vendredi 2 février 2018

L'école creuse...

Depuis qu’en matière scolaire, l’affirmation : « le niveau monte » s’est retrouvée à sec, la ritournelle: « l’école creuse les inégalités » est mise à toutes les causes.
Les condamnations envers un système excluant par défaut sont unanimes pourtant dès qu’il est question de réformer, tous les conservatismes se liguent au nom de valeurs qu’ils savent bafouées tous les matins et pas seulement quand la prof dégueule sa peur sur le parking du lycée technique.
Féodalités/ Versailles, Girondins/ Jacobins, Rocard/ Mitterrand, CFDT/FO, établissements/ministère, responsabilité/ égalité, ZEP et zigzags.
Les « progressistes » de naguère en sont à souhaiter le statu quo, disant que la réforme du bac est précipitée, alors que ça fait bien 30 ans qu’on en cause.
Le progrès n’a plus de camp : ceux dont c’était la philosophie mettent les avancées scientifiques dans le même panier que les astuces marketing avec l’obsolescence programmée qui crame nos objets de consommation et puis de toutes façons c'est la faute de Bercy.
Est-ce que l’égalité a été réalisée dans notre république parce que tout le monde va faire un tour sur le Campus ?
Dans le pays où il y a 30 millions de sélectionneurs pour le foot, pourquoi ces pudeurs de gazelle autour du mot « sélection ». La sélection s’opère actuellement par l’échec, l’abandon. Le tirage au sort pour accéder à des formations est un scandale, mais on fait comme si.
C’est que la paresse intellectuelle venue au secours du manque de courage, est le produit de toutes ces années où le mot « travail » était banni. Un brin d’exigence face à l’effondrement des compétences des étudiants semblerait pourtant urgent.
Refrain : crise des vocations. Qui pour s’occuper des vieux, des enfants, des malades, des moteurs, des trains et de la plonge en week-end… ? Ceux qui sont au boulot et qui font exploser les pointeuses se racornissent devant la disqualification de leurs professions. L’éleveur qui se lève à point d’heure pour 300 € le mois et le boulanger qui met la clé sous la porte peuvent bougonner.
A défaut d’être Youtubeur, vendeur ou traider tout le monde ne peut devenir développeur, chercheur, ingénieur, professeur, docteur...
La cohérence qui semble se déployer concernant les réformes de l’enseignement technique, technologique, supérieur, pourrait apporter un espoir de rénovation d’un système qui ne met pas les jeunes en face d’un boulot qui leur conviendrait, et ne répond pas aux besoins de la société, pas plus qu’il n’est porteur d’une culture générale épanouissante.
Le grand oral dont nous avons bénéficié en 68 est une mesure qui me semble bienvenue pour mesurer l’authenticité des compétences d’un candidat dans la mesure où la préparation en amont peut modifier les pratiques en permettant peut être une réelle appropriation des savoirs.
Des groupes de tailles variables pourraient permettre de travailler ce domaine où les ordis ne sont pas indispensables.
Le contrôle continu, s’il peut motiver les élèves tout au long de la scolarité, plutôt qu'un faux examen où les marchands d’articles divers s’électrisent, pose le problème de l’égalité des exigences. D’ailleurs dans l’ordre des réputations d’établissements, les valeurs se sont parfois inversées qui font échapper le lycée prestigieux, Champollion, à des collégiens du secteur qui préfèrent plus de facilités ailleurs. Les contrôles à Pierre Perret seront plus faciles qu’à Henri III, mais la formation aussi a toujours été d’un niveau différent. Le cadre national ne cadre plus grand-chose et la dramatisation des enjeux autour du bac en ferait oublier le drame du chômage des jeunes. Les zones sont inégales : des moyens ont été attribués aux plus fragiles, mais soit on cache l’hétérogénéité des établissements par un bac maintenu genre village Potemkine, soit on adapte l’examen aux réalités dont la cruauté appellera des réformes qui vont bien au-delà des murs de l’école : logement, lutte contre le chômage,  pour retrouver confiance en soi, en son pays.
« La reproduction des inégalités sociales par l'école vient de la mise en œuvre d'un égalitarisme formel, à savoir que l'école traite comme « égaux en droits » des individus « inégaux en fait » c'est-à-dire inégalement préparés par leur culture familiale à assimiler un message pédagogique. »
Pierre Bourdieu
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Cette semaine le dessin vient de Courrier International  ( Gatis Sluka Lettonie)

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