Des mystères vont être levés, d’autres apparaissent, ainsi
ce très célèbre dessin à la sanguine de Léonard de Vinci ne serait pas son « autoportrait »
alors qu’il a fixé pour des siècles, l’image de l’ingénieur,
astronome,
philosophe,
mathématicien,
sculpteur,
architecte,
ingénieur, diplomate,
inventeur,
poète,
musicien,
physicien,
botaniste,
chimiste…
peintre.
Alors qu’André Chastel, historien de la Renaissance écrit :
« On a démesurément exagéré
l'originalité de Léonard », Daniel Arasse peut constater : « Dieu mis à part, Léonard de Vinci est sans
doute l'artiste sur lequel on a le plus écrit. »
Et bien que depuis sa naissance à Vinci « à la troisième heure de la nuit », le 15 avril
1452, comme
l’avait noté son grand père notaire, Léonard a laissé, éparpillées dans le
monde entier, plusieurs milliers de pages, remplies de son écriture en miroir,
sur ses recherches, mélangées à des comptes de ménage, il a très peu parlé de
lui.
Le nombre de tableaux qui lui sont attribués est très
faible :
« - Quand
finirez-vous ce portrait ?
- Je finirai quand je
pourrai. »
A l’époque, le travail s’effectuait en équipe pour les
fresques et aussi dans les ateliers (bottega), comme c’est le cas pour la « Madone au bas-relief »
de Cesare Da
sesto aux visages léonardesques.
Au XV° siècle, le culte marial avait pris son essor, Van der Wayden peignait « Saint Luc dessinant la Vierge ».
D’après une légende du 1er siècle, elle serait morte à 72 ans après
son Assomption, mais aurait voulu que son image en jeune femme demeure.
Au XII° à l’époque romane, la vierge et son fils sont très droits. Avec « Notre-Dame de Baroille », Jésus bénit de ses trois doigts désignant la trinité alors que les deux doigts collés à la paume indiquent la double nature à la fois divine et mortelle de Dieu.
Au XII° à l’époque romane, la vierge et son fils sont très droits. Avec « Notre-Dame de Baroille », Jésus bénit de ses trois doigts désignant la trinité alors que les deux doigts collés à la paume indiquent la double nature à la fois divine et mortelle de Dieu.
Au XIV° siècle, à l’époque gothique la « Vierge à l’Enfant
de la Sainte-Chapelle »
est une vraie femme se rejetant en arrière, son
enfant est lourd, elle intercède entre la terre et le ciel.
« La vierge de l’annonciation » en position
d’humilité, alors qu’elle peut être en majesté sur son trône, est signée Simone Martini.
Jusqu’à la Renaissance les artistes n’étaient pas distingués, ils n’étaient
qu’un outil dans la main du Créateur, des artisans.
Fra Giovani était tellement doux et beau qu’il fut surnommé Fra Angelico,
sa « Vierge de l’annonciation », tête
découverte et cheveux en désordre, un peu, est de la blondeur de la pureté.
La « Madonna and child » de Verrocchio,
le maître de Léonard, n’est plus sur le fond doré qui évoquait la Jérusalem céleste,
mais dans un espace rempli d’air et de lumière.
Luis de
Moralès, l’espagnol, a retenu la technique du sfumato, « La Vierge et l'Enfant » est tragique, l’archange ne lui a rien caché, elle
sait.
Commencée par de Vinci en 1478, cette « Madone Benois »
du nom de son avant dernier propriétaire, fut la dernière acquisition de la
famille impériale russe. Effectuée à l’huile suivant le tout nouveau procédé
venant des Flamands, cette jeune vierge-on était adulte à 14 ans- coiffée d’une
multitude de nattes, a épilé son front à la mode du XV°.Tout est symbole, le
bijou en cristal de roche entouré de perles souligne l’Immaculée Conception, la
pureté. La vierge regarde l’enfant qui regarde la fleur à quatre pétales comme
la croix. Les vingt cinq couches de glacis ont permis de traduire avec
délicatesse, la lumière qui vient caresser les visages. Au dessus de la terre
on ne voit que le ciel. Les auréoles ont été rajoutées au XIX° siècle.
La « Madone
Litta » est d’une beauté au-delà du temps terrestre, le front a la même
longueur que le nez et égale la distance du nez au menton. En bleu et rouge, et
son col doré retrouvent les couleurs du
moyen-âge. On
ne voit pas la prunelle de ses yeux, mais la tendresse est dans les plis. Ses
bras forment comme un œuf autour de l’enfant qui nous interpelle. Le petit
tient un chardonneret, celui de la Passion.
Giovanni Francesco Melzi le compagnon des derniers temps s’est chargé
de classer les écrits de Léonard de Vinci, il a réalisé d’après une ébauche de
son maître, cette « Flore » entourée d’anémones à six pétales comme les
branches de l’étoile de David, dont la vierge serait une descendante,
d’achillées associées à la fertilité et de jasmin
représentant la pureté.
Léonard de Vinci est mort il y a 500
ans.
Merci, Guy, pour cette présentation succincte qui va à l'essentiel.
RépondreSupprimerJe relève l'expression "attaché scientifique" du Musée de Saint Petersbourg...
J'avais déjà lu dans le livre d'Arasse que le sanguin de Leonardo n'était vraisemblablement pas un autoportrait.
Quand on songe que l'essor scientifique en Occident s'emballe avec les peintres de la Renaissance, véritable.. scientifiques dans leurs expérimentations avec la matière qui devait être agencée pour créer un tableau.
Je vois bien l'élément révolutionnaire de la Renaissance dans l'irruption du paysage, souvent une représentation de la nature, dans le fond des tableaux. Le signe indubitable que l'Homme, encore une fois, était travaillé par la nécessité de redéfinir ses attaches au monde (souvent terrestre) dans lequel il prenait place.
Et la vie qui explose dans le tableau de Morales où la jeune vierge joue avec son enfant montre le désir humain de s'affranchir d'un carcan devenu trop rigide, trop brimant et desséchant pour les êtres de chair que nous sommes.
Le culte marial était une des expressions les plus nobles de la place de la femme consentante, obéissante de son plein gré, dans la société. (Pas de raison de s'imaginer que ce n'était qu'à la femme qu'il était demandé d'obéir, d'ailleurs.)
Le culte marial glorifiait la force de la douceur de la reine du Ciel, et rien n'empêchait les mortels d'ici bas de s'identifier à leur insu même à sa noblesse qui n'était pas héréditaire, ni déterminée par le rang ou les richesses.
La religion chrétienne offre de multiples possibilités aux déshérités de ne pas avoir honte de leur condition ou de leur pauvreté, en insistant sur une autre définition de la richesse qui fait concurrence à nos idées simplistes, utilitaires, matérialistes, et cyniques sur l'aristocratie à l'époque moderne.
L'artiste anonyme, me semble-t-il, répond au désir légitime de vouloir focaliser toute l'attention du fidèle sur l'oeuvre elle-même, en voilant l'identité de l'artiste artisan, encore une fois au sens noble du terme. Ce vieil antagonisme entre ce qui est dit/celui qui le dit ne nous laissera jamais en repos.
Encore merci.