vendredi 19 mars 2021

Place aux jeunes !

Pour que les jeunes prennent la place, les vieux doivent déménager. Parole de boomer.
Tombant plus qu’à mon tour dans le « c’était mieux avant », je m’en voudrais de rajouter une couche au jeunisme frétillant surtout chez les plus âgés, mais je déplore quand même que tant d’Elkabbach ne décrochent toujours pas.
Contre le cours du jeu, entre 14 et 18, ce sont les ainés qui ont mis leurs fils en terre.
Aujourd’hui, alors que nos restes tiennent dans un cendrier, nous ne savons plus le prix de la mort. 
« La mort d'un homme est une tragédie. La mort d'un million d'hommes est une statistique. » Staline
A remarquer tant de noms italiens sur les pierres d’un cimetière voisin, je me suis dit que pour « vivre ensemble » dans l’instant, il a fallu aussi que nous ayons à occuper le même sol, pour l’éternité. Depuis la nuit des temps, nous avons cherché autour de nos douleurs; mais la cohabitation des absents avec les présents se complique avec nos difficultés à admettre notre incomplétude, nos incapacités à voir le noir. Notre oxygène s’altère en carbone, notre burger saigne et il faut faire la vaisselle et ranger sa chambre.
Face aux lois d’une nature en petite forme, les intransigeants prospèrent : dans peu de temps de nouveaux disciples des Jaïns, ceux qui balayent devant leurs pieds pour ne pas écraser d’insectes, vont culpabiliser les végétariens les plus intransigeants : lentilles pour tous à la Croix Rousse ! 
Si l’adage qui reconnait aux marginaux d’exprimer le futur avant tout le monde se vérifie comme on a pu le voir avec la banalisation des tatouages ou les trois voiles de Creil vite dupliqués, des doutes peuvent naître concernant les destinées du cinéma quand se retient surtout la vulgarité de certains artistes dans un moment de célébration.
 « Ceux qui viennent à la porte du ministère avec une sébile dans une main et un cocktail Molotov dans l'autre devront choisir » Maurice Druon
Il est difficile de tracer un avenir quand revenir surtout sur les maux du passé devient l’obsession en 21, au XXI° siècle.
Les musées sont fermés, dans un pays aux allures de musée sous ses hauts plafonds, traversé par quelques intermittents du spectacle et des livreurs de sushis.
Qui veut travailler dans une boulangerie, conduire un camion, torcher mémé, supporter les parents d’élèves… ? 
« Le printemps maladif a chassé tristement 
L’hiver, saison de l’art serein, l’hiver lucide,» 
Stéphane Mallarmé
Quelques notes de poésie comme un prétexte à écrire le mot « lucide » avant qu’il soit hors d’usage.
Dans les querelles qui touchent l’université dont la seule appellation évoquait ces derniers temps la misère des étudiants, l’indigence atteint le débat lui même. Alors que le CNRS décrète que l’« Islamo gauchisme » n’est pas un concept scientifique, Science Po Grenoble déclare que l’« Islamophobie » est un terme scientifique. Il est vrai que pour se la jouer sciences dures ces émanations proviennent de « labos » de sociologie. 
Mais qui suis-je, comme dit le pape, pour juger l’enseignement supérieur et ses magisters ? 
« L'Histoire dit les événements, la sociologie décrit les processus, la statistique fournit les chiffres, mais c'est la littérature qui les fait toucher du doigt, là où ils prennent corps et sang dans l'existence des hommes. » 
Claudio Magris
Les librairies sont ouvertes.
Le monde avec sa dette est ignoré, les salles de spectacles sont fermées, mais nous sommes collés face à un théâtre d’ombres.
Lors de retrouvailles de courbatus, j’avais ressorti ma scie : « Jadis les enfants ne parlaient pas à table, et puis on n’a plus entendu qu’eux », une amie a ajouté :  
« maintenant on n’entend plus personne avec les portables »
………… 
Le tableau est d’ Agnès Colrat https://www.colrat.fr/

1 commentaire:

  1. Un peu d'indulgence, quand même, Guy.
    Rien n'a été fait pour que nous sachions le prix de la mort. Les techniciens en tous genres se félicitent d'avoir eu gain de cause sur la mort, et même... de l'avoir rationalisée, alors que la mort a été... un démocrate, pour notre soulagement. Avant... il y avait beaucoup de morts en bas âge, et nous ne clamions pas que c'était contre nature. C'était. Un point, c'est tout.
    Il est de la nature de la créature que nous sommes de ne pas savoir ce que nous faisons au moment où nous le faisons, et quid de cette lutte... héroïque contre la mort, partout, et par tous les moyens.
    Beaucoup de notre comportement... collectif et individuel, tient dans la nécessité d'incarner, de matérialiser un mal être terrible qui était bien présent avant le Covid. Et comme c'est souvent le cas, nous agissons pour NOUS prouver que nous contrôlons toujours notre malheur, pour éviter la conscience douloureuse que nous y sommes soumis.
    Ainsi va l'Homme. Il ne s'améliore pas... Lui, il reste.. égal à lui-même.

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