Né en 1834 dans une famille de la « bonne »
société parisienne, dont il fera disparaître l’intervalle aristocratique dans
ses signatures, il ne persiste pas dans des études de droit et s’inscrit à
l’atelier de Lamothe
dont Ingres
est la référence. Il fait des allers-retours entre Paris et l’Italie. Il peint son
grand-père, figure tutélaire de la famille, banquier à Naples, « Hilaire
Degas », dans le style
de l’école de Lyon tableau de petite taille au cadrage serré, en intérieur, et pointe
sous un beau traitement de la lumière, toute la force de son caractère.
Avec « La famille Bellelli », il
développe cette finesse de l’observation quand l’oncle est relégué, les
fillettes exprimant pour l’une l’indépendance et l’autre les promesses de
soutenir une mère qui devra être internée.
A ses débuts, ses modèles sont
familiaux : sa sœur « Thérèse et Edmond Morbilli », dont les visages
s’imposent au dessus de vêtements audacieusement brossés, et ses frères qu‘il
va voir à la Nouvelle Orléans où est née leur mère.
Dans Le Bureau de coton »
ce
sont les deux oisifs. Première œuvre à entrer dans une collection
publique.
Lui, le misogyne, impose « Marie Cassat » dans le milieu
impressionniste comme il défendra Berthe Morisot et Suzanne Valadon.
« Le Vicomte Lepic et ses filles traversant la
place de la Concorde », est cadré comme une photographie,
technique qu’il pratique volontiers et dont il collectionne des tirages
remarquables, comme les tableaux de Delacroix, Corot, Gauguin, Ingres qui lui conseille lors d’une rencontre
de faire « des lignes et des lignes ». Il est de toutes les
expositions impressionnistes, mais ne travaille que dans son atelier et garde
le culte du dessin : « Le
dessin n’est pas la forme mais la manière de voir la forme ». Il
fréquente Monet,
Pissarro,
se lie d’amitié avec Gustave Moreau mais se brouille avec Manet
parce que celui-ci a accepté la légion d’honneur. Depuis la mort de son père,
il va avoir besoin vendre ses productions. Il se lance dans des séries :
- « Les repasseuses », où
sur une toile sans apprêt, les corps sont confrontés à des postures difficiles.
L’une d’elle n’est pas une travailleuse mais un modèle comme lors de la mise en
scène de « L’absinthe ».
Le regard y circule depuis la mode
des estampes japonaises de bas en haut et non plus d’avant en arrière, si bien
qu’on en oublie que les tables sont dépourvues de pieds.
- «Chez la modiste », c’est très fréquenté : les femmes
se devaient de ne pas sortir « en cheveux ».
- Les chevaux, sont souvent traités avant ou après la
course. Pour « Le défilé » l’adjonction d’essence irise la
peinture.
- Ses danseuses ne dansent pas souvent, sauf « L’étoile ».
Les coulisses sont encore présentes, la vue est plongeante. L’homme en noir serait-il
un amoureux, un souteneur, un protecteur ? Comme le jugeait Apollinaire, l’opéra
était « le plus grand bordel ».
Le même modèle a servi dans différentes positions, ainsi que
Rodin
faisait ses « marcottages », dans « Les danseuses bleues ».
Quand sa vue se détériore, il se met à la sculpture qui doit
en principe lui servir essentiellement d’aide pour ses tableaux. Le seul modèle
de cire qu’il ait accepté de fondre fut « La petite danseuse » qui
fit scandale car des éléments manufacturés étaient intégrés à l’œuvre :
un ready made avant Duchamp ! Les épreuves en bronze sont donc posthumes.
Considéré en tant que maître des ballets, les
interprétations les plus récentes voient une chorégraphie dans un des tableaux
d’histoire de ses débuts « Petites filles spartiates provoquant des garçons ».
Lors de l’affaire Dreyfus, il est un virulent anti
dreyfusard à l’instar d’autres artistes novateurs Renoir ou Cézanne alors que l ‘académique Jérôme
dont la clientèle était anti sémite se retrouve du bon côté. Homme de toutes
les contradictions, « le terrible monsieur Degas » avait le sens de
la formule, lui qui avait libéré la construction en peinture, la couleur, et voyagé
avec les impressionnistes auxquels il dira : « À vous, il faut la vie naturelle, à
moi la vie factice. » Il gardera comme inscription sur sa tombe après
sa mort en 1917 : « Il aimait
beaucoup le dessin » lui qui
souhaitait : « être
illustre et inconnu ».
Très cher Degas...
RépondreSupprimerUne douce, et parfois pas si douce que ça parfum de mélancolie suinte de certains de ses tableaux, mais il aimait le corps des femmes, et ça me console de sa mélancolie.
Un être compliqué, bourré de paradoxes, manifestement.