vendredi 22 septembre 2017

Le travail a-t-il un avenir ?

La maison des enseignants de Grenoble et de l’éducation tout au long de la vie avait invité quelques sociologues, politologues et une professeure de philosophie pour intervenir sur un thème que d’aucuns ont trouvé négligé par la gauche.
Mais que n’a-t-elle pas oublié, la belle endormie?
Ce qui m’avait paru novateur dans le marasme actuel, tel que « Le Revenu Universel » est renvoyé au piquet par Bernard Friot, en route pour la fête de l’Huma, organisée en même temps que cette rencontre qui avait rempli la salle de la maison du tourisme à Grenoble.
Il a mis dans la même corbeille : Hamon, Macron avec le FN et LR » et  demandé une « mesure de laïcité : la séparation de l’état et du MEDEF ».
Malgré ces outrances qui régalent les convaincus, le bougre est stimulant bien que peu dupe de son audience : « les livres de science sociales se vendent en moyenne à 400 exemplaires hors bibliothèques » nous apprend-il. Gageons que son dernier ouvrage « Pour vaincre Macron » aura plus de succès.
Le salaire à vie, qui bénéficie à un tiers des plus de 18 ans (fonctionnaires et retraités) serait par lui attribué à tout le monde et porté entre 1700 € et 6000 €. Le capitalisme serait aboli, les moyens de productions nationalisés et les entreprises gérées par les salariés comme en 17 (1917).
Il donne à réfléchir sur la notion de travail : lorsque l’on accompagne un enfant à l’école, quelle est la différence, selon que cette tache est réalisée par un parent ou par une aide maternelle ?
Et c’est une opinion de bon sens, loin des provocations, quand il estime qu’un enseignant est un producteur de richesse, contredisant tous ceux qui pensent la fonction publique essentiellement comme une charge.
Bien qu’illustrant son propos de référence à Croizat qui a mis en place à la libération : l’assurance maladie, les allocations familiales, le système des retraites… son propos porte surtout sur le travail abstrait.
Plus concrète est Danièle Linhart dont la description du taylorisme est éclairante quand celui-ci ne se résout pas à Charlot dans « Les temps modernes » mais se retrouve dans une « sur humanisation managériale » très contemporaine. En effet pour contrer la «flânerie systématique des ouvriers» aux yeux de patrons investisseurs qui connaissaient moins le travail que les professionnels, il fallait casser ces métiers, en permettant à tous d’accomplir des taches simples. «L’organisation scientifique du travail» était porteuse de progrès, le pouvoir passait de l’atelier aux bureaux : la bataille idéologique était gagnée.
Même si la « critique artiste » de 68 a proclamé « ne plus vouloir perdre sa vie à la gagner », l’individualisation va emporter tout sur son passage : les horaires variables sont pratiques pour conduire les enfants à l’école et la polyvalence moins monotone, les compétences sont reconnues par des primes à la tête du client. Il y aura bien des séminaires pour inventer un destin commun, mais les cercles de qualité font des ronds dans l’eau, loin de la fraternité des collectifs qui travaillaient ensemble depuis longtemps, pouvaient distribuer leurs tracts quand la sirène libérait tout le monde en même temps. Maintenant 75 % des emplois sont dans le tertiaire, alors la tendance lourde à tout psychologiser amène à faire porter à chacun un petit « bureau du temps et des méthodes », pour intérioriser les bonnes pratiques venues d’ailleurs : « je gère ».  Il s’agit de sortir de sa « zone de confort » après avoir respecté le code déontologique. Le changement perpétuel rend obsolète l’expérience, au pays de la financiarisation, le travail est dénigré, nous revenons au début du taylorisme avec ceux qui pensent et ceux qui exécutent, avec une cœrcition qui peut bien passer par quelques massages, la crèche dans la boite, méditation et jeu de rôle. Tant que ne sera pas remise en cause la clause de subordination, l’exploitation de l’homme par l’homme durera autant que le marché de Voiron.
Martine Verhlac avait introduit les débats en faisant référence à la Déclaration de Philadelphie (1944) de l’Organisation internationale du travail «  proclamant ce dernier comme un droit fondamental, participant de la justice sociale et d’un développement spirituel dans la liberté et la dignité ».
Je n’ai pas entendu les témoignages de « collaborateurs » d’Ecoplat qui devaient intervenir l’après- midi, ni la prestation de Paul Ariès, animateur du « Mouvement pour une décroissance équitable », messager du « passeport  universel »  et  coursier « du revenu universel ».
Mais  une personne  à qui j’ai proposé mon compte rendu avait apprécié :
« L'après midi? Ecoplat, une lutte longue, diversifiée, riche et dense d'enseignements de tous ordres (engagement de chacun, lequel et comment et quelle durée), éclairée et suivie par une personne qui rédige son mémoire de psychologue du travail sur le sujet.
Puis le GAEC de Ste Luce, 4 au départ, 15 maintenant, associés et salariés. Evolution de "l'entreprise" à la campagne, organisation précise du travail dans un souci d'équité constant; bravo!
Très édifiant tout ça!
Quant à Ariès, fonceur, convaincu, et conférencier, belle ouverture finale de cette journée. Il a cité des exemples où ses utopies fonctionnent.
Utopies? Il y a quelques décades, le vote des femmes en était une (ce n'est pas de moi mais de ce Hollandais que l'on entend sur les ondes en ce moment, proposant à fond le RUB)! »
……..
Un dessin parmi d’autres du « Canard » de cette semaine :

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