Quand je donnais un avis à mes élèves, au stylo rouge, j’espérais que chacun
aille au maximum de ses possibilités. Dans le prolongement d'un enseignement
destiné à les accompagner dans leur grandissement, j’ai aimé l’expression qui s’appliquait
dans le champ politique : « entrepreneur
de soi même », quand la responsabilité construit la liberté.
Tant de belles expressions sont devenues hors sol en ces
temps bourbeux.
Quand vais-je les abandonner, elles qui habitaient les
écoles estampillées « liberté, égalité, fraternité », peluches
« Bisounours » effilochées, salies ?
Chaque jour apparaissent aux lucarnes : le malheureux
étudiant, le restaurateur accablé, le misérable intermittent, le pauvre prof,
l’infortunée infirmière, le triste teufeur…
Il y a un intrus dans la liste, comme est dévalué le terme « dictature »
apposé à la moindre contrariété, et que dire de la situation au Liban quand
nous sommes privés de cinéma ? Parmi les éclaboussures de l'actualité: « Tous au régime sans viande » ne me semble pas de la première urgence.
Pour m’extraire de la cohorte des affligés, il suffit de
tourner la tête et rire de la malice de mes petits enfants, apprécier la
générosité de mes amis, m’émerveiller de la beauté du pays et des délices
de la saison.
Mais ce jardin privé n’est pas à l’abri.
Nous sommes-nous
faits à l’idée qu’il faudrait vivre avec les épidémies ?
Il est facile
pour le retraité d’approuver l’expression « il suffit de traverser la
rue » pour répondre à la question : comment nomme-t-on la « qualité de l'esprit qui comprend et
s'adapte facilement » ? L’intelligence.
Par contre il suffit d’aller faire un
tour sur les réseaux, que je crains et qui m’attirent, pour que la croyance aux
capacités de discernement de nos contemporains s’effondre. La justesse d'un jugement n'est surtout pas corrélée
au niveau d’études : j’ai connu des militants ouvriers bien plus
pertinents que certains universitaires dans les colonnes du
« Monde ». Les islamo-gauchistes ne veulent pas reconnaître les
islamo-fascistes, ignorant le sens des mots, eux qui
voient le Maréchal (Pétain) au coin de tous les boulevards. Ces chercheurs se sentent atteints dans leur liberté mais acceptent bien peu des opinions différentes des leurs.
Y a-t-il à hésiter entre la bonté de l’homme et sa
malveillance ?
Nous sommes d’ici et maintenant, que la société nous accable
ou qu’elle nous régale.
Le virus a creusé les traits du monde d’avant, contenu dans
celui d’aujourd’hui, préfigurant celui d’après. Sera-t-il vert, vert de gris ou
de toutes les couleurs ?
Les règles religieuses les plus rétrogrades ont cru alors que la foi en un monde meilleur, la foi en l'homme s'est étiolée, même chez ceux qui poursuivaient seulement la rouge étoile. Est ce que tous ceux là nous montreront que la maitrise de la crise dépend de chacun de nous, après avoir mis
au pré les boucs émissaires et à la déchetterie les bonbonnes amères?
Pour respecter le verdict des urnes, je
sais aussi que les masses passent parfois à côté de l’essentiel. J’allais écrire :
à l’heure où la planète brûle, la thématique du droit à l’avortement qui anime
les foules dans de nombreux pays me semble ne pas aller à l’essentiel. A moins
que ce soit comme la COVID un moyen de régler le problème de la surpopulation
mondiale.
Le blanc boomer râle encore, mais ne mettra pas de
majuscules aux opprimés, fussent-ils de couleur et point de « e »
surnuméraires auprès de mes femmes.
« L’ennemi est
bête : il croit que c’est nous l’ennemi alors que c’est lui »
Pierre Desproges.
Je partage largement tes remarques ce matin, Guy.
RépondreSupprimerMais je reste interloquée par le choix qu'ont fait nos gouvernants de QUI peut travailler par ces temps, et qui ne peut pas.
On ne peut pas choisir sans qu'apparaissent derrière, des valeurs, les choses en lesquelles on croit, SEPAREES de choses que nous estimons moins importantes. Une volonté de trier... l'essentiel du superflu ? l'essentiel du LUXE ?
Et en faisant cette séparation on enlève le masque à ce qu'on croit, par la même occasion. Ce qui était implicite devient plus ou moins explicite.
Je crois qu'on doit revenir à la phrase, si capitale, que l'Homme ne vit pas que du pain, mais de l'Esprit.
C'est une phrase de l'Evangile qui porte son poids.
Si l'Homme ne vit pas QUE du pain, on pourrait dire qu'il ne meurt pas non plus QUE du manque de pain, ou du manque de ce que la société civile décrète comme étant essentiel au maintien de son corps considéré comme un assemblage de pièces détachées. Je crois que notre civilisation considère notre corps en ce moment comme un assemblage de pièces détachées.
Faire cela, en soi, ouvre la porte à une très grande souffrance qui ne se laissera pas mesurer. A mon avis.