Après la seconde
guerre mondiale, des enfants du sud de l’Italie sont accueillis quelques mois
par des familles du nord à l’initiative du parti communiste.
« Il dit aux
autres que je suis un des enfants du train, qu'ils doivent m'accueillir et me
faire me sentir comme chez moi. Chez moi je n'avais rien, je me dis. Alors ce
serait mieux qu'ils me fassent me sentir comme chez eux. »
Le récit de cet épisode assez extraordinaire par Amérigo,
sept ans, élevé seul par sa maman, est émouvant et drôle.
« La fin de la
chanson, ils lèvent tous le poing vers le ciel, qui est gris et plein de nuages
longs et fins. Mariuccia et Tommasino pensent qu’ils montrent leurs poings
parce qu’ils s’engueulent. Alors je leur explique qu’ils font le salut
communiste, c’est différent du salut fasciste, que je connais par la Royale.
Quand elles se croisaient dans la ruelle, la Jacasse et la Royale faisaient
chacune son salut et on aurait dit qu’elles jouaient à
pierre-feuille-ciseaux. »
Le ton juste, toujours délicat à saisir lorsqu’un auteur
s’exprime comme un enfant, permet
d’aborder, sans lourdeur didactique ni pathos, cette distance entre Naples
et Modène, les oppositions politiques, les dilemmes :
« Ta maman te
manque ?
- Non, oui, un peu. C'est que j'ai peur qu'au bout d'un moment elle ne me manque plus. »
- Non, oui, un peu. C'est que j'ai peur qu'au bout d'un moment elle ne me manque plus. »
La générosité et les croyances sont interrogées au fil du
temps qui a passé :
« Vous n’êtes pas
en exil, répond le maire. Vous êtes avec des amis qui veulent vous aider, ou
plutôt avec des camarades, c’est plus que des amis, parce que l’amitié c’est
une affaire privée entre deux personnes, et ça peut se terminer. Alors qu’entre
camarades on se bat ensemble parce qu’on croit dans les mêmes choses. »
Les caractères des personnages bien tracés se nuancent, se
révèlent. Cette mère que la misère avait
rendue peu douée pour les câlins, a fait de son mieux :
« Parfois ceux
qui te laissent partir t'aiment plus que ceux qui te retiennent. »
Je rejoins les lecteurs du « Livre de poche » qui
lui ont accordé leur prix, bien que la dernière partie abandonnant les
territoires de l’enfance rappelle quelques conclusions systématiquement optimistes des films américains, alors
que les trois-quarts des 280 pages avaient le charme des films italiens que
nous avons tant aimés.
Ça a l'air bien.
RépondreSupprimerDes réserves pour la nuance entre amitié et camaraderie. Tout dans ce bas monde a une fin, tout de même, et Tocqueville nous a donné les moyens de penser même les guerres de religion sans les institutions et les croyances officielles (ce qui sépare les familles, les amis, les peuples en les regroupant selon une autre géométrie... variable).
Est-ce que... forcément ? la misère rend peu douée pour les câlins, ou est-ce notre préjugé qui nous fait voir le monde de cette manière, en instituant les choses comme ça ?
Quelle misère, d'ailleurs ? Peut-on être riche et confortable et... dans la misère ? Pourquoi pas ?