Il est plaisant ce jeu avec le temps lorsque l’on attend la
dernière production d’un auteur qu’on apprécie
et qu’il est assouvi tout en étant contrarié par le délai
qu’on aura à attendre pour le prochain livre.
Comme il est rassurant de retrouver ces terres en Massif
Central du côté d’Aurillac dans le Cantal:
« On les avait vrillés
l’un à l’autre, noués, descendus du Nord lointain du département, un pays pentu,
bourru, caparaçonné de neiges interminables entre novembre et avril, et striés
d’orages impérieux pendant les deux mois d’été éruptifs où tout ce que le sud
du département compte de domaines agricoles notoires envoie à l’estive,
là-haut, au-delà du Puy-Mary et du Lioran, sur les plateaux du Cézalier ou du
Limon, force troupeaux de vaches rouges promises à la griserie longue des
montagnes fourrées d’herbe grasse. »
J’ai été d’abord dérouté par une chronologie chamboulée mais
mon inconditionnalité envers l’auteur m’a conduit à y voir une habileté
bienvenue lorsque les absents et les morts sont tellement présents dans
l’épaisseur d’une vie familiale qui s’acharne à vivre.
« Il y a eu des
complications, des attentes, des déceptions, mais ça n’a pas tourné au drame
parce que Juliette et André ont le goût du bonheur, de la joie, des choses
vives et douces qui font du bien. »
Pour le plaisir des mots pesés, une phrase parmi les 171
pages dit bien des choses :
« Le multiservice ouvrait
à quinze heures, l’église était fermée mais le cimetière pavoisé de frais
aguichait l’œil à flanc de coteau, inondé de soleil roux, presque
sémillant ; des noms, des dates, des durées de vie que l’on calculait
presque malgré soi, quelques caveaux péremptoires plantés avec aplomb au milieu
des tombes quasiment alanguies dans la tiédeur insolente de l’air. »
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