibliothèque comme les vrais livres avec couvertures cartonnées, illustrations, maison d’édition fantaisiste, quatrième de couverture et biographie amusante.
Les élèves s’engagèrent dans des albums pour les tout petits, jusqu’à des polars déjantés, des romans roses et des destins historiques où Abdel racontait comment Jean-Claude arrivait à guérir un certain Adolf de ses folies guerrières. Nous avons apprécié des épopées footballistiques et des voyages lointains, des histoires où les animaux expriment plus profondément que certains déballages les souffrances, les conflits de l’écrivain.
La confection d’un journal de classe, si féconde à une époque, ne me prouvait plus des vertus initiales qui furent évidentes. Le sujet était libre, contrairement aux autres situations d’écriture de l’année, avec cependant négociation pour éviter d’aligner six textes sur le foot. La motivation des élèves s’érodait ; « il fallait Me fournir un texte pour Mon journal » : tout faux ! L’appât du gain rapporté par la vente du journal au porte à porte aurait pu motiver les libres écrivains. Seuls les « spéciaux classe de mer » inspiraient encore des réussites dans le genre. Nos lointains débats théologiques sur la nature libre des textes s’effacent. Les contraintes rassurent ; les impulsions données par une histoire captivante enrichissent plus que l’injonction de liberté, même épaulée par une boîte à mots déclencheurs.
- Correction individuelle des brouillons en rouge accompagnée de commentaires lors des six évaluations de l’année. J’affichais ma subjectivité de juge : « je ne dois pas m’ennuyer ».
La procédure pour obtenir un produit fini, « nickel » prend une semaine pour recopier, pointer, corriger à nouveau au crayon, effacer, numéroter, archiver.
Je crains que l’usage exclusif du traitement de texte pour les rédactions ne retarde l’instant de s’essayer à un nouveau texte, d’un autre genre, et que la forme prime sur le fond, le « look » sur l’essai. Il faudrait ménager du temps pour un « tremblé », une rature, des tentatives de s’éloigner du premier jet.
A ranger dans la liasse des autres textes reliés en fin d’année.
Il existe aujourd’hui des petits classeurs aux couleurs acidulées pour recueillir dans ce lieu exclusif les essais de l’écrivain en herbe.
- Correction collective. Quelques phrases caractéristiques relevées dans les textes fournissent matière à mise en commun et à élaboration de conseils inscrits
- Au recto d’une page en couleur:
« - Eviter les répétitions, les répétitions, les répétitions ;
- Faire la chasse au verbe faire.
- il y a des moyens d’éviter il y a … »
- Au verso : « la chasse aux canards » :
"engueuler"à remplacer par "gronder"
"plein de" à remplacer par "beaucoup de…"
Ces dispositifs ne sont-ils qu’un barrage dérisoire contre l’océan des présents fébriles ?
Entre deux virgules nous allons fouiller du côté des mystères de l’humain. Les volutes, les suspensions de la plume nous racontent à chaque fois l’originalité de l’homme qui commença ainsi son histoire.
Les jambages s’alignent entre les rayures Seyes ; l’écriture qui fait tirer la langue ne se confondrait-elle pas avec le geste de l’écrivain équipé de son Mont-blanc ? Applique toi.
Ecrire est un grand orgueil, cependant cette expression fait office de sauvegarde. Ecrire c’est raturer. Il me faudrait arpenter encore quelques départements des beaux-arts et des belles lettres pour rendre la lumière d’un mois de novembre. Alors saisir la vérité de ce qui circula quand je fis classe me semblera encore bien insaisissable, longtemps.
« Ecrire c’est traverser une saison qui n’est sur aucun calendrier » F. Lefèvre
mardi 16 décembre 2008
Vieillir
Vieillir c’est perdre l’insouciance.
Ce sont les bobos et les douleurs quotidiennes à ignorer, en attendant le cataclysme final, c’est la mort qui rôde près des parents, à négocier avec plus ou moins d’habileté ou de chance dans le grand virage final et définitif,
Ce sont les amis, sur le visage desquels on découvre ses propres rides et l’insidieux travail du temps qui passe et vous ronge de l’extérieur, en surface .
Ceux qu’on aime, se débattant dans leur marasme personnel, parfois « cernés de près par les enterrements » comme le disait Brassens qui fut lui-même vite vaincu par la camarde,
Et les enfants, dont, privés de la bienheureuse inconscience de nos propres parents, on n'a aucune certitude heureuse quant à leur avenir …
C’est la peur de l’inéluctable solitude finale, arbre bientôt abattu à son tour, dans le no man’s land de nos cimetières perso …
Mais c’est aussi aimer, aimer passionnément la vie, savoir le prix de chaque instant volé au futur désespérant, et se chauffer à l’amitié, au soleil caressant, à la beauté du monde, à chaque occasion suscitée ou volée au hasard, petit soldat anonyme du grand troupeau humain qui court à sa perte programmée…
13 Août 08- Dany Besset
lundi 15 décembre 2008
Caos calmo.
Le monde s’écroule : sa femme vient de mourir en vacances et son entreprise audiovisuelle est en train de fusionner, alors Nani Moretti va s’asseoir sur un banc en attendant toute la journée sa fille qui est à l’école. Bien des personnages défilent dans le square où l’on voit qu’une fermeture centralisée d’une voiture peut être sympathique, où Roman Polanski participe d’un casting qui réserve des surprises. A une époque on s’amusait avec un copain à repérer « le truc » dans un film, tel que casser des noix sans casser la vitre du « Passager de la pluie », ici ce sont les listes qu’il établit en ce moment de bilan qui me semblent une trouvaille poétique : les compagnies aériennes dont il a été client, les endroits où il n’ira plus, ce qu’il n’a pas supporté dans sa vie…J’ai bien aimé ce conte alors que souvent ce genre élude la réalité, là, ce pas de côté révèle les faux-semblants, les trahisons. La position du père protecteur à l’égard de sa fille aurait pu être étouffante, là, c’est l’harmonie, la paix. La petite sera sage sans cesser d’être une enfant. Vive le cinéma italien qui l’air de rien, dit bien l’air du temps, où la désinvolture marque la gravité.
dimanche 14 décembre 2008
Fellag
La sincérité, la fraîcheur de l’humoriste kabyle se sont un peu émoussées dans ce spectacle : « les algériens sont des mécaniciens » où il ne joue plus seul. Le côté légèrement désuet des sketches peut attendrir. La nouveauté des performances antérieures et son courage nous avaient tellement emballés dans ses spectacles antérieurs, qu’il est difficile de rester sur ces sommets même si sa critique est toujours tonique : l’empressement inefficace de tous les mécaniciens proclamés, leur débrouillardise aussi révèlent bien des traits d’une société dans son ensemble. Les chutes sont un peu attendues, mais je retiens la séquence superbe qui clôt le spectacle. Le couple tout excité revient de Bruxelles avec la Mercedes de leur rêve et se fait pulvériser l’objet de leur prestige au premier feu à la sortie du port... alors ils allument la radio qui est restée intacte et ils dansent. La poésie vient élever l’humour et remet des couleurs dans des tableaux qui risquaient d’être un peu fades. Malgré un Jésus de la rue D’Isli qui réussit à guérir les maux les plus graves, sauf celui du fonctionnaire algérien.
samedi 13 décembre 2008
Décomplexés et timides.
Je m’applique dans le débat politique à me monter respectueux de mes adversaires mais il y a des occasions où il faut se ronger les poings.
Quand une formatrice pour adultes dit à l’une de ses élèves qu’elle ferait bien de retourner au bled, il ne s’agissait pas du manuel d’orthographe, mais de l’affichage d’un racisme à l’égard d’un public qui d’ailleurs la fait vivre ! Et que la situation catastrophique des finances française serait causée par… Mitterrand ! Tant de mauvaise foi peut accabler mais aussi nous revigorer.
Je me réjouis à chaque fois que certains ne se soient toujours pas remis de notre victoire de 81. Cette France de toujours qui considère la gauche comme illégitime : ces réacs me ravissent. Et dire que l’affichage d’une droite décomplexée a paru comme un signe de modernité !
La haine de l’autre ce serait plutôt Cro Magnon.
En face, des camarades se bagarrent pour convaincre des parents de la nocivité des mesures qui accablent l’éducation nationale. Eh bien certains, ne veulent pas se mouiller, pensant que la contestation est politique, comme si les mesures ne l’étaient pas, politiques. « Je ne fais pas de politique » signe de la main droite. Encore un vieux retour aux silences d’antan quand il ne fallait pas afficher ses opinions. Mais pas si passés que ça, les pseudos qui sévissent sur Internet n’assument pas leurs opinions : ils éructent, cachés ! Ils sont plus souvent de droite me semble-t-il.
Ce royaume des silences remonte lui à l’antédiluvien.
vendredi 12 décembre 2008
Sarinagara. P. Forest
Un ami m’a offert ce livre.Mais il y a des jours où le bienheureux oubli vire à cette putain de mémoire défaillante: je ne sais plus qui ?
L’écrivain va à l’autre bout du monde au Japon après la mort de sa fille. Il a oublié le tremblement de terre de Kobé qui a eu lieu le jour de l’annonce du cancer de sa petite.
Il nous conte la vie d’un poète qui a écrit en de pareilles circonstances, celle de l’inventeur japonais du roman moderne et enfin du photographe qui immortalisa -comme on dit - quelques images de survivants de Nagasaki. Le titre vient du dernier mot d’un haïku : « je savais le monde - éphémère comme rosée - et pourtant et pourtant ». La survie après la mort d’un enfant est un scandale et la littérature ne peut rien, pourtant il nous dit la beauté du monde avec des mots de la précision du cristal. Je me suis pardonné mon goût pour cette chose chochotte nommée poésie en approchant les haïkus qui unissent l’absolu et le quotidien, j’ajouterai la nature et la culture. Tout ce livre cherche la réconciliation de l’oubli et de la mémoire, du rêve et de la réalité, en termes limpides parfois un peu trop parfaits. La neige se mélange aux pétales du printemps. Merci.
jeudi 11 décembre 2008
Henriette Deloras
Si elle n’avait marié Jules Flandrin serait-elle accrochée présentement au musée de Grenoble ?
Depuis Camille Claudel, il est de bon ton de ressortir des cartons quelques inconnu(e)s pour faire montre d’originalité, exister à côté du barnum picassien, que je m’empresserai d’ailleurs d’aller admirer à l’occasion.
Les pastels interdissent les repentirs, ceux de la dame sont agréables et porteur de nostalgie lorsqu’ils évoquent les artistes attablés aux bistrots de « la belle époque ». J’ai préféré les personnages de dos car les traits des visages traités à la craie tendent à la caricature. Ses interprétations de tableaux de Bruegel à Picasso sont gentiment originales, quelques natures mortes aux couleurs éclatantes apaisent une humeur qui s’interroge souvent : pourquoi elle plutôt qu’une autre ? Dans l’atelier que je fréquente, il y a quelques amateurs dont les productions ne manquent ni de vigueur, ni de personnalité et qui ne connaîtront pas d’exposition.
mercredi 10 décembre 2008
Français.Faire classe#12
Le cœur battant du métier et il ne faudrait pas s’inquiéter ! Langue hachée menue, lecture en vrille, et l’orthographe: "j’te dis pas". Les ravis du temps moderne de chez moderne qui entrent dans le post moderne trouvent que ceux qui veulent « sauver les lettres » sont des amoureux de crépuscule qui exagèrent ; et pourtant nos négligences, nos lâches accommodements portent leurs fruits amers.
Pour ne pas m’embourber dans la déploration, je vais essayer de faire l’état des équipements que j’embarquais à bord des goélettes C.M. 2.
« Ou penchés à l'avant des blanches caravelles,
Ils regardaient monter en un ciel ignoré
Du fond de l'Océan des étoiles nouvelles. »
José Maria de Heredia
Expression orale
Les sabirs régressifs progressent et nous nageons dans un domaine informel qui échappe aux évaluations incontestables, irréalisables par le seul professeur des établissements scolaires.
Il est une bonne tranche de langue qui nous a ravis : les contes.
Dans cette activité, la prise de parole dépasse les catégories enseignées telles que lecture, expression orale, vocabulaire, conjugaison. Elle développe l’écoute, le respect et l’esprit critique, la connaissance d’un répertoire personnel plus étendu, et la recherche de la précision. Elle conduit à une meilleure entente avec les autres et une image de soi bonifiée.
Citoyenneté et culture.
- Chaque enfant était tenu de conter au moins une fois dans l’année devant ses camarades.
C’est le moment de baisser les stores et d’éteindre les lumières, celui d’honorer le rendez-vous pris la semaine dernière, le moment de se jucher sur le tabouret, d’empoigner le bâton de parole ou simplement de se poser sous les seuls feux de la rampe du tableau. Certains étaient au rendez vous chaque semaine.
- Chacun dispose personnellement d’un livret d’une trentaine de contes et d’un stock conséquent dans le fond de classe et à la « bib » du quartier.
- Ceux qui le souhaitent, en prévenant à l’avance, content au micro dans les cars qui nous conduisent au gymnase, au ski. S’en suivent les critiques, systématiquement.
- Un conteur professionnel assure dans chaque classe des moments de formation (6heures)
Une représentation annuelle pour les plus grands concrétise une démarche qui prend naissance en maternelle : c’est le projet d’école. Fédérateur, il a permis une cohérence dans tout le groupe scolaire, entraîné de belles collaborations avec l’union de quartier, les bibliothèques, les associations telles que celles qui gravitaient autour des « arts du récit ». Quand les enfants conteurs se mêlent aux adultes sous les arbres d’un week-end de printemps, les albums de souvenirs s’enrichissent.
- Le spectacle. Spots de la scène ; papa, maman et petit frère sont venus à la salle de spectacle de la ville : c’est bon pour Narcisse, pour petit frère qui attend son heure. Ce n’est pas qu’une représentation pour quelques lignes dans le journal local, encore qu’il existe un peu d’espace entre le jansénisme au silence butté et le battage creux, à faire valoir les réussites de l’école sans que l’esbroufe ne nous bouffe.
Parfois le conte justifie son image un peu poussiéreuse, compassée, mais la ré appropriation par les mômes leur donne une vie nouvelle. Leur structure immuable permet toutes les libertés, elle constitue l’échafaudage autour duquel tout se bâtit, se colore, se personnalise. Les premiers pas se résument parfois à bien dire une blague : il faut quelques talents pour que cela fonctionne efficacement : évaluation instantanée ! La mémoire est sollicitée mais il faut se défaire de la mécanique, savoir différer la chute, maîtriser le squelette de l’histoire, éviter les passés simples pour mieux entrer dans l’échange avec son public : donner vie, redonner ce qui a été recueilli. Dans les bonheurs de la vie, il y a bien cette place que nous nous gagnons dans les discussions ; se faire entendre, se faire comprendre, se faire aimer. Sans s’en laisser conter.
Tchatche, slam, rap, les « battles » crient, disent, savent que le pouvoir passe bien par ces mises en mots. Politique et équilibre personnel.
Des pédagogues aiment qualifier de philosophiques des débats d’enfants alors que la philo, objet de railleries en terminale, remise en cause pour les plus grands, apparaît comme la panacée… en maternelle. La parole donnée aux élèves : c’est bien ainsi qu’ils construisent efficacement une langue, mais pourquoi la maîtresse doit être silencieuse ?
La parole libre, prioritaire chaque journée où la première demi-heure est consacrée aux présentations (poèmes, contes, expériences, actualité) aux débats (vie scolaire) annonces diverses, se maîtrise derrière le doigt levé. Une drastique obsession impose cette posture caractéristique de l’école, évite le monopole des « grandes gueules » et encourage l’antique précepte qui invite à tourner sept fois sa langue dans sa bouche. Condition de l’apaisement, du débat. Le reste de la journée, il s’en est fallu d’une ancienne élève devenue stagiaire pour me révéler que je passais mon temps à poser des questions. La maïeutique, quoi ! La parole des élèves grossit leur petite pelote, les constitue. Je ne prétendais pas être dans la démarche qui mène à l’autosocioconstruction des savoirs. Pas assez auto, un peu trop téléphoné. Ma monarchie s’est essayée à l’éclairage, elle fut constitutionnelle, absolue parfois, tendant à cette forme supérieure de l’ordre qu’est l’anarchie comme le disait Elisée Reclus.
mardi 9 décembre 2008
Nouvelle du mardi
Désormais les billets publiés sur ce blog s’installent dans une certaine périodicité. Le mardi sera réservé aux lecteurs qui ont envie de publier un poème, un texte. Marie Thérèse Jacquet inaugure la rubrique. Le lundi sera consacré au cinéma, le mercredi à l’école, vendredi aux livres, samedi à la politique. La cuisine, les beaux arts , les spectacles… pour les autres jours
LE CABAS A ROULETTES
« Je suis oublié des cœurs comme un mort, comme un objet de rebut » psaume 31 verset 13
- Tu pars ? Tu pars sans moi ? Adèle !
-…
-Tu as ta crise de sciatique, c’est ça qui t’empêche de me répondre ?
-…
- Ma pauvre vieille Adèle !
- Je ne sais pas si je vais te prendre ce matin. Je n’ai besoin que d’une baguette et d’une plaquette de beurre…
- Ouais, t’oublie le kil de rouge. .. Emmène-moi ; huit jours que tu ne m’as pas sorti…
- Ah, huit jours… Huit jours, tu crois… ?
- Si tu vas faire tes courses toute seule, tu vas te mettre plein de miettes et de farine sur ta veste. Le beurre fondra dans tes mains. Allez, emmène-moi avec toi. Toujours enfermé, moi, dans le placard de la cuisine avec ces merdes que tu gardes par flemme : tes chaussures de ski boucanées, les après-ski qui prennent l’eau, les bougeoirs et les vases gagnés au club de scrabble, tes cinq boîtes de cartes postales (ils sont morts tous ces gens qui t’envoyaient leurs amitiés du bord de lagons bleus ?), tes chaussons de danse, tes fringues jaunes et bleues, (pourquoi ne portes-tu plus que du noir et du marron pisseux ?), ces confitures de mûres concoctées en Normandie ( les souris les ont bouffées). Et je ne parle pas des balais dépoilés. Pourquoi diable tu gardes des balais qui ne sont plus que des manches ?
La planche à repasser sans molleton, les bouteilles vides ou presque qui empestent l’acide acétique. C’est le purgatoire dans ce placard. J’ai l’impression d’être dans un cimetière avec toutes ces guenilles et que tu nous as privés de rites funéraires ! Si ça continue je vais croire aux loups… Sors-moi !
- Tu parles trop ce matin, tu me donnes le tournis. Je t’ai déjà dit que tu n’as rien à craindre des loups. J’ai mis des tapettes dans tous les coins. On n’en a jamais attrapé un…
- C’est pas la preuve qu’il n’y en a pas… Les loups sont très malins pour repérer les pièges.
- Tu exagères : il est très bien ton placard, à l’abri des courants d’air. Tu peux y dormir toute la journée sans soucis…
- Sans soucis, c’est vite dit avec toutes ces saloperies qui puent. Et puis il y a les GROS L…
- Ah ! Y en a marre avec eux !
- T’as raison tant que je suis vide ils ne viendront pas… Mais la vie c’est de sortir et de s’en mettre plein !
- Tu ne comprends pas que les temps ont changé, qu’aujourd’hui ce qui compte, c’est la sécurité. Je veux dire la sé-cu-ri-té des pla-cards. La vie il y a rien de plus dangereux. C’est l’instabilité perpétuelle. La vie c’est très mortel. Il vaut mieux pour toi vivre à petit feu.
Quand je t’ai eu en… en … 2000. Ah ça fait déjà huit ans que je suis à la retraite ! Mes collègues s’étaient cotisés. On t’a arrosé au champagne…
- C’ était pas du champagne d’abord, c’était de la Clairette. Tes collègues avaient caché les bouteilles dans ma poche.
- Huit ans déjà !
- Tu bois trop, laisse donc cette bouteille dans mon placard… Tu vas devenir affreuse.
- Bof ! Y a plus de miroirs chez moi et les gens ne me voient plus alors… Economies de fringues, de coiffeur. Un pif rouge, c’est rigolo, non ? Fun, comme ils disent maintenant, sleurp !
- La déprime te guette. Sors nous… Allons nous asseoir sur le banc, à côté du marchand de miel. Tu me raconteras les Trente Glorieuses.
- T’as raison, c’est jour de marché. Bon, je vais te sortir. Tu sais ton discours de tout à l’heure m’a donné une idée. Je vais promener aussi les cartes postales. Les pauvres, elles reverront un peu de pays. Mais, une condition. Promets-moi de ne pas insulter les caniches de la marchande de fromage.
- Ben dis donc, ils lèvent la patte sur …
- Les chiens n’ont jamais fait ça sur toi, ils préfèrent les arbres à un vieux cabas à roulettes tout pour…
- Répète un peu… tout pour… ?
- Pourvu de tous les accessoires modernes…
- Mouais, je suis certain que c’est pas ça que tu voulais dire, Adèle, mais je m’en fiche si tu me sors.
- Ah ! Te voilà devenu raisonnable. Zut, où est mon porte- monnaie ?
- Tu l’as laissé dans une poche de mon flanc, ton très léger porte-monnaie en faux crocodile plus usé que moi !
- Je n’aime pas quand tu ricanes à propos de mon porte-monnaie. Il m’a rendu autant de services que toi. J’aurai bien du mal à m’en séparer, vois-tu !
- Sentimentale, ma pauvre ! Tu collectionnes les cadavres…
- C’est vrai qu’il est léger ce porte-monnaie. Pardi, je ne pourrai pas acheter le beurre, il ne me reste que deux euros, il me faut du pain. Et ma pension qui n’arrive que dans trois jours !
Me voilà bien, tiens !
-Tu as encore un paquet de lentilles et un reste de nouilles dans le frigo
- Les lentilles, je ne les digère plus.
- On te fera crédit à la supérette… Ou alors, on refait le coup du mois dernier. Tu me remets mon double fond…
- Ton fond est trop percé. On a failli se faire prendre ! Rappelle-toi cette boîte de sardines au citron qu’on a perdue en quittant la caisse… Heureusement, le gérant n’a rien remarqué !
- Tu attaches trop d’importance à la bouffe, tu devrais te mettre à la méditation comme moi… Dans le placard, c’est plus facile. Si tu jettes les godasses, ça te fait juste la place. La méditation c’est extra pour les gens qui ne savent plus où se mettre…
- Excuse-moi, je sais que tu détestes ça mais je vais devoir fouiller dans ton fond… Peut-être que ?
- Fais vite et après on sort. J’aime le soleil d’automne.
- Rien. Pas la moindre piécette, juste des miettes de pain et ce vieux radis tout ratatiné.
- En route ! J’ai entendu un claquement de mâchoires !
- Toujours cette obsession ! Laisse-moi mettre mon foulard sur la tête !
- Pffft ! On dirait une des Vamps ! Ce que t’es moche !
- Tu ne t’es pas regardé ! Là, c’est pas trop lourd les cartes postales ?
- Eh ! Je suis encore costaud ! Dépêche… Y a un loup sous l’évier, j’ai vu sa patte velue. Même le balai a des griffes… L’apiculteur t’aime bien, peut-être qu’il te donnera un petit pot,
un échantillon toutes fleurs.
- Allons, allons courage ! Let’s go. We are the champions my…
- Pourquoi tu m’regardes comme ça ? J’ai la trouille quand tu fais ces yeux là.
- Tu grinces mon pauvre vieux, tes côtes saillent sous ta peau de toile cirée à carreaux…
Cette grande fente que tu as devant, c’est nouveau ?
- …
- C’est irréparable. Point final.
- J’ai la ligne, sûr. De la fermeté… Allez, let’s go Adèle. N’allons pas trop vite. Laisse-moi m’emplir d’air, pousse-moi dans les feuilles de platane. J’adore rouler dans les flaques d’eau et les feuilles mortes.
- Quel gamin tu fais !
- S’il te plait, le fleuriste a abandonné quelques chrysanthèmes dorés même pas fanés. Là, dans le caniveau, bigleuse. Mets en un ou deux dans ma poche. Merci.
- Je n’aime pas cette odeur de Toussaint.
- Tu n’as jamais été courageuse.
- …
- J’ai un peu mal à la roulette gauche, celle qui n’a plus de caoutchouc.
- C’est ton rhumatisme. L’acier n’est plus ce qu’il était.
Le cabas à roulettes chante :
« Le soleil d’automne emplit
Tous mes trous, ouais baby !
Je devine, oh oui
Y a un sens à la vie… »
Il poursuit sans chanter :
- Mais pourquoi quittes-tu le marché ? Je ne connais pas cette rue. Jamais tu ne m’y as emmené. Réponds, pourquoi vas-tu si vite ? Pense à ton cœur ; songe à ma carcasse… Ce grand truc, là-bas… ça ne serait pas une benne ? Des gens y jettent un sommier encore bon, des chaises qu’on pourrait revisser et même un ours en peluche ! Les enfants n’ont plus de cœur ! Adèle, à nos âges nous devrions éviter ce genre de spectacle… Mais que fais-tu ?
Tu ne vas pas jeter les cartes postales de tes amis vivants et disparus ?
Tu pourrais, au moins en relire quelques unes. Tiens, celle-là. Tout ce bleu et ce blanc. Elle est restée des années sur le bahut la carte de Maurice envoyée de Santorin… Adèleueueueu !
Ton insensibilité me blesseueueueu. Maintenant voilà que tu me soulèves, pourquoi me caresses-tu l’encolure ? Pourquoi ce baiser sur mon guidon ? Tu me gênes : nos rapports n’ont jamais été si ten… Tu me chantes une berceuse maintenant ! J’ai le vertige en haut de tes bras raidis… Au secours ! Help ! La benne est pleine de loups !
Marité Jacquet 2008-11-30
lundi 8 décembre 2008
Two lovers
Dans le film de James Gray avec Joaquin Phoenix, qu’est ce qu’elles lui trouvent, ces deux belles femmes la blonde et la brune à cet adolescent attardé ? Certes, il montre une énergie exceptionnelle sur le dance flor, mais le fils à la maman bien compréhensive porte en lui tellement de mystère, de tristesse. C’est m’a-t-on dit parce que les femmes aiment bien consoler, réparer ; là il y a du boulot. Pas plus que je n’ai compris le succès critique, je n’ai été concerné par le dilemme amoureux secouant une indolence plombante par quelque impulsivité à connotation suicidaire.
dimanche 7 décembre 2008
Souchon
Quand Carla fait sa promo, je passe à une autre station, pourtant je m’étais laissé séduire par sa voix douce, mais avec l’autre qui sature tous les hauts parleurs, ça fait beaucoup!
Quand Souchon passe sur toutes les radios : je cours.
L’autre soir je me suis calé devant la télé comme rarement : « le chanteur d’à côté ». Je me suis régalé bien sûr, avec cependant un petit fond de doute depuis que Nadine Morano a dit bien aimer « foule sentimentale ». Il n’y a plus de lieu où ils nous laisseraient en paix. Je ne lui contesterai pas d’aimer par exemple « avec le temps » du Ferré que je révère, ce n’est donc pas par sectarisme, mais est ce que cette chanson peut être ambiguë ? Pourtant elle dénonce les fausses idoles, les apparences trompeuses dont la madame sans gène de l’UMP est un exemple éclatant de jobardise. Comme lorsque mon chouchou Souchon interprète « dans les poulaillers d’acajou » devant Monory. Mais parfois le plaisir ne colle pas avec les convictions. Je m’étais bien donné le droit d’aimer « Le Nabucco » de Verdi qui retentissait pourtant dans les meetings de Le Pen. Au temps de « l’âge d’or », j’ai cru que les chansons changeraient le monde, et je me régale à « parachutes dorés », mais elles ne font que le raconter, et c’est déjà pas mal. Elles sont les témoins les plus vivaces du temps qui passe, et le vieillissement de nos idoles est le nôtre. « J’ai dix ans » encore des fois, et ce n’est pas moi qui lui reprocherait de parler des femmes en disant « les filles ». Les volutes de la nostalgie accompagnées du petit « pouet ! » pour ne pas se liquéfier : la vie rêvée, les trésors au fond des mers, nos faiblesses, nos maladresses, tout est léger, léger.
samedi 6 décembre 2008
On a … qu’on mérite !
Remplacer les pointillés par :
le P.S., la gauche , le président, les syndicats, la directrice, le mari, le fils, voire son propre visage a dit un écrivain quand on tend à s’attarder en ce monde.
Ces jours-ci bien de mes connaissances avaient des paroles compatissantes et des airs navrés à mon égard, moi tracteur socialo. Le chrysanthème pousse volontiers dans le champ des roses. Les débats à la tête du P.S. avaient apporté leurs fruits amers. Il était marrant aussi, le dessin représentant Ségolène sur fond de slogan : « Yes, we conne », marrant.
Comme la France compte 20 000 000 de sélectionneurs en foot, il en est encore plus de commentateurs politiques, davantage nourris des flashs matinaux que de discussions dans les salles sonores des M.J.C. ou dans les cantines refroidies.
Position facile du désoeuvré accédant à la sexagitude qui donnerait des leçons aux donneurs de leçons.
Pourtant le décalage saute aux yeux :
- Comment un personnel politique aussi médiocre représente des électeurs aussi excellents ?
- Comment tous les conseils avisés ne connaissent pas d’application ?
Les invitations qui tournent aux portes des boites mail pour ne pas finir comme la grenouille qu’on a mise à cuire doucement, nous distraient. Les mobilisations d’un jour pour défendre l’école ne sont pas à la hauteur des enjeux ; les pétitions, que nous sommes appelés quotidiennement à signer électroniquement, s’effacent. Pourtant des formes de luttes se cherchent une nouveauté depuis des décennies, sans emporter l’adhésion, malgré les lettres bien tournées qui circulent sur le net, rien ne bronche. En outre, Arlette Chabot a déjà assez de travail avec la dernière campagne gouvernementale ! Alors ?
L’état de faiblesse dans lequel nous nous retrouvons à gauche ne doit pas nous conduire à enfourcher le moindre cheval pourvu qu’il soit rétif, tant sur le plan local, que national, gagnés par l’hébétude devant les feux d’un Guévarisme sur canapé à « Vivement dimanche ».
Il ne s’agit pas de disserter d’engagements qui n’engagent à rien pour des enjeux où nous serions beaux mais impuissants, simplement faire vivre des exigences, à notre portée, dont il est question dans le livre des principes, où la solidarité s’inscrirait au pays du progrès humain entre égalité et liberté.
« Penser en liberté, agir en sincérité » Pierre Mendès France.
P.S. : En Gironde, dimanche dernier, le PS a emporté une élection partielle contre un intime de Sarkozy.
vendredi 5 décembre 2008
Nicolas De Staël
A une époque de vache maigre, il avait brûlé son plancher pour se chauffer. Orphelin très tôt après l’exil, sa première femme est morte d’épuisement, lui s’est jeté du haut de sa terrasse à Antibes en 1955 à 41 ans. Est-ce parce qu’il n’arrivait pas à surmonter le malentendu qui le portait aux nues du succès, lui le chercheur de vérité intense ? La violence gagnait sur la fragilité. Une vie peut elle se tenir dans une biographie ? Une œuvre échappe à son auteur. Et les banalités m’assaillent quand je m’essaie à écrire sur cet éminent artiste dont l’ambivalence me frappe : à la fois accessible, évident et aussi complexe et torturé. Héritier d’une culture picturale bien montrée par Christian Loubet, le conférencier à succès des amis du musée, la patte du géant passionné est reconnaissable entre toutes. Sous les projecteurs du Parc des Princes, les poudroiements solaires de la Sicile ou de l’Espagne, les scintillements des ports de Méditerranée, il nous restitue la lumière éloignant la césure entre abstraction et réalisme. Ses mouettes suivaient elles les corbeaux ultimes de Van Gogh ? Les tentations sont grandes d’interpréter ce parcours d’un millier de toiles où malgré la familiarité avec sa palette rouge et ses couteaux, il nous reste à décrypter encore bien des mystères dans ce portrait de femme couchée comme une montagne bleue, des ses paysages où les chemins mènent à « la ligne du fuite ». Sa toile inachevée, « l’orchestre » est sans musicien.
jeudi 4 décembre 2008
« Les années ». Annie Ernaux
Les années Ernaux sont à nous. Ses premiers livres m’avaient marqué : « La place », « les armoires vides »; ses récents, je les avis dédaignés, les trouvant impudiques. Celui là constitue le livre de sa vie, et par la magie de la littérature, celui de nos vies. Ce n’est pas du Jean Paul Dubois dans « une vie française » qui semblait avoir recopié le Quid pour dérouler ses exploits. Annie Ernaux, la femme, avec délicatesse déroule les années depuis 40 jusqu’à 2006. Je me sens comme elle, immobile au milieu des années qui passent alors qu’à l’adolescence, c’était le monde qui semblait immobile et nous changeants. Ses oublis sont les miens, ses espoirs, ses désenchantements et ses insuffisances : reconnaître ne rien comprendre des rivalités entre chiites et sunnites... Et puis la mémoire vive de petits détails sans importance qui côtoient de grands mouvements de l’histoire : Kiri le clown apparaît au détour d’une phrase où est pointée la perte d’influence de l’église. L’énoncer ainsi peut tromper, tant les macédoines nostalgiques destinées à taper à l’oeil se multiplient dans les rayonnages. Son livre est plutôt un palimpseste. Je suis allé regarder dans le dictionnaire : « Manuscrit sur parchemin dont la première écriture a été lavée ou grattée et sur lequel un nouveau texte a été écrit. » Ces pages correspondent exactement à cette définition où l’épaisseur du temps est palpable. Le parti pris de décrire quelques photographies qui scandent ces années est fécond et l’évolution des langages est bien saisie aussi. De la paysanne en 40 qui lâche un pet dans le train où se trouvent des Allemands et proclame à la cantonade : « si on peut pas leur dire, on va leur faire sentir », jusqu’au repas de famille ou l’auteur qui s’exprime à la troisième personne se sent comme « la cheftaine indulgente et sans âge d’une tribu éternellement adolescente », c’est la vie qui se reconstruit à chaque pas.
Elle n’abuse pas de citations:
« Je me suis appuyée à la beauté du monde
Et j’ai tenu l’odeur des saisons dans mes mains »
c’est de Anna de Noailles.
mercredi 3 décembre 2008
Evaluation. « Faire classe » # 11
Le terme évaluation est devenu omniprésent, les procédures se compliquent à l’excès pour arriver à des avis anodins où la confiance envers les professeurs est évacuée derrière des langages formatés et jargonnants. Les enfants sont souvent vus comme des dangers par une société qui se rassure bien vite quand l’uniforme met le couvercle, ou comme des victimes dans les télés irréalités. Pour le tout-venant : la notation qui pouvait s’exercer sans dramatisation avait le mérite d’être comprise de tous. Elle laisse place, à un baragouin qui accable les plus démunis, à une liasse de compétences en train de s’acquérir tellement épaisse que c’est la bonne volonté des parents qui s’émousse.
La reconnaissance des mérites prendra tout son prix si l’enseignant assume l’évaluation bienveillante des difficultés, des manques.
Nuancées, les appréciations, si elles sont simples, auront du poids.
A côté de la reprise de la quinzaine de notes acquises en évaluation ponctuelle ou continue, avec le récapitulatif du nombre de romans lus, de contes et de poèmes présentés, j’apportais un soin maniaque à l’appréciation que je portais sur chaque élève. J’évitais de paraphraser ce que les notes détaillaient : au brouillon d’abord, je pesais mes mots, ne voulant plus provoquer le désappointement légitime d’un père, en juin, à qui je proposais le redoublement pour son fils alors que je n’avais cessé de l’encourager tout au long de l’année. Plus long que d’apposer des croix dans un tableau standard, mais un lien authentique. Chaque fois que le bulletin était rendu, le descriptif des travaux effectués dans le trimestre était communiqué aux parents.
Le trajet individuel et le bilan collectif : oui, la satisfaction du chemin accompli.
- Pour les élèves les plus en difficulté, la simplicité devra être la règle.
Avancer cette recommandation peut relever de l’ouverture de portes déjà battantes mais situe le fossé creusé entre les praticiens et les experts.
Dans le temps, le maître respecté était du même bord que ceux auxquels il s’adressait. Aujourd’hui ceux qui singent la proximité se dissimulent derrière les mots de la caste pédagogique dans la lignée du dialecte notarial, judiciaire, législatif, cultureux, médical ou financier.
Les évaluations de sixième et de C.E.2 proposées à toute la France introduisaient une innovation intéressante : de nouvelles formes d’exercices, cependant peu renouvelées d’une année sur l’autre, une concrétisation des exigences attendues pour les élèves à ces niveaux, des modalités d'appréciations fines, un protocole commun pour le passage des épreuves.
Elles auraient pu donner lieu à des comparaisons riches; nous nous en étions d’ailleurs servis pour notre école en accordant plus d’attention à la géométrie où pêchaient nos élèves. Il est si rare dans le métier de pouvoir jauger d’une évolution, que notre fierté put se nourrir des progrès constatés. Mais nous ne pouvions avoir connaissance des résultats des écoles voisines. La porte reste grande ouverte aux rumeurs, au dénigrement constitutif de notre identité de français. La place est toute chaude pour les hebdomadaires maniaques des classements qui dégainent leur thermomètre de l’immobilier après l’anémomètre des lycées, le baromètre des hôpitaux et le doigt mouillé du frenchy le plus populaire. Ils auraient pu s’épargner un dossier, tant le prix du mètre carré coïncide avec le nombre de mentions au bac. Ces mentions sont venues discriminer des réussites trop artistiquement floues.
Carte scolaire : le problème se pose au collège, pas à l’école. Pourtant un C.P. raté se révèle autrement plus déterminant qu’un prof de maths défaillant en quatrième. La zone est implacable pour les plus exclus et de l’autre côté les libérales professions renforcent leur ghetto. Qui dira "zone de non droits" pour les nichés fiscaux ? Les parents, les autres, ont, très majoritairement, confiance en l’école. Mais il suffit d’un principal un peu niquedouille pour que la réputation d’un établissement plonge ; il sera plus difficile de remonter la pente pour un(e) déterminé(e) qui travaillera en confiance avec ses profs.
Pour nos cuisines personnelles : habituer les enfants à juger de leurs évolutions sans tomber dans les délires auto-évaluatifs qui furent prisés un temps jusqu’au bord des piscines ou sur les pentes du Vercors : « enlevez vos moufles et sortez vos stylos ! ». Les graphiques gérés par les élèves eux-mêmes s’avèrent parlants même si des tricheries viennent corriger quelques variations saisonnières ( prélude aux lissages diplomatiques dans les jurys de Bac). J’ai été marri un moment de l’aveu enjoué d’une ancienne élève dont le souvenir le plus marquant était de m’avoir bien roulé. « Mais ce n’est pas moi que vous trompez »n’ai-je même pas pathétiquement répliqué. Ma naïveté m’a protégé.
A passer son temps au trébuchet, l'instit qui pèse les résultats et non les âmes a moins de temps pour préparer sa classe. Les pratiques recommandées souhaitent ensevelir les maîtres sous l’abondance des items évaluatifs. L’obsession de la transparence, du contrôle : enlevez-moi ce spot, il m’éblouit. Le « maître » peut très bien souhaiter ne pas tout maîtriser.
J’ai abandonné, à mon tour, l’utopie qui bannissait tout examen. Terrible escroquerie : la sélection s’opère, insidieuse ou brutale quand elle a été repoussée : désastre de l’enseignement supérieur. J’ai gardé après mes années échevelées, l’idée que la vérification notée devait être un prétexte pour valoriser les travaux accomplis. Ceux ci n’ont jamais été l’objet de classement, même si les notes étaient proclamées parfois pour calculer collectivement la moyenne de classe (souvent autour de 14/20). Dextérité autour de l’usage de la calculatrice et réitération de la notion de moyenne. Oui, je faisais souvent calculer les moyennes après un contrôle par les élèves eux-mêmes. Je n’ai pas le souvenir de traumatismes mais d’un exercice rondement mené de mathématiques appliquées.
De toutes les façons, les enfants connaissent assez finement les potentiels de chacun.
Et partout ailleurs : que je te classe les villes fleuries, les hôpitaux, le meilleur passeur du championnat ; les moindres mots sont sondés à longueur de journées ! Mais l’excellence n’est plus valorisée à l’école ; les rites de remise des prix sont réservés aux gagnants du loto. Place aux benêts chez Bern.
J’annonçais chaque contrôle au tableau des projets hebdomadaires entre une exposition sur les illusions d’optique et le rendez-vous avec notre conteur. Le symbole en était la gravure d’une cordée à l’assaut d’une forte pente dont le produit dérivé figurait un montagnard en bois escaladant un baromètre à poser sur le tableau le moment venu. Un de mes malabars m’avait demandé de ne plus installer ce fétiche : il ne le prenait pas comme un jeu, mais comme un signe trop solennel qui lui « portait malheur ». Je lui ai demandé sa permission pour le réintroduire. Les interprétations enfantines nous dépassent, souvent.
Après chaque contrôle j’ouvrais l’institution « bureau des pleurs » : cela motivait des corrections attentives, rétablissait la justice d’un point oublié. Dédramatisation.
Un petit dessin agrémentait chaque feuille de contrôle avec une formule, si possible amusante, pour ne pas oublier de noter son nom.
Exemple picoré ailleurs pour un contrôle de conjugaison :
« Evite le présent lointain, le futur avancé, l'inactif présent, le passé postérieur, le pire - que -passé, le jamais possible, le futur achevé, le passé terminé, le plus-que-perdu. Note ton nom: »
Je m’efforçais à varier les exercices en me refusant de noter les objectifs pédagogiques exhaustifs à destination des bobos-parents dont abusent les néos convertis au jargon Ifumiens. Les consignes sont destinées aux enfants sans alourdir une double page. Je pensais que l’application que je leur avais portée serait suivie par un plus grand zèle du client qui devait « plancher ». Une fois corrigée, la feuille rejoignait les autres dans le classeur spécifique aux contrôles que je n’appelais pas compositions mais cela en avait bien cette solennité destinée à motiver les troupes sans assommer les plus fragiles.
Pour ceux qui ne récoltent que quelques maigres points, trop de notes en dessous de la ligne de flottaison devenues à force, illisibles,des démarches existent pour apaiser des angoisses bloquantes : les comptes retiennent le positif. Quarante cinq mots dans la dictée : on notera les mots réussis : 42 sur 45. On aura dénombré quand même 3 fautes, oh pardon trois erreurs à ne pas corriger en rouge traumatisant ! La bêtise a parfois le sourire angélique, c’est alors une grimace.
La reconnaissance des mérites prendra tout son prix si l’enseignant assume l’évaluation bienveillante des difficultés, des manques.
Nuancées, les appréciations, si elles sont simples, auront du poids.
A côté de la reprise de la quinzaine de notes acquises en évaluation ponctuelle ou continue, avec le récapitulatif du nombre de romans lus, de contes et de poèmes présentés, j’apportais un soin maniaque à l’appréciation que je portais sur chaque élève. J’évitais de paraphraser ce que les notes détaillaient : au brouillon d’abord, je pesais mes mots, ne voulant plus provoquer le désappointement légitime d’un père, en juin, à qui je proposais le redoublement pour son fils alors que je n’avais cessé de l’encourager tout au long de l’année. Plus long que d’apposer des croix dans un tableau standard, mais un lien authentique. Chaque fois que le bulletin était rendu, le descriptif des travaux effectués dans le trimestre était communiqué aux parents.
Le trajet individuel et le bilan collectif : oui, la satisfaction du chemin accompli.
- Pour les élèves les plus en difficulté, la simplicité devra être la règle.
Avancer cette recommandation peut relever de l’ouverture de portes déjà battantes mais situe le fossé creusé entre les praticiens et les experts.
Dans le temps, le maître respecté était du même bord que ceux auxquels il s’adressait. Aujourd’hui ceux qui singent la proximité se dissimulent derrière les mots de la caste pédagogique dans la lignée du dialecte notarial, judiciaire, législatif, cultureux, médical ou financier.
Les évaluations de sixième et de C.E.2 proposées à toute la France introduisaient une innovation intéressante : de nouvelles formes d’exercices, cependant peu renouvelées d’une année sur l’autre, une concrétisation des exigences attendues pour les élèves à ces niveaux, des modalités d'appréciations fines, un protocole commun pour le passage des épreuves.
Elles auraient pu donner lieu à des comparaisons riches; nous nous en étions d’ailleurs servis pour notre école en accordant plus d’attention à la géométrie où pêchaient nos élèves. Il est si rare dans le métier de pouvoir jauger d’une évolution, que notre fierté put se nourrir des progrès constatés. Mais nous ne pouvions avoir connaissance des résultats des écoles voisines. La porte reste grande ouverte aux rumeurs, au dénigrement constitutif de notre identité de français. La place est toute chaude pour les hebdomadaires maniaques des classements qui dégainent leur thermomètre de l’immobilier après l’anémomètre des lycées, le baromètre des hôpitaux et le doigt mouillé du frenchy le plus populaire. Ils auraient pu s’épargner un dossier, tant le prix du mètre carré coïncide avec le nombre de mentions au bac. Ces mentions sont venues discriminer des réussites trop artistiquement floues.
Carte scolaire : le problème se pose au collège, pas à l’école. Pourtant un C.P. raté se révèle autrement plus déterminant qu’un prof de maths défaillant en quatrième. La zone est implacable pour les plus exclus et de l’autre côté les libérales professions renforcent leur ghetto. Qui dira "zone de non droits" pour les nichés fiscaux ? Les parents, les autres, ont, très majoritairement, confiance en l’école. Mais il suffit d’un principal un peu niquedouille pour que la réputation d’un établissement plonge ; il sera plus difficile de remonter la pente pour un(e) déterminé(e) qui travaillera en confiance avec ses profs.
Pour nos cuisines personnelles : habituer les enfants à juger de leurs évolutions sans tomber dans les délires auto-évaluatifs qui furent prisés un temps jusqu’au bord des piscines ou sur les pentes du Vercors : « enlevez vos moufles et sortez vos stylos ! ». Les graphiques gérés par les élèves eux-mêmes s’avèrent parlants même si des tricheries viennent corriger quelques variations saisonnières ( prélude aux lissages diplomatiques dans les jurys de Bac). J’ai été marri un moment de l’aveu enjoué d’une ancienne élève dont le souvenir le plus marquant était de m’avoir bien roulé. « Mais ce n’est pas moi que vous trompez »n’ai-je même pas pathétiquement répliqué. Ma naïveté m’a protégé.
A passer son temps au trébuchet, l'instit qui pèse les résultats et non les âmes a moins de temps pour préparer sa classe. Les pratiques recommandées souhaitent ensevelir les maîtres sous l’abondance des items évaluatifs. L’obsession de la transparence, du contrôle : enlevez-moi ce spot, il m’éblouit. Le « maître » peut très bien souhaiter ne pas tout maîtriser.
J’ai abandonné, à mon tour, l’utopie qui bannissait tout examen. Terrible escroquerie : la sélection s’opère, insidieuse ou brutale quand elle a été repoussée : désastre de l’enseignement supérieur. J’ai gardé après mes années échevelées, l’idée que la vérification notée devait être un prétexte pour valoriser les travaux accomplis. Ceux ci n’ont jamais été l’objet de classement, même si les notes étaient proclamées parfois pour calculer collectivement la moyenne de classe (souvent autour de 14/20). Dextérité autour de l’usage de la calculatrice et réitération de la notion de moyenne. Oui, je faisais souvent calculer les moyennes après un contrôle par les élèves eux-mêmes. Je n’ai pas le souvenir de traumatismes mais d’un exercice rondement mené de mathématiques appliquées.
De toutes les façons, les enfants connaissent assez finement les potentiels de chacun.
Et partout ailleurs : que je te classe les villes fleuries, les hôpitaux, le meilleur passeur du championnat ; les moindres mots sont sondés à longueur de journées ! Mais l’excellence n’est plus valorisée à l’école ; les rites de remise des prix sont réservés aux gagnants du loto. Place aux benêts chez Bern.
J’annonçais chaque contrôle au tableau des projets hebdomadaires entre une exposition sur les illusions d’optique et le rendez-vous avec notre conteur. Le symbole en était la gravure d’une cordée à l’assaut d’une forte pente dont le produit dérivé figurait un montagnard en bois escaladant un baromètre à poser sur le tableau le moment venu. Un de mes malabars m’avait demandé de ne plus installer ce fétiche : il ne le prenait pas comme un jeu, mais comme un signe trop solennel qui lui « portait malheur ». Je lui ai demandé sa permission pour le réintroduire. Les interprétations enfantines nous dépassent, souvent.
Après chaque contrôle j’ouvrais l’institution « bureau des pleurs » : cela motivait des corrections attentives, rétablissait la justice d’un point oublié. Dédramatisation.
Un petit dessin agrémentait chaque feuille de contrôle avec une formule, si possible amusante, pour ne pas oublier de noter son nom.
Exemple picoré ailleurs pour un contrôle de conjugaison :
« Evite le présent lointain, le futur avancé, l'inactif présent, le passé postérieur, le pire - que -passé, le jamais possible, le futur achevé, le passé terminé, le plus-que-perdu. Note ton nom: »
Je m’efforçais à varier les exercices en me refusant de noter les objectifs pédagogiques exhaustifs à destination des bobos-parents dont abusent les néos convertis au jargon Ifumiens. Les consignes sont destinées aux enfants sans alourdir une double page. Je pensais que l’application que je leur avais portée serait suivie par un plus grand zèle du client qui devait « plancher ». Une fois corrigée, la feuille rejoignait les autres dans le classeur spécifique aux contrôles que je n’appelais pas compositions mais cela en avait bien cette solennité destinée à motiver les troupes sans assommer les plus fragiles.
Pour ceux qui ne récoltent que quelques maigres points, trop de notes en dessous de la ligne de flottaison devenues à force, illisibles,des démarches existent pour apaiser des angoisses bloquantes : les comptes retiennent le positif. Quarante cinq mots dans la dictée : on notera les mots réussis : 42 sur 45. On aura dénombré quand même 3 fautes, oh pardon trois erreurs à ne pas corriger en rouge traumatisant ! La bêtise a parfois le sourire angélique, c’est alors une grimace.
mardi 2 décembre 2008
Obludarium
Sous chapiteau, le cabaret des monstres des fils de Milos Forman. « Le cirque du soleil » rencontre un succès planétaire ; à côté de la MC2 sur la pelouse enneigée, c'est l’aquarium des ténèbres qui a dressé ses balcons. Des images du XIX° siècle surgissent avec femme à barbe en collant poilu, hercule de foire, nains en tissus et sirène en son filet. L’invitation aux spectateurs, de donner du leur en actionnant la manivelle à générer de la lumière dans les loges, préfigure peut être notre XXI° à l’énergie problématique. En tous cas une occasion de s’impliquer dans cette entreprise poétique et énergique aux accents slaves universels. Ballets bien réglés, acrobaties méritoires, humour décalé, on sourit et nous nous questionnons, sur notre embarras parfois. Des poissons volent, des chevaux dansent en ombres chinoises sous la robe immense d’une trapéziste ou en pantin géant. La musique anime les masques grotesques et depuis l’intérieur de cette boite à musique nous interrogeons à nouveau notre idée de l’homme et celle de la femme à barbe. Epatant, original, jusqu’au 19 décembre.
lundi 1 décembre 2008
« Les bureaux de Dieu »
Des militantes chevronnées du planning n’étaient pas convaincues par le titre que je trouve, ma foi- si je puis me permettre- poétique et accrocheur. Ne disait-on pas jadis, en parlant d’une famille accueillante : « chez eux, c’est la maison du bon dieu » et pas seulement de la part de négationnistes du Darwinisme ? Dans cet appartement qui reçoit si bien les femmes, au dessus de la ville, où se jouent les naissances, cela n’appelle pas forcément de divinité mais en tous cas, il est question de la gravité de la vie, de la création de soi : « Vous pourrez devenir quelqu’un d’autre pour les autres ».
Induit par le commentaire d’une chroniqueuse d’Inter, j’étais parti avec mon questionnement à priori : « C’est incroyable qu’il y ait encore besoin du Planning avec toutes les informations qui sont diffusées aujourd’hui concernant la reproduction, la contraception ! »
Eh bien, c’est autre chose qui se joue. A part quelques cas rares d’ignorance, des adolescentes rifougniantes, mais c’est normal; les besoins de paroles sont primordiaux, que ce soit pour la jeune en jeans ou pour la stressée au collier de perles. Le film rend palpable la qualité de l’écoute. Les entretiens sont remarquablement menés avec des actrices célèbres, qui ne se montrent pas forcément exemplaires, mais toujours remarquablement authentiques. J’ai encore vérifié dans ce film que ce n’est pas parce que l’on sait que l’on fait.