Je vais ainsi parsemer le texte à venir de proverbes glanés
sur Internet en pensant à mon grand-père qui puisait volontiers dans d'autres boîtes à
maximes.
Depuis que la montre est devenue obsolète, sauf dans les
suppléments luxe du « Monde », le monde en est à la minute près ;
désormais il n’est plus « moins le quart » mais « 23 : 44 :
59 ».
Ayant fait mon temps, j’ai le privilège de le prendre, le
temps, et de gloser sur les minutes de cette liberté augmentée, devenue un
cadeau échappant, un peu, à la marchandisation.
Au moment où faire le ménage touche à la méditation, acheter
ses carottes en plein air devient un
acte militant et choisir de passer devant une caissière plutôt que d’utiliser
le lecteur à code barre, digne d’un reportage pour site alternatif.
Ainsi aller au marché constituerait une belle affaire
conviviale, et lorsque je complète mes achats au super marché, je me permets de
regarder d’un œil critique des employés effectuer les courses pour quelques
affairés aisés dédaignant les lieux communs.
« Il faut prendre
le temps comme il vient, les hommes pour ce qu'ils sont, et l'argent pour ce
qu'il vaut. »
Alors que les protestations égalitaires semblent gagner du
terrain avec des enfants ayant exclusivement voix au chapitre dans la
liturgie familiale et que grammaire amère vient poser ses « e »
jusque dans nos accords, les larbins se multiplient.
Autrement dit :
les emplois, qui se développent par chez nous, sont surtout de « service ».
Les inclus n’ayant plus le temps de s’occuper de leurs parents - j’en suis -
payent des aides à la personne. Drive-in et Quick, « kiss and ride »
et dépose minute pour tous. Un coach est requis à destination des fortunés,
quand même pour s’occuper de soi, on ne se suffit plus.
Il n’y a pas de sot métier http://blog-de-guy.blogspot.fr/2017/11/selection.html
mais les maisons de retraite ont du mal à recruter, les artisans ne trouvent
pas de relève et la conscience professionnelle se fait moquer. La « valeur
travail », comme elle avait été énoncée par un histrion agité du passé,
nous a semblés digne de mépris et nos mômes peu partants pour se faire suer le
burn out. Alors il ne nous reste plus
qu’à compter sur quelques échappés des Caïmans afin qu’ils laissent ruisseler
sur leurs plumes dorées quelques euros destinés à nos retraites passées à
mirer le temps.
Parmi les (nombreux) mérites de notre énergique président,
sa volonté de ne pas se laisser dicter son agenda par la sphère journalistique
est opérante pour attester de sa volonté politique. Les médiapartitifs n’y
verront rien. Ces messieurs tellement
bien mis (moralement) ne cessent de vitupérer mais acceptent mal critiques et
questions dérangeantes les concernant. La gauche ne sait plus s’adresser au
pays, ne se voit plus qu’en « président des niches », elle en arrive à
organiser des réunions type apartheid, racisé.e.s !
Les errements, les maladresses des Sarkollande servent bien
notre sémillant prés’ qui sait retenir
les leçons. Il ajuste, rectifie promptement, sans en faire une pusillanime
méthode, légitimant ainsi ses positions lorsqu’elles ne bougent pas. La voix de
notre nation se fait à nouveau entendre dans un monde aussi pressé qu’englué
dans son passé.
Entre instantané et coup de rétro, sous les aiguilles de
l’école communale qui donnait jadis le tempo, qu’avons-nous fait ?
Nous avons couru, « jeunes hommes modernes »
ainsi se nommaient les rédacteurs de feu « Actuel », et je ne fus pas
le dernier à abuser de la photocopieuse
pour gagner du temps.
L’hégémonique machine devenue le lieu central de la
sociabilité du milieu éducatif est aussi fauteuse de trous pour exercices
faciles à exécuter et à corriger. Plus de rédactions maladroites, de graphies
approximatives : un mot, un vrai/faux… et voilà pourquoi nos journalistes
après un long exposé demandent à leurs interlocuteurs de répondre par un
« oui » ou un « non ». C'est que pour des élèves devenus
grands, expliciter une démarche devient difficile, quant à rédiger, il y a des
logiciels pour ça et puis si peu de temps pour examiner une…comment dites
vous ? Une copie. J’ai réunion.
« Tous les Blancs
ont une montre, mais ils n'ont jamais le temps. » Proverbe sénégalais.
………………
Dessins du « Canard Enchaîné » et de « Courrier
international » qui a repris un dessin de Gado paru dans le « Daily
Nation » de Nairobi. Sur la voiture : « politique africaine de
la France ». Sur le sac à dos : « bagage colonial ». Sur le
papier : « feuille de route ».
Superbe écrit, Guy. Vraiment, j'en suis presqu'envieuse, tellement ton style est intelligent, cultivé, pondéré, soigné.
RépondreSupprimerPour le temps... je me souviens du jour à la poste de Saint Egrève qu'une employée du service publique, pour... tuer le temps... alors que j'attendais au guichet, avait sorti "le temps, c'est de l'argent".
Elle l'a proféré avec les meilleures intentions du monde, cette phrase dont la banalité.. du mal..passe inaperçue.
La phrase fait partie de la catéchèse de la modernité : tu sais, ces phrases qui... n'ont pas de sujet, mais qui sont censées nous rassembler pour nous faire aller tous dans la même direction, sans nous interroger, mais avec une allure vive, de préférence, sans traîner les pieds, et sans nous arrêter pour respirer les roses en bordure de la route (quelles roses ?...).
Je lui ai répondu que cette phrase était un mensonge, qu'on pouvait regagner de l'argent, mais pas du temps, qui, une fois passé... reste derrière.
L'autre jour, à la Poste, j'ai entendu par hasard une autre de ces phrases qui illustrent la banalité du mal, et notre difficulté pour l'appréhender dans le monde moderne : "personne n'est irremplaçable".
Certes, il y a du vrai dans cette phrase qu'on peut lire "dans l'exercice de sa fonction personne n'est irremplaçable", mais... dans le lieu où la personne n'exercice pas une fonction (n'est pas donc.. fonctionnaire, ni salarié), cette personne là, en chair et en os, ou dans la particularité de son style écrit, est Unique.
Notre dernière grande guerre en Europe tournait beaucoup autour de cette problématique que nous n'avons pas dépassée, pour la simple raison qu'elle est indépassable...Elle est un paradoxe constituant de notre être au monde, social ou pas.
C'est un texte dense et mûrement réfléchi, il y aurait de quoi méditer et essayer de répondre à chaque phrase. Félicitations (nous verrons-nous un jour autour d'un café?)
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